TOWNSHEND, WILLIAM, fonctionnaire et homme politique, né vers 1745, probablement dans le pays de Galles, fils de Richard Townshend, de Wrexham, pays de Galles ; vers 1791, il épousa Flora Stewart, fille du juge en chef Peter Stewart et de Helen MacKinnon, et ils eurent six fils et deux filles ; décédé le 5 décembre 1816 à Plymouth, Angleterre.

On connaît peu la vie de William Townshend avant qu’il devienne percepteur des douanes et intendant du commerce maritime de l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard). Sa parenté avec le vicomte George Townshend pourrait ne pas être étrangère à ces nominations. Ses ennemis prétendront plus tard qu’il avait en Angleterre des amis puissants, même si sir Cecil Wray, propriétaire absentéiste dont il était le représentant, est le seul protecteur qu’on lui connaisse. William Allanby avait reçu la charge de percepteur en 1765, mais il semble n’avoir manifesté qu’un faible intérêt pour la colonie, puisque le gouverneur Walter Patterson* fit remarquer en 1783 qu’Allanby était absent depuis neuf ans et qu’il était peu probable qu’il revienne. Pendant son absence, on n’avait tenu aucun registre des expéditions et des douanes.

Arrivé dans l’île Saint-Jean en 1784, Townshend était nommé au conseil de l’île en décembre de cette année-là ; Patterson faisait remarquer que Townshend ayant été « aussi irréprochable depuis son arrivée », on ne pouvait lui refuser un siège. Cette nomination l’implanta solidement au sein de la petite élite de la colonie et il prit vite part aux interminables efforts de Patterson en vue de saisir les terres des propriétaires absentéistes. Townshend était membre du conseil en avril 1786 lors de l’adoption de la loi sur la saisie des terres, et son nom fut mentionné dans les accusations portées plus tard contre les fonctionnaires. Il s’était cependant opposé à cette mesure à cause d’irrégularités dans son adoption, décision qui l’avait amené à démissionner. Les plaignants soutinrent dans leur sommaire de la preuve de 1789 que Townshend, qui avait repris son siège au conseil en avril 1787, avait temporairement « admis les démarches de ses collègues fonctionnaires ». Dans le rapport qui suivit en 1789, le Conseil privé arrivait à la conclusion qu’il avait été entraîné innocemment dans cette affaire ; il fut du petit nombre de fonctionnaires de la colonie qui purent éviter la destitution et le déshonneur.

À l’arrivée du lieutenant-gouverneur Edmund Fanning en novembre 1786, Townshend s’était rapidement rangé du côté des opposants de Patterson. Dans une réponse écrite au secrétaire d’État à l’Intérieur en novembre 1787, Fanning louangea Townshend, ce « fervent défenseur des mesures du gouvernement de Sa Majesté ». Nul doute qu’une partie de l’enthousiasme de Fanning venait de la part que Townshend avait prise dans les élections de juillet et août 1787. Fanning avait espéré que celles-ci mettraient fin à l’emprise que le groupe de Patterson avait sur la chambre d’Assemblée. Le 20 août, on accusa Townshend devant le conseil d’avoir fait campagne avec vigueur pour cette élection et, même s’il le nia, il est évident qu’il se révéla un partisan actif de Fanning.

Le zèle de Townshend dépassa aussi l’action politique. À partir de son arrivée dans l’île, il s’occupa énergiquement de l’application de la législation douanière. Après le relâchement produit par la gestion d’Allanby, une telle remise en vigueur créa vite des difficultés dans la colonie. En 1786, Townshend contraria Patterson en saisissant les biens de marchands qui, avec l’approbation de ce dernier, avaient importé des marchandises des États-Unis. Les griefs faits cette année-là par un autre marchand, John Cambridge*, hâtèrent l’action de Townshend qui attendit cependant d’avoir fait une vérification à Halifax, afin d’avoir « des vues plus justes et plus avisées sur les pouvoirs d’un gouverneur et d’un conseil ». Ce retard ainsi que des allégations de Cambridge selon lesquelles Townshend avait toléré la contrebande en provenance des îles de la Madeleine menèrent à une enquête des commissaires aux douanes. La fin de l’enquête, au début de 1788, innocentait Townshend et les conclusions du rapport montraient que Patterson et le procureur général Phillips Callbeck* s’étaient « très malhonnêtement ingérés dans les affaires des douanes ».

En juin 1788, Townshend tenta de saisir des marchandises qui avaient été descendues à terre à la ferme de Patterson. Il y débarqua avec un groupe de soldats mais fut repoussé par 25 hommes dont la plupart étaient des employés de Patterson. Ses efforts aboutirent plus tard : les marchandises et le schooner qui les avait transportées furent saisis et vendus par ordre de la Cour de vice-amirauté à Charlottetown. Pendant les deux années qui suivirent, il effectua plusieurs saisies, dont celles de navires appartenant à John Cambridge et à ses collègues marchands William Bowley et John Hill*. Il est difficile de préciser si ces saisies étaient légitimes parce que Townshend appliquait trop rigoureusement les lois douanières, ne faisant aucune concession pour les conditions qui prévalaient dans la colonie. Son opposition aux gros marchands l’entraîna dans de longs litiges.

