WATEROUS (Waterhouse), CHARLES HORATIO, manufacturier, né le 29 septembre 1814 à Burlington, Vermont, fils d’Eleazer Waterhouse et d’Emma Johnson ; le 5 décembre 1839, il épousa Martha June, et ils eurent six fils et une fille ; décédé le 10 février 1892 à Brantford, Ontario.

Le père de Charles Horatio Waterous, ancien directeur d’une école privée de Burlington, mourut en 1816, peu après qu’il eut abandonné sa famille pour s’établir à Saint-Louis. Sa veuve connut des difficultés financières jusqu’à ce qu’elle épouse Denson Tripp, cultivateur de New Haven, au Vermont. À compter de ce moment et jusqu’à sa quinzième année, Charles travailla l’été dans la ferme de son beau-père et alla à l’école durant l’hiver. En 1829, il devint l’apprenti de Thomas Davenport, forgeron de Brandon. Waterous nota plus tard que son maître était « meilleur inventeur que forgeron ». Lorsque Davenport quitta les affaires, Waterous acheva sa formation dans un atelier d’usinage.

L’apprentissage de Waterous avait piqué sa curiosité et son inventivité. Parallèlement à son travail subséquent de machiniste, il continua d’aider Davenport à mettre au point un moteur électrique. En 1833, Waterous alla travailler à New York, chez un oncle qui possédait une fonderie et un atelier d’usinage. Durant les deux années suivantes, il travailla en Ohio, dans des ateliers du même genre. Il fut ensuite mécanicien sur des bateaux à vapeur des Grands Lacs. En janvier 1839, l’offre d’association que lui fit Davenport le ramena à New York où l’inventeur avait établi un atelier-laboratoire. Ils étaient installés au-dessus de l’atelier de Samuel Finley Breese Morse, celui qui perfectionna le télégraphe et avec qui Waterous prétendit plus tard avoir discuté de divers problèmes techniques. Contrairement à leur voisin, Davenport et Waterous n’eurent pas de succès : même s’il pouvait actionner une petite presse typographique, leur moteur n’avait pas la puissance suffisante pour servir à d’autres applications industrielles et coûtait trop cher à produire. Après une année, au bout de ses économies, Waterous emprunta de l’argent à ses amis pour rentrer en Ohio. À Sandusky, il loua un atelier d’usinage qu’il dirigea lui-même. Puis, en 1842, il construisit des moulins en compagnie de Julius Edgerton à Painesville et dans les environs ; en 1845, un incendie mettait cependant fin à leur activité. Encore une fois, Waterous trouva du travail sur les vapeurs des Grands Lacs. En 1846, cependant, il s’associa à Edgerton et à John D. Shepard pour exploiter une fonderie à Buffalo, mais la compagnie fit faillite durant la dépression économique de 1848.

Plus tard la même année, Waterous accepta d’aider à la réorganisation de la fonderie de Philip Cady Van Brocklin à Brantford. Même en investissant probablement peu ou pas de capital dans l’entreprise, il eut le titre d’associé et reçut un salaire en plus du quart des profits. Sa compétence technique et son sens de l’innovation permirent de transformer la fonderie en usine de machines à vapeur. Un nouvel associé, Thomas Winter, Anglais arrivé récemment des Antilles, finança le projet. La Van Brocklin, Winter and Company demeura en exploitation jusqu’à la retraite de l’associé principal en 1855. Incapable de maintenir l’entreprise seul, Waterous s’associa la même année à une autre fonderie de Brantford, la Goold, Bennett and Company, en vue d’acquérir l’affaire de Van Brocklin. Ses nouveaux associés étaient Franklin P. Goold et Adolphus B. Bennett, tous deux de Brantford, et Joseph Ganson, Holester Lathrop et Ralph W. Goold, qui exploitaient une fonderie à Brockport, dans l’état de New York. La nouvelle firme prit la raison sociale de Ganson, Waterous and Company. Les capitaux additionnels nécessaires pour l’expansion de l’usine provinrent d’Ignatius Cockshutt*, le commerçant le plus important de Brantford, qui sans être associé était copropriétaire de l’usine.

La dépression qui débuta en 1857 faillit mettre un terme à l’entreprise. Au début, les sommes versées pour le règlement des comptes des clients suffisaient à couvrir l’achat des matières premières, le salaire des employés et les autres dépenses. Mais après 1857 le fonds de roulement était trop faible et, bien que l’on ait généralement considéré les associés comme financièrement à l’aise, leurs avoirs étaient de plus en plus liés aux comptes en souffrance de la société. Pour cette raison, la Goold, Bennett and Company vendit la première de ses fonderies de Brantford en 1857 et, à la fin de la même année, Bennett, Lathrop et Ralph W. Goold s’étaient retirés de la Ganson, Waterous and Company. En 1859, incapable de s’acquitter de ses obligations, la firme entreprit de liquider ses affaires. Ses créanciers lui accordèrent toutefois un répit de dernière minute au début de 1860 sous forme d’un sursis de paiement de quatre ans en échange d’une cession d’actif. Malgré cela, Ganson mit fin à sa participation en 1862, bien que le nom de la société demeurât inchangé jusqu’en 1864 afin de conserver la confiance de la clientèle. Cette année-là, après que la firme eut apparemment remboursé ses créanciers et repris ses affaires en main, Franklin P. Goold la quitta pour diriger la Brantford Pottery, une entreprise que lui et Waterous avaient acquise en 1859 et qu’ils conservèrent jusqu’en 1867, sans doute pour se couvrir en cas de faillite de leur fonderie.

Waterous, de son côté, décida de ne pas quitter l’entreprise en s’associant à George H. Wilkes, en 1864, au sein d’une nouvelle firme, qu’ils baptisèrent C. H. Waterous and Company. Wilkes était un associé de la Ganson, Waterous and Company depuis 1861, année où l’entreprise avait fusionné avec une autre fonderie de Brantford en faillite dont les créanciers lui avaient confié la direction. À compter du milieu des années 1860, la C. H. Waterous and Company prospéra grâce à la fabrication de machinerie pour les moulins à farine et les scieries, de machines à vapeur ainsi que d’appareils de pompage destinés à l’industrie pétrolière de l’ouest de l’Ontario et aux services d’aqueduc municipaux. L’augmentation du chiffre d’affaires, qui passa de 120 000 $ en 1870 à 220 000 $ en 1875, justifia d’ambitieux projets d’expansion de même que la constitution juridique de la Waterous Engine Works Company Limited en 1874. La participation financière qu’Ignatius Cockshutt avait maintenue toutes ces années fut reconnue par la nomination de son fils, James G. Cockshutt, à la présidence de la nouvelle société, dont Waterous devint directeur général.

La dépression du milieu des années 1870 jeta une douche froide sur les visions optimistes issues de cette réorganisation. On n’en était qu’à la construction des fondations d’une nouvelle usine lorsque des difficultés financières forcèrent la compagnie, au début de 1877, à vendre le terrain et ce qui restait de matériaux de construction. Pour se protéger, Waterous avait prudemment compliqué ses finances personnelles en vendant sa propriété à son épouse et à ses enfants, puis en l’hypothéquant. Wilkes et Cockshutt fils se désintéressèrent alors de l’entreprise et en septembre 1879, bien que toujours endetté envers Cockshutt père, Waterous acheta toutes les actions en circulation de la compagnie.

Ces difficultés n’incitèrent toutefois pas Waterous à appuyer l’imposition de barrières tarifaires comme solution au problème économique. Il n’attribua pas non plus l’impressionnante croissance de sa compagnie, à compter de la fin des années 1870, à la Politique nationale introduite en 1879 par le gouvernement de sir John Alexander Macdonald [V. Sir Samuel Leonard Tilley]. Au cours des années 1880, Waterous négocia avec la ville de Brantford et réussit à obtenir des primes, des exemptions d’impôts et l’accès gratuit aux services publics. En 1883, il envoya son fils Frank à Winnipeg ouvrir et gérer une agence et un atelier d’usinage pour servir la clientèle de l’Ouest. Comme elle n’employait que dix hommes, la succursale ne s’occupait probablement que des comptes locaux, de la construction et de l’assemblage des moulins et des chaudières en plus de travaux de réparation. Trois ans plus tard, elle était réduite à une succursale de vente, puisque l’atelier d’usinage avait fermé ses portes lorsque Waterous père décida de se lancer sur le marché américain. En réponse aux pressions de la chambre de commerce de St Paul, au Minnesota, la compagnie ouvrit un atelier d’usinage dans cette ville, sous la direction d’un autre des fils Waterous, Frederick, qui avait été directeur adjoint à la succursale de Winnipeg. En 1888, la compagnie employait 250 hommes et affirmait, en exagérant sans doute un peu, posséder un actif de 750 000 $, l’usine de St Paul y compris. La croissance de la compagnie, faisait valoir Waterous en 1891, dépendait de la négociation d’un traité de réciprocité destiné à ouvrir le marché américain aux manufacturiers canadiens.

L’engagement politique de Waterous se limita à ses déclarations sur les tarifs douaniers et la réciprocité, publiées pour la plupart dans l’Expositor de Brantford, et au soutien qu’il apporta au parti libéral. Pendant presque toute sa vie, il fréquenta l’église congrégationaliste, bien qu’à la fin il assistât aux offices célébrés à l’église presbytérienne Zion de William Cochrane. Lorsqu’il ne travaillait pas, il appréciait le calme de sa ferme près de Brantford en compagnie de son épouse et de sa famille. Waterous ne se remit jamais du décès de son épouse en 1889, et il mourut trois ans plus tard.

En rapportant son décès, le Globe de Toronto fit l’éloge de Charles Horatio Waterous en ces termes : « Il était l’ami tant du journalier que de l’apprenti et considérait leur aise et leur contentement comme nécessaire à son propre bonheur. » Comme bien d’autres hommes qui ne devaient leur succès qu’à eux-mêmes, Waterous traitait ses employés de façon paternaliste, ce qui excluait la reconnaissance syndicale, comme ce fut le cas au moment de la grève déclenchée à son usine en 1872 sur la question de la journée de « neuf heures ». Son succès, malgré les nombreux reculs et même les échecs, était pour lui et pour ceux qui n’étaient pas favorables aux revendications de la force ouvrière la preuve de l’efficacité de l’effort individuel.

David G. Burley

AN, RG 31, C1, 1851, 1861, 1871, Brantford ; 1861, 1871, Brantford Township.— AO, MU 3307–3308, particulièrement MU 3307, C. H. Waterous, « Auto-biographical sketch » (copie dactylographiée).— Arch. privées, Richard Waterous (Brantford), Family papers.— Baker Library, R. G. Dun & Co. credit ledger, Canada, 13 : 24, 55–57, 83, 108.— Brant County Museum (Brantford, Ontario), Waterous papers.— Brant County Surrogate Court (Brantford), Reg., liber G (1892–1893), nº 1513 (mfm aux AO).— MTRL, T. S. Shenston papers, letter-bock, 388–389.— In memoriam : Charles H. Waterous, Jr. (Brantford, 1892).— The Waterous’ Engine Works Co.’s (Limited) illustrated catalogue of steam engines, saw and grist mill machinery, Waterous’ improved system of fire protection and water supply, saws and saw mill furnishings (Brantford, 1875 ; photocopie aux AO, MU 3307).— Expositor (Brantford), 14 déc. 1888, 12, 19 févr., 18 mars 1892.— Globe, 12 févr. 1892.— Canadian album (Cochrane et Hopkins).— D. G. Burley, « The businessmen of Brantford, Ontario : self-employment in a mid-nineteenth century town » (thèse de PH. D., McMaster Univ., Hamilton, Ontario, 1983), 98–102, 138, 140–143, 146, 151.

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David G. Burley, « WATEROUS (Waterhouse), CHARLES HORATIO », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/waterous_charles_horatio_12F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1990
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