CHERRIER, FRANÇOIS-PIERRE (François, Pierre-François), marchand et notaire, baptisé à Savigné-l’Évêque (dép. de la Sarthe, France), le 3 septembre 1717, fils de François Cherrier, marchand, et de Périnne Isambart, décédé à Saint-Denis, sur le Richelieu (Québec), le 21 juillet 1793.

C’est à l’instigation de son oncle maternel, le sulpicien Joseph Isambart, curé de Saint-Antoine à Longueuil depuis 1721, que François-Pierre Cherrier vint au Canada en 1736. Isambart le convainquit de s’établir dans ce village et, grâce à lui, Cherrier acquit une certaine importance, signant comme témoin lors de la rédaction d’actes, agissant comme parrain dès l’année suivant son arrivée et établissant des relations avec les principales familles de l’endroit. Il ouvrit un magasin à côté du presbytère et il semble avoir assez bien réussi en affaires. Le 9 novembre 1738, devant le notaire François Simonnet, Cherrier achetait une terre, payant les trois quarts comptant et le solde « en marchandises de son magasin ». Il fut nommé notaire seigneurial en 1738 – sans doute grâce à l’appui de son oncle – tout en continuant à s’occuper de son commerce.

Le 14 janvier 1743, le curé Isambart bénissait le mariage de Cherrier et de Marie, fille de l’ancien marguillier Michel Dubuc. Charles Le Moyne* de Longueuil se trouvait parmi les témoins qui signèrent leur contrat, passé la veille devant le notaire Antoine Loiseau. Douze enfants naquirent de cette union et les liens d’affaires qu’entretenait Cherrier lui permirent d’inviter Jean-Marie Landriève Des Bordes, alors commis au contrôle dans les magasins du roi à Montréal, à servir de parrain pour son fils Joseph-Marie-Simon, en 1747, tandis que la marraine était Marie Gauvreau, épouse de Jean-Baptiste-Grégoire Martel de Saint-Antoine, garde-magasin du roi à Montréal.

Afin de diversifier ses activités commerciales, Cherrier acheta, en 1748, tout le bois qui se trouvait sur une terre faisant partie du fief Du Tremblay, contigu à Longueuil ; il paya 480# en billets d’ordonnance et 120# en cartes du pays. De plus, il afferma sa terre de Longueuil. Le 18 novembre 1750, l’intendant Bigot le nomma notaire royal dans l’étendue de la paroisse de Longueuil. Les seuls revenus de notaire n’étaient pas suffisants pour subvenir aux besoins de Cherrier, père d’une famille nombreuse, il continua donc à s’intéresser au commerce, à l’instar de bien d’autres notaires de l’époque.

Après la Conquête, Gage, gouverneur de Montréal, renouvela la commission de notaire de Cherrier, le 1er octobre 1760. Cependant, en tant que marchand, ce dernier eut à souffrir de la liquidation de l’argent de papier, qui lui causa des pertes importantes. Comme son protecteur, le curé Isambart, était mort depuis décembre 1763, Cherrier alla tenter fortune à Montréal au mois d’août 1765. C’est dans cette ville que son aînée, Marie-Charlotte, épousa le chirurgien Jean-Jacques Lartigue, en septembre de l’année suivante. Les difficultés financières ne faisant que s’accroître, Cherrier et sa famille revinrent à Longueuil, en août 1767. Le notaire n’était pas au bout de ses peines puisque au début de 1770 il devait à Jacques Perrault, dit Perrault l’aîné, marchand de Québec, la somme de £380 18 shillings 6 pence. Sa maison de pierres et le terrain qui l’entourait, sur la rue principale, furent mis en vente aux enchères, ainsi qu’une terre de 12 arpents de front sur 30 à 40 de profondeur, située dans la baronnie de Longueuil. Faute d’acheteurs, Perrault acquit cette dernière en paiement d’une partie des dettes de Cherrier. Enfin, au mois de mai de la même année, le notaire perdait sa maison et les dépendances lors d’un incendie.

C’est un homme brisé mais non désespéré qui quitta Longueuil, le 16 mai 1770, pour aller se réfugier avec sa femme et ses enfants au presbytère de la paroisse Saint-Denis, sur le Richelieu, où l’aîné de ses fils, François*, était curé depuis l’année précédente. Cherrier laissait des dettes passives assez importantes à un certain M. Dupré, marchand de Québec, à Jacques-Joseph Lemoine Despins de Montréal ainsi qu’à MM. Mercure et Perrault de la même ville. Cherrier s’établit à Saint-Denis, dans une maison sise face à l’église et au presbytère, où il poursuivit la pratique du notariat jusqu’en 1789.

Si Cherrier ne réussit pas à faire fortune, il eut la consolation de voir ses enfants s’établir solidement dans la vie. Son fils François devint grand vicaire de l’évêque de Québec, et Joseph-Marie, arpenteur puis marchand, fut le père de l’avocat Côme-Séraphin*. Benjamin-Hyacinthe-Martin se fit arpenteur et devint député de Richelieu, tandis que Séraphin, également député de Richelieu, pratiqua la médecine et le commerce. Sa fille, Marie-Charlotte, fut la mère de Jean-Jacques Lartigue*, premier évêque de Montréal ; Périne-Charles, mariée à Denis Viger*, celle de Denis-Benjamin*. Enfin, Rosalie, qui épousa le notaire Joseph Papineau*, devint la mère du grand tribun Louis-Joseph Papineau*.

Yves-Jean Tremblay

Le greffe de François-Pierre Cherrier (1750–1789) est conservé aux ANQ-M.

AD, Sarthe (Le Mans), État civil, Savigné-l’Évêque, 3 sept. 1717.— ANQ-M, État civil, Catholiques, Saint-Antoine (Longueuil), 14 janv. 1743 ; Greffe d’Antoine Foucher, 30 déc. 1748 ; Greffe d’Antoine Loiseau, 13 janv. 1743.— APC Rapport, 1918, app.B, 29.— Allaire, Dictionnaire, I : 119, 277.— F.-J. Audet, Les députés de Montréal (ville et comtés), 1792–1867 (Montréal, 1943), 411s.— F.-J. Audet et Édouard Fabre Surveyer, Les députés au premier parlement du Bas-Canada (1792–1796) [...] (Montréal, 1946), 65.— É.-Z. Massicotte, Les tribunaux et les officiers de justice de Montréal sous le Régime français, BRH, XXXVII (1931) : 307.— Les notaires au Canada sous le Régime français, ANQ Rapport, 1921–1922, 47.— P.-G. Roy, Inv. ord. int., III : 152.— Tanguay, Dictionnaire, III : 52s.— Vachon, Inv. critique des notaires royaux, RHAF, XI : 105.— J.-J. Lefebvre, La famille Cherrier, 1743–1945, SGCF Mémoires, II (1947) : 148–164 ; La vie sociale du grand Papineau, RHAF, XI (1957–1958) : 472s.— É.-Z. Massicotte, L’essaimage des Français et des Canadiens-français dans l’Amérique du Nord, BRH, XXXIV (1928) : 45.— Henri Morrisseau. La famille Cherrier de Saint-Denis-sur-Richelieu ; un salon aristocratique à la fin du dix-huitième siècle, Revue de l’université d’Ottawa, XVI (1946) : 301–338.

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Yves-Jean Tremblay, « CHERRIER, FRANÇOIS-PIERRE (François, Pierre-François) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/cherrier_francois_pierre_4F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
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