Titre original :  mike sokolowski | Destination Winnipeg

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SOKOLOWISKI (Sokolowski), MIKE, victime de violence au cours d’une grève ; marié et père de trois enfants ; décédé le 21 juin 1919 à Winnipeg.

On ne connaît presque rien de Mike Sokolowiski à part les quelques détails (parfois contradictoires) rapportés dans les journaux de Winnipeg après sa mort. Sur une photographie publiée dans le Winnipeg Tribune, on le voit proprement vêtu, avec une moustache noire bien taillée et une crête de cheveux noirs. Il est trapu ; son âge se situe à la fin de la vingtaine ou au début de la trentaine. Le journal indique qu’il était « de naissance autrichienne » ; même en supposant que ce soit exact, ce renseignement est vague puisque l’empire austro-hongrois comprenait de nombreux groupes ethniques à la fin du xxe siècle. Sokolowiski aurait été domicilié au 552 de l’avenue Henry (rue Henry), à l’extrémité nord de Winnipeg, mais le seul nom correspondant à cette adresse dans l’annuaire de la ville de 1919 est celui d’une dame Sodosky. Le Tribune rapporte également qu’il portait un insigne du service de santé ; cependant, il ne figurait pas dans les registres d’emploi de ce service. D’autres articles de journaux disent qu’il était ferblantier. Si vraiment Sokolowiski était en train de lancer une pierre aux policiers, comme on le prétendit, alors il avait prévu que la manifestation tournerait mal puisque dans la rue Main, en juin 1919, il n’y avait guère de pierres qui pouvaient servir de projectiles. Quoi qu’il en soit, on ignore s’il était un gréviste, un sympathisant ou un simple spectateur.

L’affrontement au cours duquel mourut Sokolowiski fut le point culminant des longues semaines d’agitation ouvrière que l’on appelle d’ordinaire la grève générale de Winnipeg. Le mouvement avait commencé au début de mai parmi les ouvriers de la construction et les métallurgistes. Il s’étendit le 13 mai lorsque le Trades and Labor Council annonça qu’un référendum donnait 11 000 votes en faveur d’une grève générale et seulement 500 contre. Dès le 15 mai, dans toute la ville, des milliers d’ouvriers quittaient le travail, la plupart afin de participer à la « grève générale de solidarité » organisée pour appuyer les premiers grévistes. Comme les grèves générales étaient chose nouvelle en 1919, les classes dominante et moyenne de Winnipeg se méfiaient beaucoup : elles croyaient assister à la première étape d’une révolution. Pour y faire face, elles organisèrent le Citizens’ Committee of One Thousand, dont le mandat initial était d’assurer le maintien des services municipaux. Les autorités fédérales, craignant aussi que l’ordre social soit menacé, s’empressèrent de critiquer la grève et de prendre des mesures contre elle.

Au début, la grève fut dirigée par les chefs traditionnels du mouvement ouvrier de Winnipeg ; la majorité d’entre eux avaient été formés dans les syndicats britanniques et en avaient appris les tactiques. Cependant, Winnipeg était un endroit particulièrement explosif en 1919, en partie à cause de la présence, à l’extrémité nord, de milliers d’immigrants nés dans des territoires appartenant à des ennemis du Canada pendant la Première Guerre mondiale. Quelques-uns de ces immigrants étaient membres d’organismes radicaux et la plupart avaient connu une forme quelconque de répression gouvernementale pendant la guerre. Sokolowiski était, semble-t-il, l’un de ces « étrangers ». Un autre facteur aggravait les tensions : la présence d’un fort contingent d’anciens combattants canadiens qui protestaient depuis quelque temps contre les étrangers et commencèrent à la fin de mai à manifester en faveur des grévistes. Par crainte des sympathies de la police municipale envers les travailleurs en grève, les autorités la remplacèrent le 9 juin par une police spéciale qui provoqua une émeute le lendemain par ses méthodes répressives. Ces agents spéciaux seraient bientôt remplacés en première ligne par la Gendarmerie royale à cheval du Nord-Ouest, qui avait été postée dans la ville dès le début de l’agitation ouvrière.

Paradoxalement, le 21 juin, la grève officielle était déjà sur son déclin. Quatre jours plus tôt, le gouvernement fédéral avait ordonné que les chefs présumés soient arrêtés pour sédition. Les anciens combattants organisèrent la manifestation du 21 juin pour protester contre les arrestations. Les gendarmes foncèrent dans la foule, rue Main, en faisant tournoyer des bâtons de baseball et en tirant trois salves. Seul Mike Sokolowiski mourut sur-le-champ : on rapporte qu’il fut tué d’une balle dans la tête. Steve Schezerbanowes, atteint de plusieurs balles, mourrait plus tard de gangrène. En tout, il y eut 27 blessés et 94 arrestations. D’innombrables blessures mineures ne furent jamais signalées. La grève générale de Winnipeg prit fin officiellement le 26 juin à onze heures du matin, mais elle laissa des séquelles. Des rancunes subsistèrent dans la ville, une série de procès s’engagea contre les meneurs et le département de l’Immigration prit d’autres mesures contre les étrangers.

J. M. Bumsted

Manitoba Free Press, 23 juin 1919.— Winnipeg Tribune, 23 juin 1919.— Annuaire, Winnipeg, 1919.— D. H. Avery, « Ethnic and class tensions in Canada, 1918–20 : Anglo-Canadians and the alien worker », dans Loyalties in conflict : Ukrainians in Canada during the Great War, Frances Swyripa et J. H. Thompson, édit. (Edmonton, 1983), 79–98 ; « The radical alien and the Winnipeg General Strike of 1919 », dans The west and the nation ; essays in honour of W. L. Morton, Carl Berger et Ramsay Cook, édit. (Toronto, 1976), 209231.— D. J. Bercuson, Confrontation at Winnipeg : labour, industrial relations, and the general strike (Montréal et Londres, 1974).— J. M. Bumsted, The Winnipeg General Strike of 1919 : an illustrated history (Winnipeg, 1994).— D. C. Masters, The Winnipeg General Strike (Toronto, 1950).— M. K. Mott, « The « foreign peril » : nativism in Winnipeg, 19161923 » (mémoire de m.a., Univ. of Manitoba, Winnipeg, 1970).— Winnipeg 1919 : the strikers’ own history of the Winnipeg General Strike, Norman Penner, édit. (Toronto, 1973).

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J. M. Bumsted, « SOKOLOWISKI (Sokolowski), MIKE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/sokolowiski_mike_14F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
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