THOMAS, THOMAS, chirurgien, trafiquant de fourrures, juge de paix et homme politique, né vers 1766, probablement au pays de Galles ; il épousa d’abord à la façon du pays, puis officiellement le 30 mars 1821, une prénommée Sarah de la nation des Cris, et ils eurent deux fils et six filles ; décédé le 24 novembre 1828 à la colonie de la Rivière-Rouge (Manitoba).
Thomas Thomas entra au service de la Hudson’s Bay Company à titre de chirurgien le 25 mars 1789. À ce moment-là, on disait de lui qu’il venait de la paroisse St Andrew, à Holborn (Londres) ; par la suite, cependant, on le déclara originaire de Carmarthen, au pays de Galles, qui était probablement sa ville natale. Il arriva à York Factory (Manitoba) le 27 août. Dans les documents de la Hudson’s Bay Company, il est généralement désigné sous le nom de Thomas l’aîné pour le distinguer d’un autre chirurgien du même nom, qui travailla à York Factory de 1791 à 1794 et que l’on nomme Thomas Thomas le second. Le journal du poste de York Factory fait de brèves allusions aux chasses de Thomas l’aîné. Au printemps de 1791, avec un compagnon, il tua 630 oies pour compléter les provisions du poste. La plupart des employés de la compagnie étaient jeunes et en bonne santé, aussi y avait-il peu de travail pour un chirurgien, même si au printemps de 1793 il dut traiter les nombreuses victimes du scorbut.
Le 14 juillet 1794, Thomas l’aîné partit pour l’intérieur des terres malgré les plaintes formulées par les autorités de la compagnie au sujet des dépenses qu’elle avait dû faire durant les deux hivers que Thomas le second y avait passés. L’agent principal de York Factory, Joseph Colen*, déclara qu’il « n’aurai[t] pas permis à un chirurgien de retourner à l’intérieur des terres, si ce n’avait été du grand attachement de M. Thomas l’aîné pour cette région ». À l’été de 1795, Thomas s’embarqua pour l’Angleterre. Tout laisse croire que son séjour à York Factory lui avait plu ; il n’est donc pas surprenant de le voir revenir à la baie d’Hudson l’été suivant à titre d’agent principal de Severn House (Fort Severn, Ontario), où il arriva le 16 septembre 1796 et exerça ses fonctions jusqu’en 1810.
Cette année-là, Andrew Wedderburn, beau-frère de lord Selkirk [Douglas*], devint membre du comité de Londres de la Hudson’s Bay Company à laquelle il apporta une vigueur nouvelle. Il proposa un plan de gestion de la traite, connu sous le nom de « programme de compression », qui recommandait l’élimination du gaspillage, proposait un projet de partage des profits avec les fonctionnaires de la compagnie et le regroupement des postes de traite en départements du Nord et du Sud. Les postes de la baie James, soit le fort Albany (Fort Albany, Ontario), Moose Factory et Eastmain Factory (Eastmain, Québec), avec leurs postes intérieurs, formèrent le département du Sud. Thomas y fut nommé surintendant au salaire annuel de £150 et reçut l’assurance de toucher au moins £250 pour sa « part de profit ». En novembre 1811, il fut nommé juge de paix du Territoire indien et il remplit cette fonction jusqu’en 1816.
Thomas passa son premier hiver en qualité de surintendant à Eastmain Factory. Le comité de Londres l’y avait sans doute envoyé après avoir été informé des « jalousies [qui existaient] parmi les fonctionnaires ». Thomas fut chargé d’enquêter sur les désaccords survenus entre George Atkinson et ses collègues. Le comité voyait dans ces frictions la cause principale des quantités décevantes d’huile de baleine expédiées par ce poste en Grande-Bretagne où, en temps de guerre, le prix de ce produit était fort élevé. En 1813, le comité dénonça la mauvaise gestion de John Thomas à Moose Factory et ordonna à Thomas Thomas de le congédier, même s’il avait plusieurs années de service.
De 1810 à 1814, Thomas établit ses quartiers généraux au fort Albany. En 1813, le titre de son poste fut officiellement changé pour celui de gouverneur. L’année précédente, le comité de Londres s’était déclaré « très satisfait de voir que M. Thomas et tous les agents principaux et fonctionnaires de son département reconnaiss[aient] l’opportunité des nouvelles règles et [étaient] conscients que leurs propres intérêts [étaient] intimement liés à la prospérité de la compagnie ».
En 1810, William Auld avait été nommé surintendant du département du Nord. Plus étendu et plus complexe, ce département comprenait les postes de York Factory (Manitoba) et du fort Churchill (Churchill) ainsi que ceux du district de la Saskatchewan et du district de Winnipeg, c’est-à-dire tous les postes situés au sud et à l’ouest de la baie d’Hudson. Malheureusement, Auld ne s’adapta pas au programme de compression et démissionna en 1814. Thomas accepta de lui succéder à la direction du département du Nord pour un an seulement, et il élut domicile à York Factory. Voulant encourager ses fonctionnaires à prendre des initiatives, le comité de Londres terminait ainsi ses directives à Thomas : « après avoir donné notre avis sur ces questions, nous en laissons la réalisation à votre entière discrétion en qualité de gouverneur ».
Au cours de l’hiver de 1814–1815, Thomas prit des dispositions pour fournir les provisions de pemmican nécessaires à une expédition mise sur pied à Montréal dans le but d’aller affronter la North West Company dans la région de l’Athabasca. L’organisateur de l’expédition, Colin Robertson*, découvrant des faiblesses de caractère chez John Clarke*, qui devait en assurer le commandement, consulta James Bird* et Thomas au lac Winnipeg à l’été de 1815. Ils approuvèrent la nomination de Clarke et, par conséquent, doivent porter une part du blâme pour la triste fin de cette expédition. Au cours de cet été, la North West Company réussit à obtenir la démission du gouverneur d’Assiniboia, Miles Macdonell, et à disperser les colons de l’établissement de la Rivière-Rouge. Quelques-uns d’entre eux cherchèrent refuge à l’autre bout du lac Winnipeg. Thomas persuada Robertson de les ramener et de rétablir la colonie. Durant cette année passée dans le département du Nord, Thomas connut beaucoup de tension et d’inquiétude. Le 30 août, sans doute pour le récompenser de ses peines, le gouverneur des territoires de la Hudson’s Bay Company, Robert Semple*, le nomma au Conseil d’Assiniboia.
Après la mort de Semple survenue en juin 1816 à Seven Oaks (Winnipeg) [V. Cuthbert Grant*], la Hudson’s Bay Company demanda à Thomas d’occuper à titre intérimaire le poste de gouverneur en chef, mais il refusa. Il passa l’hiver de 1815–1816 avec sa famille à Jack River House et, en 1818–1819, il hiverna à Cumberland House (Saskatchewan) avant de s’installer définitivement dans la colonie de la Rivière-Rouge. Le 30 mars 1821, Thomas y épousa officiellement Sarah, la mère de ses enfants ; par la suite, celle-ci reçut le baptême avec sept de ses enfants.
Le 24 décembre 1822, le gouverneur intérimaire d’Assiniboia, Andrew H. Bulger*, nomma une seconde fois Thomas membre du Conseil d’Assiniboia. Plus tard, George Simpson*, gouverneur du département du Nord, qualifia le conseil d’inefficace et Thomas de « timide et faible comme un enfant ». Robertson, pour sa part, estimait que les connaissances. de Thomas en matière de traite des fourrures se limitaient à ce qu’on pratiquait à la baie, qu’il appliquait une « économie rigide » et que, « comme le cheval aveugle du tanneur », il avait peur de sortir des chemins battus. Néanmoins, le comité de Londres semblait le considérer comme le meilleur homme disponible pour prendre la direction des affaires de la compagnie à Rupert’s Land.
Dans son testament, Thomas Thomas avait prévu une rente de £25 pour Sarah, sa femme, que Letitia Hargrave [Mactavish*] décrira plus tard comme « l’ivrogne la plus tristement célèbre de Rivière-Rouge ». Il laissa aussi £3 850 à chacun de ses deux fils et £1 000 sous forme de fonds consolidés à 3 % de la Bank of England à chacune de ses six filles. Thomas était considéré comme un citoyen influent dans la colonie. Ses fils suivirent sa trace et plusieurs de ses filles épousèrent des hommes importants. Sophia*, la cadette, collabora à la traduction de la Bible dans la langue des Cris.
APC, RG 68, General index, 1651–1841.— PAM, HBCA, A.6/18 ; A.30/4 ; 7 ; A.32/3 : fo 222 ; A.36/13 ; A.44/2 ; B.59/b/30 ; B.198/b/4 ; 6 ; B.239/a/89 ; 96–97 ; B.239/b ; C.1/392 ; 400 ; E.4/1.— HBRS, 2 (Rich et Fleming) ; 24 (Davies et Johnson).— Letitia [Mactavish] Hargrave, The letters of Letitia Hargrave, Margaret Arnett MacLeod, édit. (Toronto, 1947).— Morton, Hist. of Canadian west (1939).— Rich, Hist. of HBC (1958–1959), 2.
Bruce Peel, « THOMAS, THOMAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/thomas_thomas_6F.html.
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Année de la publication: | 1987 |
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