KARAGHTADIE (Karaghiagdatie, Kanaghkwase, Kuriahtaaty, Nicholas, Nickus), sachem du clan des Loups de la tribu des Agniers, probablement né au début des années 1700 à Canajoharie (Indian Castle, comté de Herkimer, N. Y.), décédé probablement au même endroit en mars 1759.
Comme la plupart des Agniers, Karaghtadie se tint du côté des Anglais contre les Français pendant les deux dernières guerres coloniales. Le 21 mars 1747, il reçut de William Johnson*, chargé de la participation indienne dans ces conflits, des ravitaillements en vue de conduire un détachement de guerriers. Le 7 mai 1747, Karaghtadie accompagna quelque 38 guerriers, conduits par Theyanoguin. Cette expédition se termina par un désastre quand elle fut surprise en embuscade près de Montréal à la mi-juin par une troupe française commandée par Louis de La Corne et Jacques Legardeur de Saint-Pierre. Karaghtadie et quelque 14 autres furent capturés. Il resta prisonnier au Canada jusqu’en août 1750, au début chez les Français et ensuite chez les Indiens, probablement les Hurons de Lorette.
Pendant sa captivité, Karaghtadie, espérant obtenir sa libération, invita ses amis Agniers à venir au Canada pour discuter avec les autorités françaises au sujet d’un échange de prisonniers. Les Français désiraient négocier un traité de paix séparée avec les Indiens, comme ils l’avaient fait auparavant. Les Anglais, cependant, insistèrent pour que les négociations portent sur tous les prisonniers, blancs et indiens, alléguant que les Indiens étaient leurs sujets. En 1749, Johnson manœuvra pour empêcher une délégation de plusieurs chefs, ainsi que la femme de Karaghtadie et sa famille, de partir pour le Canada. Leur venue au pays, disait-il, aurait été tout ce que le gouverneur français, Barrin de La Galissonière, aurait pu souhaiter. En août 1750, quand Karaghtadie revint chez lui, après que les Français et les Anglais se furent entendus sur l’échange des prisonniers, il était bouleversé et irrité qu’on l’ait laissé languir en captivité ; Johnson consacra alors trois jours de travail ardu à le remettre de bonne humeur.
Bien qu’ayant gagné le respect de ses voisins blancs dans ses rapports avec eux, Karaghtadie commit une grave erreur, en 1754 ; il se laissa abuser par John Hendricks Lÿdius* et signa un document par lequel il faisait cession d’une terre dans la vallée du Wyoming, en Pennsylvanie. Cet acte, contracté de façon précipitée, sans le consentement du conseil des Six-Nations, occasionna dans la vallée des tensions qui durèrent plusieurs années.
L’épouse de Karaghtadie, Sarah, semble avoir été femme chef de la tribu des Agniers, car leur fils Hans devint le Tekarihoken ou premier chef, une fonction qui se transmettait par la branche féminine. Sarah n’était pas une femme à être prise à la légère, même par son mari. Au cours de l’été 1755, quand un agent du major général William Shirley pressa Karaghtadie de se joindre à une expédition contre le fort Niagara (près de Youngstown, N.Y.), il hésita. Finalement, en se tournant vers Sarah il dit : « Voici mon épouse [...] demandez son approbation. »
L’expédition contre Niagara fut annulée, mais le 8 septembre 1755, plusieurs Agniers, incluant probablement Karaghtadie, prirent part à la bataille livrée contre les soldats de Dieskau au lac Saint-Sacrement (lac George), et un fils de Karaghtadie fut alors tué.
En 1758, Karaghtadie se rendit en Pennsylvanie où, avec d’autres députés des Six-Nations, il contribua à rabaisser les prétentions de Teedyuscung, un chef Delaware (Loup). Teedyuscung avait nié que les Iroquois eussent autorité sur sa tribu et, au moins à deux reprises, avait semblé se retourner vers les Français dans le but de faire valoir son point de vue. Le 23 octobre, au point culminant d’une conférence tenue à Easton, les députés des Six-Nations se réconcilièrent avec la Pennsylvanie sans tenir compte des chefs delawares qui étaient sous leur dépendance, ouvrant ainsi la voie à la chute de fort Duquesne (Pittsburgh, Penn.) et à la conquête de l’Ouest par les Anglais.
Karaghtadie était chrétien, et au moins un de ses enfants fut baptisé par un missionnaire anglican, Henry Barclay. Une de ses filles épousa George Croghan, commerçant et agent auprès des Indiens de la Pennsylvanie ; leur fille devint la troisième épouse de Joseph Brant [Thayendanegea*].
N.Y. Hist. Soc. (New York), Henry Barclay, Register book, Fort Hunter 1734/35-[1745/461, 25 juin 1741.— Johnson papers (Sullivan et al.), I : 738 ; III : 162, IX : 18, 22s., 39, 62–65, 600, 767 ; X : 43–48, 57s. ; XIII : 113.— Minutes of the council of Pensylvania, VIII : 175, 218.— NYCD (O’Callaghan et Fernow), VI : 527 ; X : 108–110.— Pennsylvania archives, 1re sér., II : 174–176.— [Charles Thomson], An enquiry into the causes of the alienation of the Delaware and Shawanese Indians from the British interest, and into the measures taken for recovering their friendship [...] (Londres, 1759), 178.— P. A. W. Wallace, Conrad Weiser, 1696–1760, friend of colonist and Mohawk (Philadelphie, Londres, 1945), 350–363, 520–552.
Isabel T. Kelsay, « KARAGHTADIE (Karaghiagdatie, Kanaghkwase, Kuriahtaaty) (Nicholas, Nickus) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/karaghtadie_3F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1974 |
Année de la révision: | 1974 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |