Titre original :  John Castell Hopkins., BM1,S5,P0963

Provenance : Lien

HOPKINS, JOHN CASTELL, commis de banque, journaliste, auteur et impérialiste, né le 1er avril 1864 à Dyersville, Iowa, fils aîné de John Castell Hopkins et de Triandra Phelia Boyd Heu-de-Bourck ; le 2 octobre 1906, il épousa à Toronto Annie Beatrice Mary Bonner, et ils eurent deux filles ; décédé dans cette ville le 5 novembre 1923.

Né de parents britanniques, John Castell Hopkins était enfant lorsque sa famille s’installa à Bowmanville, en Ontario, où il termina ses études. De 1883 à 1891 environ, il fut commis à la Banque impériale du Canada, d’abord à Bowmanville puis, à compter de 1889, à Toronto. Le 28 mai 1886, à Ingersoll, il avait pris une part importante à la formation de la section ontarienne de l’Imperial Federation League ; en novembre 1888, il devint secrétaire honoraire du regroupement des sections canadiennes. Tels furent les premiers signes de son attachement à l’Empire britannique, une de ses passions ; l’autre était l’écriture, et c’est dans la même période qu’il décida de s’y consacrer. En février 1887, le Torontois Goldwin Smith* avait applaudi (tout en refusant d’y collaborer) à son projet de « diffuser des renseignements exacts sur les colonies ». Abandonnant le secteur bancaire, Hopkins alla travailler dans un journal farouchement impérialiste, l’Empire de Toronto, où il passa vite d’un emploi de commis à la fonction de corédacteur. En 1894, il quitta ce poste pour devenir pigiste.

Hopkins n’avait pas une « constitution robuste », mais il avait la plume facile et ne se laissait pas aisément déconcentrer. De confession anglicane, il ne se maria qu’en 1906. (Annie Beatrice Mary Bonner, catholique, était deux fois plus jeune que lui.) Selon un biographe, sa « vie se caractérisa par une grande vitalité » et « sa production littéraire dépassa probablement celle de tout autre publiciste du dominion ». En trois décennies, il composa une quarantaine de livres et d’opuscules, et collabora à de multiples journaux, périodiques et publications canadiennes et étrangères. De plus, il coordonna et dirigea plusieurs collections, notamment la première encyclopédie sur le Canada. Cet ouvrage en six volumes, paru de 1898 à 1900 et rédigé en bonne partie par lui-même, avait pour but de présenter des informations solides sur l’histoire du pays et sa situation présente. Le Canada, affirmait Hopkins, « n’a[vait] besoin que d’être connu pour être grand ». Ensuite, de 1901 à 1923, il fut, avec l’assistance de sa femme, le maître d’œuvre de la Canadian annual review of public affairs, où il accomplit aussi un abondant travail de rédacteur. Cette publication, qu’il souhaitait être un condensé impartial de statistiques, de comptes rendus d’événements d’actualité, de discours et d’opinions de la presse, était de conception ambitieuse et foisonnait de détails. On la consulte encore beaucoup.

Bon nombre des écrits de Hopkins reflètent son adhésion à la philosophie impérialiste britannique, credo alors très répandu. Ils témoignent aussi de son parti pris pour l’histoire romancée et de sa foi en la notion populaire de progrès. Pour Hopkins, ces éléments allaient de pair et formaient une vision de l’épanouissement national dont le thème central était l’avancement du Canada sous la conduite de la Grande-Bretagne. Logiquement, donc, le Canada devait viser à faire partie d’une fédération impériale où il jouerait un rôle de premier plan. Comme la plupart des impérialistes, Hopkins soupçonnait les États-Unis de nourrir des desseins belliqueux envers le Canada et les jugeait outrageusement démocrates et matérialistes. Sous sa plume, les groupes qui avaient lutté pour maintenir les liens avec la Grande-Bretagne, par exemple les loyalistes et les défenseurs du Canada pendant la guerre de 1812, devenaient des héros. Il choisissait des individus, notamment le premier ministre du Canada sir John Sparrow David Thompson*, et, sans égard à leurs convictions, tripatouillait leur portrait pour le faire entrer dans la fresque de l’Empire. De même, malgré ses bonnes intentions, il traitait les Canadiens français avec hauteur en les dépeignant comme des « habitants » loyaux. Il ne badinait pas avec l’impérialisme et n’hésitait pas à en promouvoir le cérémonial. En 1910, par exemple, il fit paraître un opuscule sur la célébration du Jour de l’Empire au Canada (dans lequel il attribua à sir George William Ross* le mérite de l’avoir instauré, minant ainsi les prétentions de Clementina Fessenden [Trenholme*], impérialiste de Hamilton).

Hopkins appuya sans réserve toutes les croisades impériales. Dans South Africa and the Boer-British war [...], paru en 1900 à Brantford, en Ontario, il soutint l’intervention de la Grande-Bretagne en défendant la liberté des Uitlanders anglais contre les Boers néerlandais, cruels et autocratiques. Dans le même esprit, il dépeignit la Première Guerre mondiale comme un combat entre la civilisation britannique et l’autoritarisme allemand, à tel point que, à lire par exemple The province of Ontario in the war [...], publié à Toronto en 1919, on croirait qu’il cherchait à rallier les Canadiens non avec une plume, mais avec une épée. Les années de guerre devinrent pour lui la période bénie où le Canada avait accédé à la maturité et pris sa place au sein de la communauté internationale – conclusion étayée, disait-il, par l’admission de délégations canadiennes à la conférence de paix de Paris en 1919 et à la Société des nations. Toutefois, il soulignait que le Canada avait acquis ce nouveau statut avec le soutien de la Grande-Bretagne et que l’engagement du dominion envers l’Empire ne s’en trouvait donc pas compromis. Hopkins ne pouvait pas admettre que le nationalisme engendré par la guerre avait éloigné le Canada de la Grande-Bretagne. Or, dans les années 1920, le désir d’éviter une participation coûteuse à un autre conflit européen, tout comme l’accession des États-Unis au rang de principal partenaire commercial du Canada, renforceraient cette tendance. Le déclin de l’impérialisme se refléterait aussi dans des ouvrages d’érudition qui expliqueraient l’essence du Canada à l’aide de théories centrées sur l’Amérique du Nord.

Après la mort de Hopkins en 1923, la plus grande partie de sa production tomba donc dans l’oubli. Elle n’était d’ailleurs pas, dans l’ensemble, d’une haute tenue littéraire. Hopkins avait écrit beaucoup de textes à la hâte, par nécessité professionnelle et pour laisser libre cours à sa verve. Dans une critique condescendante, l’historien universitaire William Stewart Wallace* a dit d’un de ses livres qu’il pouvait servir uniquement à « donner un air raffiné aux salons de beaucoup de maisons de ferme ». En parlant de la biographie de Thompson par Hopkins – texte plein de déférence paru moins de deux mois après le décès du personnage –, l’historien Peter Busby Waite a qualifié le style de « plat, pour ne pas dire flatulent » et la biographie de « morte, ou peu s’en faut ».

Hopkins, suggère Carl Berger, ne se mêlait pas aisément à des impérialistes de l’élite, dont George Taylor Denison. En revanche, il correspondit avec la plupart des principaux penseurs impérialistes du Canada et fraya avec beaucoup de gens importants. Membre de l’ordre d’Orange, des Sons of England et du conseil de la British Empire League, il fut en 1891–1892 président de la Toronto Young Men’s Liberal Conservative Association et, en 1910–1911, de l’Empire Club of Canada, à la fondation duquel il avait contribué en 1903. Son appartenance à de grandes sociétés historiques et à trois cercles torontois – l’Albany Club, le Rosedale Golf Club et le Royal Canadian Yacht Club – l’aida sans doute aussi à entretenir des relations. En plus, il était fellow de la Royal Statistical Society, de la Royal Geographical Society et de la Royal Society of Literature of the United Kingdom.

Les livres, opuscules et articles de John Castell Hopkins en révèlent beaucoup sur l’idéologie impérialiste, qui influa si profondément sur la politique et la société canadiennes à la fin du xixe siècle et au début du xxe. Cependant, le travail méticuleux qu’il accomplit à la Canadian annual review en vue de croquer l’histoire sur le vif eut des répercussions plus durables. Publié de 1923 à 1936 grâce aux soins de sa femme, Annie Beatrice Maria Bonner, cet ouvrage a été relancé, après une longue interruption, en 1960.

Jeffrey A. Keshen

Il n’existe pas de liste complète des publications de John Castell Hopkins, mais on trouve des listes partielles dans Middleton, Municipality of Toronto, 2 : 32s., et dans notre mémoire de m.a. intitulé « The policies of Canada’s chief press censor during the Great War » (Carleton Univ., Ottawa, 1986). La plupart des livres et des opuscules de Hopkins peuvent être consultés sur microfiches à l’ICMH et figurent dans son Répertoire.

Les publications les plus représentatives comprennent notamment Canada and the empire ; a study of imperial federation (Toronto, 1890) ; Canada and American aggression ([Montréal, 1892]) ; The maple leaf and the Union Jack : a brief study of the imperial connection (Toronto, 1892) ; les notices sur « D’Alton McCarthy », « Wm. Ralph Meredith » et « Charles H. Tupper » dans les Hommes du jour : galerie de portraits contemporains, L.-H. Taché, édit. (32 sér. en 16 vol., Montréal, 1890–[1894]), 14e, 20e et 24e sér., respectivement ; Life and work of Mr. Gladstone ; a great and varied career (Toronto et Brantford, Ontario, 1895) ; Life and work of the Rt. Hon. Sir John Thompson [...] (Toronto, 1895) ; Queen Victoria : her life and reign [...] (Toronto et Brantford, 1896 ; autre éd., Toronto, 1901) ; The sword of Islam ; or, suffering Armenia [...] (Brantford et Toronto, 1896) ; Progress of Canada in the nineteenth century [...] (Toronto et Brantford, 1900) ; The story of the dominion : four hundred years in the annals of a continent [...] (Philadelphie et Toronto, 1901) ; The origin and history of Empire Day (Toronto, 1910) ; French Canada and the St. Lawrence ; historic, picturesque and descriptive (Toronto, 1913 ; réimpr., 1974) ; « The war of 1812–15 », OH, 12 (1914) : 42–57 ; et Canada at war, a record of heroism and achievement, 1914–1918 (Toronto, 1919).

Hopkins a aussi édité Canada, an encyclopædia of the country : the Canadian dominion considered in its historic relations, its natural resources, its material progress, and its national development (6 vol., Toronto, 1898–1900) et y a rédigé de nombreux articles, dont « The imperial federation movement in Canada », 6 : 53–57. [j. a. k. ]

AO, F 102 ; RG 80-2-0-227, nº 45365 ; RG 80-5-0-344, nº 3324.— BAC, MG 29, D35.— Globe, 7 nov. 1923.—Toronto Daily Star, 6 nov. 1923.— World (Toronto), 3 oct. 1906.— Annuaire, Toronto, 1889–1900.— Carl Berger, The sense of power ; studies in the ideas of Canadian imperialism, 1867–1914 (Toronto et Buffalo, N.Y., 1970).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— Canadian who’s who, 1910.— Encyclopaedia of Canadian biography, 3 : 55.— The Oxford companion to Canadian history and literature, Norah Story, édit. (Toronto, 1967).— Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell), 2.— P. B. Waite, The man from Halifax : Sir John Thompson, prime minister (Toronto, 1985).— Who’s who in Canada, 1922.

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Jeffrey A. Keshen, « HOPKINS, JOHN CASTELL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/hopkins_john_castell_15F.html.

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Auteur de l'article:    Jeffrey A. Keshen
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
Année de la révision:    2005
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