BOISSEAU, NICOLAS-GASPARD, auteur, notaire, homme politique et fonctionnaire, né le 10 octobre 1765 à Saint-Pierre, île d’Orléans, Québec, fils de Nicolas-Gaspard Boisseau* et de Claire Jolliette ; le 11 janvier 1790, il épousa à Saint-Jean-Port-Joli, Québec, Catherine Gaspé, fille d’Ignace-Philippe Aubert* de Gaspé, et ils eurent 11 enfants dont 4 moururent en bas âge ; décédé le 9 mars 1842 dans la paroisse Saint-Thomas (à Montmagny, Québec).
Nicolas-Gaspard Boisseau entreprend des études au petit séminaire de Québec qu’il doit interrompre pendant le siège de la ville par les Américains en 1775 [V. Benedict Arnold* ; Richard Montgomery*]. Il retourne alors à l’île d’Orléans, où son père se charge de l’instruire. Il revient au petit séminaire en 1778 et y étudie jusqu’en 1780. Il devient par la suite commis de son père, alors greffier de la Cour des plaids communs du district de Québec et greffier de la paix.
Fort de son expérience auprès de son père, Boisseau sollicite du gouverneur lord Dorchester [Carleton*], le 14 janvier 1787, une commission de notaire. Il semble que son expérience de commis ne puisse remplacer un stage de clerc, normalement exigé des candidats à la profession, aussi n’obtient-il sa commission que le 22 juillet 1791, après des examens et de longues entrevues.
Dans l’attente de sa commission, Boisseau rédige ses mémoires entre 1787 et 1789. Constitués essentiellement de notes de lecture tirées de journaux ou de quelques livres sans doute empruntés à la bibliothèque paternelle, ces mémoires témoignent tout de même de ses intérêts. On y retrouve un peu d’histoire universelle et nationale, un peu de géographie, par exemple des descriptions des villes de Québec et de Montréal et de quelques accidents de terrain pittoresques. Boisseau a une prédilection pour la connaissance de la terre et du cosmos, aussi plusieurs notations concernent-elles le climat, les astres, les volcans, les tempêtes ou bien les chutes de neige inusitées. L’espace qu’il réserve aux sciences naturelles n’est peut-être surpassé que par celui qu’il consacre à la chronique politique. En effet, il relate les grands événements politiques et militaires, passés et présents, canadiens ou étrangers. Il accorde une attention particulière aux allées et venues du gouverneur et du prince William Henry à l’occasion de son passage dans la colonie en 1787.
Boisseau s’intéresse aux faits curieux et aux anecdotes amusantes. Quelques pages d’ethnographie sur la formation du couple, les mœurs paysannes, la plantation du mai, la fabrication du charbon et du sucre d’érable constituent de bonnes observations, mais sont-elles vraiment de lui ? Boisseau est avare de commentaires sur sa personne. Il fait allusion à sa santé et à ses difficultés d’obtenir sa commission de notaire. Il brosse de lui-même un court portrait, réduit aux traits physiques, comme ceux qu’il trace de ses parents. Cet homme de l’Ancien Régime s’intéresse moins à ses semblables que les mémorialistes de l’époque romantique ou contemporaine. Il se peut aussi que son jeune âge ou sa nature extravertie expliquent ses silences à son propos. Si Boisseau reproduit une vingtaine de lettres tirées de la correspondance familiale, c’est qu’il les juge dignes de paraître dans une production intime. Mais elles ne semblent pas revêtir plus d’importance que des découvertes et inventions, quelques statistiques sur le trafic maritime, la population de la province au recensement de 1784, ou le nombre de cordes de bois utilisées pour le chauffage domestique dans la colonie. Par contre, les mémoires témoignent d’une sensibilité nouvelle à l’organisation rigoureuse et détachée des faits.
Sur la nature et la condition humaine, Boisseau tient un discours abstrait, dans le style éthicophilosophique qui fait une large place aux fables, aux maximes, aux proverbes ou à la prose sentencieuse en vogue à la fin du xviiie siècle et si bien illustrée en France par Nicolas de Chamfort, Pierre Choderlos de Laclos et Antoine Rivarol, ses contemporains. Peut-être avait-il lu les Maximes de La Rochefoucauld ou les Caractères de La Bruyère. Mais comment savoir si des extraits de ces auteurs et d’autres passages étaient simplement réimprimés dans les journaux de l’époque et glanés ou pastichés par l’apprenti notaire ? Dans ce cas, son intérêt pour les sciences naturelles et le discours moral ne serait pas vraiment le fruit de ses goûts profonds mais résulterait plutôt de la rencontre banale d’idées que le journal lui offrait régulièrement.
Aux premières élections à la chambre d’Assemblée du Bas-Canada en 1792, Nicolas-Gaspard Boisseau est élu député de la circonscription d’Orléans, qui comprend alors toute l’île du même nom. Toutefois, il abandonne la politique en 1796 ; c’est Jérôme Martineau* qui le remplace à titre de député. Dès lors, Boisseau se consacre presque exclusivement au notariat. Il pratique d’abord à Saint-Vallier, puis il s’installe dans la paroisse Saint-Thomas en 1799. Il est nommé commissaire chargé d’ériger une école dans la paroisse en 1803, commissaire autorisé à faire prêter le serment d’allégeance en 1812, puis commissaire des chemins du comté de Devon en 1817. Il mène donc une vie professionnelle à respectable distance des affaires publiques d’envergure nationale. De 1818 à 1820, il connaît des déboires financiers qui l’obligent à disposer d’une bonne partie de ses biens à Saint-Thomas et de 500 acres de terre dans le canton de Nelson, qu’il avait obtenues en 1804.
Le minutier de Nicolas-Gaspard Boisseau, contenant des actes passés entre 1791 et 1841, est conservé aux ANQ-Q, sous la cote CN3-7. Ses mémoires se trouvent aux APC, sous la cote MG 23, GV, 1.
ANQ-Q, CE1-12, 10 oct. 1765 ; CE2-7, 12 mars 1842 ; CE2-18, 11 janv. 1790.— APC, RG 68, General index, 1651–1841.— ASQ, Fichier des anciens.— La Gazette de Québec, 24 févr. 1791, 6 nov. 1817, 16 avril, 16 juill., 9 nov. 1818, 7 sept., 19 oct. 1820, 4 janv., 29 mars, 31 mai, 26 juill. 1821.— F.-J. Audet, « les Législateurs du B.-C. ».— F.-J. Audet et Fabre Surveyer, les Députés au premier Parl. du B.-C.— Desjardins, Guide parl.— Langelier, Liste des terrains concédés, 1199.— Wallace, Macmillan dict.— P.-G. Roy, la Famille Aubert de Gaspé (Lévis, Québec, 1907) ; la Famille Boisseau (Lévis, 1907).
Serge Gagnon, « BOISSEAU, NICOLAS-GASPARD (1765-1842) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/boisseau_nicolas_gaspard_1765_1842_7F.html.
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Auteur de l'article: | Serge Gagnon |
Titre de l'article: | BOISSEAU, NICOLAS-GASPARD (1765-1842) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
Année de la révision: | 1988 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |