MARRYAT, FREDERICK, auteur, né le 10 juillet 1792 à Londres, deuxième des 15 enfants de Joseph Marryat et de Charlotte Von Geyer ; le 21 janvier 1819, il épousa Catherine Shairp, et ils eurent 11 enfants, dont 3 moururent en bas âge ; décédé le 9 août 1848 à Langham, Norfolk, Angleterre.

Frederick Marryat, reconnu comme un « jeune garnement de la pire espèce » à la Mr Freeman’s Academy de Ponders End (Londres), fit deux fugues dans l’espoir de prendre la mer. Frappé par sa détermination, son père, homme d’affaires influent et futur député tory, lui trouva en septembre 1806 une place de volontaire à bord d’une frégate de la marine, l’Impérieuse. Marryat servit ensuite sur plusieurs navires qui connurent des épisodes particulièrement mouvementés et il passa son examen de lieutenant en octobre 1812. Sa promotion n’eut lieu que le 26 décembre parce qu’il n’avait pas été baptisé « selon le rite de l’Église établie, l’Église d’Angleterre ».

Entre 1813 et 1815, Marryat commença à souffrir d’hémoptysie, maladie caractérisée par des crachements de sang qui proviennent des voies respiratoires et qu’il avait peut-être contractée en tentant en vain de sauver un marin tombé à la mer. Cité pour son courage et son humanité dans plusieurs certificats datant de l’époque, il reçut une médaille de la Royal Humane Society. En 1815, on le promut commander. Capitaine du sloop Beaver en 1820 et 1821, Marryat fut l’un des trois officiers qui firent un croquis de Napoléon Ier sur son lit de mort à Sainte-Hélène, le 5 mai 1821. Quatre jours plus tard, il emporta en Angleterre les dépêches qui racontaient la mort de l’ex-empereur. Ensuite, jusqu’à sa mise à la demi-solde en février 1822, il travailla à empêcher la contrebande dans la Manche. En 1823, il s’embarqua pour la Birmanie, où il se distingua en adaptant aux opérations navales un petit bateau à vapeur. Le 14 avril 1825, on confirma son grade de post captain. Rentré en Angleterre en janvier 1826, Marryat désarma son navire et fut fait compagnon de l’ordre du Bain le 26 décembre pour les services rendus en Birmanie. De novembre 1828 à novembre 1830, en qualité de commandant de la frégate Ariadne, il protégea les sujets britanniques des Açores pendant la lutte qui se déroulait alors pour le trône du Portugal.

Marryat adopta ensuite le métier d’écrivain, auquel il s’essayait depuis plusieurs années. Il avait déjà publié, à Londres en 1817, A code of signals for the use of vessels employed in the merchant service, qui servit de manuel officiel jusqu’en 1857. En 1819, tant à cause de cet ouvrage que de son talent de caricaturiste et de ses connaissances scientifiques, il reçut le titre de fellow de la Royal Society. En 1833, la France lui décernerait la croix de la Légion d’honneur pour ses travaux sur la navigation. Son deuxième ouvrage, paru en 1822, traitait de l’abolition de l’enrôlement forcé dans la marine. En 1829, il publia à Londres son premier roman, largement autobiographique, The naval officer ; or, scenes and adventures in the life of Frank Mildmay. Marryat devint rédacteur en chef du Metropolitan Magazine de Londres en 1831 et en fut propriétaire de 1832 à 1836. Dès 1836, il avait huit autres romans à son actif, dont Mr. Midshipman Easy, l’une de ses œuvres les plus connues. Doué pour le récit d’aventures, auquel il apportait esprit et humour, et pour la caractérisation des personnages, il connut immédiatement un succès populaire et financier.

Volage, voire instable, Marryat se détacha peu à peu de sa femme. Le 3 avril 1837, il partit pour l’Amérique, soi-disant « pour étudier les effets d’une forme de gouvernement et d’un climat démocratiques sur un peuple qui, en dépit de toutes ses adjonctions étrangères, [pouvait] encore être considéré comme anglais » ; mais également il envisageait d’intervenir contre les éditeurs américains qui republiaient ses livres sans son autorisation et il souhaitait échapper à ses problèmes conjugaux (en 1838, il allait rédiger un document officiel de séparation). Pendant son séjour en Amérique du Nord, il demeura surtout aux États-Unis. Toutefois, dès qu’il entendit parler des rébellions du Haut et du Bas-Canada, il jugea de son « devoir d’officier de se présenter et d’offrir [ses] services comme volontaire ». À la mi-décembre 1837, il marcha sur le nord de Montréal avec les troupes du major général sir John Colborne* et du lieutenant-colonel George Augustus Wetherall*, puis prit part aux batailles de Saint-Eustache et de Saint-Benoît (Mirabel) contre les patriotes de Jean-Olivier Chénier et d’Amury Girod. Le 18 décembre, il écrivit à sa mère : « Triste scène de sacrilège, de meurtre, d’incendie et de destruction. Tous les combats ont eu lieu dans les églises, que le feu a consumées en entier et où gisent les corps défaits des insurgés. La guerre est déjà une mauvaise chose, la guerre civile est horrible. Dieu merci, tout cela est terminé. » Plusieurs mois après ces batailles, à l’occasion d’un dîner de la Saint-Georges à Toronto, il porta un toast à Andrew Drew*, qui avait intercepté le bateau patriote Caroline en décembre 1837. À son retour aux États-Unis, il dut donc braver la colère des foules américaines. Brûlé en effigie dans les villes qu’il visita, il résista à la tempête avec humour et parvint même à accroître sa popularité avant de rentrer en Angleterre, le 20 novembre 1838.

Marryat retira, de son passage éclair au Canada, des connaissances qu’il mit à profit dans A diary in America [...] et d’autres livres. A diary, écrit après son retour en Angleterre, connut une large diffusion. Cet ouvrage contient de vivantes descriptions des événements de Saint-Eustache et de Saint-Benoît et est l’un des rares comptes rendus de la rébellion bas-canadienne écrits d’un point de vue britannique. Marryat s’y montre très sévère à l’endroit des Canadiens. Selon lui, la principale cause du soulèvement fut la « capitulation continuelle [de la Grande-Bretagne] devant les clameurs et fausses représentations des Français ». Le règlement des problèmes de la colonie, affirme-t-il, passe par l’assimilation totale : « Si [...] on oppose la loyauté des Britanniques à la trahison des Français – l’énergie, l’activité et le capital des Anglais à la mollesse, à l’ignorance et à l’incapacité de la population française –, il ressort que, non seulement par souci de justice et de gratitude [envers les sujets loyaux] ais aussi en vertu de nos propres intérêts, il faut maintenant retirer entièrement aux Canadiens français ce pouvoir dont ils ont abusé et cette confiance dont ils se sont révélés indignes. » Le Haut-Canada, qui offre aux immigrants britanniques un climat tempéré, un sol fertile et d’abondantes richesses naturelles, lui inspire des commentaires favorables. Comme il s’adresse surtout à un public britannique, il fait valoir que l’avantage principal que présentent les colonies pour la Grande-Bretagne est celui de servir de rempart contre l’expansionnisme américain. Parmi ses autres livres, The settlers in Canada [...], ouvrage « pour la jeunesse » paru en 1844, s’inspirerait de l’histoire d’une famille de la gentry irlandaise installée dans le canton haut-canadien de Clarke en 1796, les Lovekin. En outre, il n’est pas impossible qu’un habitant de Peterborough ait servi de modèle pour le personnage de Dick Short, dans Snarleyyow ; or, the dog fiend, publié à Londres en 1837.

À son retour d’Amérique du Nord, Marryat se trouva à court d’argent, malgré un généreux héritage et les profits de ses nombreux livres. Établi en 1843 dans une propriété rurale près de Langham, il vécut des droits de ses livres pour enfants, auxquels il consacra dès lors la plus grande partie de ses énergies. Il mourut à cet endroit en 1848.

C’est un historien de la marine britannique qui a su le mieux caractériser Frederick Marryat : « d’une énergie au-dessus du commun, doué de talents divers, jamais banal, d’un tempérament et d’une conduite imprévisibles et, comme bien des hommes et des femmes, porté à surestimer le passé à mesure que le temps passe ». Décrit par un admirateur haut-canadien comme « un homme, un gentleman et une personne pleine de force et d’humour », Marryat partageait les valeurs de milliers de colons britanniques des classes moyenne et supérieure qui vivaient en Amérique du Nord au xixe siècle.

W. A. B. Douglas

Frederick Marryat est l’auteur de nombreux volumes, y compris A diary in America, with remarks on its institutions (3 vol., Londres, 1839). Pour une liste détaillée des ouvrages de Marryat, voir National union catalog.

NMM, MRY/6, 11 ; C. G. Pitcairn-Jones, notes on sea officers.— Trent Univ. Arch. (Peterborough, Ontario), B-69-001 (Marryat papers).— DNB.— G.-B., Admiralty, The commissioned sea officers of the Royal Navy, 1660–1815, [D. B. Smith et al., édit.] (3 vol., s.1., [1954]).— Marshall, Royal naval biog., 3, 1re part. : 260.— David Hannay, Life of Frederick Marryat (Londres et New York, 1889 ; réimpr., New York, 1973).— M.-P. Gautier, Captain Frederick Marryat ; l’homme et l’œuvre (Montréal, 1973).— Robina et K. M. Lizars, Humours of ‘37, grave, gay and grim : rebellion times in the Canadas (Toronto, 1897).— Christopher Lloyd, Captain Marryat and the old navy (Londres et New York, 1939).— Florence Marryat, Life and letters of Captain Marryat (2 vol., Londres, 1872).— Oliver Warner, Captain Marryat, a rediscovery (Londres, 1953).

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W. A. B. Douglas, « MARRYAT, FREDERICK », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/marryat_frederick_7F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
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