Cela eut pour résultat qu’en 1791 Cambridge, Bowley, Hill et plusieurs des principaux propriétaires absentéistes nommèrent Townshend parmi ceux qui formaient une alliance illégale en vue de diriger l’île. En plus de rappeler les accusations d’avoir prélevé des droits illégaux et exorbitants portées contre Townshend devant les commissaires aux douanes, Cambridge et les autres l’accusèrent de délits telles la complicité dans la contrebande du tabac, l’utilisation erronée des formulaires d’enregistrement ainsi que des saisies oppressives. Quelques-unes des accusations provinrent d’un incident au cours duquel Townshend avait accusé Hill d’illégalités en rapport avec l’enregistrement d’un nouveau navire ; de fait, il s’agissait d’irrégularités d’ordre technique qu’on aurait pu laisser passer. Le sens général de la poursuite de 1791 était que Townshend, de connivence avec le juge en chef Stewart, le lieutenant-gouverneur Fanning et le procureur général Joseph Aplin, avait projeté d’opprimer Hill et Cambridge. Les témoins prétendirent que Townshend avait dit à Hill que les autorités gouvernementales se préparaient à « mener l’affaire rondement à l’endroit de ceux qui s’étaient opposés à elles ». À l’audition des accusations à Londres cette année-là, Townshend présenta une défense détaillée mais elle ne semble pas avoir fait impression sur le comité d’enquête. L’année suivante, celui-ci arriva cependant à la conclusion qu’on ne pouvait considérer avoir fait la preuve des réclamations parce qu’elles étaient « démenties aussi complètement et affirmativement qu’elles [étaient] putées ».

Que ce soit Townshend ou les marchands qui se fussent assagis par suite de leur expérience, il reste que le nombre de cas de contrebande entendus devant les tribunaux de l’île baissa considérablement. Le seul qui attira l’attention après 1792 fut une accusation portée en 1797 contre James Douglas, représentant de James William Montgomery. Douglas se plaignit qu’il s’agissait à l’origine de représailles à la suite de la poursuite qu’il avait intentée au juge en chef Stewart. Trois années passèrent avant l’acquittement de Douglas.

Même si on rapporta que Townshend cherchait alors une situation plus avantageuse, tous ses efforts restèrent vains. Sa santé déclina après 1800, mais malgré une maladie qui se prolongeait, ce fut Townshend, plutôt que le premier conseiller Thomas Desbrisay, qu’on nomma commandant en chef par intérim de l’île, en octobre 1812, après la révocation du lieutenant-gouverneur Joseph Frederick Wallet DesBarres*. À titre d’administrateur, Townshend semble ne pas avoir fait beaucoup plus que suivre les directives du ministère des Colonies durant la période de moins d’un an où il fut en poste. Sa plus importante décision fut la révocation de James Bardin Palmer* des postes qu’il avait occupés sous DesBarres, mais c’était une demande des autorités de Londres. Cela ne l’empêcha pas de se vanter qu’au lieu d’une « colonie agitée, divisée et anarchique », le nouveau lieutenant-gouverneur Charles Douglass Smith* trouverait une « population rangée, pacifique [...] et bien satisfaite ».

Le reste de la vie de William Townshend semble avoir été dénué d’événements marquants. Sa santé continua de décliner et il mourut au cours d’une visite en Angleterre en 1816. Malgré les liens qu’il eut avec l’élite de l’Île-du-Prince-Édouard par son mariage et en raison de son poste, il semble avoir été capable d’éviter d’être entraîné dans les querelles politiques de la colonie. Le bureau qu’il dirigeait se chargea facilement et sans ennui de l’augmentation du commerce et de la construction navale au cours des dernières années où Townshend était en fonction. En dépit de débuts orageux, il était devenu à la fin de sa carrière ce que Patterson avait d’abord supposé en 1784 : un homme irréprochable.

H. T. Holman

APC, MG 9, C3 ; MG 23, E5 ; E7 : 2 ; RG 7, G8D, 44 : 88, 249.— PAPEI, Acc. 2810, Ira Brown papers, no 138 ; Acc. 2849, Palmer family papers, no 8 ; RG 1, Commission books, 1812 ; RG 5, Minutes, 1784–1817 ; RG 6, Supreme Court, case papers, 1784–1800 ; minutes, 1784–1800 ; RG 9, Customs, shipping reg., 1 (1787–1824).— PRO, CO 226/8 : 63, 163 ; 226/9 : 172 ; 226/11 : 193 ; 226/12 : 3, 22, 24, 26, 240, 247 ; 226/13 : 282 ; 226/14 : 73, 90, 400 ; 226/16 : 186 ; 226/18 : 118, 131, 166, 214 ; 226/19 : 221 ; 226/22 : 229 ; 226/23 : 57 ; 226/24 : 74 ; 226/26 :13, 15 ; 226/27 : 31 ; 226/28 : 24 ; 226/30 : 7 ; 226/31 : 5, 12 ; 226/32 : 251, 304, 308, 311 ; 226/43 : 257.— SRO, GD 293/2/19–20.— Supreme Court of P.E.I. (Charlottetown), Estates Division, liber 1 : f.116 (testament de William Townshend).— [John MacDonald], Remarks on the conduct of the governor and Council of the Island of St. John’s, in passing an act of assembly in April of 1786 to confirm the sales of the lands in 1781 [...] (s. l., [1789]), 64s.— [J.] B. Burke, A genealogical and heraldic history of the colonial gentry (2 vol., Londres, 1891–1895 ; réimpr., 2 vol., Londres, 1891–1895 ; réimpr., 2 vol. en 1, Baltimore, Md., 1970), 2 : 684.

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H. T. Holman, « TOWNSHEND, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/townshend_william_5F.html.

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Auteur de l'article:    H. T. Holman
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
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