DUNCAN, CHARLES, officier de marine, explorateur et trafiquant de fourrures, circa 1786–1792.

On peut supposer que Charles Duncan avait passé de nombreuses années dans la marine quand il prit part, entre 1786 et 1788, à des voyages dans la marine marchande. On en a pour preuve sa propre esquisse intitulée « Sketch of the entrance of the Strait of Juan de Fuca ». Publiée en 1788 par l’hydrographe Alexander Dalrymple, elle indique qu’il détenait alors le rang de capitaine dans la marine royale.

En 1786, la Richard Cadman Etches and Company, connue ordinairement sous le nom de King George’s Sound Company, équipa le Prince of Wales et son ravitailleur, le Princess Royal. James Colnett* reçut le commandement du premier, Duncan celui du second. La compagnie, l’une des quelques associations commerciales constituées pour entreprendre le commerce des fourrures de loutre marine avec la Chine, avait envoyé des vaisseaux sous les ordres de Nathaniel Portlock* et de George Dixon sur la côte nord-ouest de l’Amérique du Nord l’année précédente. Duncan et Colnett quittèrent l’Angleterre en septembre 1786 et, après avoir établi une usine de peaux et d’huile de phoque sur l’île de Staten (Isla de los Estados, Argentine), ils arrivèrent dans la baie de King George (baie de Nootka, Colombie-Britannique) en juillet suivant. Ils y firent le commerce avec les Indiens nootkas et, à la mi-août, rencontrèrent Dixon qui avait passé la saison à trafiquer des fourrures plus au nord. Duncan et Colnett firent alors route vers les îles Sandwich (Hawaii) pour y passer l’hiver. Ils retournèrent sur la côte en mars 1788, où ils se séparèrent, Duncan allant faire escale à la baie de Nootka pour réparations. En mai, il mit le cap sur les îles de la Reine-Charlotte (Colombie-Britannique), suivant ainsi la recommandation de Dixon d’après laquelle le commerce y serait bon. En passant par le détroit de Hécate et l’entrée de Dixon, il fut le premier à prouver qu’il s’agissait bien d’îles, confirmant ainsi les spéculations de Dixon et du comte de Lapérouse [Galaup].

Duncan passa les mois de juin et de juillet 1788 à faire la navette entre ces îles et celles se trouvant au large de la terre ferme entre l’embouchure de la rivière Skeena et l’île de Calvert. Il appela ce chapelet d’îles les îles Princesse-Royale ; une seule île garde encore ce nom. Sa carte de la région fut par la suite utilisée par Vancouver. Le 5 août, il continua vers le sud jusqu’à la baie de Nootka où il rencontra un autre marchand, John Meares*. Plus au sud, dans la baie de Clayoquot, Duncan ancra en vue du village nootka d’Ahousat (île de Vargas, Colombie-Britannique) et fit le commerce avec la tribu de Wikinanish. Duncan passa ensuite près du détroit de Juan de Fuca. Sa carte et son croquis de l’entrée, datés du 15 août, contiennent certains commentaires sur les Indiens du cap Claaset (cap Flattery, Washington). Ils comprennent aussi un dessin du rocher Pinnacle (Fuca’s Pillar, Washington) au large du cap. La ressemblance de ce rocher avec celui qui est décrit dans la relation de Juan de Fuca* du détroit d’Anian, ainsi que le commentaire des Indiens suivant lequel une « grande mer » se trouvait à l’est, renforça la conviction en Angleterre que le détroit menait à la mer polaire.

Le 17 août, Duncan fit voile vers les îles Sandwich où il se joignit à Colnett et, ensemble, ils se dirigèrent vers la Chine. La saison de Duncan sur la côte avait été profitable : il avait obtenu près de 2 000 fourrures. Il ne retourna pas sur la côte nord-ouest mais fit un échange de bateaux avec Colnett et, de Canton, mit le cap sur l’Angleterre à bord du Prince of Wales.

Les découvertes de Duncan sur la côte nord-ouest en firent un partisan vigoureux, même fanatique, de l’existence d’un passage du nord-ouest. Son retour en Angleterre coïncida avec un intérêt grandissant pour le passage légendaire, soulevé par la crise de la baie de Nootka [V. Esteban José Martínez], les explorations de Peter Pond* et de Hearne, les appuis de Dalrymple et une expédition gouvernementale mise sur pied pour établir une colonie sur la côte nord-ouest. En mai 1790, Duncan reçut des instructions de la Hudson’s Bay Company lui enjoignant de faire voile sur la côte ouest de la baie d’Hudson, de découvrir le passage, de l’emprunter pour atteindre l’entrée du détroit de Juan de Fuca puis de revenir ou de continuer sur la Chine. Au cas où il ne trouverait pas le passage, il devait se frayer un chemin à l’intérieur des terres à partir de l’inlet de Chesterfield (Territoires du Nord-Ouest) jusqu’aux lacs Yathkyed et Dubawnt. Dixon devait accompagner Duncan et, à partir des lacs, aller, par voie de terre, jusqu’au Pacifique ; ce projet fut annulé par la suite, et Duncan partit seul. Il fit un voyage en 1790 et un autre en 1791. À la seconde occasion, il passa l’hiver au fort Churchill (Manitoba) ; il inspecta les rives de la baie ainsi que l’inlet de Chesterfield en juillet 1792 mais ne découvrit aucun indice de passage. Duncan qui « avant son départ croyait fermement qu’il découvrirait le passage du Nord-Ouest si souvent cherché [...] ressentit si violemment cette déception que, lors de son voyage de retour, il eut un accès de fièvre cérébrale ». Il tenta, à plusieurs reprises, de se suicider et dut être attaché à sa couchette mais il tenait encore à l’existence d’un passage, croyant que le soulèvement du terrain sur la côte ouest de la baie d’Hudson l’avait rendu infranchissable. L’on ne sait rien de plus de Duncan.

Barry M. Gough

[William Beresford], A voyage round the world ; but more particularly to the north-west coast of America [...], George Dixon, édit. (Londres, 1789 ; réimpr., Amsterdam et New York, 1968).— The Dixon-Meares controversy [...], F. W. Howay, édit. (Toronto et New York, 1929 ; réimpr., Amsterdam et New York, 1969).— Meares, Voyages. Walbran, B.C. coast names. H. H. Bancroft [et H. L. Oak], History of the northwest coast (2 vol., San Francisco, 1884).— Cook, Flood tide of empire. H. T. Fry, Alexander Dalrymple (1737–1808) and the expansion of British trade (Buffalo, N.Y., et Toronto, 1970).— Glyndwr Williams, The British search for the northwest passage in the eighteenth century (Londres et Toronto, 1962).

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Barry M. Gough, « DUNCAN, CHARLES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/duncan_charles_4F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
Année de la révision:    1980
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