TOURNOIS, JEAN-BAPTISTE, prêtre, jésuite, missionnaire, né le 1er janvier 1710 à Orchies, dans les Flandres (aujourd’hui en France), décédé dans sa ville natale après 1761.

Jean-Baptiste Tournois entra dans la Compagnie de Jésus à Tournai (Belgique) le 27 septembre 1727. Il arriva à Québec en juin ou juillet 1741 et rejoignit presque aussitôt le père Luc-François Nau à la mission du Sault-Saint-Louis (Caughnawaga, Québec), où les sœurs Desauniers, Marie-Madeleine, Marie-Anne et Marguerite, dirigeaient un magasin depuis 1726. On les soupçonnait de pratiquer la contrebande avec les Anglais d’Albany, sous la couverture d’un commerce honnête avec les Indiens. En 1742, le ministre de la Marine, Maurepas, ordonna la fermeture de leur magasin ; deux ans plus tard, il réitera son ordre aux autorités de la colonie.

En 1744, le père Tournois qui, depuis son arrivée, tolérait ce commerce fut nommé supérieur de la mission, remplaçant le père Nau qui retournait en France. Le nouveau supérieur conserva la même attitude car il jugeait préférable que les Indiens, pour acheter ce dont ils avaient besoin, n’aient pas à aller à Montréal, où ils trouvaient facilement de l’eau-de-vie. En 1745, Maurepas ordonna d’expulser de Sault-Saint-Louis les demoiselles Desauniers et indiqua que la volonté du roi était de voir ces commerçantes se retirer à Montréal ou à Québec. Deux ans plus tard, les demoiselles Desauniers pratiquaient toujours leur commerce à Sault-Saint-Louis et le gouverneur La Galissonière [Barrin] toléra durant son mandat leur présence dans la mission. C’est avec l’arrivée du nouveau gouverneur La Jonquière [Taffanel], à l’automne de 1749, qu’une enquête établit, à la satisfaction du gouverneur, la véracité des accusations contre les demoiselles Desauniers.

Le père Tournois s’inquiéta de cette situation et obtint du gouverneur pour ses Indiens une audience, durant laquelle ils affirmèrent leur droit à la traite avec les colonies anglaises. La Jonquière ne put que rabrouer les Indiens et ces derniers lui affirmèrent que le père Tournois leur avait dicté leurs paroles et que les demoiselles Desauniers, de concert avec le jésuite, dirigeaient ce commerce de contrebande. Lors d’une visite à la mission, le gouverneur La Jonquière constata qu’il s’y trouvait une grande quantité de marchandises anglaises, et le père Tournois lui expliqua que ces marchandises étaient beaucoup moins chères et de bien meilleure qualité que celles qui venaient de France. La Jonquière admit le bien-fondé de cet argument, mais en mai 1750 il fit venir à Québec le père Tournois et, un an plus tard, le força à repasser en France, avec les demoiselles Desauniers, sur le Chariot Royal.

La cour soutint La Jonquière, mais lui reprocha d’avoir donné trop d’éclat à cette affaire et surtout de ne pas avoir su convaincre le missionnaire de faire cesser le commerce illicite au Sault-Saint-Louis. De plus, on lui reprocha d’avoir retiré le missionnaire de sa mission sans consulter Mgr de Pontbriand [Dubreil] et le père Gabriel Marcol, supérieur des jésuites.

Le père Tournois séjourna deux ans à Cambrai. En 1753, il se rendit à Valenciennes et, en 1761, quitta cette ville lors des événements qui précédèrent la suppression de la Compagnie de Jésus en France. Il se réfugia alors à Orchies où il mourut à une date inconnue. En dehors de l’incident du Sault-Saint-Louis, le père Tournois avait laissé le souvenir d’un homme au caractère fort, capable de compréhension, mais aussi de fermeté à l’égard des Indiens. Ses successeurs ne donnèrent pas satisfaction et, en 1754, le gouverneur Duquesne* demanda en vain que l’on renvoie au Canada le père Tournois, celui qui avait « le mieux mené la mission du Sault Saint-Louis ».

Jean-Marie Leblanc

AN, Col., B, 75, f.57 1/2 ; 78, f.20 ; 81, ff.32. 41 1/2 ; 85, f.3 ; 93, ff.19–20 ; 94, f.32 ; 95, f.31 ; Col., C11A, 95, ff.163–182.— JR (Thwaites), LXIX : 56–58, 76, 236, 296, 304 ; LXXI : 174s. Les malignités du sieur de Courville, BRH, L (1944) : 72. E. J. Devine, Historic Caughnawaga (Montréal, 1922), 239s., 248–251. Lanctot, Histoire du Canada, III : 115s. J.-G. Forbes, Saint-François-Xavier de Caughnawaga, BRH, V (1899) : 137.

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Jean-Marie Leblanc, « TOURNOIS, JEAN-BAPTISTE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/tournois_jean_baptiste_3F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
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