GUILLIMIN, CHARLES (aussi Guillimen, bien que cette orthographe n’ait pas été employée en Nouvelle-France), riche marchand, armateur, commissionnaire, constructeur de navires, commandant de milice, membre du Conseil superieur ; né en 1676 et décédé à Québec le 27 février 1739.

La famille Guillimin, qui constituait la branche cadette d’une des familles nobles les plus respectées de Bretagne, habitait Concarneau, port de pêche du Finistère. Guillaume Guillimin, le père de Charles, était avocat au parlement de Bretagne. L’on ignore tout des premières années de la vie de Charles, mais l’on croit qu’il arriva en Nouvelle-France au cours des dernières années du xviie siècle avec un capital assez important pour lui permettre de se lancer dans bon nombre d’entreprises coloniales. Grâce à ses investissements dans les pêcheries du Saint-Laurent et dans la construction navale et au commerce qu’il faisait avec des marchands de France, il eut tôt fait de devenir « [...] l’un des négociants les plus riches de Québec ». Il semble aussi qu’il se soit acquis une certaine renommée militaire, dès le début de sa carrière dans la colonie. Il disait, par exemple, avoir réussi à monter deux batteries sur les hauteurs du Cul-de-Sac, au plus fort de l’attaque navale de Sir William Phips* contre Québec en 1690, et avoir harcelé les vaisseaux anglais avariés qui cherchaient refuge à l’abri du cap. En outre, en 1704, il commanda la milice de Québec dans l’expédition que le marquis de Vaudreuil [Rigaud] organisa contre les établissements de la Nouvelle-Angleterre.

Mais Guillimin était avant tout un négociant. Au cours des 25 premières années du xviiie siècle, il consacra ses efforts à augmenter sa fortune et son influence dans la vie commerciale de la colonie. Ainsi, en 1710, il affermit sa position dans le milieu en épousant Françoise Lemaître-Lamorille, veuve, fille d’un négociant de Montréal. Il exploita des établissements de pêche à la baie des Chaleurs et aux îles de la Madeleine, construisit sept ou huit navires de haute mer à Québec, bâtit, à Québec et à Montréal, quelques habitations de dimensions importantes et au moins un magasin. Il fut aussi commissionnaire de Mme Pascaud, demeurant a La Rochelle, dont le mari, Antoine pascaud, avait été de son vivant au nombre des marchands de France qui entretenaient un commerce considérable avec la Nouvelle-France.

Comme l’écrivirent par la suite le gouverneur Charles de Beauharnois* de La Boische et l’intendant Gilles Hocquart* : « Il est vrai que ce particulier a fait des entreprises considérables en ce pays. » Ils firent aussi remarquer que Guillimin avait toujours été un bon citoyen, soucieux de l’intérêt de tous. Il l’avait d’ailleurs prouvé en 1712, pendant une crise financière, en prêtant la somme de 40 000# au trésorier du roi à Québec. Sa nomination au Conseil supérieur de la Nouvelle-France, le 20 septembre 1721, fut une reconnaissance publique des services qu’il avait rendus.

Cependant, comme ce fut souvent le cas en Nouvelle-France, un malheureux concours de circonstances entraîna la ruine financière de Guillimin. Ce fut tout d’abord la décision du gouvernement français de dévaluer la monnaie de carte, ce qui signifia pour Guillimin la perte d’une somme importante lorsque le prêt de 40 000# lui fut enfin remboursé. Il eut à subir des pertes encore plus lourdes quand plusieurs de ses navires marchands périrent en mer au cours des années 1720 à 1730. Alors commença toute une série de poursuites judiciaires de la part de ses créanciers. Il essaya de récupérer quelques biens en intentant, lui-même, une action contre Mme Pascaud pour des injustices qu’elle aurait commises à son égard à l’époque où il était son commissionnaire, mais le ministre Maurepas donna finalement gain de cause à Mme Pascaud. Vers 1730, la mauvaise fortune de Guillimin avait atteint son point le plus bas. Il dut s’adresser au ministre pour obtenir une pension mais, malgré tout l’appui que lui accordèrent le gouverneur et l’intendant, cette pension ne lui fut pas accordée et, en 1736, Maurepas refusa même de l’exonérer d’une dette de 1 300# qu’il avait contractée au magasin du roi. Bien qu’il ait tenté de rétablir son commerce maritime, il ne fait aucun doute qu’il était pauvre quand il mourut en 1739, laissant à ses fils, Charles et Guillaume*, le soin de refaire la fortune de la famille.

La carrière de Guillimin fut semblable à celle de plusieurs marchands de la Nouvelle-France : des décisions d’ordre administratif, prises en France, et des revirements brusques de l’économie canadienne eurent tôt fait d’anéantir leur richesse et leur prestige.

Donald J. Horton

AN, Col., B, 44, 57–61, 64 ; Col., C11A, 36, 66, 71–72 ; Col. E, 215 ; Section Outre-Mer, G3, 2 038 (Greffe de Desmaret, 20 oct. 1732).— Documents relatifs à la monnaie sous le régime français (Shortt), II : 744.— Le Jeune, Dictionnaire, I : 726s.— Tanguay, Dictionnaire, IV : 420.— Cahall, Sovereign Council of New France.— Cameron Nish, La Bourgeoisie et les Mariages, 1729–1748, RHAF, XIX (1965–66) : 595.— P.-G. Roy, La famille Guillemin, BRH, XXIII (1917) : 97–116.

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Donald J. Horton, « GUILLIMIN (Guillimen), CHARLES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/guillimin_charles_2F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1969
Année de la révision:    1991
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