ROBICHAUX (Robichau, Robeshaw), LOUIS, marchand, né le 9 août 1704 à Port-Royal (Annapolis Royal, Nouvelle-Écosse), fils de Prudent Robichaux et d’Henriette Petitpas ; il épousa le 7 février 1730, à Annapolis Royal, Jeanne Bourgeois, et ils eurent dix enfants ; décédé le 20 décembre 1780 à Québec.
Le marchand Louis Robichaux entretenait de bonnes relations avec les troupes britanniques en garnison à Annapolis Royal, de loin sa plus importante clientèle. En plus de leur fournir des vivres, du bois de construction et de chauffage, il effectuait pour eux certains travaux de réparation. Il fut un des Acadiens qui, en janvier 1729/1730, prêtèrent le serment les engageant à demeurer « entierement Fidele » à George II [V. Richard Philipps*]. Au début de la guerre entre la France et la Grande-Bretagne en 1744, Robichaux et sa famille réparaient les fortifications d’Annapolis Royal ; en outre, certains membres de sa famille avertirent la garnison, en août, de l’attaque imminente des Français commandés par François Du Pont Duvivier. En conséquence, les Français, selon le témoignage de Robichaux, le dépouillèrent à deux reprises de son mobilier et de son bétail et, par deux fois, le firent prisonnier avec sa famille. Mais à chaque occasion ils réussirent à prendre la fuite.
Les Acadiens souffraient terriblement de cette guerre. En juin 1745, Robichaux et six autres délégués acadiens décrivirent au lieutenant-gouverneur Paul Mascarene* et au Conseil de la Nouvelle-Écosse la situation pénible dans laquelle vivaient leurs concitoyens : « Vous Scavez, Messieurs, en quel Etat nous réduisent, et les François et les Sauvages dans tout leurs Courses, ceux-cy nous Ravagent pillent tuent ceux-la nous accablent de peines et de traveaux ne nous donnant pas le temps de respirer, ét d’un autre Coté on nous fait entendre qu’on viendra de Boston pour nous Réduire entièrement, aquoy on auroit pas grand peine, étant déjà bien abbatus en toutes manière. » Ils soulignèrent que les Français les traitaient « d’Anglois » et que les Britanniques mettaient en doute leur loyauté bien qu’ils n’eussent « rien fait de ce qui peut avoir Raport aux Armes ».
Après la guerre, Robichaux réussit à refaire sa fortune, mais ses bonnes relations avec les Britanniques ne lui permirent pas d’éviter la dure épreuve de l’exil, en 1755. Tout au plus, le major John Handfield* lui accorda-t-il le privilège de choisir le lieu de sa déportation. Il opta pour la Nouvelle-Angleterre où, espérait-il, sa fidélité aux Britanniques serait reconnue et, par conséquent, il serait traité avec indulgence. À leur arrivée, Robichaux et sa famille se virent contraints de séjourner à Boston où ils demeurèrent jusqu’en septembre 1756, avant d’être transférés à Cambridge par le gouvernement du Massachusetts. Au cours du même mois, Robichaux adressa une requête au Conseil du Massachusetts afin d’obtenir la permission de retourner à Boston. Il y précisait que, s’il avait pu subvenir à ses besoins au cours des trois mois précédents à Boston, il ne pouvait trouver un emploi à Cambridge, et y promettait que lui et sa famille « se comporter[aient] en bons et paisibles sujets et voisins ». Craignant peut-être son influence sur les Acadiens, le conseil refusa sa demande mais lui fournit toutefois une maison et une aide financière occasionnelle pendant son séjour de 11 ans à Cambridge.
Durant son exil en Nouvelle-Angleterre, Robichaux se révéla le porte-parole à la fois de ses compagnons d’infortune et de leurs missionnaires, demeurés en Acadie, et devint leur homme de confiance. Dans une lettre du 17 septembre 1761, l’abbé Pierre Maillard*, vicaire général de l’évêque de Québec à Halifax, l’autorisa, en l’absence de prêtre, à recevoir le consentement mutuel des Acadiens en exil désireux de se marier, avec responsabilité de demander les dispenses requises et de faire un rapport sur chaque union célébrée. Dix ans plus tard, le 17 juillet 1771, l’abbé Charles-François Bailly de Messein lui écrivit également, le confirmant dans sa délégation. Il lui spécifia, en outre, la procédure à suivre dans les cas où des mariages auraient lieu sans son autorisation.
L’exil fut, semble-t-il, moins pénible pour Robichaux que pour ses compagnons. En effet, sa bonne éducation, ses relations dans la société bostonnienne et le prestige dont il jouissait auprès des missionnaires et des Acadiens rendirent son séjour en Nouvelle-Angleterre plus agréable. C’est pourquoi, sans doute, son nom ne figure pas sur les listes des Acadiens qui demandèrent à passer en France, au Canada ou à Saint-Domingue (île d’Haïti). Alors que la plupart des familles acadiennes, qui le désiraient et le pouvaient, s’étaient établies au Canada en 1766, Robichaux ne s’y rendit qu’en 1775. Il quitta Boston, alors en pleine tourmente révolutionnaire, probablement avec des amis loyalistes de Cambridge, tels les colonels John et William Vassall et Edward Winslow*. Il alla vivre à Québec où il mourut le 20 décembre 1780, victime de la « picote ». Ses enfants s’établirent au Québec et au Nouveau-Brunswick ; Vénérande* devint l’agent à Québec de son frère Otho*, un important homme d’affaires du Nouveau-Brunswick.
Placide Gaudet, Généalogie des familles acadiennes avec documents, APC Rapport, 1905, II, iiie partie : 258–271.— N.S. Archives, I, 84s.— Pierre Belliveau, French neutrals in Massachusetts [...] (Boston, 1972), 192–199.— Calnek, History of Annapolis (Savary), 66, 68, 73, 75s., 78.
Donat Robichaud, « ROBICHAUX (Robichau, Robeshaw), LOUIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/robichaux_louis_4F.html.
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Auteur de l'article: | Donat Robichaud |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1980 |
Année de la révision: | 1980 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |