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HOWLEY, MICHAEL FRANCIS, prêtre catholique, archevêque et auteur, né le 25 septembre 1843 à St John’s, fils de Richard Howley et d’Eliza Burke ; décédé dans cette ville le 15 octobre 1914.
Michael Francis Howley appartenait à une famille distinguée de Terre-Neuve. Venu d’Irlande au début du xixe siècle, son père avait connu la réussite à la fois comme marchand et fonctionnaire ; parmi ses frères, Thomas* devint médecin, et James Patrick, géologue et auteur. Michael Francis fréquenta d’abord l’école catholique de St John’s, alors dirigée par John Valentine Nugent*. À l’âge de 13 ans, il entra au collège catholique installé dans l’ancien palais épiscopal sous la direction d’Enrico Carfagnini*. En 1858, lorsque l’établissement rouvrit ses portes sous le nom de St Bonaventure’s College, il fut parmi les premiers à s’y inscrire. En 1863, nanti d’une solide formation classique, il alla se préparer au sacerdoce au Collège pontifical de la propagation de la foi à Rome.
Howley fut ordonné prêtre en la basilique Saint-Jean-de-Latran le dimanche de la Trinité 6 juin 1868. Tout de suite après, la Propagande le nomma secrétaire de Charles Eyre, nouveau délégué apostolique et administrateur du district ouest de l’Écosse. Howley resta 15 mois en Écosse, puis rentra à Rome avec Eyre pour assister au premier concile du Vatican. Les événements qui provoquèrent et marquèrent ce concile agité et décisif firent une vive impression sur Howley et allaient influencer sa pensée jusqu’à la fin de sa vie. C’est pendant cette période que son conservatisme foncier se confirma. Au cours de son séjour à Rome, il reçut son doctorat du cardinal préfet de la Propagande.
Thomas Joseph Power*, tout récemment sacré évêque de St John’s, était présent lui aussi au concile, et il demanda à Howley de retourner à Terre-Neuve avec lui. Arrivé à St John’s en septembre 1870, Howley fut d’abord affecté à la cathédrale St John the Baptist. L’été, de 1871 à 1873, il assista Thomas Sears, préfet apostolique de St George’s sur la côte occidentale de l’île. Nommé curé de la baie Fortune en 1876, il y resta trois ans, après quoi il retourna à St John’s à titre de vicaire de la cathédrale. En 1885, lorsque Sears tomba malade, on envoya Howley l’aider à administrer St George’s. Il prit l’initiative fort inhabituelle de demander de succéder à Sears quand celui-ci prendrait sa retraite. Sears mourut dans le courant de l’année, et Howley fut nommé préfet. Il fut confirmé dans sa nouvelle fonction en juillet 1886.
Le littoral ouest de Terre-Neuve était un vaste territoire sous-développé et accessible seulement par bateau ; la population, d’origines diverses, était clairsemée. Éloigné de Rome, dont il relevait, et des autorités ecclésiastiques de St John’s, Howley avait une grande autonomie. Son journal personnel ne fait allusion ni aux difficultés de parcourir son immense territoire, ni aux conditions de vie primitives. Sans le témoignage de ses contemporains, on ne connaîtrait donc pas les épreuves physiques qu’il devait endurer. Pendant son séjour sur la côte ouest, Howley s’intégra à la vie sociale, économique, spirituelle et politique de la région à la fois en tant que personnage public et chargé d’âmes. Il fit venir les Sisters of Mercy du Rhode Island et leur construisit un couvent, bâtit des églises en plusieurs endroits et améliora les écoles pour enfants. On l’admirait dans cette région multiethnique [V. Constant Garnier*] parce qu’il parlait français et gaélique.
Comme beaucoup de Terre-Neuviens, Howley voyait d’un très mauvais oeil les droits de pêche concédés aux Français sur la « côte française » par le traité d’Utrecht en 1713 : il les considérait injustes pour les habitants du lieu. En 1890–1891, quand cette question fit l’objet de débats publics à cause de la signature d’un modus vivendi par la France et l’Angleterre sur la pêche au homard [V. James Baird ; sir William Vallance Whiteway*], il se manifesta ouvertement et en privé auprès de tous les gouvernements en cause – celui de la Grande-Bretagne, celui de la France et celui de la colonie. Il demanda même à Léon XIII d’intervenir. Il se fit le principal porte-parole des habitants du littoral ouest, et peut-être ses actes contribuèrent-ils en fin de compte à la solution du litige. Chose certaine, ils amenèrent le gouvernement britannique à faire pression sur les hommes politiques de St John’s pour qu’ils améliorent le sort des Terre-Neuviens de cette côte.
En 1892, St George’s fut élevé au rang de vicariat apostolique par une bulle papale, et Michael Francis Howley fut élu vicaire apostolique et évêque titulaire d’Amastris. Sacré par Mgr Power à St John’s le 24 juin, il était le premier Terre-Neuvien de naissance à accéder à l’épiscopat. À la fin de 1894, il retourna à St John’s pour prendre la direction du diocèse, Power étant décédé l’année précédente. À la suite des pressions de Howley et de Ronald Macdonald, évêque de Harbour Grace, Terre-Neuve devint une province ecclésiastique en 1904. En même temps, St John’s acquit le statut d’archidiocèse et Howley en devint le premier archevêque.
Durant 20 ans, en qualité d’évêque et d’archevêque, Howley veilla aux besoins spirituels, sociaux et éducatifs des gens de St John’s. Il restaura la cathédrale et y fit poser l’éclairage électrique. Il encouragea l’amélioration des installations d’enseignement pour jeunes catholiques. Il agrandit le St Bonaventure’s College, établissement pour garçons, et la St Bride’s Academy de Littledale, alors un collège pour filles. Howley se préoccupait beaucoup de l’instruction, car il était convaincu qu’elle aiderait les catholiques à faire leur chemin dans le monde moderne. Sa priorité était la formation des jeunes hommes. En 1898, voyant que les jeunes femmes des écoles conventuelles excellaient aux examens publics, il estima qu’elles avaient prouvé leurs capacités et décréta qu’elles se remettraient à des études qui en feraient de meilleures épouses et mères. À l’intention des défavorisés, il veilla à ce que le domaine de sa famille, Mount Cashel, soit cédé aux Frères chrétiens d’Irlande pour être transformé en orphelinat et en école professionnelle pour garçons sous la direction de John Luke Slattery*.
Howley ne consacrait pas toutes ses énergies aux affaires spirituelles. Il s’intéressait aussi à la vie économique et politique de la colonie. Quand le contrat ferroviaire de 1898 donna à Robert Gillespie Reid* et à sa famille un quasi-monopole sur l’économie, il n’hésita pas à franchir les barrières politiques et religieuses pour monter une vigoureuse campagne d’opposition. Dans une lettre au gouverneur, sir Herbert Harley Murray*, il menaça de conseiller aux épargnants de retirer leur argent de la Newfoundland Savings Bank si le projet de loi ferroviaire recevait la sanction royale. Il écrivit une lettre du même genre au premier ministre, sir James Spearman Winter. Finalement, le contrat fut révisé. Howley prenait une part active à la politique locale, usant de son énorme influence en faveur des candidats et du parti de son choix. Il assistait à des assemblées publiques, écrivait à la presse et se mêlait à des polémiques. Parfois, son enthousiasme pour une cause obscurcissait son jugement. On peut s’interroger sur les répercussions de son engagement, mais on sait que les hommes politiques répugnaient à tester son pouvoir.
Lorsque le médecin britannique Wilfred Thomason Grenfell*, qui œuvrait depuis 1892 auprès des pêcheurs du Labrador et du nord de Terre-Neuve, recueillit de grosses sommes d’argent aux États-Unis et au Canada en décrivant les conditions de vie et de travail de ces gens, Howley et d’autres Terre-Neuviens réagirent avec colère. Howley critiqua la mission de Grenfell dans une série de lettres au Daily News en décembre 1905. Non seulement était-elle superflue, dit-il, mais « les moyens par lesquels le docteur Grenfell obt[enait] de l’aide financière pour sa mission [était] une insulte à la population de Terre-Neuve ». Les diapositives projetées par le médecin pour illustrer ses conférences, « prises dans les maisons les plus sordides et les plus pauvres de [la] population, [étaient] accompagnées d’un commentaire exagéré, et les auditeurs gard[aient] l’impression que telle [était] la condition générale et normale [des] gens [de Terre-Neuve]. Ainsi, on exploit[ait] la misère de quelques-uns [... des] établissements les plus pauvres pour soutirer des aumônes à un auditoire charitable ». En outre, Grenfell avait l’habitude de raconter les difficultés qu’il avait dû affronter dans le cours de son travail. Ayant œuvré dans des conditions semblables sur le littoral ouest, Howley se demandait pourquoi le soi-disant missionnaire n’accomplissait pas sans se plaindre le travail qu’il avait choisi.
L’archevêque estimait de son devoir de s’occuper de tous les aspects de la vie de ses ouailles et de les aider à prendre des décisions éclairées. Au fil du temps, ses sermons reflètent le changement des préoccupations de la société. Ultraconservateur, il critiquait l’impact du nouvel ordre social dans le monde ; la lutte des travailleurs pour améliorer leur sort lui semblait dangereuse pour son autorité et celle de l’Église. Quand William Ford Coaker* fonda le Fishermen’s Protective Union en 1908, Howley s’opposa vigoureusement à lui. Il interdit aux pêcheurs catholiques de se joindre à ce syndicat en disant que le serment de fidélité exigé en faisait une société secrète, donc une association prohibée par l’Église. Pis encore, dans une lettre circulaire écrite en 1909, il affirma croire que le syndicat menaçait le pouvoir temporel de l’Église et dresserait les pêcheurs catholiques contre les marchands catholiques. Il annula l’interdiction par la suite, mais le mal était fait. Majoritairement catholiques, les communautés de pêcheurs de la côte sud n’adhérèrent jamais au syndicat. Si celui-ci finit par échouer, ce fut en grande partie à cause de l’archevêque.
Michael Francis Howley aimait passionnément Terre-Neuve et croyait qu’elle avait un potentiel illimité. Il dessina les armoiries de la ville de St John’s, participa au concours où fut choisi un hymne national, et rédigea pour des journaux et revues du monde entier des articles élogieux sur Terre-Neuve. Dans la préface de son ouvrage Ecclesiastical history of Newfoundland, paru à Boston en 1888, il raconte que, depuis ses années d’école, il ramassait « tout ce qui a[vait] un rapport quelconque avec le passé de [la] contrée, la moindre anecdote de l’ancien temps, le moindre bout de manuscrit, la moindre inscription ou épitaphe [...], le moindre vestige civil, militaire ou ecclésiastique de l’occupation antérieure de Terre-Neuve ». Largement inspiré du travail d’auteurs précédents et d’un manuscrit inédit de l’évêque John Thomas Mullock*, le livre de Howley raconte l’histoire de Terre-Neuve depuis les premières visites des Européens jusqu’au décès de l’évêque Michael Anthony Fleming* en 1850.
Dans Poems and other verses (New York, 1903), Howley rassembla aussi bien des vers écrits au St Bonaventure’s College qu’une opérette présentée par des écoliers en 1883 en l’honneur du cinquantenaire de l’arrivée à Terre-Neuve des Sisters of the Presentation of the Blessed Virgin Mary [V. Mlle Kirwan*, dite sœur Mary Bernard]. Le recueil contient également son poème patriotique connu sous le titre de Fling out the flag. Howley écrivit aussi, entre autres, des traités sur les voyages de Jean Cabot* et de Jacques Cartier* ainsi que sur l’établissement des Vikings au Vinland. Tenant de la théorie selon laquelle Cabot avait débarqué à Terre-Neuve en 1497, il participa à un mouvement en faveur de la commémoration de cet événement et, le 22 juin 1897, posa la pierre angulaire de la tour Cabot sur le coteau Signal [V. Daniel Woodley Prowse]. Durant 14 ans, il publia régulièrement des articles sur les toponymes terre-neuviens dans le Newfoundland Quarterly ; le dernier parut peu après sa mort en 1914.
L’archevêque Howley était un homme complexe. Malgré son attachement à Terre-Neuve, il proposa que le littoral ouest s’unisse au Canada lorsque le gouvernement colonial parut négliger les habitants de cette région. Ceux-ci auraient eu de bonnes raisons d’envisager pareil changement : ils avaient de solides liens économiques, ethniques et sociaux avec le continent. Plus tard dans sa vie, dit-on, Howley aurait été favorable à l’entrée de Terre-Neuve dans la Confédération. L’intensité de son engagement en faveur de cette cause demeure inconnue. Dans les deux cas, on l’accusa de manœuvres politiques. Cependant, comme il visitait souvent le Canada, peut-être croyait-il que cette alliance serait avantageuse pour Terre-Neuve et la communauté catholique.
Homme énergique et intelligent, Michael Francis Howley servit ses ouailles et sa patrie avec ferveur tout au long de sa vie. C’était un homme d’Église dévoué, un citoyen engagé et un vrai patriote. Honoré de son vivant par de nombreuses sociétés savantes, il fut élu membre de la Société royale du Canada en 1902. Décédé en octobre 1914 après une brève maladie, il repose au cimetière Belvedere à St John’s.
L’ouvrage de Michael Francis Howley, intitulé Ecclesiastical history of Newfoundland, a été réimprimé à Belleville, Ontario, en 1979.
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Barbara A. Crosbie, « HOWLEY, MICHAEL FRANCIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/howley_michael_francis_14F.html.
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Auteur de l'article: | Barbara A. Crosbie |
Titre de l'article: | HOWLEY, MICHAEL FRANCIS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1998 |
Année de la révision: | 1998 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |