SMITH, JOHN, ministre presbytérien, né le 19 janvier 1801 à Cromarty, Écosse, fils du révérend Robert Smith et d’Isabella Gair Rose ; le 30 août 1838, il épousa à Bytown (Ottawa) Jane Morson, et ils eurent six enfants ; décédé le 18 avril 1851 dans le canton de Beckwith, Haut-Canada.
John Smith était le sixième d’une famille de dix enfants et, suivant les traces de son père, il fit ses études au King’s College d’Aberdeen, en Écosse, de 1814 à 1819. Homme timide, paisible et dévot, il donna des leçons particulières pendant qu’il étudiait la théologie et devint par la suite l’assistant du révérend William Mackay, qui exerçait son ministère à Dunoon et qui était à l’époque un des plus grands spécialistes du gaélique. Smith apprit cette langue de Mackay, acquérant ainsi une compétence qui, plus tard, allait attirer l’attention des autorités religieuses à la recherche d’un pasteur capable de desservir une petite colonie perdue du Haut-Canada.
Le canton de Beckwith avait été colonisé en 1818 par des Écossais venus de Laggan (région de Highland). Au début de l’année suivante, ceux qui parmi ce groupe étaient de religion presbytérienne écrivirent au gouverneur, le duc de Richmond [Lennox*], qui résidait à Québec, pour qu’il les aide à recruter et à entretenir un ministre pouvant prêcher en gaélique. N’ayant pas obtenu de réponse, ils se tournèrent vers le révérend William Bell, ministre presbytérien qui œuvrait non loin de l’établissement, et ils le prièrent d’adresser en leur nom une requête en Écosse. Bell, qui était un scissionniste de l’Église d’Écosse, accéda à leur désir et écrivit à l’Associate Synod of Scotland. En 1822, au moment où les fidèles avaient de nouveau perdu tout espoir, un ministre scissionniste, George Buchanan, leur fut envoyé comme pasteur. Pour ce groupe de pionniers, Buchanan dut être une précieuse acquisition, car en plus de prêcher en anglais et en gaélique il possédait une formation médicale. D’abord enchantés, les fidèles accueillirent avec joie le pasteur et sa nombreuse famille, « et firent tout ce qu’ils purent pour leur assurer le confort ». Mais, peu à peu, des divergences, surtout en matière religieuse, séparèrent Buchanan et ses ouailles. Le mécontentement éclata en mai 1832 lorsque la grange qui servait d’église à Buchanan fut accidentellement détruite par un incendie. Les paroissiens, voulant profiter de cette occasion pour tout reprendre à neuf, envisagèrent de construire une église en pierre, où les offices liturgiques seraient célébrés conformément au rite de l’Église d’Écosse et non plus selon celui de l’organisation scissionniste à laquelle Buchanan appartenait. Même si l’on était à étudier la possibilité que Buchanan, âgé de 70 ans et malade (il allait mourir en 1835), soit admis au sein de l’Église d’Écosse, une demande fut adressée à la Glasgow Colonial Society [V. Robert Burns*] en vue d’obtenir les services d’un ministre de l’Église établie qui parlerait couramment l’anglais et le gaélique.
La Glasgow Colonial Society demanda au révérend Thomas C. Wilson, qui desservait la localité voisine de Perth et qui n’était arrivé que depuis peu de temps dans le Haut-Canada, de donner son avis sur les perspectives d’avenir du canton de Beckwith. « Les gens, rapporta Wilson, sont généralement industrieux et jouissent d’un confort matériel, et ils sont très attachés à l’Église de leurs pères. Et je connais peu d’endroits ici, dans les campagnes, où un ministre dévoué pourrait trouver des conditions plus agréables. » Satisfaite de ce rapport, la société se mit à la recherche d’un ministre pour le canton de Beckwith. Peu de gens pouvaient occuper cette charge, car la société exigeait absolument que le titulaire parle couramment le gaélique. John Smith possédait les qualités requises et, lorsqu’il décida de se rendre au Canada, il bénéficia de l’appui de ses collègues. Le révérend William Mackay adressa à la société une lettre enthousiaste dans laquelle il faisait l’éloge de son caractère et de son talent. Un autre ministre écrivit : « Ce n’est pas un prédicateur populaire, mais ses vues sont évangéliques et son humeur et sa conduite [sont] agréables. Ses aptitudes sont passables, et le fait qu’il ne soit pas populaire s’explique par un manque d’assurance [qui le rend] nerveux [et] qu’il lui est difficile de surmonter. » Lorsqu’il prononça un sermon à titre d’essai, à Glasgow, le 26 mai 1833, Smith fut bien accueilli et reçut des louanges. Chargé de le juger, un des représentants de la société déclara : « Je n’aurais pas découvert que le gaélique était, dans son cas, une langue acquise s’il ne me l’avait pas dit. » Il remporta un tel succès aux sermons d’essai qu’on lui laissa le choix entre deux ministères dans le Haut-Canada : le canton de Lancaster et celui de Beckwith. Il choisit ce dernier, se sentant peut-être des affinités avec les colons de Laggan qu’il avait visités peu de temps auparavant. Smith obtint sa nomination de la société le 27 mai et fut ordonné ministre par le consistoire de Chanonry le 9 juillet.
Accompagné de deux de ses sœurs, Smith arriva dans le canton de Beckwith à la fin d’octobre 1833 et, le 3 novembre, il prononça son premier sermon à l’église St Andrew, édifice en pierre dont la construction était presque terminée. Déçu de constater qu’on ne lui avait pas construit une maison, il vécut quelque temps dans un bâtiment en bois rond mis à sa disposition par un des fidèles et, en 1834, il surveilla l’édification d’un presbytère en pierre où logèrent par la suite les trois ministres qui vinrent après lui. À l’automne de cette année-là, la construction de l’église était achevée.
Les fidèles de Smith ne tardèrent pas à le considérer comme un homme bienveillant et compréhensif, et ils apprécièrent en particulier sa maîtrise du gaélique. Son ministère connut du succès. Dans une lettre datée du 21 avril 1834, il écrivait : « À titre de responsable du saint ministère parmi eux, j’ai reçu de mes fidèles toutes les marques d’estime et de respect ; et chaque fois qu’ils [pouvaient] ajouter à mon confort personnel, ils l’ont fait avec une extrême gentillesse [et] la plus grande gaieté de cœur. Plus de 300 personnes assistent régulièrement à mes cérémonies religieuses. Certaines belles journées durant la saison des traîneaux, il devait y avoir au moins 500 fidèles. Pendant les mois d’été, lorsque nos chemins sont praticables, j’espère que le nombre moyen d’auditeurs atteindra 400 ou un peu plus. Pour un canton éloigné, il s’agit d’un auditoire très respectable. »
Il semble que Smith ait travaillé sans soulever aucune controverse, même si William Bell, qui disait de lui qu’il avait « un grand talent pour le silence », déplorait le fait qu’un ministre ordonné par l’Église d’ Écosse ait été nommé dans le canton de Beckwith à un moment où des négociations étaient en cours en vue de réadmettre les scissionnistes. Smith demeura au sein de l’Église d’Écosse lors de la scission de 1844 qui donna lieu à la création, sous la direction de John Bayne, de ce qui fut communément appelée l’Église libre. Les fidèles de Smith appuyèrent leur ministre et contribuèrent généreusement à la collecte de fonds qu’il mena au profit du Queen’s College de Kingston, qui conservait également la même affiliation religieuse. Ses ouailles, qu’il qualifiait de « travailleurs de la ferme », donnèrent quelque £130 alors que le compte de la communauté ne s’élevait qu’à £34.
La tradition familiale, qui souligne la « sainteté [de John Smith] et son manque de sens pratique », rapporte qu’il mourut d’une pneumonie « après avoir donné son pardessus à un mendiant ». Il n’existe cependant pas de preuves à l’appui de cette croyance. Trois autres ministres succédèrent à Smith au pastorat de Beckwith. Moins de 25 ans après sa mort, toutefois, l’église ferma ses portes et on la laissa tomber en ruine.
APC, MG 9, D7, 35, 30 août 1838.— QUA, Queen’s Univ. letters, John Smith à F. A. Harper, 10 juin 1840.— UCA, Biog. files, John Smith, particulièrement Mabel Ringereide, « The Rev. John Smith and his Rockcliffe kin » (copie dactylographiée, 1976) ; Glasgow Colonial Soc., corr.— Croil, Hist. and statistical report (1868), 89–90.— Bathurst Courier, 2 mai 1851.— Scott et al., Fasti ecclesiæ scoticanæ, 7.— Gregg, Hist. of Presbyterian Church.— Mabel Ringereide, The flourishing tree (Ottawa, [1979]) ; « Beckwith Manse », Presbyterian Record (Don Mills [Toronto]), 99 (1975), no 11 : 2–3.
Mabel Ringereide, « SMITH, JOHN (1801-1851) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/smith_john_1801_1851_8F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
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