WORSLEY, MILLER, officier de marine, né le 8 juillet 1791 à Gatcombe, Angleterre, cinquième des sept fils du révérend Henry Worsley et de Mary Dickonson ; le 3 octobre 1820, il épousa à Londres Johanna Evered Harris, et ils eurent au moins deux fils et une fille ; décédé le 2 mai 1835 en Angleterre.

Miner Worsley appartenait à l’une des branches cadettes d’une vieille et riche famille de l’île de Wight, en Angleterre. Il prit la mer à titre de volontaire de première classe le 29 juin 1803, devint midshipman le 19 mars 1805 et réussit son examen de lieutenant le 3 octobre 1810. Pendant la guerre de 1812, avec Robert Heriot Barclay*, Daniel Pring* et six autres officiers, il fut envoyé des Bermudes au Canada pour y défendre les Grands Lacs et le lac Champlain. Puis, le 12 juillet 1813, il fut promu lieutenant. Déjà, il avait connu en mer plusieurs engagements importants, tour à tour sur le Decade (36 canons), le Swiftsure (74 canons), le Pylades (16 canons), le Glatton (56 canons) et le Valiant (74 canons). C’est à bord du Swiftsure qu’il avait, avec Barclay, participé à la bataille de Trafalgar. Arrivé dans le Haut-Canada, il fut affecté sur le lac Ontario comme lieutenant en premier du Princess Charlotte (42 canons), et il se signala lors de l’attaque fructueuse que les Britanniques lancèrent le 6 mai 1814 contre Oswego, dans l’état de New York.

C’est au cours d’un épisode qui se déroula sur le lac Huron, plus tard la même année, que Worsley acquit sa renommée. S’étant vu confier la tâche peu enviable de remplacer le lieutenant Newdigate Poyntz, commandant d’un renfort naval destiné à Michillimakinac (Mackinac Island, Michigan) qui s’était mis à dos le lieutenant-colonel Robert McDouall*, commandant du poste, Worsley, accompagné de 20 marins, parcourut en juillet 1814 la route difficile qui reliait par terre York (Toronto) à la baie Nottawasaga. Là, il prit le commandement du schooner Nancy, qui avait été réquisitionné à la North West Company. Au cours de ce même mois-là, cinq navires américains et plus d’un millier d’hommes partirent pour Michillimakinac. Le 4 août, ils tentèrent de prendre le fort, mais sans succès. Le commandant de la force navale, le capitaine Arthur Sinclair, résolut alors de s’attaquer au Nancy dans l’espoir de couper la garnison de sa dernière source de ravitaillement.

En fait, le 1er août, Worsley avait mis le cap sur Michillimakinac avec des approvisionnements, mais McDouall le prévint à temps pour qu’il retourne à la baie Nottawasaga et construise un blockhaus temporaire. Attaqué le 14 août par trois navires (le Niagara, le Tigress et le Scorpion) et par environ 300 hommes, Worsley, qui ne pouvait compter que sur une cinquantaine de marins et d’Indiens et ne disposait que de quelques petits canons, résista aussi longtemps que possible puis rendit ses pièces d’artillerie inutilisables et se prépara à détruire le Nancy avant de se retirer dans les bois. Un obus qui fit sauter le magasin du blockhaus hâta la fin du navire en allumant un incendie qui se propagea rapidement et brûla le bâtiment jusqu’à la ligne de flottaison. Les Américains barrèrent ensuite l’embouchure de la rivière Nottawasaga afin d’empêcher toute communication entre York et Michillimakinac, mais les orages de la fin de l’été les forcèrent à lever leur blocus. Worsley chargea à bord de deux barques et d’un canot les réserves d’un dépôt resté intact et quitta subrepticement la rivière le 18 août. Il longea le bord du lac sur une distance de 360 milles et arriva à proximité de l’île St Joseph le 24 août. Worsley écrivit que durant le trajet ses hommes et lui avaient été « soumis à de grandes épreuves et à des privations de toutes sortes, n’ayant pour subsister que ce qu’[ils avaient pu] chasser ou pêcher ». Le 29 août, il était dans l’île, où il dut cacher les barques pour qu’elles ne soient pas visibles du Tigress et du Scorpion, seuls navires demeurés sur le lac, puis il continua sa route à bord du canot. Le lendemain, il arriva à Michillimakinac. Il persuada ensuite McDouall qu’une attaque lancée contre les deux navires, qui étaient séparés par une certaine distance, réussirait. Le 3 septembre, avec quatre bateaux et 90 hommes, dont quelques soldats du Royal Newfoundland Regiment commandés par le lieutenant Andrew H. Bulger*, Worsley captura le Tigress lors d’une attaque surprise, puis, le 6, il prit le Scorpion. Ces prises assurèrent aux Britanniques la maîtrise du lac Huron et leur permirent de se maintenir jusqu’à la fin de la guerre dans la région située au nord-ouest de la rivière Ohio.

Pour ses exploits, Worsley reçut de chaleureuses félicitations de ses supérieurs, dont McDouall, le lieutenant général Gordon Drummond* et le commodore sir James Lucas Yeo*. Par contre, l’Amirauté ne reconnut ses mérites que le 13 juillet 1815, en le faisant commander. Resté sur le lac Huron, Worsley avait contracté en octobre 1814 une maladie qui sévissait parmi les effectifs navals du Haut-Canada et il avait passé l’hiver à l’infirmerie au lac Érié, avec une demi-solde. Il retourna ensuite dans l’île de Wight et n’eut aucune affectation jusqu’en 1832. À ce moment-là, peut-être à cause de la requête qu’il avait présentée l’année précédente au roi Guillaume IV, il devint commander chargé d’inspecter la garde côtière et il occupa ce poste jusqu’en 1834, un an avant de mourir.

Miller Worsley, « officier compétent, actif et intelligent [...] au caractère conciliant », comme le décrivit Drummond, était admiré de tous mais, comme la guerre de 1812 n’était pas de celles que les Anglais aimaient rappeler, il reste peu de souvenirs de lui. Les Canadiens commémorèrent son fait d’armes quand, au milieu des années 1920, ils découvrirent dans la rivière Nottawasaga les vestiges du Nancy, autour desquels une île s’était formée. Le seul monument à la mémoire de Worsley est le musée qui se trouve sur cette île et qui abrite le squelette du navire qu’il défendit avec tant d’acharnement.

W. A. B. Douglas

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W. A. B. Douglas, « WORSLEY, MILLER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/worsley_miller_6F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
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