HORDEN, JOHN, ministre de l’Église d’Angleterre, évêque, traducteur et auteur, né le 20 janvier 1828 à Exeter, Angleterre, fils aîné de William Horden, imprimeur, et de Sarah Seward ; le 28 mai 1851, il épousa Elizabeth Oke, et ils eurent deux fils et quatre filles ; décédé le 12 janvier 1893 à Moose Factory (Ontario).

John Horden fit ses études à Exeter dans un établissement de charité appelé St John’s Hospital. Apprenti forgeron dès son jeune âge, il enseigna à l’école du dimanche de l’église St Thomas the Apostle, où le révérend John Medley exerça beaucoup d’influence sur lui. En 1851, il devint instituteur dans une école de garçons et offrit ses services à la Church Missionary Society dans l’espoir qu’on l’affecte en Inde. Cependant, en mai, il accepta Plutôt d’aller occuper dans les plus brefs délais la charge d’instituteur et de catéchiste à Moose Factory, poste de la Hudson’s Bay Company. C’est le révérend George Barnley de la Wesleyan Methodist Missionary Society qui avait établi en 1840 la première mission permanente de cet endroit. Barnley avait quitté les lieux en 1847 à la suite de conflits avec l’agent principal, Robert Seaborn Miles. Comme la société méthodiste s’avérait incapable de le remplacer, la compagnie, qui faisait la sourde oreille aux avances des oblats de Marie-Immaculée, avait offert la mission à la Church Missionary Society en 1851.

Horden et sa femme arrivèrent à Moose Factory le 26 août 1851 à bord du Prince Albert, navire ravitailleur de la Hudson’s Bay Company. L’évêque de Rupert’s Land, David Anderson*, projetait de laisser Horden à Moose Factory pendant un an avant de l’envoyer dans la colonie de la Rivière-Rouge (Manitoba) pour qu’il reçoive une formation en théologie. Cependant, la Church Missionary Society lui fit savoir que les lettres de Horden montraient « une grande maturité de jugement, des principes chrétiens et un esprit vif », et qu’elles étaient plus riches en renseignements que celles qu’elle recevait ordinairement des missions. En outre, au cours d’une visite à Moose Factory en 1852, Anderson put remarquer « la grande facilité » de Horden pour la langue crie et la qualité de ses rapports avec les Indiens. Il modifia donc ses projets et l’ordonna prêtre le 24 août.

La diplomatie dont Horden faisait preuve dans ses relations avec la Hudson’s Bay Company avait aussi contribué à son avancement. Fermement convaincu que, « si on néglige[ait] le jour du Seigneur, on néglige[ait] aussi tout ce qui est saint et bon », il était pourtant prêt à ne pas interdire les déplacements et la chasse le dimanche car il reconnaissait que les conditions locales rendaient la stricte observance difficile. Il ne ménageait aucun effort pour communiquer avec les habitants de sa mission. Linguiste doué, Horden non seulement parlait couramment le cri mais acquit une connaissance pratique du sauteux, de l’inuktitut, du chipewyan et du norvégien (la compagnie eut plusieurs employés norvégiens à Moose Factory dans les années 1850). Avec ses collaborateurs autochtones, il traduisit de nombreux ouvrages religieux en employant l’écriture syllabique inventée par James Evans*, que les Cris de la baie James avaient appris à connaître au début des années 1840. De même, avec plusieurs jeunes apprentis autochtones, il exploita une petite imprimerie de 1853 à 1859, après quoi la Church Missionary Society prit en main le travail d’édition. Sa plus grande contribution à la linguistique allait être un ouvrage publié à Londres en 1881, A grammar of the Cree language, as spoken by the Cree Indians of North America.

Un an après son arrivée, Horden entreprit une série de visites dans les postes de la région de la baie James ; il se rendit d’abord à Martin Falls (Ontario), puis en 1853 à Rupert’s House (Waskaganish, Québec). En 1852, on avait envoyé le révérend Edwin Arthur Watkins au fort George (Fort George) afin de commencer à évangéliser l’est de la baie James et, pendant la décennie suivante, on y affecta d’autres missionnaires. Pour la Church Missionary Society, ce n’était qu’une mesure temporaire, car elle avait l’intention d’établir une Église que desserviraient des ministres autochtones. Le premier assistant autochtone de Horden fut l’Indien John Smith, qui avait aidé Barnley pendant un moment. Cependant, on le congédia en 1854 pour ivrognerie et débauche. Un jeune homme d’ascendance autochtone et européenne, John Turner, assista Horden durant une courte période mais, en 1854, la Hudson’s Bay Company le muta à la rivière Little Whale (Petite rivière de la Baleine, Québec). Un autre sang-mêlé, Thomas Vincent*, arriva à Moose Factory en 1855 afin d’occuper un poste d’instituteur tout en recevant une formation en théologie. Ordonné en 1860, il fut affecté la même année au fort Albany (Fort Albany) afin d’établir une mission permanente et de contrer l’influence des prêtres catholiques.

En 1872, comme l’évêque de Rupert’s Land, Robert Machray*, en était arrivé à la conclusion que son diocèse était trop vaste pour être supervisé efficacement, on subdivisa son territoire en trois nouveaux diocèses. Le 15 décembre, à l’abbaye de Westminster, Horden fut sacré évêque du diocèse de Moosonee, qui englobait une bonne partie des bassins hydrographiques de la baie d’Hudson et de la baie James. Il continua de parcourir la région en long et en large : en 1875, il se rendit à Missanabie (Ontario), quatre ans plus tard à York Factory (Manitoba) et en 1889 au fort Churchill (près de Churchill). À la fin de son épiscopat, les missionnaires et agents de la Church Missionary Society allaient avoir converti ou reconverti à peu près tous les Cris de l’est de la baie James, de Moose Factory, du fort Churchill et de York Factory, ainsi qu’un bon nombre de Sauteux, de Chipewyans et d’Inuit. Toutefois, l’Église catholique allait établir une mission permanente au fort Albany en 1892, ce qui intensifierait de beaucoup la concurrence interconfessionnelle dans l’ouest de la baie James.

Même si, comme la Church Missionary Society, Horden souhaitait une Église dotée de ministres autochtones, il prônait une démarche progressive : en 1893, le diocèse comptait plus de missionnaires anglais qu’indiens ou inuit. Son attitude devant le choix de son successeur illustre bien ses sentiments. Le poste aurait dû revenir à Vincent, puisqu’il avait 38 ans d’expérience et parlait couramment l’anglais et le cri, mais Horden le jugeait inapte à l’occuper parce qu’il était sang-mêlé, ce qui limitait son influence auprès des Blancs du diocèse. De plus, Vincent n’avait pas d’amis importants en Angleterre, là où le diocèse devait constamment réclamer des fonds. À la mort de Horden, qui survint subitement en 1893, ce fut donc Jervois Arthur Newnham qui lui succéda. Horden est enterré au cimetière de la Hudson’s Bay Company à Moose Factory, aux côtés de sa fille Ellen Hudson, morte bébé.

En 42 ans de vie missionnaire, John Horden abattit un travail impressionnant ; rares sont ceux qui prirent leur tâche plus à cœur ou qui ont eu une influence aussi durable. Cependant, on ne fait que commencer à réévaluer les répercussions de son ministère et de son épiscopat sur la vie des populations autochtones. On forma quelques ministres sang-mêlé, mais on leur refusa de hautes fonctions. Horden encouragea les Indiens à abandonner leurs croyances et leurs coutumes car il ne leur reconnaissait pas la moindre valeur spirituelle ou culturelle. La foi anglicane est devenue une tradition pour bon nombre de leurs descendants, mais l’Église de la région est beaucoup moins indépendante financièrement et beaucoup moins dirigée par des gens du lieu que ne le prévoyaient les plans de la Church Missionary Society. Certains autochtones, convaincus que les anglicans ne sont pas de « vrais » chrétiens, ont embrassé des principes fondamentalistes. D’autres, offensés par l’arrogance culturelle des Églises, cherchent à renouer avec les valeurs et les pratiques religieuses autochtones, soit en faisant revivre leurs traditions ancestrales, soit, plus souvent, en s’inspirant du mouvement panindien qui s’est manifesté ailleurs en Amérique du Nord. Enfin, quelques-uns espèrent, en redécouvrant leurs traditions, opérer une synthèse entre elles et leur foi anglicane.

John S. Long

EEC, General Synod Arch. (Toronto), M 61-3 (Moosonee coll.), Horden letter-books.— Univ. of Birmingham Library, Special Coll. (Birmingham, Angl.), Church Missionary Soc. Arch., records.— Beatrice Batty, Forty-two years amongst the Indians and Eskimo ; pictures from the life of the Right Reverend John Horden, first bishop of Moosonee (Londres, 1893).— T. C. B. Boon, The Anglican Church from the Bay to the Rockies : a history of the ecclesiastical province of Rupert’s Land and its dioceses from 1820 to 1950 (Toronto, 1962).— J. S. Long, « Shaganash » : early Protestant missionaries and the adoption of Christianity by western James Bay Cree, 1840–1893 » (thèse de ed.d., Univ. of Toronto, 1986).— J. M. Banks, « The Church Missionary Society press at Moose Factory : 1853–1859 », Canadian Church Hist. Soc., Journal (Toronto), 26 (1984), 69–80.— J. S. Long, « Archdeacon Thomas Vincent of Moosonee and the handicap of « Metis » racial status », Canadian Journal of Native Studies (Brandon, Manitoba), 3 (1983) : 95–116 ; « The Cree prophets : oral and documentary accounts », Canadian Church Hist. Soc., Journal, 31 (1989) : 3–13.— « Education in the James Bay region during the Horden years », OH, 70 (1978) : 75–89 ; « John Horden, first bishop of Moosonee : diplomat and man of compromise », Canadian Church Hist. Soc., Journal, 27 (1985) : 86–97 ; « Manitu, power, books and wiihtikow : some factors in the adoption of Christianity by nineteenth-century western James Bay Cree », Native Studies Rev. (Saskatoon), 3 (1987), no 1 : 1–30.

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John S. Long, « HORDEN, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/horden_john_12F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1990
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