SURIA, TOMÁS DE, artiste, né en mai 1761 à Madrid, fils de Francisco Suria et de Feliciana Lozana ; le 15 décembre 1788, il épousa Maria Josefa Dominguez de Mendoza ; décédé en 1835 à Mexico.
Tomás de Suria étudia à l’Académie royale San Fernando de Madrid. À 17 ans, il s’embarqua pour la Nouvelle-Espagne en compagnie de son mentor, Jerónimo Antonio Gil. À Mexico, il devint graveur à l’hôtel de la Monnaie et acquit de son vivant une certaine renommée en tant que créateur de médaillons. En 1778, il participa avec Gil à la fondation de l’Académie royale San Carlos, où il œuvra comme artiste et par la suite comme professeur.
En 1791, marié et père de famille, Suria fut choisi pour faire partie d’une expédition espagnole qui, sous la direction d’Alejandro Malaspina*, devait faire le tour du monde. Il était engagé à titre provisoire pour exécuter des travaux artistiques sur la côte nord-ouest du Pacifique. Esprit aventureux et doué des qualités requises par Malaspina, Suria fut choisi par le vice-roi Revilla Gigedo parce qu’il était le meilleur candidat disponible en Nouvelle-Espagne. Malgré les vigoureuses protestations de sa femme, qui présenta vainement ses doléances à Revilla Gigedo, Suria décida de partir et, ayant obtenu une forte hausse de salaire et d’autres avantages financiers, il alla rejoindre Malaspina à Acapulco, où Tadeo Haenke* et les autres scientifiques de l’expédition prenaient les dispositions nécessaires pour se rendre sous les latitudes nordiques.
Lorsqu’il arriva à Acapulco le 16 février, Suria se mit à tenir un journal, dont une partie a été conservée. Ce texte, rédigé de sa propre initiative, renferme des informations qu’on ne trouve pas dans les comptes rendus officiels de l’expédition (qui débuta le 1er mai) et on y reconnaît facilement l’œuvre d’un marin d’eau douce. Il contient également les esquisses de plusieurs dessins qu’il exécuta entre l’Alaska et la Californie.
Sur la côte nord-ouest, Suria accomplit son premier travail artistique à l’anse Mulgrave (baie Yakutat, Alaska), où il prit comme sujet les Indiens locaux, les Tlingits. De là, les voyageurs suivirent le littoral vers le sud et, à la mi-août, ils étaient rendus à la baie Nootka (Colombie-Britannique). À cet endroit, Suria exécuta des dessins représentant la colonie espagnole, les chefs indiens Muquinna*, Natsape et Tlupananulg avec leurs grands chapeaux en osier, ornés de scènes de chasse à la baleine, et d’autres Nootkas, ainsi qu’un petit croquis du mouillage qui, dans la baie, était convoité par plusieurs pays [V. Juan Francisco de la Bodega* y Quadra]. En outre, Suria consigna dans son journal d’importantes données anthropologiques sur les coutumes locales et la structure sociale des Nootkas. Sous sa direction, Manuel José Antonio Cardero*, mousse qui faisait partie de l’expédition, dessina des illustrations zoologiques, peignit des coutumes indigènes et fit des croquis de paysages.
Pendant le séjour des voyageurs dans la baie Nootka, Suria accompagna un groupe qui remonta l’inlet Tahsis dans deux petites embarcations. On connaît mal le résultat de cette excursion, toutefois, car le journal de Suria s’arrête au moment où elle commençait. Son travail artistique n’était cependant pas terminé : il fit par la suite un croquis du chef Tlupananulg à la barre de son grand canot de guerre ; il représenta également le chef qui exécutait une danse sur la plage à l’intention des Espagnols.
Les voyageurs étaient de retour à Acapulco le 16 octobre, et Suria, qui avait rapporté une grande quantité d’œuvres, reprit ses occupations à l’hôtel de la Monnaie et à l’Académie royale San Carlos. Ses dessins achevés portent l’inscription latine « Suria fecit ». Malaspina, qui avait été son commandant durant presque sept mois, commenta son travail en ces termes : « nos œuvres nombreuses et très intéressantes ont été remises au musée royal, car Don Tomás Suria a représenté avec une très grande fidélité à la nature tout ce qui était digne de l’art du graveur, assurant ainsi une meilleure compréhension de la narration de ce voyage ».
Pendant le reste de sa vie, Tomás de Suria travailla comme graveur, professeur et trésorier, et il occupa de temps à autre un poste peu élevé de fonctionnaire. Avec une vue qui baissait, il exécuta sa dernière œuvre artistique en 1834 et mourut à Mexico l’année suivante à l’âge de 74 ans.
Le journal de Tomás de Suria est conservé à la Yale Univ. Library, Beinecke Rare Book and ms Library (New Haven, Conn.) sous Western Americana ms, no 464, et a été publié sous le titre de « Journal of Tomás de Suria of his voyage with Malaspina to the northwest coast of America in 1791 », H. R. Wagner, trad. et édit., Pacific Coast Hist. Rev. (Glendale, Calif.) ; 5 (1936) : 234–276 ; puis en publication distincte sous le même titre, D. C. Cutter, édit. (Fairfield, Wash., 1980). Une édition espagnole a paru sous le titre de Tomás de Suria y su viaje con Malaspina, 1791, Justino Fernández, édit. (Mexico, 1939). Le Museo Naval (Madrid) ainsi que le Museo de America (Madrid) possèdent des œuvres de Suria.—
D. C. Cutter, Malaspina in California ([San Francisco], 1960).— J. F. Henry, Early maritime artists of the Pacific northwest coast, 1741–1841 (Seattle, Wash., 1984.— Carmen Sotos Serrano, Los pintores de la expedición de Alejandro Malaspina (2 vol., Madrid, 1982).— D. C. Cutter, « Early Spanish artists on the northwest coast », Pacific Northwest Quarterly (Seattle, Wash.), 54 (1963) : 150–157.— D. C. Cutter et Mercedes Palau de Iglesias, « Malaspina’s artists », El Palacio (Santa Fe, N.Mex.), 84 (1976), no 4 : 19–27.
Donald C. Cutter, « SURIA, TOMÁS DE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/suria_tomas_de_6F.html.
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Auteur de l'article: | Donald C. Cutter |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
Année de la révision: | 1987 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |