JUCHEREAU DUCHESNAY, MARIE-JOSEPH, dite de l’Enfant-Jésus, hospitalière de l’Hôpital Général de Québec, supérieure, née à Beauport (Québec), le 20 février 1699, fille d’Ignace Juchereau* Duchesnay, seigneur de Beauport, et de Marie-Catherine Peuvret Demesnu, décédée à Québec le 20 novembre 1760.
Marie-Joseph Juchereau Duchesnay entre au monastère de l’Hôpital Général de Québec le 3 novembre 1713 et elle fait profession le 23 avril 1715. Pour faciliter l’entrée de Marie-Joseph, étant donné son jeune âge – elle a quatorze ans et demi – les parents Juchereau offrent une dot de 3 500# en argent du pays, alors qu’ils s’étaient engagés à donner 2 500# seulement pour sa sœur, Geneviève de Saint-Augustin, entrée au monastère quatre ans auparavant. Au moment de sa profession, la novice s’engageait, par contrat, à donner une certaine somme d’argent ou de biens qui servirait à l’entretenir et, à l’occasion, à remédier à la gêne pécuniaire de la communauté. Dans ce régime des dots, l’État intervenait en fixant le montant ; sauf pendant la décennie 1722–1732, la dot requise en Nouvelle-France était de 3 000#. Toutefois, à cause de la pauvreté du pays, il arrivait, comme dans les autres communautés de Québec, que cette exigence ne fût pas respectée à l’Hôpital Général. Par ailleurs, au lieu d’argent sonnant, les candidates offraient souvent soit un congé de traite, soit une terre, des planches ou du blé.
En 1716, Mgr de Saint-Vallier [La Croix*] envoie Marie-Joseph de l’Enfant-Jésus apprendre à dorer à la colle et à broder en or et en argent chez les ursulines de Québec, qui excellent dans ce genre de travail. Cinq ans plus tard, en 1721, Marie-Joseph seconde sa sœur dans le gouvernement de la maison ; elle est élue assistante de Geneviève de Saint-Augustin, supérieure depuis 1717. De 1724 à 1729, Marie-Joseph semble occuper le poste de première hospitalière de l’hôpital. Puis, à l’élection triennale de 1729, en même temps qu’Angélique Hayot, dite de Saint-Joseph, elle est élue dépositaire (économe) et discrète (conseillère). Elle n’exercera pas longtemps ces charges car, en 1730, immédiatement après le décès de sa sœur Geneviève, le doyen du chapitre, Louis Bertrand* de Latour, décide de nommer supérieure, Marie-Thérèse Langlois, dite de Saint-Jean-Baptiste ; ce geste d’autorité entraîne une nette division dans la communauté. Faisant partie du groupe des religieuses récalcitrantes, Marie-Joseph Juchereau demeurera éloignée des charges importantes de la communauté pendant quelque temps. En 1732, à la suite d’élections canoniques, Marie-Thérèse de Saint-Jean-Baptiste cède la direction à Marie-Joseph Juchereau qui sera réélue supérieure une deuxième fois, en 1735.
C’est au cours de cette période, de 1732 à 1738, que Marie-Joseph de l’Enfant-Jésus, avec la permission de la cour, tente, avec plus ou moins de succès, d’aménager pour les soldats une espèce d’« hôtel des invalides ». Il s’agit d’attirer à l’Hôpital Général des militaires hors d’état de faire leur service, qui sont hébergés ici et là dans les campagnes, chez les habitants, ou qui sont placés dans un hôpital de Montréal ou de Québec. Comme chaque année le roi accorde à l’habitant ou à l’hôpital un paiement correspondant à la demi-solde des invalides, on comprend que l’entreprise apparaisse intéressante aux religieuses de l’Hôpital Général comme moyen de supporter leur œuvre.
À l’élection de 1738, Marie-Joseph Juchereau quitte sa charge de supérieure, comme il se doit, après deux triennats consécutifs, mais continue de remplir des fonctions importantes dans la communauté puisqu’elle est élue dépositaire et discrète, en même temps que Marie-Thérèse Langlois. De nouveau éligible en 1741, Marie-Joseph Juchereau est réélue supérieure en remplacement de Marie-Charlotte de Ramezay, dite de Saint-Claude de la Croix. Encore une fois, elle demeurera à la direction de la communauté pendant deux triennats.
L’affaire du palais épiscopal fut définitivement conclue pendant son administration. À titre de légataires universelles de Saint-Vallier, les religieuses, à partir de 1728, réclamaient le palais épiscopal qui, selon Mgr Dosquet* et Mgr de Mornay, appartenait à l’évêque défunt. À titre de supérieure, Marie-Joseph de l’Enfant-Jésus intervint directement dans la lutte, en 1737, en exposant son point de vue à Maurepas, ministre de la Marine. Elle montra l’injustice qu’il y avait de faire payer les religieuses pour les réparations des abbayes unies à l’évêché et demanda un remboursement de 10 000#. Elle se défendit si bien que le ministre donna raison à la communauté qui revendiquait la propriété du palais. Néanmoins, en 1743, après avoir dédommagé l’Hôpital Général, la cour réunit le palais au Domaine du roi.
Marie-Joseph Juchereau reprend la charge de dépositaire et de discrète en 1747, laissant le gouvernement de la maison à Marie-Joseph Legardeur de Repentigny, dite de la Visitation. Cette dernière s’étant démise de ses fonctions à la fin de son triennat, Marie-Joseph de l’Enfant-Jésus est à nouveau élue en 1750 et en 1753. À la fin de ce dernier mandat, elle remet la direction de la communauté à Marie-Charlotte de Ramezay, dont elle devient l’assistante. Enfin, en 1759, elle est réélue supérieure pour la septième et dernière fois. Marie-Joseph n’a guère le temps d’exercer ses fonctions car elle meurt le 20 novembre 1760, à l’âge de 61 ans, alors que l’Hôpital Général de Québec subit les contrecoups très pénibles de la guerre de Sept Ans.
Marie-Joseph Juchereau Duchesnay est la religieuse de l’Hôpital Général de Québec qui, de tout le xviiie siècle, aura exercé le plus longtemps la charge de supérieure, soit 19 ans sur 45 de vie religieuse, depuis sa profession.
AHGQ, Actes capitulaires, 12, 16 ; Annales ; Registre des entrées et des dots.— AJQ, Registre d’état civil, Notre-Dame-de-Miséricorde de Beauport, 20 févr. 1699.— AN, Col., B, 66, f.35 ; 76, ff.101, 104 ; Col., C11A, 54, f.36 ; 107, ff.397, 404.— Mgr de Saint-Vallier et l’Hôpital Général, 301–303.
Micheline D’Allaire, « JUCHEREAU DUCHESNAY, MARIE-JOSEPH, dite de l’Enfant-Jésus », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/juchereau_duchesnay_marie_joseph_3F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1974 |
Année de la révision: | 1974 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |