Titre original :  Peter Erasmus, Metis, Alberta

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ERASMUS, PETER, fermier, instituteur, aide-missionnaire, chasseur, guide, marchand, interprète et chroniqueur, né le 27 juin 1833 dans la colonie de la Rivière-Rouge (Manitoba) ; en 1864, il épousa au lac Whitefish (Alberta) Charlotte Jackson (décédée en 1880), et ils eurent quatre fils et deux filles, puis en 1882, au même endroit, Mary Stanley (décédée en 1891), et de ce second mariage naquirent trois filles ; il se peut qu’il ait eu un fils avant son premier mariage et il adopta un garçon ; décédé le 28 mai 1931 au lac Whitefish.

Peter Erasmus était l’un des huit enfants de Peter Erasmus, colon danois établi à la Rivière-Rouge, et de Catherine (Kitty), femme métis qui avait pour frère Henry Budd*, premier catéchiste autochtone de l’Église d’Angleterre à Rupert’s Land, et pour ancêtres les marchands de fourrure William Hemmings Cook* et Matthew Cocking*. Peter commença l’école à l’âge de sept ans, sous la tutelle de James Settee* et de Henry Budd. Après le décès de son père en 1849, il prit en charge la ferme familiale, mais en 1851 il partit travailler comme instituteur pour son oncle Henry à la mission Christ Church à The Pas. Comme il réussissait bien dans cette fonction, on l’encouragea à étudier à la St John’s Collegiate School à la Rivière-Rouge pour devenir prêtre de l’Église anglicane.

Erasmus admit cependant qu’il n’avait pas la vocation ; comme il le dit lui-même : « Mes prières n’avaient aucune substance. » Un autre choix se présenta à lui durant son troisième semestre : on lui proposa de devenir l’assistant du révérend Thomas Woolsey de l’Église méthodiste. Erasmus saisit l’occasion, malgré les liens étroits qu’il avait eus auparavant avec les anglicans. Il se joignit à Woolsey en 1856 et participa à la remise sur pied des missions au fort Edmonton (Edmonton) et au lac Pigeon (Alberta). Selon Woolsey, Erasmus était un interprète particulièrement efficace et, grâce à ses talents de chasseur, il aida à nourrir les communautés de la mission.

En 1858, lorsque le docteur James Hector se joignit à l’expédition de John Palliser* dans l’Ouest canadien, Erasmus accepta de l’accompagner à titre de pourvoyeur et de chasseur. Erasmus se sépara du groupe en août 1859, car, en désaccord avec Hector, il trouvait dangereux de traverser le col Howse (Alberta) pour atteindre le fleuve Columbia en cette saison tardive. Erasmus alla plutôt chercher de l’or dans les environs du fort Colvile (près de Colville, Washington). En 1861, il était de retour à la mission du lac Smoking (Smoky), au nord-est du fort Edmonton, et travaillait pour Woolsey et Henry Bird Steinhauer*. Deux ans plus tard, il fit la connaissance du révérend George Millward McDougall* et de son fils John Chantler* qui l’engagèrent comme guide et interprète. Ils le trouvèrent d’une aide inestimable. John Chantler McDougall le qualifiait d’« interprète de première classe » et les succès initiaux de leur mission à Victoria (Pakan, Alberta) furent en bonne partie dus à ses talents de chasseur et de voyageur.

Erasmus cessa de travailler pour les McDougall en 1865, après une querelle au sujet de son salaire. Il s’établit au lac Whitefish, avec sa femme Charlotte, sur une terre que leur avait donnée James Seenum (Pakan), le chef de la bande crie locale. Erasmus et sa femme y vécurent de la trappe. À la suite d’une rencontre fortuite à la Rivière-Rouge avec un ancien camarade de classe de la St John’s Collegiate School – William ou Colin Inkster –, Erasmus se vit offrir de repartir avec des marchandises de traite pour les vendre à la commission. Ce fut ainsi qu’il commença une nouvelle carrière comme négociant indépendant au lac Whitefish.

En 1876, Mistawāsis (Big Child) et Ahtahkakoop (Star Blanket) demandèrent à Erasmus d’être leur interprète au fort Carlton (Saskatchewan) durant la négociation du traité no 6 [V. Kamīyistowesit*]. Embauché pour représenter les Cris des Plaines, Erasmus joua cependant un rôle bien plus important dans la traduction des pourparlers, parce qu’il possédait de meilleures compétences linguistiques, semble-t-il, que les traducteurs du gouvernement, Peter Ballendine et le révérend John McKay. Doué pour les langues, il parlait couramment l’anglais et plusieurs dialectes cris, ainsi que la langue des Sauteux, des Stonies (Nakoda) et des Pieds-Noirs.

Les mémoires d’Erasmus comprennent l’un des rares comptes rendus du processus des traités écrit par quelqu’un qui n’appartenait à aucun parti officiel du gouvernement. Ce document fournit d’importants détails sur les discussions des représentants des Premières Nations menées pendant des conseils qu’ils tenaient en secret. Ainsi, selon Erasmus, un discours prononcé par Mistawāsis réussit à convaincre certains chefs de bandes a priori réticents à accepter le traité proposé. Erasmus servit également d’interprète pendant les négociations du traité no 6 au fort Pitt et les adhésions signées au même endroit en 1877. Quelques années plus tard, en 1884, il seconderait James Seenum dans ses démarches pour étendre les limites de la réserve de Saddle Lake (Alberta).

Dans les années qui suivirent 1876, Erasmus avait travaillé pour le département fédéral des Affaires indiennes à titre de « magasinier et interprète » aux bureaux de Saddle Lake et d’Edmonton. Ce fut une période difficile dans sa vie. Charlotte mourut en 1880. Erasmus confia dans ses mémoires que, au début de cette décennie, il était « fatigué de voyager » et désirait vivement s’installer quelque part dans la région du lac Whitefish avec sa famille et de « vieux amis parmi les Indiens ». Ce rêve se réalisa quand il accepta un emploi qui consistait à acheter des fourrures pour la Hudson’s Bay Company aux lacs Whitefish et Saddle ; en 1882, il avait repris ses activités de petit commerçant.

En 1885, Erasmus fut de ceux qui aidèrent à tenir les membres des bandes de l’agence de Saddle Lake à l’écart des hostilités qui se déroulèrent pendant le soulèvement du Nord-Ouest [V. Mistahimaskwa*]. Ce fut là sa dernière grande confrontation avec l’histoire. Son fils adoptif, Peter Shirt, joua un rôle encore plus important dans cette affaire. Erasmus raconta que Peter Shirt avait vu les troubles à venir dans un rêve prémonitoire et qu’il était déterminé à contrer ce mauvais présage. Ce comportement montre combien différents étaient les univers culturels qui coexistaient dans le Nord-Ouest en 1885 et qu’Erasmus contribua à rapprocher.

Après 1885, Erasmus enseigna à Victoria, et aux lacs Whitefish et Goodfish. Il continua aussi à travailler pour les Affaires indiennes, puis, de 1909 à 1912, il occupa un poste d’« aide-répartiteur » à Gleichen sur la réserve des Pieds-Noirs, sinécure que lui avait procurée le ministre de l’Intérieur, Frank Oliver. Plus tard encore, le gouvernement versa à Erasmus une modeste pension pour ses années de service aux Affaires indiennes et pour son rôle de traducteur durant la négociation du traité no 6. Erasmus mourut au lac Whitefish en 1931.

À l’âge de 87 ans, Peter Erasmus avait accepté de raconter son histoire à Henry Thompson, écrivain et journaliste métis de sa localité. Le manuscrit qui en résulta, et où le récit s’arrête en 1885, ne fut pas publié immédiatement, mais le Glenbow-Alberta Institute de Calgary en fit plus tard l’acquisition et en publia une version révisée, intitulée Buffalo days and nights, en 1976. Bien que certains lecteurs aient mis en doute la capacité d’Erasmus de se souvenir avec autant de précision de conversations tenues plusieurs années auparavant, des historiens ont constaté que ses descriptions de personnes et d’événements étaient généralement appuyées par d’autres sources. Buffalo days and nights demeure l’un des témoignages authentiques les plus importants sur la vie dans l’Ouest canadien au xixe siècle, et l’un des rares qui s’appuient sur une connaissance directe des Premières Nations et du peuple métis.

Michael Payne

Les mémoires de Peter Erasmus ont été publiés sous le titre Buffalo days and nights : Peter Erasmus as told to Henry Thompson, introd. par I. [M.] Spry (Calgary, 1976 ; réimpr., 1999).

AM, ACBH, B.60/a/30–32 (Fort Edmonton Post Journals, 1852–1862).— GA, M 474, M 475, M 476, M 477, M 5908 ; M 729 (George and John McDougall family fonds) ; M 3525 ; M 4497 (mfm) ; M 7144-314,000.— Glenbow Library (Calgary), Peter Erasmus clipping file.— Canada, Indian treaties and surrenders […] [1660–1906] (3 vol., Ottawa, 1891–1912 ; réimpr., Toronto, 1971), 2.— G. H. Gooderham, « Peter Erasmus », Alberta Hist. (Calgary), 36 (1988), no 2 : 16–19.— J. [C.] McDougall, Parsons on the plains, Thomas Bredin, édit. (Toronto, 1971).— Alexander Morris, The treaties of Canada with the Indians of Manitoba and the North-West Territories […] (Toronto, 1880 ; réimpr., 1971 et 2000).— Wesleyan Missionary Notices (Londres), 3e sér., 8 (1861)–11 (1864).— Wesleyan Missionary Notices, Canada Conference (Toronto), nos 12 (mai 1857)–17 (février 1859).— Thomas Woolsey, Heaven is near the Rocky Mountains : the journals and letters of Thomas Woolsey, 1855–1869, H. A. Dempsey, édit. (Calgary, 1989).

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Michael Payne, « ERASMUS, PETER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/erasmus_peter_16F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2014
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