ROLLIN, PAUL, sculpteur, architecte, propriétaire foncier et marchand, né le 25 janvier 1789 à Longueuil, Québec, fils de Dominique Rollin et de Magdeleine Bouthellier (Bouteiller) ; le 3 avril 1815, il épousa à Saint-Vincent-de-Paul (Laval, Québec) Zoé Pétrimoulx ; décédé le 1er décembre 1855 à Sainte-Thérèse-de-Blainville (Sainte-Thérèse, Québec).
Fils d’un Lorrain établi à Longueuil, Paul Rollin fait son apprentissage avec Louis Quévillon*, de Saint-Vincent-de-Paul. Le contrat d’apprentissage n’a pas été retrouvé, mais on sait qu’en 1812 Rollin est déjà maître sculpteur. Considéré par Quévillon comme l’un de ses bras droits et installé par lui sur un terrain voisin du sien, il participe avec ses collègues René Beauvais*, dit Saint-James, et Joseph Pépin* aux travaux de l’atelier des Écorres. Il s’associe avec eux en vue de remplir des contrats d’ornementation dans les églises de la région montréalaise. Ainsi, en 1808–1809, il contribue avec Pépin à la décoration de la première église Notre-Dame à Montréal. Il réalise alors le baldaquin, les voûtes et les corniches, et procède à la dorure des pièces sculptées.
De 1815 à 1822 environ, Rollin forme ses propres apprentis, dont aucun cependant ne devient célèbre. En février 1815, il s’associe à Quévillon, Pépin et Saint-James « pour faire tous les ouvrages de dite profession de sculpteur [...] pour quelques personnes que ce soient ». Leur contrat stipule, entre autres, que « cette société a la charge que les dites parties tenues, ainsi qu’elles s’y obligent les unes envers les autres, de contribuer chacune également à tout ce qu’il conviendra faire et payer [...] Et les deniers provenant des dits ouvrages seront reçus par chacune des dites parties indifféremment, dont elles [...] partageront également le profit. » Leur association prend fin en janvier 1817 après que les sculpteurs eurent travaillé ensemble aux églises de Pointe-Claire et de Varennes. Rollin, Quévillon, Pépin et Saint-James concluent un marché avec les marguilliers de Chambly, en 1819, afin de faire des ouvrages de sculpture dans l’église. Ces travaux touchent à la voûte, au chœur et au jubé. À la même époque, Rollin collabore aussi avec ces artisans à l’ornementation des églises de Longueuil et de Lachenaie. Puis, il s’associe avec Saint-James vers 1821 pour faire la sculpture, la dorure et l’argenture de l’église de Saint-Mathias. Après le décès de Quévillon en 1823, Rollin poursuit ses activités de sculpteur même si les temps plus difficiles l’obligent d’accepter des contrats à titre d’architecte-entrepreneur. Tel est le cas à Saint-Vincent-de-Paul où il se voit confier la réfection du toit de l’église en 1823. Il partage cette responsabilité avec Saint-James et le maître menuisier Simon Hogue.
Même si l’activité de l’atelier de Quévillon s’avère plus restreinte au chapitre de la statuaire, on attribue à Rollin une statue de la Vierge destinée au maître-autel de la première église Notre-Dame, à Montréal. Cette statue, réalisée vers 1808, aurait par la suite été transportée dans la grande église construite par James O’Donnell* entre 1823 et 1829. Rollin participe d’ailleurs en 1828 à l’ornementation de cette seconde église en confectionnant 243 rosaces en forme d’étoiles, destinées à être appliquées sur la voûte peinte, et 213 feuilles à appliquer sur le maître-autel. Ce travail illustre bien le type de sculpture qui marque la production de l’atelier des Écorres : il s’agit davantage d’ouvrages répétitifs, de pièces multipliées que de pièces individualisées. À une époque où plusieurs églises doivent être décorées à la fois, cette manière de concevoir la sculpture n’offre que des avantages. Mais après 1830, le nombre des bâtiments à orner va en décroissant, car peu de constructions nouvelles sont entreprises, et on en vient à exiger des travaux de nature plus raffinée.
On pourrait juger sévèrement aujourd’hui un sculpteur qui se contenterait de reproduire fidèlement des modèles européens, surtout si ceux-ci étaient déjà démodés en France. Mais dans une région isolée, comme l’est celle de Montréal à l’époque, décorer l’église paroissiale de dorures sculptées semble constituer une réalisation si importante que l’on s’inquiète peu de savoir comment ces travaux seraient jugés par des Européens. Les critiques du « quévillonnage », venues de la région de Québec, amorcent cependant une remise en question de l’ornementation des églises, et ces jugements sévères précipitent sans doute la ruine de l’atelier des Écorres et la dispersion des sculpteurs dans les régions périphériques. La sculpture sur bois connaîtra un certain déclin après 1830, mais elle regagnera la faveur à la suite de l’entrée en scène de Victor Bourgeau* au cours des années 1840.
Le prestige dont jouit Rollin ne semble pas être affecté par la remise en question du « quévillonnage ». Il faut dire que l’artisan du bois a su élargir le champ de ses activités et qu’il est intégré à un milieu raffiné formé d’avocats et d’autres notables, comme le laisse voir la liste des témoins à son mariage en 1815. Il se révèle aussi un propriétaire foncier respecté. L’année de son mariage, il achète une terre dans la seigneurie de Châteauguay, qu’il revend sept ans plus tard. En 1820, il acquiert une propriété dans le village de Saint-Vincent-de-Paul, comprenant un terrain et une maison. Il cède le tout à Saint-James, en 1830, au prix de £2 400. Une terre, achetée dans la même région en 1823, est baillée à ferme et une autre, à Saint-François-de-Sales (Laval), est revendue en 1828. Enfin, on sait que Rollin a acheté une terre à Sainte-Thérèse-de-Blainville avant 1832 et qu’il y est établi comme marchand. On ne connaît rien cependant de ses activités à ce titre.
L’auteur de la notice nécrologique de Paul Rollin, parue dans la Minerve, le considère comme « le plus ancien sculpteur canadien ». Selon lui, il se montra « bon père de famille, bon époux et bon chrétien. Il se fit toujours remarquer par sa simplicité, ses mœurs douces et honnêtes. »
ANQ-M, CE1-12, 25 janv. 1789 ; CE6-25, 4 déc. 1855 ; CN1-16, 19 sept. 1812 ; CN1-28, 24 mars 1824 ; CN1-68, 17 févr. 1825, 4 mai 1827 ; CN1-96, 28 févr. 1812, 13 avril 1815, 3 févr. 1816, 3, 24 févr., 6 juin 1817, 10, 19 févr. 1818, 27 juill. 1819, 20 janv. 1820, 10 sept. 1821, 22 févr., 9 juill. 1822, 22 févr., 8 mars, 13 oct., 8 nov. 1823, 7 avril 1824, 11 juin 1825, 22 déc. 1828, 25 mai 1829, 11, 30 mars 1830, 20 nov. 1832 ; CN1-126, 11 févr. 1815 ; CN1-167, 8 juin 1815 ; CN1-334, 3 févr. 1815 ; CN1-375, 26 févr. 1821 ; CN6–29, 4 août 1823.— AP, Saint-Vincent-de-Paul (Laval), Reg. des baptêmes, mariages et sépultures, 3 avril 1815.— MAC-CD, Fonds Morisset, 2, R754/P324.— La Minerve, 7 déc. 1855.— L’Église et l’Enclos paroissial de Saint-Mathias-de-Rouville (Québec, 1978).— Olivier Maurault, la Paroisse : histoire de l’église Notre-Dame de Montréal (2° éd., Montréal, 1957).— Ramsay Traquair et G. A. Neilson, The old church of St Charles de Lachenaie (Montréal, 1934).— Émile Vaillancourt, Lune maîtrise d’art en Canada (1800–1823) (Montréal, 1920).
Raymonde Gauthier, « ROLLIN, PAUL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/rollin_paul_8F.html.
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Auteur de l'article: | Raymonde Gauthier |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |