VOGT, AUGUSTUS STEPHEN, organiste, directeur de chorale, professeur de musique, compositeur et auteur, né le 14 août 1861 à Washington, Haut-Canada, fils de John George Vogt et de Marianna Zingg ; le 19 août 1891, il épousa à Bowmanville, Ontario, Georgia Adelaide McGill (décédée le 1er novembre 1922), et ils eurent une fille et un fils ; décédé le 17 septembre 1926 à Toronto.

Le père d’Augustus Stephen Vogt était Allemand et était venu dans le Haut-Canada pour échapper à l’agitation révolutionnaire de 1848 ; sa mère, Suisse, avait immigré avec ses parents dans les années 1830. Vogt grandit à Elmira, en Ontario, dans un foyer où les enfants adoptèrent le luthéranisme de leur mère. Leur père, catholique, était hôtelier et construisait également des orgues ; il en fit un pour l’église luthérienne St James, située dans sa localité et où Augustus Stephen fut nommé organiste à l’âge de 12 ans. En 1878, après avoir étudié à Hamilton, ce dernier devint organiste de l’église First Methodist à St Thomas. Il poursuivit sa formation en musique au New England Conservatory of Music, à Boston, de 1881 à 1884, puis au conservatoire de Leipzig, en Allemagne, de 1885 à 1888, époque pendant laquelle le jeune compositeur doué composa un prélude et une fugue pour orgue. À son retour à Toronto en 1888, il s’imposa en tant qu’organiste et directeur de chorale à la prestigieuse église baptiste Jarvis Street, poste qu’il occuperait jusqu’en 1906. Il est possible que sa conversion à la foi baptiste ait entraîné un désaccord entre lui et son père. Actif en tant que secrétaire d’un collège d’organistes qui exista peu de temps, de 1889 à 1892, et comme professeur de piano, d’orgue et de théorie au Toronto College of Music [V. Frederick Herbert Torrington*], il obtint en 1892 un poste semblable à ce dernier au Toronto Conservatory of Music (Royal Conservatory of Music). Il serait nommé membre du Royal College of Organists.

Tout au long de sa carrière, Vogt dut se débattre contre les problèmes à caractère politique du milieu musical de Toronto. Le conservatoire se chargeait de l’évaluation de ses étudiants et les membres du personnel qui agissaient comme examinateurs recevaient des honoraires. À la fin des années 1890, Vogt ainsi que d’autres personnes s’opposèrent à l’utilisation au Canada des examens de l’Associated Board of the Royal Academy of Music and the Royal College of Music de Londres. Ce genre d’évaluation externe n’était pas nécessaire, disaient-ils, en s’offusquant de ce « trafic de diplômes ». En réponse aux insultes de Vogt, le représentant local de l’Associated Board, Samuel Aitken, rétorqua en 1899 que, si le conservatoire avait « exploité » Vogt en ne lui versant que la moitié de ses honoraires, « il [n’aurait] peut-être pas [été] en train de se construire un palace dans la rue Bloor ». De plus, il trouvait amusant qu’« un gentleman dont le nom s’épel[ait] V-O-G-T » s’indigne de ces examens administrés « par des étrangers ». Vogt, qui se décrivait lui-même comme « un Canadien d’origine et un fidèle sujet », répliqua que le président de l’Associated Board, le prince de Galles, avait un nom de famille (Saxe-Cobourg-Gotha) « qui [était] tout aussi associé à des mets délicats comme la choucroute, le [fromage] limburger et la [bière] lager ». Malgré cette opposition, les examens de l’Associated Board se poursuivirent pendant plusieurs décennies.

Lorsque Vogt était étudiant à Leipzig, il allait régulièrement écouter les chants de la chorale de la célèbre église Saint-Thomas. À Toronto, il accordait beaucoup d’importance aux répétitions et il s’efforça d’atteindre ainsi l’excellence dans son travail avec le chœur de chant sans accompagnement qu’il dirigeait à l’église baptiste Jarvis Street, ce qui accrut sa réputation locale de directeur de chorale. En 1894, il fonda le Toronto Mendelssohn Choir (qui, au début du xxie siècle, est le chœur de voix mixtes le plus ancien du Canada) et, grâce à son travail avec cette formation, il serait acclamé partout dans le monde. Les 75 premiers membres venaient en grande partie du chœur de son église et le répertoire était principalement chanté a cappella. Au concert d’inauguration qui eut lieu au Massey Music Hall le 15 janvier 1895, il y avait 167 choristes, dont 106 femmes, toutes célibataires. Parmi les membres de longue date se trouvait la femme de Vogt, qu’il avait dirigée dans une chorale avant leur mariage. Vogt mit fin aux activités du Mendelssohn Choir en 1897, mais ce fut pour reformer le groupe, astucieusement, en 1900 ; en vertu de sa nouvelle structure, le chœur serait dissous tous les ans et, pour en conserver l’excellence, chaque choriste devrait auditionner de nouveau. Vogt élargit le répertoire pour y inclure du chant avec orchestre et il présenta ces pièces à l’occasion de festivals annuels, à partir de 1902. Le chœur travailla en collaboration avec le Chicago Orchestra et le Pittsburgh Orchestra, entre autres, et les tournées qu’il effectua aux États-Unis étaient sans précédent parmi toutes les formations musicales canadiennes. Le Mendelssohn Choir gagna rapidement les louanges de la critique. « Le chant choral est une branche de l’art dans laquelle les Canadiens semblent exceller », expliqua Vogt au Musical Times de Londres. Ernest Alexander Campbell MacMillan* fit remarquer plus tard dans une critique que « ce merveilleux instinct de la couleur musicale qui ne manquait jamais d’être présent dans les représentations de Vogt combinait un sens exceptionnel du rythme à une sensibilité presque mystérieuse à la sonorité de la voix ».

