COCKING (Cochin, Cockan, Cockings), MATTHEW, agent principal de la Hudson’s Bay Company et explorateur, né en 1743, à York, Angleterre, semble-t-il, probablement le fils de Richard Cochin, tailleur, et de Jane Carlton, décédé le 17 mars 1799, à York.
On connaît peu de chose de Matthew Cocking antérieurement à 1765, alors que la Hudson’s Bay Company l’ « accueillit » pour cinq ans, au salaire annuel de £20, à titre de commis aux écritures au fort York (York Factory, Manitoba). Il y transcrivit, de sa belle main, les journaux et la correspondance du poste, et y tint les comptes. Il contrôlait les expéditions de marchandises et de fourrures, à l’arrivée et au départ, à l’aide des réquisitions et des inventaires. Son intelligence et sa diligence furent reconnues en 1770, alors qu’on le nomma second à York, au salaire annuel de £50.
En 1772, Cocking se porta volontaire pour aller à l’intérieur des terres, quand Andrew Graham*, agent principal intérimaire à York, se plaignit que les rapports rédigés par les employés de la compagnie envoyés à l’intérieur, étaient « incohérents et inintelligibles ». Le 27 juin 1772, guidé par un « leader indien » peu enthousiaste, Cocking entreprenais un voyage difficile dans un canot indien qu’il ne savait pas manœuvrer. Les Indiens étaient « souffreteux » et un homme de canot mourut. Ils voyagèrent lentement par la route habituelle, remontant les rivières Hayes, Fox et Minehage (Minago), dans l’actuel Manitoba, pour atteindre la rivière Saskatchewan. Sur l’emplacement d’un vieux poste français, où des amis l’attendaient, le parti « abandonna » ses canots et marcha à partir du ruisseau Peonan (Saskatchewan), traversa la rivière Saskatchewan-Sud et atteignit les collines Eagle (au sud de Battleford). Cocking erra ça et là avec les Indiens, chassant dans la grande prairie, au sud-ouest de l’actuel Biggar, et dans la moyenne prairie, jusqu’au moment où il fut nécessaire de construire de nouveaux canots en vue du retour à la baie d’Hudson. Cocking rentra à York le 18 juin 1773. Dans son journal de route détaillé, se terminant par des « Réflexions sur un établissement à l’intérieur », Cocking fit, comme Graham l’avait espéré, un « compte rendu sensé » du pays des bisons, de la vie et des coutumes des peuples qui l’habitaient, dont des « Indiens étrangers » des plaines, notamment les Siksikas (Pieds-Noirs). Il décrivit la grande et la moyenne prairie, sans oublier la faune et la flore, et le chemin les reliant à la baie. Dans ses commentaires sur les postes de traite, les procédés et les normes des trafiquants indépendants (pedlars) qui interceptaient le commerce vers York, Cocking montra clairement l’urgence pour la compagnie d’étendre ses activités de traite à l’intérieur. Il y indiqua aussi les nombreuses difficultés qu’elle devrait surmonter, en particulier le manque de canots et d’hommes expérimentés.
Au cours du voyage suivant qu’il entreprit vers l’intérieur, en 1774–1775, Cocking fit l’expérience amère d’une de ces difficultés : la complète dépendance vis-à-vis des Indiens pour le « transport ». Il partit le 4 juillet 1774, pour aider Samuel Hearne à établir Cumberland House, le premier poste intérieur permanent de la compagnie dans l’Ouest, situé au lac Pine Island (lac Cumberland, Saskatchewan). Cocking emprunta un itinéraire via le lac Winnipeg (Manitoba), qu’il espérait convenir à de grands canots. En route, il « rattrapa » Isaac Batt, qui avait une grande expérience des voyages à l’intérieur, et Charles Thomas Isham*, que leurs guides indiens avaient abandonnés. Ne voulant pas les laisser mourir de faim, Cocking resta avec eux. Il fut même incapable de persuader les Indiens qui l’accompagnaient de remonter la rivière Saskatchewan, où plusieurs des indigènes étaient malades ; d’autres Indiens se présentèrent par la suite pour le conduire, non pas à Basquia (Le Pas, Manitoba), où Hearne l’attendait, mais dans leur propre pays, en remontant la rivière Red Deer, à l’ouest du lac Winnipegosis. Cocking hiverna au lac Witch (peut-être le lac Good Spirit, Saskatchewan). Aucunement effrayé, il décrivit ce nouveau pays dans son journal et s’efforça d’attacher à la compagnie les Indiens inconnus qu’il rencontra. Le 20 mai 1775, il descendit, pour le retour, la rivière Red Deer ; il arriva à York le 27 juin.
Bien que nommé chef de poste à Severn House (Fort Severn, Ontario) depuis 1774, Cocking fut une fois de plus envoyé à l’intérieur, malgré sa grande répugnance et une « vilaine brouille », selon les rapports de Ferdinand Jacobs, agent principal à York, et du conseil de ce poste. Après avoir emprunté la rivière Nelson (Manitoba), il prit le commandement de Cumberland House, le 6 octobre 1775, succédant ainsi à Hearne. De ce poste, il mena la lutte aux trafiquants indépendants, envoyant Robert Longmoor*, Malchom Ross et William Walker, entre autres, en mission de traite pour leur faire concurrence. Sur un ordre émané directement du comité de Londres, Cocking fut une fois encore, en 1776, envoyé à l’intérieur, à Cumberland House.
En août 1777, on permit enfin à Cocking d’assumer ses fonctions à Severn House. Tout comme York, ce poste avait à subir la concurrence des trafiquants indépendants ; en plus d’y entretenir les relations avec les Indiens, Cocking s’y occupait surtout, jour après jour, de l’approvisionnement et de l’administration courante. Même si la mauvaise santé « le gagnait », il prit le commandement d’York en 1781, quand la maladie obligea Humphrey Marten, agent principal à ce poste, à rentrer en Angleterre. À York, son dernier geste officiel qui nous soit rapporté fut sa tentative de faire échec à la propagation de la dévastatrice épidémie de petite vérole de 1781–1782. Il envoya d’urgentes mises en garde à Severn House, au fort Albany (Fort Albany, Ontario) et à Moose Factory (Ontario), en août 1782. Marten revint et releva Cocking juste avant la capture de York par le comte de Lapérouse [Galaup]. Cocking s’embarqua pour l’Angleterre le 24 août, sur le King George, lequel, avec un chargement de fourrures, déjoua les forces françaises. Les « longs services et la bonne conduite » de Cocking lui valurent l’ « approbation » de la compagnie. La documentation qu’il a laissée est aujourd’hui une source inestimable de renseignements sur les débuts de l’Ouest.
Installé dans la banlieue d’York, où il avait une sœur et un demi-frère, Cocking n’oublia pas les liens familiaux qu’il avait outre-Atlantique ; il obtint de la compagnie la permission d’y envoyer annuellement un montant d’argent à « l’usage de ses enfants et de leurs parents à la baie d’Hudson ». À sa mort, ses principaux légataires étaient des parents en Angleterre, mais son testament comportait des provisions pour que des marchandises d’une valeur de £6 fussent remises annuellement à chacune de ses trois filles de sang mêlé, l’aînée conservant sa part entière et les deux autres la partageant avec leur mère respective. Le conseil d’York Factory demanda qu’une partie de ce legs pût être « convertie en pain de gingembre, noix, etc., vu qu’elles n’[avaient] pas d’autres possibilités de se procurer ces petites fantaisies que la paternelle affection d’un père leur assurait dans le passé ».
[Matthew Cocking], An adventurer from Hudson Bay : journal of Matthew Cocking, from York Factory to the Blackfeet country, 1772–1773, L. J. Burpee, édit., SRC Mémoires, 3e sér., II (1908), sect. ii : 89–121.
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Irene M. Spry, « COCKING (Cochin, Cockan, Cockings), MATTHEW », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/cocking_matthew_4F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1980 |
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