Titre original :  Judge Nicholas Dominic Beck, Alberta Supreme Court, Edmonton, Alberta. 1921. Photographer/Illustrator: McDermid Studio, Edmonton, Alberta. Image courtesy of Glenbow Museum, Calgary, Alberta.

Provenance : Lien

BECK, NICHOLAS DU BOIS DOMINIC, avocat et juge, né le 4 mai 1857 à Cobourg, Haut-Canada, fils de John Walton Romeyn Beck et de Georgiana Boulton ; petit-fils de George Strange Boulton* ; en novembre 1886, il épousa Mary Ethel Lloyd (décédée le 30 avril 1904), et ils eurent deux filles et deux fils, puis le 9 janvier 1906, à Richmond Hill, Ontario, Louisa Adelaide Teefy, et finalement le 10 avril 1928, à Vancouver, Jeanne Cecilia Tilley ; décédé le 14 mai 1928 à Seattle, Washington.

Nicholas Du Bois Dominic Beck grandit à Peterborough, où son père, Américain de naissance, était le rector anglican. C’est là qu’il fit ses études primaires et fréquenta le collegiate institute. Après un stage dans un cabinet juridique de cette ville et son admission au barreau en 1879, il alla parfaire sa formation professionnelle à l’Osgoode Hall et à la University of Toronto, où il obtint une licence en droit en 1881. Il exerça ensuite à Peterborough. En 1883, il se joignit à un contingent d’avocats qui allaient à Winnipeg en vue de profiter des perspectives de travail ouvertes par la construction ferroviaire et la spéculation immobilière. Il s’associa avec un catholique bilingue, James-Émile-Pierre Prendergast*, qui deviendrait député libéral à l’Assemblée législative du Manitoba en 1885 et défenseur des écoles confessionnelles. Les liens de Beck avec le révérend Hippolyte Leduc – sous l’influence de qui, dit-on, il se convertit au catholicisme en 1883 – datent de la même époque. Beck assuma la fonction de rédacteur en chef dans un périodique catholique de Winnipeg, la Northwest Review, et représenta le collège de Saint-Boniface au conseil universitaire de l’université de Manitoba [V. Alexander Morris*].

En 1889, Beck quitta Winnipeg pour s’intégrer au cabinet de James Alexander Lougheed à Calgary. Deux ans plus tard, il se fixa à Edmonton. La colonisation était commencée dans cette région désormais accessible par chemin de fer à partir de Calgary. Beck fut nommé procureur de la couronne et, au moment de l’érection d’Edmonton en municipalité en 1892, conseiller juridique de la ville. Un des règlements rédigés par lui interdisait de rouler à bicyclette sur les nouveaux trottoirs de bois ; détail amusant, il fut le premier contrevenant à être poursuivi en justice. En 1893, l’année où il reçut le titre de conseiller de la reine, il s’associa à Edward Corrigan Emery. La plaidoirie était la force de Beck, mais en plus, chose courante dans la profession, son cabinet négociait des hypothèques ; outre la municipalité, ce dernier comptait parmi ses clients des agents immobiliers. Particulièrement soucieux de favoriser l’essor de la ville, Beck et Emery s’occupèrent des aspects juridiques de la mise sur pied de l’Edmonton Club et de l’Edmonton Industrial Exhibition Association. Par ailleurs, Beck participait à la vie de sa profession. Il convoqua la première assemblée des membres du conseil de la Law Society of the North-West Territories, tenue à Calgary en 1899, fut le premier vice-président de cette association, en occupa la présidence de 1901 à 1907 et fut rédacteur principal des Territories Law Reports, publiés à Toronto de 1900 à 1910.

Beck avait d’abord été conservateur, mais, à compter de 1900, il appuya résolument le Parti libéral parce que celui-ci entendait reconnaître le statut particulier des écoles catholiques. En 1892, l’Assemblée territoriale avait, sans le consentement du gouvernement fédéral, adopté une ordonnance qui réduisait les privilèges de la minorité en régularisant les inspections, en exigeant que les instituteurs détiennent un brevet d’enseignement et en soumettant le choix des manuels au contrôle gouvernemental. En octobre 1893, Beck, alors président du conseil des écoles catholiques, rédigea une pétition pour demander au gouvernement d’Ottawa de ne pas reconnaître cette ordonnance. La pétition se situait dans le contexte d’une cause type impliquant une religieuse enseignante de l’école de la mission Saint-Joachim à Edmonton. En février 1894, à la grande déception de Beck et d’autres pétitionnaires, le gouvernement de sir John Sparrow David Thompson* refusa d’agir. Le tour que prenait la question scolaire au Manitoba faisait craindre à la hiérarchie et aux laïques catholiques, dont Beck, que leurs droits s’érodent encore davantage dans le Nord-Ouest. En 1895, à l’occasion de la consécration du General Hospital d’Edmonton, administré par les sœurs grises, Beck tint, au nom des administrateurs scolaires de Saint-Joachim, des propos qui ne laissaient guère de doute sur sa position : l’adoption d’une loi réparatrice pour le Manitoba était un moyen de triompher de l’ordonnance territoriale. Après les élections fédérales de 1896, les laïques catholiques d’Edmonton adressèrent au nouveau gouvernement libéral de Wilfrid Laurier* une pétition où ils exprimaient leurs appréhensions. Des députés libéraux fédéraux crurent que Beck en était l’instigateur.

L’agitation en faveur de l’autonomie provinciale ramena les questions éducationnelles sur le devant de la scène. En 1904, l’archevêque de Saint-Boniface, Adélard Langevin*, demanda à Beck d’écrire une lettre ouverte sur les « droits acquis » des catholiques en matière de districts scolaires distincts. Beck avait des réticences ; il craignait la réaction de la presse. La stratégie qu’il avait en tête correspondait davantage aux vœux de l’évêque de Saint-Albert, Émile-Joseph Legal*, que Donato Sbarretti y Tazza, délégué apostolique à Ottawa, avait invité à rédiger une clause en faveur des écoles confessionnelles en vue de la faire inclure dans les projets de loi d’autonomie créant l’Alberta et la Saskatchewan. Beck restait quand même soucieux. À l’entrée des territoires dans la Confédération, en 1870, le droit à des écoles confessionnelles n’avait fait l’objet d’aucune garantie juridique. Beck proposa donc une clause qui préserverait les droits de fait et exigerait une définition plus claire des revenus que pourraient espérer recevoir les écoles catholiques.

En 1905, le ministre de l’Intérieur, Clifford Sifton, déclencha une controverse en démissionnant pour marquer son désaccord avec la disposition par laquelle le gouvernement Laurier proposait de protéger le réseau d’écoles confessionnelles existant. Beck était satisfait de cette disposition, mais refusait carrément que le soin de défendre le réseau soit laissé aux assemblées provinciales sans que les citoyens bénéficient de la protection inscrite dans l’article 93 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique. Dès mars 1905, à Ottawa, il prodiguait des conseils à Sbaretti, qui, craignait-il, risquait de se montrer trop conciliant. Finalement, la clause négociée par le délégué apostolique et le premier ministre Laurier lui sembla la meilleure que l’on pût attendre. Sa satisfaction fut d’autant plus vive que les libéraux, dirigés par Alexander Cameron Rutherford*, remportèrent haut la main les premières élections de l’Alberta, ce qui promettait une protection supplémentaire aux écoles confessionnelles.

Au moment de l’organisation des tribunaux provinciaux, en 1907, Beck fut nommé juge puîné de la Cour suprême par Laurier sur la recommandation de Rutherford. Bien que ses carnets indiquent qu’il travailla sur bon nombre d’aspects de la jurisprudence, ses jugements les plus importants avaient trait au droit financier et à la responsabilité. Ses connaissances dans ces domaines lui furent d’une grande utilité à la suite de la crise de l’Alberta and Great Waterways Railway [V. Charles Wilson Cross]. En butte à des allégations de manquement aux règles et à de l’opposition au sein de son propre parti, Rutherford annonça en mars 1910 que trois juges – David Lynch Scott, Horace Harvey* et Beck (à titre de président) – formeraient une commission royale qui enquêterait sur les tractations fiduciaires entre des membres du gouvernement et la compagnie de chemin de fer, particulièrement en relation avec des garanties sur des obligations. Les rapports des commissaires parurent en novembre. Celui de Scott et de Harvey n’était pas probant. Dans le sien, Beck conclut à l’« absence de preuves » d’un quelconque méfait, ce qui, de l’avis de l’Albertan de Calgary, n’était qu’une façon de camoufler l’incapacité du gouvernement.

De l’avis de ses pairs, Nicholas Du Bois Dominic Beck était un juriste méticuleux et sérieux, plein d’assurance dans les cas où il exprimait un avis minoritaire, assez convaincant au fil du temps – y compris pendant ses années à la division d’appel, où il siégea à compter de 1921 – pour que ses jugements soient fréquemment cités. Toutefois, la fermeté apparemment dépourvue d’humour dont il faisait preuve en matière juridique lui attirait les foudres de Robert Chambers Edwards, de l’Eye Opener de Calgary. Une fois nommé juge, Beck avait continué de s’intéresser aux questions religieuses et éducationnelles. Membre de l’Educational Council de l’Alberta à compter de 1906, il devint en 1908 membre du conseil universitaire et premier vice-chancelier de la nouvelle University of Alberta, qui lui décerna un doctorat en droit la même année. En 1913–1914, il fit partie des premiers maîtres de conférences honoraires de la faculté de droit. Au sein de son Église, il devint membre du conseil d’administration de la Catholic Church Extension Society et, en 1926, vice-président de la Catholic Truth Society. Il souffrait d’angine et succomba à cette maladie à l’âge de 71 ans pendant des vacances à Seattle ; il fut inhumé à Edmonton.

Richard A. Willie

AO, RG 80-5-0-355, nº 21632.— City of Edmonton Arch., Newspaper clipping files, biog. file, Nicholas D. Beck.— Legal Arch. Soc. of Alta (Calgary), 09-00-00 (Calgary Bar Assoc. fonds), 1973–1984, vol. 1–16 ; 12-00-01 (Nicholas DuBois Dominic Beck fonds), judge’s notebooks ser., 1907–1928 ; 60-00-00 (Law Soc. of the North-West Territories fonds), roll of advocates and minutes, vol. 1, 1886–1907 ; Reference library files, dossier Nicholas DuBois Dominic Beck, comprenant « Articles of partnership dated October 1st. 1893, Nicholas D. Beck and Edward C. Emery » (copie) ; et dossier Univ. of Alta, faculty of law, W. H. Johns, « History of the faculty of law, the University of Alberta ».— Calgary Herald, 15 mai 1928.— Liberal (Richmond Hill, Ontario), 11 janv. 1906.— Vancouver Sun, 10 avril 1928.— D. R. Babcock, Alexander Cameron Rutherford : a gentleman of Strathcona (Calgary, 1989).— Emery Jamieson, The Emery Jamieson story (Edmonton, 1993).— F. C. Jamieson, « Edmonton courts and lawyers in territorial times », Alberta Hist. Rev. (Edmonton), 4 (1956), nº 1 : 3–9.— L. [A.] Knafla et Richard Klumpenhouwer, Lords of the western bench : a biographical history of the supreme and district courts of Alberta, 1876–1990 (Calgary, 1997).— M. R. Lupul, The Roman Catholic Church and the North-West school question : a study in church-state relations in western Canada, 1875–1905 (Toronto, 1974).— L. G. Thomas, The Liberal party in Alberta : a history of politics in the province of Alberta, 1905–1921 (Toronto, 1959).

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Richard A. Willie, « BECK, NICHOLAS DU BOIS DOMINIC », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/beck_nicholas_du_bois_dominic_15F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
Année de la révision:    2005
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