En 1913, après un voyage d’un an en Europe, Vogt succéda à Edward Fisher* comme directeur musical du Toronto Conservatory, alors situé dans la rue College. Il quitta le Mendelssohn Choir en 1917 à cause des exigences de ses nouvelles tâches. Aussi méticuleux et visionnaire comme administrateur qu’il l’était comme directeur de chorale, il fit augmenter le nombre d’étudiants et le nombre de centres locaux qui administraient les examens du conservatoire pour différents niveaux partout au Canada. Vogt se rendit dans l’Ouest en tant qu’évaluateur jusqu’en 1921. En 1914, un programme en interprétation donné au conservatoire même fut créé. Parmi les professeurs doués qu’attira Vogt se trouvait James Healey Willan*, d’abord comme responsable du volet théorie, puis comme directeur adjoint. Avec l’aide de sir Byron Edmund Walker, qui présidait le conseil du conservatoire et celui de la University of Toronto – laquelle remit à Vogt un doctorat en musique en 1906, honneur qui lui était cher –, Vogt forgea de bonnes relations avec l’université ; il devint le premier doyen de sa faculté de musique en 1918 tout en étant directeur du conservatoire. Pendant son mandat, le conservatoire fut intégré à l’université à la suite d’une loi provinciale adoptée en 1919 ; en 1924, avec l’approbation de l’université, Vogt prit en charge une autre école locale reconnue, la Canadian Academy of Music.

Au delà de son travail de directeur de chorale et d’administrateur, Vogt écrivit des articles pour la revue Musical Canada, publiée à Toronto et dirigée par Edwin Rodie Parkhurst, et pour le magazine Musical Life and Arts de Winnipeg. Il fut critique de musique pour le Saturday Night de Toronto dans les années 1890 sous le pseudonyme de Moderato et il fournit d’autres textes et lettres en 1891, en 1912–1913 et en 1922. Ses compositions pour chorale comprenaient An Indian lullaby pour voix de femmes et Crossing the bar, œuvres produites en 1906, ainsi que The Sea, en 1911 ; Vogt effectua également des arrangements pour The Lord’s Prayer et pour Rule Britannia. Il est connu surtout pour son ouvrage intitulé Modern pianoforte technique, paru à Toronto en 1900, son Standard anthem book, largement utilisé et publié en deux volumes, à Toronto, entre 1894 et environ 1909, et un livre écrit en collaboration avec Willan et intitulé School and community song book, paru à Toronto en 1922.

En 1918, Augustus Stephen Vogt commença à souffrir de troubles cardiaques. Quatre ans plus tard, sa femme mourut d’un cancer du sein et du foie. Néanmoins, Vogt continua d’occuper ses deux postes exigeants, mais, ainsi qu’il le dit à sa fille en août 1926, « la nature quasi meurtrière de [son] travail [le] tu[ait] presque ». Le mois suivant, tandis qu’il souffrait de l’influenza, il mourut d’une crise cardiaque. En 1929, un vitrail commémoratif commandé par le Mendelssohn Choir fut placé dans l’église anglicane St Paul à Toronto, que Vogt avait fréquentée pendant de nombreuses années.

Gaynor G. Jones

AO, RG 22-305, nº 55454 ; RG 80-5-0-188, nº 8478 ; RG 80-8-0-858, nº 6219 ; RG 80-8-0-1018, nº 6042.— Univ. of Toronto, Faculty of Music, Rare Books and Special Coll., MUS, MSS pam 004 (Vogt papers).— UTA, A1973-0026/487(64).— Canadian Statesman (Bowmanville, Ontario), 19, 26 août 1891.— Globe, 18 sept. 1926.— Toronto Daily Star, 18 sept. 1926.— An account of the Canadian protest against the introduction into Canada of musical examinations by outside musical examining bodies, Canadian Protesting Committee, édit. (Toronto, 1899).— Samuel Aitken, The case of the Associated Board ([s.l., 1899 ?]).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— Canadian who’s who, 1910.— Dominion Musical Journal (Toronto), nouv. sér., 1 (1891–1892) : 19, 25.— Encyclopedia of music in Canada (Kallmann et al.), 1378s.— G. G. Jones, « “Exam wars” and the Toronto territorial connection », Canadian Univ. Music Rev. (Toronto), 11 (1991), nº 2 : 51–67.— National encyclopedia of Canadian biography, J. E. Middleton et W. S. Downs, édit. (2 vol., Toronto, 1935–1937).— Saturday Night, 1891–1926.— Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell), 1.— Who’s who in Canada, 1925–1926.

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Gaynor G. Jones, « VOGT, AUGUSTUS STEPHEN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/vogt_augustus_stephen_15F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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