SALABERRY (Irumberry de Salaberry), MELCHIOR-ALPHONSE DE, militaire, avocat, homme politique, né à Saint-Philippe-de-Laprairie, Bas-Canada, le 19 mai 1813 du mariage du lieutenant-colonel Charles-Michel d’Irumberry* de Salaberry, le « vainqueur de Châteauguay », et de Marie-Anne-Julie Hertel de Rouville, fille de Jean-Baptiste-Melchior*, conseiller législatif, décédé à Québec le 27 mars 1867.
Melchior-Alphonse de Salaberry se vit offrir très jeune des postes de responsabilité et de prestige, à cause de la célébrité de son père et du bon renom dont jouissaient, auprès du gouvernement, les familles dont il descendait. Ainsi, il avait à peine 16 ans lorsque sa mère déclina, en son nom, l’invitation de lord Aylmer [Whitworth-Aylmer*] à joindre les rangs de l’armée. Cinq ans plus tard, le 14 août 1834, il était fait aide de camp extraordinaire. Nommé commissaire des petites causes de la paroisse Saint-Joseph-de-Chambly, le 6 juin 1836, il obtint le renouvellement de son poste, le 22 mars 1837. Quelques semaines auparavant, le 24 février, il avait été appelé à faire partie du grand jury convoqué à l’ouverture de la cour criminelle du district de Montréal. Le 22 août, il entra au Conseil législatif, mais il n’y siégea pas, la constitution étant suspendue le 27 mars 1838.
Nommé lieutenant-colonel, le 23 mars 1837, Salaberry commanda le 2e bataillon de milice de Chambly pendant les troubles de l’automne. Il empêcha alors les Patriotes de s’emparer du fort Chambly. Dans les mois subséquents, cependant, cinq miliciens mirent en doute son ardeur à combattre les Patriotes. Quatre d’entre eux, John Pool, Thomas Cary, Louis Chaloux et Jean-Baptiste Poudrette, dans une déclaration commune datée du 9 janvier 1838, attribuèrent son manque de zèle « à une insigne pusillanimité et une remarquable lâcheté » et déplorèrent devoir servir encore sous les ordres d’un tel officier. Toutefois, il ressort de la rétractation de Chaloux le 4 février 1838 que le responsable de cette manœuvre fut l’un des officiers de Salaberry, le lieutenant John McCutcheon. Ce dernier avait déjà refusé, en novembre 1837, de se soumettre à certains ordres de son supérieur. Le 15 janvier, McCutcheon reprit l’accusation de tiédeur contre Salaberry en lui faisant particulièrement grief d’avoir refusé de signer, vers le 10 novembre, une déclaration de loyalisme à l’endroit du gouvernement. Cependant, les accusations de McCutcheon, qui fut démis de ses fonctions le 10 février, se révélèrent sans fondement.
Salaberry eut la chance, trois ans plus tard, de prouver sa loyauté envers le gouvernement. Aux élections de 1841, les premières sous l’Union, il se présenta dans le comté de Rouville et triompha de justesse de Timothée Franchère après une violente campagne qui fit un mort. À l’Assemblée législative, Salaberry et Alexandre-Maurice Delisle* furent les seuls Canadiens français à se ranger derrière lord Sydenham [Thomson*] et à accorder leur appui au gouvernement. En juin 1841, par exemple, ils votèrent contre un amendement de John Neilson* demandant le rappel de l’Union par le gouvernement britannique. Le séjour de Salaberry à l’Assemblée fut de bien courte durée. En effet, il dut démissionner, en juin 1842, et faire face de nouveau à l’électorat parce qu’il venait d’accepter un emploi lucratif du gouvernement : le poste de greffier du district de Richelieu. Il fut défait par William Walker qui allait appuyer le même groupe parlementaire. Admis au Barreau de Montréal, le 4 février 1845, Salaberry exerça sa profession, un certain temps, avec Robert-Shore-Milnes Bouchette*, avant d’être appelé à travailler avec Joseph Jones, comme coroner de Montréal, le 23 avril 1847. Il laissa cet emploi pour accepter, le 26 juin 1848, celui d’adjudant général adjoint pour le Bas-Canada de la milice de la province. Il occupa ce haut poste de direction et d’administration jusqu’à sa mort.
Le 22 septembre 1846, Melchior-Alphonse de Salaberry avait épousé à Montréal Marie-Émilie Guy, fille de Louis Guy, conseiller législatif. Huit enfants naquirent de cette union. Fils de seigneur, Salaberry a joui d’une existence privilégiée ; sa naissance même l’appelait à vivre dans un milieu social restreint et à accéder très tôt à des fonctions que bien peu de gens d’origine plus modeste pouvaient espérer occuper un jour. Comme son père, il resta à l’écart du mouvement nationaliste canadien de son époque. À l’heure de l’affrontement entre Patriotes et troupes britanniques, Salaberry évoluait déjà dans les cercles du pouvoir qui allaient assurer son avenir personnel.
ANQ-Q, QBC 25, Événements de 1837–1838, nos 3 023, 3 754s., 3 757, 3 767, 3 769–3 771, 3 776, 3 779–3 781, 3 783, 3 785.— APC, MG 24, G45, 5, p. l 462 ; 6, p. 1 480 ; MG30, D62, 27, p.309 ; RG 9, I, A5, 15 ; I, C6, 6.— G. Turcotte, Cons. législatif de Québec, 19, 123s.— Thérèse d’Irumberry de Salaberry, Regards sur la famille d’Irumberry de Salaberry ; ses origines lointaines, sa branche canadienne (Paris, 1953).— Monet, Last cannon shot.— P.-G. Roy, La famille d’Irumberry de Salaberry (Lévis, Québec, 1905), 119–122.
Jean-Pierre Gagnon, « SALABERRY (Irumberry de Salaberry), MELCHIOR-ALPHONSE DE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/salaberry_melchior_alphonse_de_9F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1977 |
Année de la révision: | 1977 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |