McKEE, THOMAS, officier dans l’armée et dans la milice, fonctionnaire du département des Affaires indiennes et homme politique, né vers 1770, probablement dans un village chaouanon de la rivière Scioto (Ohio), fils d’Alexander McKee* et d’une Indienne qu’on pense avoir été de la tribu des Chaouanons ; décédé le 20 octobre 1814 aux Cascades (près de l’île des Cascades, Québec).
Thomas McKee, fils d’un des plus influents fonctionnaires du département des Affaires indiennes de la région des Grands Lacs, profita des avantages rattachés à la position, au prestige et aux relations de son père. En 1785, il reçut une portion du territoire situé à l’embouchure de la rivière de Detroit et donné aux fonctionnaires du département par les Indiens. En 1788, les Sauteux et les Outaouais lui accordèrent le bail de l’île Point Pelee (île Pelee) pour une période de 999 ans. Avec l’aide de son père, il devint, le 29 mars 1791, enseigne dans le 60e d’infanterie, dont une partie était en garnison à Detroit. Il fut promu lieutenant le 5 février 1795 et capitaine le 20 février 1796.
McKee prit très tôt une part active dans les affaires indiennes. Habillé en Indien, il était avec la poignée de Blancs qui participèrent à l’attaque infructueuse menée par les Indiens contre les forces du major général Anthony Wayne au fort Recovery (Fort Recovery, Ohio) en juin 1794 [V. Weyapiersenwah]. On prétendit que, par la suite, il encouragea les Wyandots à prendre les armes. En 1795, il assista à l’achat des territoires indiens au chenal Écarté (à la frontière est de la réserve indienne de l’île Walpole) et, en août 1796, il assista à un conseil avec les Sauteux et les Outaouais de la région de Detroit. Une recommandation de son père, qui était à cette époque surintendant général adjoint des Affaires indiennes du Haut-Canada, lui valut d’être nommé surintendant des Affaires indiennes du district du Nord-Ouest en 1796. Le territoire soumis à sa juridiction avait pour centre l’île St Joseph, dans le Haut-Canada, qui remplaça cette année-là Michillimakinac (Mackinac Island, Michigan) comme quartier général britannique dans la région des lacs Supérieur, Michigan et Huron. En 1797, Matthew Elliott fut déchu de ses fonctions de surintendant des Affaires indiennes dans la région d’Amherstburg, et Alexander McKee donna l’ordre à Thomas d’occuper le poste, qui vint s’ajouter aux responsabilités qu’il assumait déjà dans le district du Nord-Ouest.
En janvier 1799, après la mort d’Alexander McKee, on confia temporairement le poste de surintendant général adjoint à James Baby*, à Alexander Grant et à Thomas McKee. La nomination de McKee souleva quelques objections, probablement à cause de son intempérance dans le boire, mais il maîtrisait plusieurs langues indiennes, ce qui fit pencher la balance de son côté. De toute façon, on retira le mandat aux trois hommes en mars, pour faire place à William Claus*, nouveau titulaire du poste. En mai, McKee était redevenu responsable à Amherstburg. Il recueillit des informations sur ce qui se passait au sud des Grands Lacs, négocia la cession des territoires indiens à la couronne et assista à des conseils. Il se trouva également mêlé aux dissensions persistantes qui opposaient le département des Affaires indiennes au commandant du fort Malden (Amherstburg), Hector McLean, officier trop zélé qui voulait réduire la quantité de ravitaillement fourni aux Indiens et dont les doléances avaient provoqué le renvoi d’Elliott. McKee protesta et déclara que les mesures prises par McLean allaient « provoquer la diminution sinon la disparition totale de l’influence [du département] et pourraient compromettre infiniment les intérêts de Sa Majesté dans les affaires indiennes de ces régions ». En conséquence, l’administrateur Peter Russell et le gouverneur Robert Prescott réprimandèrent le commandant.
Élu député de Kent à la chambre d’Assemblée en 1797, McKee fut réélu en 1800 dans la même circonscription et dans celle d’Essex. De plus en plus alcoolique, et absorbé par les exigences de son travail au département des Affaires indiennes, il ne consacrait qu’un temps limité aux affaires de l’Assemblée. Il semble que McKee, lui-même peut-être aux trois quarts Chaouanon, ait considéré que son premier rôle était de servir les intérêts des Indiens. Il manifesta assurément la volonté de les appuyer en certaines occasions. En 1804, il fut d’avis qu’on avait empiété sur les droits d’un individu et il écrivit à Prideaux Selby, sous-secrétaire aux Affaires indiennes : « Le gouvernement devrait consulter les Indiens. Je suis déterminé à inciter les Indiens à faire valoir leurs revendications et leurs droits et à répondre à la force par la force. » À cette époque, McKee était encore très respecté par les autochtones, mais en 1807 les Wyandots se plaignaient qu’il était « trop jeune et inexpérimenté, trop porté sur les divertissements et qu’il négligeait [leurs] affaires ». L’opinion de Claus sur l’incompétence de McKee et les rumeurs d’une guerre imminente à la suite de l’affaire du Chesapeake entraînèrent le remplacement de McKee à Amherstburg par Elliott. Il perdit son poste en 1808, mais conserva quand même la surintendance du district du Nord-Ouest.
Entre-temps, en 1805 ou 1806, McKee avait renoncé à sa commission dans le 60e d’infanterie qui n’était plus en service dans le Haut et le Bas-Canada. Il s’enrôla dans la milice et, en 1807, il avait le grade de major. Pendant la guerre de 1812, toujours à ce grade, il fut rattaché au 2e régiment de la milice d’Essex, mais fit office de capitaine au département des Affaires indiennes. Le prince régent le félicita pour la modération dont les Indiens avaient fait preuve pendant la prise de Detroit aux Américains en août 1812 [V. Tecumseh], et on le cita dans les dépêches pour sa participation à d’autres combats au début de la guerre, encore que ses qualités de commandant sur le champ de bataille fussent mises en doute. En mars 1814, on l’accusa d’« inconduite grave » avec les Indiens sur la plage de la baie de Burlington (Hamilton Harbour). Il avait permis à ses partisans de consommer de l’alcool, ce qui les rendit « indignes », puis il s’ « enivra honteusement » lui-même et les injuria. On prit des mesures pour l’éloigner du théâtre des opérations militaires. Il mourut à l’automne, pendant qu’il faisait route vers Montréal.
Par sa connaissance de leurs langues et de leurs coutumes, Thomas McKee avait aidé au maintien des bons rapports avec les Indiens, qui jouèrent un rôle essentiel dans la fixation des frontières du Canada moderne. Grâce à son argent et à ses relations, il aurait pu avoir une brillante carrière ; malheureusement, comme l’affirma le marchand Alexander Henry*, il en vint à être « perpétuellement détraqué par l’ alcool ». McKee fut le père de trois enfants nés de mère inconnue. Le 17 avril 1797, à Petite Côte (maintenant partie de Windsor), il épousa Thérèse Askin, fille de John Askin, et ils eurent un fils. De Montréal, Henry écrivait : « La pauvre Mme McKee a beaucoup souffert pendant qu’elle était ici avec son infortuné époux. » La mort de ce dernier la laissa dans un complet dénuement et on lui accorda une pension annuelle de £40.
L’auteur voudrait exprimer sa reconnaissance envers David Brown et Gregory Finnegan, et envers le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. [j. c.]
APC, MG 11, [CO 42] Q, 80–1 : 70–74 ; MG 19, F1, 8 : 84s., 117s., 136–139, 236, 238–241, 243s. ; 9 : 7–9, 43–45, 47–49 ; F 16 : 24–26 ; RG 1, L4, 2 : 116–120 ; RG 5, A1 : 2707s. ; RG 8, I (C sér.), 15 : 46–48 ; 249 : 177–186 ; 250 : 385–387, 560–562 ; 252 : 157–163, 165–172, 213–216, 317s., 331s., 368s., 375–378 ; 256 : 48, 52, 55 ; 257 : 251, 253, 255 ; 258 : 33–36, 54s., 149, 516 ; 677 : 157 ; 682 : 286 ; 688 : 107 ; 922 : 34, 36 ; 932 : 95 ; 1170 : 53 ; 1222 : 118, 170 ; 1224 : 116s. ; 1227 : 119 ; RG 10, A2, 9 : 9202s., 9210s. ; 10 : 9406, 9598s., 9601 ; 11 : 9740–9743, 9770s., 9896 ; 12 : 10533s.— Corr. of Hon. Peter Russell (Cruikshank et Hunter), 3.— Corr. of Lieut. Governor Simcoe (Cruikshank), 4.— John Askin papers (Quaife).— Mich. Pioneer Coll., 12 (1887) : 283–289 ; 20 (1892) : 692 ; 25 (1894) : 92, 280.— Windsor border region (Lajeunesse).— Horsman, Matthew Elliott.— N. W. Wallace, A regimental chronicle and list of officers of the 60th, or the King’s Royal Rifle Corps, formerly 62nd, or the Royal American Regiment of Foot (Londres, 1879).— R. S. Allen, « The British Indian Department and the frontier in North America, 1755–1830 », Lieux hist. canadiens, no 14 (1975) : 106s.— John Clarke, « The role of political position and family and economic linkage in land speculation in the Western District of Upper Canada, 1788–1815 », Canadian Geographer (Toronto), 19 (1975) : 18–34.
John Clarke, « McKEE, THOMAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mckee_thomas_5F.html.
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Auteur de l'article: | John Clarke |
Titre de l'article: | McKEE, THOMAS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |