TANTOUIN (Pitantouin ou Tantoin) DE LA TOUCHE, LOUIS, commissaire de la marine au Canada, né vers 1662 en un lieu inconnu, inhumé à Juilley (Manche) le 9 octobre 1722 âgé d’environ 60 ans.

On ne possède aucun renseignement sur les débuts de sa carrière et la date de son arrivée au Canada est inconnue. Nommé garde-magasin à Montréal par l’intendant Bochart de Champigny en 1686, il fut promu commissaire de la marine le 1er juillet 1690 en remplacement de Mathieu Gaillard*.

Placés sous les ordres directs de l’intendant, les commissaires exerçaient des fonctions déterminées par le titre VIII de l’ordonnance de marine de 1689. Ils devaient passer régulièrement la revue des troupes pour établir les rôles de présence nécessaires au paiement de la solde – car n’étaient payés que les officiers et les soldats présents au corps – veiller à la distribution des effets d’habillement, recevoir les marchandises destinées au service et en assurer la conservation, surveiller la gestion des magasins, veiller à ce que les capitaines paient régulièrement la solde et recevoir éventuellement les plaintes des mécontents. Au Canada, le commissaire était de plus chargé de la surveillance de la traite du castor par congés accordés par le gouverneur général et il devait s’assurer de la bonne application des textes qui réglaient cette matière délicate. Les personnes qui obtenaient de tels congés devaient, avant de partir, déclarer au commissaire la valeur des marchandises qu’ils emportaient.

De telles fonctions de contrôle dans des domaines où les fraudes étaient fréquentes ne pouvaient manquer de provoquer des conflits entre commissaires et officiers. La Touche, qui semble avoir été fort consciencieux, n’y échappa pas. Le 21 septembre 1692, Champigny le note comme « s’acquittant bien de son devoir, estant plein d’affection, de soin et de fidélité » et sollicite une augmentation de son traitement de 1 200ª avec lequel il ne peut « supporter la dépense qu’il est obligé de faire et particulièrement dans ses courses ». La Touche résidait le plus souvent à Montréal, où il fut, à partir de 1694, subdélégué de l’intendant, et devait donc se déplacer pour visiter les diverses garnisons du pays.

L’exactitude avec laquelle il remplissait ses fonctions lui valut en 1697 un violent conflit avec le major des troupes, Auger de Subercase, qui tolérait la présence de passe-volants dans les compagnies ou faisait compter des soldats absents. La Touche constata que les officiers se livraient à de multiples supercheries, faisaient subir diverses brimades aux habitants qui s’adonnaient à la traite des fourrures et s’appropriaient la solde de leurs troupes. Il se plaignait de l’indiscipline des officiers : « on doute beaucoup en ce pays que les ordonnances du roy y doivent estre observées et prises au pied de la lettre autant que dans le royaume ». En 1698, il fait saisir et vendre à Montréal des canots chargés de marchandises qui passaient en fraude pour le compte de Lamothe Cadillac [Laumet] et * des difficultés avec le gouverneur de Callière « qui se mesle de la justice et de la police comme du fait de guerre pendant que je suis à Montréal subdélégué de M. l’intendant et qu’il y a le juge ordinaire pour la rendre ».

Tous les jugements sont unanimes en faveur de La Touche. Le 15 octobre 1698, Buade* de Frontenac et Champigny louent son exactitude et se félicitent qu’il se refuse à passer dans les revues les domestiques des capitaines. Le contrôleur général Le Roy de La Potherie écrit : « M. de la Touche, cy-devant commissaire à Montréal, est un homme irréprochable. Sa conduite a été très judicieuse. Il a eu souvent des discussions avec M. de Callières, mais quand on a de la droitesse, on est quelquefois exposé aux caprices de ses supérieurs ».

Le 8 novembre 1700, Champigny sollicite pour La Touche une récompense en raison des services rendus lors de la réception des envoyés anglais à Montréal. Vers la même époque, ce commissaire demande à rentrer en France pour y servir dans un port car sa longue absence a dérangé ses affaires ; il est remplacé par François Clairambault d’Aigremont. La Touche est alors nommé commissaire à Rochefort le 8 juin 1701 mais il y reste peu de temps car, l’année suivante, les charges de commissaires de la marine sont rendues vénales et La Touche, n’ayant pu réunir les 30 000# nécessaires pour acheter la sienne, est congédié le 12 octobre 1702. Il jouissait pourtant de quelque bien car il prêta diverses sommes pendant son séjour au Canada et laissa en partant le soin de ses affaires au notaire Pierre Raimbault.

On ne sait rien de la fin de sa carrière sinon qu’il devint secrétaire des finances du duc de Berry, puis se retira en Normandie. Il avait épousé Madeleine Girard et ils eurent plusieurs enfants.

Étienne Taillemite

AN, Col., B, 20, ff.102, 234 ; 22, ff.85v., 104 ; Col., C11A, 12, ff.60, 283, 350 ; 15, ff.50v., 128, 159–167 ; 16, ff.15, 88, 108 ; 17, ff.105, 107 ; 18, ff.42, 107, 191 ; 19, f.19, Marine, C2, 55.— Correspondance de Frontenac (1689–1699), RAPQ, 1928–29 : 333, 353, 377.— Un mémoire de Le Roy de la Potherie sur la Nouvelle-France adressé à M. de Pontchartrain, 1701–1702, BRH, XXII (1916) : 215.— É.-Z. Massicotte, Louis Tantouin ou Pitantouin de la « Touche », BRH, XXV (1919) : 127s.— P.-G. Roy, Daniel Auger, sieur de Subercase, BRH, XVI (1910) 177 ; Biographies canadiennes, BRH, XXI (1915) 217–221.

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Étienne Taillemite, « TANTOUIN (Pitantouin, Tantoin) DE LA TOUCHE, LOUIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/tantouin_de_la_touche_louis_2F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1969
Année de la révision:    1991
Date de consultation:    28 novembre 2024