GARRETTSON, FREEBORN, ministre méthodiste, né le 15 août 1752 dans le Maryland, près de l’embouchure de la rivière Susquehanna, fils de John Garrettson et de Sarah Merriarter, née Hanson ; le 30 juin 1793, il épousa à Rhinebeck, New York, Catharine Livingston, et ils eurent une fille ; décédé le 26 septembre 1827 à New York et inhumé à Rhinebeck.
Freeborn Garrettson appartenait à une riche famille anglicane mais, au cours de sa jeunesse, il subit l’influence des prédicateurs méthodistes itinérants. En 1775, il fit l’expérience d’une conversion qui le bouleversa : « Mon âme était extrêmement heureuse, écrivit-il plus tard, [et] il me semblait que je voulais m’envoler et atteindre le ciel. » Il libéra ses esclaves et, en temps et lieu, il décida de se faire prédicateur méthodiste. À compter de 1776 et durant plusieurs années, il parcourut le Maryland et les États avoisinants comme prédicateur à l’essai. Pacifiste, il ne voulait pas se mêler de la Révolution américaine ; il alléguait que « contribuer à verser du sang humain répugnait à [sa] raison et affligeait [sa] conscience », et il observa une stricte neutralité même s’il subissait les attaques des patriotes. Il fut ordonné ministre méthodiste lors d’une conférence à Baltimore en décembre 1784, et c’est en cette même occasion que fut fondée l’Église méthodiste épiscopale aux États-Unis.
Pendant plus de 50 ans, Garrettson sillonna l’est du continent de la Caroline du Nord à la Nouvelle-Écosse, pour prêcher l’évangile selon la version des méthodistes et suscita des milliers de conversions. C’était un voyageur infatigable et un prédicateur énergique, et il prônait la centralisation de l’autorité au détriment de l’autonomie des congrégations. Même s’il ne passa que 26 mois en Nouvelle-Écosse, on peut considérer qu’il fut, après Henry Alline*, le plus doué et le plus influent des prédicateurs que cette province connut au xviiie siècle. Immédiatement après son ordination, il fut envoyé dans cette colonie avec James Oliver Cromwell comme missionnaire spécial par les membres de la conférence de 1784, conformément au désir qu’avaient exprimé John Wesley et son excellent lieutenant Thomas Coke, ainsi que William Black, le chef des méthodistes de la Nouvelle-Écosse. Avec le vide que la mort d’Alline avait laissé, sur le plan religieux et l’arrivée de milliers de loyalistes (dont certains étaient méthodistes), il semblait possible aux méthodistes de mettre un terme à la suprématie que les disciples d’Alline et de la doctrine New Light exerçaient sur une grande partie de la colonie.
À la mi-février 1785, Garrettson et Cromwell quittèrent New York pour se rendre à Halifax. À son arrivée, Garrettson se vit offrir l’assistance du gouverneur John Parr* et du révérend John Breynton*, rector anglican de l’église St Paul ; pendant quelques semaines, il exerça son ministère dans une maison louée par Philip Marchinton*. À la fin de mars, il quitta la ville pour entreprendre sa première tournée de missionnaire Au cours de son séjour dans la colonie, il visita presque toutes les localités, à l’exception de Pictou. Son voyage fut particulièrement fructueux dans la région dominée par les disciples d’Alline d’origine américaine, et qui s’étendait de Falmouth à Granville et Yarmouth en descendant par la vallée d’Annapolis et qui, sur la côte sud, allait jusqu’au district d’Argyle, puis à Liverpool et Chester. Dans cette région, il bénéficia des efforts accomplis non seulement par Alline, mais aussi par les disciples de ce dernier, tels que Thomas Handley Chipman et John Payzant. Garrettson profita également du travail d’évangélisation effectué par Black dans le secteur de Chignecto et de Cumberland ainsi qu’à Halifax ; il gagna aussi des adeptes pour la première fois dans le foyer loyaliste de Shelburne. Un des hommes qu’il amena à la foi méthodiste, James Man*, devait connaître une longue et remarquable carrière de ministre en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick.
Attirées par le charisme de Garrettson, des assemblées nombreuses et enthousiastes venaient entendre son message chargé d’émotion et de ferveur religieuse. Même s’il se fit parfois attaquer violemment par les disciples d’Alline parce qu’il critiquait certains aspects de sa théologie, Garrettson ne fut pas moins capable de provoquer dans la colonie, en 1785 et 1786, un important renouveau qu’il appelait la « visite de l’Esprit ». L’accent qu’il mettait sur le « don de la grâce » et sur les possibilités de sanctification, de même que la chaude camaraderie des « réunions de classe », plaisaient aux nombreux Néo-Écossais qui recherchaient le christianisme évangélique d’Alline, mais non les excès antinomiens de certains de ses disciples.
