MASSON, LUC-HYACINTHE, médecin, commerçant, homme politique, né à Saint-Benoît (comté de Deux-Montagnes) le 16 août 1811, fils de Louis Masson, cabaretier et capitaine de milice, et de Marie-Louise Choquet, décédé à Coteau-Landing (comté de Soulanges) le 18 octobre 1880 et inhumé à Saint-Anicet le 20 octobre 1880.

Luc-Hyacinthe Masson appartenait à la cinquième génération d’une famille orléanaise émigrée à Québec au milieu du xviiie siècle. Il reçut ses premières notions de grammaire et de mathématiques à la maison paternelle dans le petit village de Saint-Benoît. Il continua ses études au collège de Montréal puis s’orienta vers la médecine qu’il étudia avec le docteur Robert Nelson. Un geste arbitraire du gouvernement avait préparé le jeune homme à l’influence politique du célèbre docteur Nelson : le 12 juillet 1827, son père avait été démis de ses fonctions de capitaine de milice pour « activité patriote ».

Au printemps de 1832, l’épidémie de choléra asiatique qui atteignit le Bas-Canada, après l’Europe, relégua dans l’ombre les grandes questions d’intérêt politique et national. Les médecins furent appelés à un autre héroïsme que celui de la résistance nationaliste. Le jeune étudiant remplaça son maître, qui venait de tomber malade, auprès des immigrés de Pointe-Saint-Charles ; à Saint-Clément-de-Beauharnois, le 1er août 1832, il prit la place du docteur Charles Fleming qui avait succombé au mal. Sa forte constitution lui permit de sortir indemne de cette rude expérience. L’année suivante, soit en 1833, il fut reçu médecin. Il exerça sa profession d’abord à Saint-Clément-de-Beauharnois, puis dans son village natal de Saint-Benoît, où il acheta le 28 janvier 1835 un terrain rue Saint-Jean-Baptiste.

C’est alors que se forma le célèbre triumvirat réunissant Jean-Joseph Girouard*, Jean-Olivier Chénier* et Luc-Hyacinthe Masson, sur lequel devait reposer la résistance du Nord aux « Habits-Rouges ». Luc-Hyacinthe Masson participa à toutes les assemblées préparatoires à la rébellion et s’y révéla fougueux orateur. Lord Gosford [Acheson*] annula alors sa commission de juge de paix. De la parole, le jeune médecin passa vite à l’action. Il prit une part active à l’organisation « militaire » de la résistance. Arrêté le 16 décembre 1837, au lendemain de la défaite de Saint-Eustache, il fut exilé aux Bermudes par la proclamation de lord Durham [Lambton*] le 28 juin 1838. Pendant ses mois d’exil, Luc-Hyacinthe Masson obtint la permission de pratiquer la médecine.

Le désaveu de la proclamation de lord Durham par le parlement de Londres lui permit de quitter les Bermudes. Il entra aux États-Unis le 9 novembre 1838. À Fort Covington, dans l’état de New York, Luc-Hyacinthe Masson ouvrit un magasin général en société avec son oncle, Eustache Masson, qui, compromis et ruiné par la rébellion, avait pris le parti de se réfugier aux États-Unis avec sa famille. Il fit d’excellentes affaires avec cet oncle dont il devint le gendre en épousant sa fille Cécile (Célinie). Mais Eustache Masson mourut en 1840, et, deux ans plus tard, Luc-Hyacinthe décida de rentrer au Canada. Le goût du commerce l’emporta sur celui de la médecine. Associé à son frère Damien, Luc-Hyacinthe Masson jeta à Saint-Anicet les fondements d’un commerce général sous le nom de Masson & Cie. Par son esprit d’initiative et sa grande activité, il donna un essor au village naissant de Saint-Anicet.

En 1844, il devint percepteur des douanes dans le port de Dundee, sur la frontière canado-américaine. Il s’occupa aussi de politique municipale comme maire de Coteau-Landing, et de politique provinciale comme député de Soulanges à la chambre d’Assemblée de la province du Canada du 31 juillet 1854 au 28 novembre 1857. Au parlement, il compléta l’œuvre à laquelle il avait consacré son énergie depuis 1849 : obtenir, pour les cultivateurs des deux rives du lac Saint-François, une indemnité pour les dommages causés par les inondations à la suite de la construction de jetées à la tête du canal de Beauharnois. En 1860, il s’établit de l’autre côté du fleuve, à Coteau-Landing, où il se consacra encore aux affaires. Après la Confédération, Luc-Hyacinthe Masson fut député de Soulanges à la chambre des Communes du Canada du 3 septembre 1867 au 8 juillet 1872. L’ardent agitateur patriote de 1837 était devenu un fervent adepte du parti conservateur.

En 1872, Luc-Hyacinthe Masson rentra dans la vie privée. Il exerça les fonctions de registraire du comté de Soulanges et de greffier de la Cour de circuit, avec résidence à Coteau-Landing. Ayant perdu sa femme le 3 mai 1846, il avait épousé le 12 juin 1849 Odile (Élodie) Watier, fille de Joachim Watier de Coteau-du-Lac. De ses 36 enfants, deux seulement lui survécurent.

À l’encoignure sud-ouest du monument des Patriotes de 1837–1838, élevé au cimetière de la Côte-des-Neiges de Montréal, le nom de Luc-Hyacinthe Masson témoigne des moments tragiques d’une vie parfois agitée. La réputation de philanthrope qu’il avait à sa mort, survenue le 18 octobre 1880, est un autre témoignage d’une vie toujours bien remplie.

Andrée Désilets

AJM, Louis Richard, La famille Masson.— ANQ, Jean-Joseph Girouard, Papiers personnels et lettres reçues, 17 août 1751 ; Ludger Duvernay, nos 292, 391 ; QBC, Procureur général, Événements de 1837–1838, nos 598, 669, 770, 803, 805, 845, 869, 3 182, 4 106, 4 145.— APC, FM 30, D62 (Papiers Audet), 20, p.450.— Archives paroissiales de Saint-Clément-de-Beauharnois (Beauharnois, Qué.), Registres des baptêmes, mariages et sépultures.— Archives paroissiales de Saint-Ignace (Coteau-du-Lac, Qué.), Registres des baptêmes, mariages et sépultures.— Archives paroissiales de Saint-Zotique (Coteau-Landing, Qué.), Registres des baptêmes, mariages et sépultures.— AVM, B 2 015.— Le journal de l’abbé N.-J. Ritchot 1870, G. F. G. Stanley, édit., RHAF, XVII (1963–1964) : 555.— Les Patriotes aux Bermudes en 1838, lettres d’exil, Yvon Thériault, édit., RHAF, XVI (1962–1963) : 438 ; XVII (1963–1964) : 429.— La Minerve (Montréal), 18 oct., 19 oct. 1880.— L’Opinion publique (Montréal), 19 avril 1877.— Can. directory of parliament (Johnson), 358.— Can. parl. comp., 1872.— Desjardins, Guide parlementaire.— Raymond Masson, Généalogie des familles de Terrebonne (4 vol., Montréal, 1930–1931).— R.-L. Séguin, Biographie d’un patriote de ’37, le Dr Luc-Hyacinthe Masson (18111880), RHAF, III (1949–1950) : 349366.

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Andrée Désilets, « MASSON, LUC-HYACINTHE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/masson_luc_hyacinthe_10F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
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