PERRAULT (Perrot, Perreault), PAUL, major général de milice au Canada, baptisé à Deschambault (Québec) le 4 avril 1725, fils de Jacques Perrault et de Marie-Madeleine Paquin, décédé à Kourou en Guyane française, le 29 janvier 1765.

Fils de fermier et fermier lui-même, Paul Perrault se lança aussi, semble-t-il, dans le commerce et le transport, obtenant assez de succès pour se permettre d’acheter des terrains supplémentaires. On eut tôt fait de reconnaître son ambition et son talent en le nommant à la tête de la milice de sa localité. En tant que capitaine de la côte, Perrault était chargé de surveiller les exercices et d’inspecter l’équipement militaire ; il était responsable d’appliquer les décrets de l’intendant Bigot* et apparaissait comme un symbole social jouissant d’un banc particulier à l’église. Il dirigeait les corvées d’entretien des ponts et des routes et pouvait même agir comme magistrat subalterne.

Lorsque éclata la guerre en 1755, Perrault engagea les hommes de Deschambault principalement pour former l’équipage des chaloupes qui devaient transporter les troupes et le matériel de guerre au lac Champlain. Les armements furent placés sous surveillance armée dans un entrepôt situé sur la propriété de Perrault. Il logea chez lui les officiers de passage, notamment le chevalier de La Pause [Plantavit*].

Perrault obtint une promotion plus importante le 3 juin 1759. En effet, le gouverneur Rigaud* de Vaudreuil, s’étant vu refuser la permission de désigner son neveu au poste de major général de milice, nomma alors Perrault. Simple habitant, ce furent peut-être ses bons services comme capitaine de milice qui lui méritèrent sa promotion. De plus, il est possible que sa femme, Marie-Joseph Rivard, dit Lanouette, qu’il avait épousée à Sainte-Anne-de-la-Pérade le 3 août 1750, ait eu un lien de parenté avec l’associé de Bigot, Joseph-Pierre Cadet*. Un contemporain le décrit comme un « homme intrigant et zélé ».

Comme major général de milice, Perrault devait coordonner l’emploi de tous les Canadiens valides (16 000). On pouvait faire appel à eux en tout temps comme hommes de chaloupe, soldats et fermiers. Perrault était stationné à Montréal, agissant avant tout comme administrateur et inspecteur, mais aussi, à l’occasion, comme conseiller des stratèges quand il se trouvait en possession d’informations particulières. En 1759, l’une de ses fonctions fut de choisir des miliciens pour les incorporer aux troupes françaises régulières et aux troupes de la Marine, en accord avec le plan favori de Montcalm visant à rendre la main d’œuvre coloniale plus utile. Écrivant à Lévis* au sujet de l’importance d’acheminer avec efficacité les convois de ravitaillement de Montréal à Québec, à l’île aux Noix et à La Présentation (Ogdensburg, N.Y.), Vaudreuil soulignait que, pour ce qui concerne les plans, « Perrot pourra [lui] être utile à cette occasion », et il ajoutait : « vous connaissez tout comme moi sa bonne volonté ».

La confiance non démentie que Vaudreuil entretenait à son égard apparaît dans sa proposition datée du 9 novembre 1759 à l’effet que Perrault devrait devenir aide-major de Québec : les anciens titulaires de ce poste avaient tous été officiers des troupes de la Marine. Au début de 1760, Perrault visita les paroisses non occupées du Canada pour passer la milice en revue et encourager les habitants dans leur détermination de reprendre Québec au printemps, ce qui représentait une tâche difficile après cinq ans de guerre.

Perrault, sa femme et ses trois filles (il eut plus tard un fils) sortirent sains et saufs de la guerre. Cependant, leur résidence fut détruite par le feu en août 1759, lorsqu’une troupe ennemie, au cours d’un raid, fit sauter le magasin militaire qui se trouvait derrière. On lui offrit de conserver son poste de major général sous le régime anglais, mais il refusa. Il désirait plutôt continuer à servir le roi de France et, en 1761, partit pour Paris sans sa famille. En avril 1762, il se retrouva en prison, après avoir été accusé de corruption dans l’Affaire du Canada. Ayant été relâché le 10 décembre 1763, il se vit confier le poste auquel il aspirait. En avril 1764, Jean-Baptiste-Nicolas-Roch de Ramezay* écrivait à son épouse : « j’aurai la douleur de voir des fripons avoir des deux mille livres, seize cents livres, jusqu’à un paysan de chez nous avoir cette somme [...] qui est le petit Perrot de de Chanbeault qui va à Cayenne [Guyane française] major des milices ».

À l’été de 1764, Perrault revint chercher sa famille au Canada. Ils quittèrent Québec en août sur la Nourice, s’arrêtant aux îles Saint-Pierre et Miquelon en route vers le sud. Le gouvernement français lui confia la tâche de persuader quelque 300 Acadiens pauvres de cet endroit d’accepter l’offre d’être entretenus pendant les trois premières années, s’ils émigraient en Guyane française. Ces réfugiés craignaient son climat chaud et insalubre, que l’on exagérait volontiers, à en croire la correspondance de Perrault ; de plus, ajoutait celui-ci, l’île Miquelon pourrait être attaquée par les Anglais : « Vous êtes ainsi que moy écrivait-il comme des Israélites qui cherchés la terre promise [...] il n’y a point dans les Isles Saint-Pierre et Miquelon, de ruisseaux qui coulent le lait ni le miel, au contraire [...] Je m’en vais m’établir à Cayenne. Croiez-vous que ma famille et ma santé me soient moins chères que les vôtres. » Il repartit pour l’Amérique du Sud au milieu de septembre sans avoir réussi à émouvoir les Acadiens.

À Kourou, moins de trois mois après son arrivée en Guyane française, il fut emporté par la chaleur ou une fièvre tropicale. Sa famille retourna en France. Le talent, la diplomatie, la chance et de bonnes relations avaient permis à un simple paysan d’entrer dans le groupe des puissants dirigeants de l’administration française. Il mourut prématurément à l’âge de 39 ans, payant ainsi le prix de son ambition.

Malcolm MacLeod

AN, Col., D2C, 48, f.334.— Le chevalier de la Pause, RAPQ, 1931–1932, 11.— Édits ord., II : 343.— Le journal de M. de Bougainville (Gosselin), RAPQ, 1923–1924, 388.— Journal du siège de Québec (Æ. Fauteux), RAPQ, 1920–1921, 137–241.— Knox, Historical journal (Doughty).— Lettres de l’intendant Bigot (Casgrain), 77.— Lettres du marquis de Vaudreuil (Casgrain), 99, 106.— Mémoire du Canada, RAPQ, 1924–1925, 160.— Les « papiers » La Pause, RAPQ, 1933–1934, 208.— RAC, 1905, II, iiie partie, 215–220.— Bonnault, Le Canada militaire, RAPQ, 1949–1951, 272–274.— P.-G. Roy, Inv. procès-verbaux des grands voyers, IV : 137.— Tanguay, Dictionnaire.— P.-G. Roy, Bigot et sa bande, 150s. ; Les petites choses de notre histoire (7 séries, Lévis, Québec, 1919–1944), 3e sér. ; M. de Ramesay, lieutenant de Roi à Québec, après 1759, BRH, XXII (1916) : 359s.

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Malcolm MacLeod, « PERRAULT (Perrot, Perreault), PAUL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/perrault_paul_3F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
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