MOODY (Moodey), SAMUEL, ministre de l’Église congrégationaliste, né à Newbury, Massachusetts, le 4 janvier 1675/1676 (ancien style), fils de Caleb Moody et de Judith Bradbury, décédé le 13 novembre 1747 à York (Maine).

Samuel Moody était le petit-fils de William Moody qui quitta le pays de Galles pour la Nouvelle-Angleterre en 1633. Caleb, son père, représenta Newbury à la Général Court de la colonie (1677–1678) et, sous le régime tyrannique d’Edmund Andros, fut emprisonné pendant cinq semaines pour avoir osé parler et agir en homme libre. La première femme de Samuel Moody, Hannah Sewall, qu’il épousa le 15 juillet 1698, était la nièce du juge en chef Samuel Sewall et était apparentée à la femme de William Pepperrell.

Moody fréquenta Harvard College où il se convertit après avoir lu An alarm to unconverted sinners de Joseph Alleine. Il termina ses études en 1697 et, l’année suivante, il accepta le poste d’aumônier d’York, dans la partie nord-est du Massachusetts (aujourd’hui le Maine). Seul un homme armé d’un courage exceptionnel et que la perspective de privations n’effrayait pas pouvait accepter d’aller à un endroit où, récemment, son prédécesseur et un certain nombre d’habitants avaient été assassinés par les Indiens. Moody refusa des émoluments réguliers, croyant que le Seigneur y pourvoirait. À une occasion, il donna les souliers de sa femme à une pauvresse mais avant la fin de la journée un voisin fit don d’une nouvelle paire à sa femme. Soucieux de se détacher des choses de ce monde, il donna son bien le plus précieux, son cheval, disant : « Il monte avec moi jusque dans la chaire et je ne puis l’y garder. » Quoiqu’il ne manquât jamais d’accomplir un geste pitoyable envers les malheureux, il n’était pas moins un homme de caractère violent et ses visites dans les buvettes en étaient une démonstration éloquente alors qu’il chassait chez eux les ivrognes qui y flânaient. On retrouve dans l’œuvre d’imagination Agamenticus beaucoup d’histoires qu’on racontait à son sujet partout en Nouvelle-Angleterre et des étranges propos qu’il tenait.

Comme il dispensait son ministère à des gens qui connaissaient les horreurs de la petite guerre que livraient les Français et leurs alliés indiens, Moody se porta volontaire au poste d’aumônier de la malheureuse expédition sur Port-Royal (Annapolis Royal, N.-É.), sous les ordres de John March*, en 1707. En 1712 les Indiens attaquèrent York, et quelques-uns de ses paroissiens furent tués. L’année suivante, toutefois, il signa avec les Abénaquis un traité qui apporta un certain répit [V. Mog*]. L’année qui précéda sa mort, il fallait encore que les membres de sa congrégation soient armés pour se rendre à l’église.

Moody était un prédicateur vigoureux et prit part aux mouvements revivalistes de son temps, y compris le « Grand Réveil » qui contribua à conférer à l’expédition de 1745 sur Louisbourg, île Royale (île du Cap-Breton), le caractère d’une croisade. L’industrie de la pêche dans laquelle étaient profondément engagés les colons du Maine se trouvait menacée par suite de la destruction de l’établissement anglais de Canseau (Canso, N.-É.) et l’attaque d’Annapolis Royal par des détachements venus de Louisbourg en 1744 [V. Joseph Du Pont Duvivier]. Si bien que le tiers du contingent du Massachusetts qui alla investir la forteresse en 1745 avait été recruté dans le Maine, et toutes les troupes furent placées sous le commandement du voisin de Moody, William Pepperrell.

Moody prit part à l’expédition à titre d’aumônier principal et lorsqu’il monta à bord du navire, à Boston, il saisit une hache et s’écria : « L’épée du Seigneur et de Gédéon » ; il prédit de plus que Louisbourg serait conquis et qu’il jetterait par terre les objets de culte des papistes. « Oh que ne puis-je être avec vous et ce cher M. Moodey dans cette seule église », écrivit à Pepperrell le conseiller presbytéral John Gray, « pour détruire les statues qu’ils y ont élevées, et entendre l’authentique Évangile de Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Christ y être prêché. » On dit qu’en effet, après le siège, Moody s’attaqua à l’autel et aux statues de l’église française avec une hache. Par la suite, il prononça le premier sermon protestant entendu dans l’enceinte de Louisbourg. Malgré sa réputation d’orateur prolixe et improvisateur, il étonna l’assistance lors du banquet qu’offrit Pepperrell aux forces navales britanniques par la brièveté de son action de grâces.

Moody avait déjà plus de 70 ans au moment de la capture de Louisbourg et il était le plus âgé parmi les hommes de l’armée. Il mourut deux ans plus tard à York dans les bras de son fils, le révérend Joseph Moody. Sa première femme, Hannah, était décédée en 1728 ; il avait épousé ensuite Ruth Newman, née Plummer, en 1732 ou 1733. Il laissait un autre enfant, Mary, née de son premier mariage ; elle est l’arrière-grand-mère du philosophe américain Ralph Waldo Emerson.

Alfred G. Bailey

University of New Brunswick Library, Archives and Special Collections Dept., Bailey family papers, Genealogical notes on the family of Loring Woart Bailey.— Diary of Samuel Sewall, 1674–1729, Coll. of the Mass. Hist. Soc., 5e sér., V-VII (1878–1882).— Documentary history of Maine, IX.— The Pepperrell papers, Coll. of the Mass. Hist. Soc., 6e sér., X (1899) : 106.— New Eng. Hist. and Geneal. Register, CXIV (1960) : 125.— Shipton, Sibleys Harvard graduates, IV : 356–365.— Ralph Emerson, Life of Reverend Joseph Emerson [...] (Boston, 1834), 444.— C. C. P. Moody, Biographical sketches of the Moody family [...] from 1633 to 1842 (Boston, 1847), 54–94.— Parkman, Half-century of conflict (1893), II : 96–98, 109, 153.— E. P. Tenney, Agamenticus (Boston, 1878).— W. D. Williamson, Sketches of the lives of early Maine ministers, Coll. of the Maine Hist. Soc., 2e sér., IV (1893) : 199–205.

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Alfred G. Bailey, « MOODY (Moodey), SAMUEL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/moody_samuel_3F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
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