JARVIS, EDWARD, agent principal de la Hudson’s Bay Company, décédé vers 1800.

Edward Jarvis fut d’abord engagé pour trois ans par la Hudson’s Bay Company, en 1771, comme chirurgien au fort Albany (Fort Albany, Ontario), sur la baie de James, au salaire annuel de £40. En moins de deux ans, il avait maîtrisé la langue crise, ce qui, ajouté à son ardeur juvénile, en faisait l’homme tout trouvé – et du reste disposé à accepter – pour mener à bien le levé qui avait été proposé des territoires de la compagnie bornés par les rivières Moose et Albany (Ontario), la baie de James et le lac Supérieur. La compagnie considérait ce levé comme indispensable à sa prospérité. Pour faire obstacle à la concurrence croissante des trafiquants indépendants (pedlars) dont les activités entamaient sérieusement le rendement de la traite, la compagnie jugeait nécessaire de cartographier les points stratégiques pour l’établissement de postes sur les rivières encore inconnues de l’intérieur. La mission de Jarvis, parallèle à celle de Philip Turnor. était de découvrir ces points.

La première expédition de Jarvis. qui quitta le fort Albany le 29 mars 1775, se termina prématurément à Henley House (à la rencontre des rivières Albany et Kenogami), quand les Indiens refusèrent de lui fournir des guides. Jarvis retourna au fort et, le 3 octobre de la même année, se mit en route à destination de la rivière Chepysippy (Kabinakagami), en compagnie de Questach, capitaine des chasseurs d’oies du fort Albany. Il bifurqua vers la rivière Missinaibi et, le 19 novembre, atteignit Moose Factory (Ontario). De retour à Henley House en février 1776, il partit, en mai, pour examiner les établissements canadiens du lac Supérieur, à Michipicoton. Il y arriva le 19 juin et consigna des observations détaillées sur les deux groupes de trafiquants de Montréal (rattachés à une compagnie de Montréal), dont l’un était formé par les employés d’Alexander Henry*, l’aîné. Il prit ensuite le chemin du retour, arrivant au fort Albany le 5 juillet. Grâce aux explorations de Jarvis, la compagnie obtint une connaissance géographique considérable de la région des rivières Albany et Moose et put se faire une idée tant des points forts que des points faibles de l’adversaire montréalais.

Les journaux de Jarvis laissent voir qu’il était bien peu fait pour affronter les difficultés qui furent le tourment de la plupart des premiers explorateurs. Il souffrit des températures extrêmes, de la diarrhée, des mouches noires et des maringouins, et de la famine ; en terminant son dernier voyage, il était si maigre qu’il devait porter un « bandage » sur ses épaules pour retenir ses pantalons. Non familier avec les habitudes des Indiens de festoyer ou de supporter la faim, il se refusait à manger en un seul repas, comme eux s’y fussent attendus, 15 livres de castor cuit. Jarvis dépendait entièrement, aussi, des Indiens de l’intérieur qui seuls pouvaient le guider ; les employés de la Hudson’s Bay Company avaient beau désirer une connaissance plus nette des territoires de la compagnie, les Indiens n’étaient pas toujours disposés à la leur donner. Selon Thomas Hutchins, agent principal au fort Albany, les Indiens avaient refusé de guider Jarvis, lors de son premier voyage, parce qu’ils étaient opposés à l’exploration entreprise par la compagnie, trouvant « un plus grand bénéfice à fréquenter deux endroits aux intérêts opposés, où chacun s’effor[çait], par le moyen de cadeaux, de les détacher de l’autre ».

La carrière de Jarvis, par la suite, ne fut ni remarquable ni passionnante. Ayant refusé de retourner à l’intérieur après l’expédition de 1776, il passa les années 1776 à 1778 à faire la navette entre le fort Albany et Henley House. En septembre 1778, il se rendit en Angleterre ; il réapparut sur les listes de la compagnie l’année suivante, comme agent principal à Moose Factory, pour une période de cinq ans, à £130 par année. En 1781, la direction du fort Albany étant devenue vacante, il demanda et obtint d’y être transféré.

À titre d’agent principal, Jarvis plaida pour une politique d’expansion vers l’intérieur et pour l’établissement de postes qui « jetteraient la consternation dans la North West Company et couperaient ses communications avec l’intérieur où se fai[sait] tout son commerce ». À l’instar de Hutchins et de Humphrey Marten, ses prédécesseurs au fort Albany, il prônait l’engagement de trafiquants montréalais pour garnir ces postes, quoique, en 1791, tant lui-même que le comité de Londres fussent devenus moins favorables à cette idée. En 1792, son état de santé précaire le força à se retirer en Angleterre.

Jarvis fut réengagé par la compagnie en 1796 et nommé inspecteur en chef et surveillant des postes de la baie d’Hudson et de la baie de James. Cette nomination représentait un effort du comité de Londres pour concilier les aspirations parfois opposées de ses agents principaux dans Rupert’s Land. Jarvis, connu pour être le champion des intérêts du fort Albany, fut reçu froidement lors de son arrivée à York Factory (Manitoba), en août. Sa mauvaise santé l’empêcha de compléter l’examen approfondi des postes de la compagnie et, en 1797, il prit sa retraite avec une pension annuelle de 50 guinées. Il mourut probablement quelque temps après mars 1800, la dernière fois où lui fut versée sa pension.

On ne connaît guère la vie privée de Jarvis, sinon qu’il avait un frère financièrement aux abois et un vieux parent, qu’il faisait tous deux vivre. La mère métisse de son fils, « fille d’un Anglais », avait « peu ou pas d’amis indiens ». Craignant pour son fils, advenant la mort de sa femme, Jarvis avait pensé ne pouvoir mieux faire que de l’envoyer en Angleterre, en 1784, pour qu’il y fût instruit.

F. Pannekoek

HBC Arch., A.1/43. f.116 ; A.1/47, ff.75, 108d ; A.1/140, f.79 ; A.6/16, f.34 ;sA.11/3, ff.197, 199 ; A.11/4, ff.23d, 162, 210 ; A.11/5, ff.102, 189d ; A.11/55, p.123 ; A.19/2, f.87 ; B.3/a/71–74 ; B.86/a/29, ff.2–14, 29 ; B.86/a/30–32.— HBRS, XVII (Rich et Johnson).— Morton, History of Canadian west.— Rich, History of HBC.

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F. Pannekoek, « JARVIS, EDWARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/jarvis_edward_4F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
Année de la révision:    1980
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