« J’ai passé un heureux hiver parmi eux » raconta Garrettson à Wesley le 10 mars 1787. « Si le travail se poursuit ainsi [mais] un peu plus longtemps, ajoutait-il, la plupart des gens emboîteront le pas. » Malgré cet optimisme, Garrettson quitta la Nouvelle-Écosse en avril pour ne jamais revenir. Il se sentait obligé de regagner son pays : « Il ne me semblait pas évident, disait-il, que j’avais été appelé à quitter les Etats-Unis. » Quand il partit, les méthodistes formaient le groupe religieux le plus prolifique de la colonie ; ils étaient même sur le point de rejeter les congrégations New Light dans les ténèbres de l’histoire. En moins de deux décennies, toutefois, les méthodistes furent devancés par le mouvement baptiste qui progressait sous la direction d’un groupe remarquable de jeunes prédicateurs dynamiques, tels que Harris Harding*, Joseph Dimock*, Théodore Seth Harding, James et Edward* Manning ; les trois premiers avaient été convertis au cours des assemblées revivalistes de Garrettson. Le talent de ces prédicateurs baptistes et bien d’autres facteurs (le départ de Garrettson, l’absence de chefs méthodistes dynamiques parmi les Néo-Écossais, la piètre qualité des missionnaires de cette secte qui venaient de Grande-Bretagne et la décision prise par les méthodistes américains de concentrer leurs activités aux États-Unis) portèrent un dur coup au méthodisme en Nouvelle-Écosse après 1786.
Lorsque Freeborn Garrettson revint de Nouvelle-Écosse, il se forma un projet dont Wesley était apparemment l’instigateur et qui fut encouragé par l’Américain Francis Asbury : ils voulaient obtenir la nomination de Garrettson au poste de surintendant général des missions méthodistes en Amérique du Nord britannique et aux Antilles. Pour quelque raison, toutefois, ce projet ne se réalisa pas. Garrettson continua plutôt d’œuvrer comme prédicateur itinérant et exerça pendant de nombreuses années la tâche de président du district de New York. Il avait une propriété à Rhinebeck et employait sa fortune considérable, que son mariage avec une Livingston avait d’ailleurs encore grossie, à soutenir la cause méthodiste, en particulier dans l’état de New York. Jusqu’à sa mort, qui survint en 1827, Garrettson critiqua vivement le « péché scandaleux » de l’esclavage et demeura un disciple enthousiaste et engagé de John Wesley.
Le journal manuscrit et d’autres papiers de Freeborn Garrett son se trouvent dans la collection Garrettson de la Drew Univ. Library (Madison, N.J.) ; des photocopies de la correspondance relative à l’Amérique du Nord britannique et une copie du journal sur microfilm sont disponibles à l’UCC-C. De la documentation tirée de ce journal a connu plusieurs éditions ; pour la préparation de cette biographie, nous avons utilisé : The life of the Rev. Freeborn Garrettson ; compiled from his printed and manuscript journals and other authentic documents, Nathan Bangs, compil. (4e éd., New York, 1838) ; et Freeborn Garrettson, American Methodist pioneer : the life and journals of the Rev. Freeborn Garrettson, 1752–1827, introd. de R. D. Simpson, édit. (Rutland, Vt., 1984). Une communication autobiographique prononcée par Garettson en 1826 devant la New York Annual Conférence a paru l’année suivante sous le titre de « Methodism in America », Wesleyan-Methodist Magazine (Londres), 50 (1827) : 672–676, 740–745, 810–815. The New Light letters and spiritual songs, 1778–1793, G. A. Rawlyk, édit. (Hantsport, N.-É., 1983).— R. Reece, « Death of the Rev. Freeborn Garrettson », Wesleyan-Methodist Magazine, 50 : 861.— DAB.— W. C. Barclay, History of Methodist missions (3 vol., New York, 1949–1959), 1.— S. D. Clark, Church and sect in Canada (Toronto, 1948).— G. [S.] French, Parsons & politics : the rôle of the Wesleyan Methodists in Upper Canada and the Maritimes from 1780 to 1855 (Toronto, 1962).— J. T. Hughes, An historical sketch of the life of Freeborn Garrettson, pioneer Methodist preacher (Rhinebeck, N. Y., 1977).— G. A. Rawlyk, « Freeborn Garrettson and Nova Scotia » (communication faite devant la World Methodist Hist. Soc., Asbury Theological Seminary, Wilmore, Ky., 1984) ; Ravished by the spirit: religious revivals, Baptists, and Henry Alline (Kingston, Ontario, et Montréal, 1984).— Matthew Richey, A memoir of the late Rev. William Black, Wesleyan minister, Halifax, N.S., including an account of the rise and progress of Methodism in Nova Scotia [...] (Halifax, 1839).— T. W. Smith, History of the Methodist Church within the territories embraced in the late conference of Eastern British America [...] (2 vol., Halifax, 1877–1890).— Abel Stevens, The women of Methodism [...] (New York, 1866).— N. A. McNairn, « Mission to Nova Scotia », Methodist Hist. (Lake Junalaska, N.C.), 12 (1973–1974), nº 2 : 3–18.— W. J. Vesey, « Freeborn Garrettson : apostle to Nova Scotia » Methodist Hist., 1 (1962–1963), nº 4 : 27–30.
George A. Rawlyk, « GARRETTSON, FREEBORN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/garrettson_freeborn_6F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
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