BELL, ROBERT, arpenteur, journaliste et homme politique, né en 1821, probablement à Strabane dans le comté de Tyrone en Irlande, fils de Robert Bell et de Catherine Wallace ; en 1849, il épousa Margaret Waugh Buckham dont il eut deux filles ; décédé le 25 février 1873, à Hull (Qué.).
Encore enfant, Robert Bell émigra à New York avec ses parents et, en 1832, la famille alla s’établir sur une ferme près de Kemptville dans le Haut-Canada. Il fréquenta les écoles locales et, le 16 juin 1843, il était reçu arpenteur provincial.
Bell alla s’installer à Bytown (Ottawa) et ne tarda pas à s’y créer une solide réputation comme arpenteur. Au début, il travailla surtout dans la région immédiate de Bytown mais, en 1847, il entreprit un relevé hydrographique de la rivière Chalk et de ses bras. Cette même année, on le choisit pour diriger une équipe d’hommes qui devait établir le tracé d’une base qui irait de la rivière Madawaska, près du lac Bark, jusqu’à la limite nord-est du district de Home, près de l’emplacement de Bracebridge ; pendant ce temps, une autre équipe, sous la direction de John James Haslett, devait continuer le tracé en direction de l’est, jusqu’au district de Bathurst. En ordonnant ces relevés, le gouvernement comptait ouvrir à la colonisation les terres situées au-delà des districts de Midland, de Victoria et de Colborne, et Bell fut chargé « de choisir le meilleur emplacement pour y tracer la route ». En août 1847, il entreprit un voyage difficile et suivit un parcours que l’on devait appeler par la suite la ligne Bell ; en mars 1848, il était de retour à Bytown. Il était d’avis que la « majeure partie » des régions qu’il avait traversées (et dont la plupart constituent aujourd’hui le district de Muskoka et le comté de Haliburton) étaient « propres à la colonisation », mais il reconnaissait que « la nature extrêmement rocailleuse de l’ensemble de ce territoire constituait le seul obstacle majeur ».
C’est à nouveau dans la région située à l’ouest de Bytown que Bell effectua son dernier relevé topographique important. En novembre 1850, on lui demanda de faire le tracé d’une route qui relierait la rivière Outaouais, dans le canton de Horton, au lac Opeongo, route qui, on l’espérait, irait par la suite jusqu’à la baie Georgienne, près de l’embouchure de la rivière French, et ouvrirait ainsi « l’intérieur de la région de l’Outaouais et du lac Huron pour le plus grand profit des fermiers aussi bien que des bûcherons ». Au cours de cette expédition, qui dura de janvier 1851 à avril 1852, Bell découvrit « d’excellentes terres » et des régions « remarquablement bien boisées ».
Sans cesser pour autant de s’intéresser à l’arpentage, puisqu’il conseillait fréquemment le commissaire adjoint des Terres de la couronne, Andrew Russell, Bell s’était maintenant orienté vers le journalisme. En 1849, il avait acheté de Henry James Friel* et de John Gordon Bell le Packet de Bytown et il y exposait ses vues sur la façon d’encourager la colonisation des- terres incultes situées entre Bytown et le lac Huron et de stimuler le commerce du bois de Bytown et de la vallée de l’Outaouais. À partir de février 1851, son journal parut sous le nom d’Ottawa Citizen.
Bell entreprit également de promouvoir la construction d’un chemin de fer qui relierait Bytown à Prescott où il rejoindrait le chemin de fer d’Ogdensburg (New York). Les marchands de bois de la vallée de l’Outaouais auraient ainsi à leur disposition de plus grandes facilités de transport vers le marché américain dont l’importance ne cessait de croître. En 1850, Bell fut nommé secrétaire du comité provisoire du chemin de fer de Bytown à Prescott qui deviendra par la suite l’Ottawa and Prescott Railway Company. Lorsque la société ferroviaire fut constituée juridiquement en 1851, on le nomma secrétaire, et, plus que tout autre, il veilla à l’achèvement de cette voie ferrée. Par la suite, il fut président de la compagnie pendant de nombreuses années.
Bell fit partie du conseil municipal de Bytown pendant un certain temps et, en 1854, il se présenta à l’Assemblée législative, dans la circonscription de Russell, sous l’étiquette réformiste, mais il fut battu. Il subit une autre défaite en 1857, mais remporta finalement le siège en 1861. En chambre, il évoqua principalement la question des chemins de fer et se fit le porte-parole de la compagnie du Grand Tronc ; il prôna également la mise en exploitation de la région qui s’étendait à l’ouest d’Ottawa et appuya vigoureusement ceux qui voulaient faire d’Ottawa le siège du gouvernement. En 1866, il fut l’objet d’une vive controverse. Alexander Tilloch Galt* avait promis d’augmenter les privilèges en matière d’instruction de la minorité protestante du Canada-Est. Bien qu’il fût lui-même presbytérien, Robert Bell présenta un projet de loi qui garantissait aux catholiques du Canada-Ouest des avantages similaires, « une proposition tellement équitable », croyait-il, « que personne, fût-il catholique ou protestant, ne pouvait s’y opposer ». Cette proposition souleva les clameurs indignées des protestants du Canada-Ouest qui considéraient que le projet de loi de 1863, présenté par Richard William Scott*, constituait le dernier compromis possible sur la question des écoles séparées au Canada-Ouest. Egerton Ryerson*, surintendant de l’Instruction publique du Canada-Ouest, déclara que ce projet de loi était « le plus sournois, le plus injuste et le plus abominable qu’on pût imaginer ». Thomas Scatcherd et George Brown combattirent la mesure à l’Assemblée et Hector Langevin*, qui avait présenté le projet de loi de Galt, admit en privé : le projet de Bell « est le plus stupide, parlementairement parlant, qu’on puisse imaginer [...] ». Lorsque les députés de langue française du Canada-Est menacèrent de voter contre le projet de Galt si le projet de loi de Bell n’était pas aussi approuvé, et que les députés du Canada-Ouest menacèrent d’en faire de même si le projet de Bell était approuvé, les deux projets de loi furent retirés. Galt donna sa démission et quitta le ministère. Les protestants du Québec entrèrent dans la Confédération avec une protection assurée par la constitution, protection qu’on avait ajoutée lors de la conférence de Londres, à la fin de 1866, et « dont les clauses précises ne furent ni discutées, ni sanctionnées par le parlement ».
Bell se porta candidat pour représenter la ville d’Ottawa à la chambre des Communes, en 1867, mais il fut battu, le mauvais état de santé de sa femme l’ayant empêché de paraître sur les hustings. Il avait cédé la rédaction du Citizen à Isaac Boulton Taylor en 1861 et, en 1865, il lui vendit le journal. Cette même année, la Ottawa and Prescott Railway Company, dont il était toujours le président, fut contrainte à la liquidation par ses actionnaires. Découragé, Bell prit sa retraite. Après la mort de sa femme, en 1868, il alla vivre avec une de ses filles, à Hull, et « le monde n’entendit plus parler de lui » ; il y mourut à l’âge de 52 ans.
APC, FO 31, 1851, A1, Ottawa City, West Ward, 270.— Ontario, Department of Lands and Forests, Surveys office, carnets de levés, nos 86, 1 895, 2 202, 2 203 ; Instructions to land surveyors, du 6 nov. 1844 au 24 oct. 1861, pp.93–96, 171–173 ; carte n° 020–024, B38.— PAO, RG 1, A-I-6, 22, 24–29 ; A-V, 9.— Muskoka and Haliburton (Murray).— Packet (Bytown), 1849–1851.— Parliamentary debates (Province du Canada), 1861–1866.— R. W. Scott, Recollections of Bytown ; some incidents in the history of Ottawa (Ottawa, [1910]), 3–9.— Times (Ottawa), 26 févr. 1873.— Can. parl. comp., 1864.— Mitchell & Co’s county of Carleton and Ottawa city directory, for 1864–5 (Toronto, 1864).— « The Ottawa Citizen » directory of Ottawa [...] 1863 (Ottawa, s.d.).— Ottawa city and counties of Carleton and Russell directory, 1866–7, James Sutherland, compil. (Ottawa, 1866).— H. R. Cummings, Early days in Haliburton (Toronto, 1963), 3–4, 7–13, 178–180.— Andrée Désilets, Hector-Louis Langevin, un père de la confédération canadienne (1826–1906) (« Les cahiers de l’Institut d’histoire », 14, Québec, 1969), 153–155, 226.— J. L. Gourlay, History of the Ottawa valley, a collection of facts [...] events and reminiscences for over half a century (s.l., 1896), 124–126.— C. B. Sissons, Church & state in Canadian education ; [an historical study] (Toronto, 1959), 138–141., – Robert Bell, N° 40, Annual report of the Ont. Land Surveyors Assoc. (Toronto, 1925), 106–109.— William Bell, N° 38, Annual report of the Ont. Land Surveyors Assoc. (Toronto, 1923), 135–138.
Henri Pilon, « BELL, ROBERT (1821-1873) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/bell_robert_1821_1873_10F.html.
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Auteur de l'article: | Henri Pilon |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1972 |
Année de la révision: | 1972 |
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