EROUACHY (Eroachi, Esrouachit ; connu des Français sous les noms de « La Ferrière », « La Forière », « La Fourière », « La Foyrière »), chef des Montagnais des environs de Tadoussac, qui, de sa propre autorité, servit souvent d’intermédiaire entre son peuple et les Français ; circa 1618–1636 (?).

Erouachy professait son amitié pour les Français et cherchait à obtenir d’eux des faveurs. En 1618, on l’envoya à Québec pour négocier avec les Français au sujet du meurtre de deux Européens par des Montagnais, commis deux ans auparavant près du cap Tourmente. En juillet 1623, il avertit les Français d’une attaque imminente contre Tadoussac et Québec, que préparait Cherououny, autre chef montagnais, peut-être à l’instigation de trafiquants de fourrures indépendants.

En 1627, les Montagnais se montraient encore ennuyés des restrictions que les Français imposaient au commerce et prétendaient que la compagnie de traite exigeait plus pour ses marchandises que les trafiquants indépendants. Lorsque deux autres Français, Dumoulin et Henri, domestique de Mme Hébert [V. Rollet], furent assassinés près de Québec en octobre de la même année, les Français prirent trois jeunes gens comme otages jusqu’à ce qu’on leur livrât les coupables. Erouachy entreprit de nouveau de négocier avec les Français. En mai 1628, il se rendit à Québec avec un homme que Chomina, Montagnais ami des Français, avait accusé des meurtres. Erouachy s’efforça de justifier son compagnon en rejetant la responsabilité des crimes sur certains Algonquins ; lorsque Champlain, ne croyant pas son récit, arrêta le suspect, il le pria de bien traiter cet homme en attendant de nouvelles preuves. Erouachy passa l’hiver parmi les Abénaquis et, en avril 1629, il retourna à Québec pour proposer une alliance entre cette tribu et les Français. Cette proposition plut grandement à Champlain, parce qu’on disait que les Abénaquis cultivaient du maïs. Il pensait que des Français pourraient hiverner chez ces Indiens, si les navires de France, pris par David Kirke l’été précédent et de nouveau menacés par les Anglais, ne réussissaient pas à atteindre Québec.

Erouachy affirma aussi son amitié envers les Français en les avertissant de se méfier des indigènes de Tadoussac ; les Français savaient déjà qu’ils avaient aidé Kirke lorsqu’il avait pris ce poste l’année précédente. Erouachy offrit en outre d’envoyer un de ses hommes protéger les Français qui pêchaient ou chassaient loin de l’établissement. Enfin, il répéta une histoire qu’il avait entendu raconter parmi les Loups (Mohicans) et qui attribuait aux machinations d’un Indien de l’île aux Allumettes la mort de Pierre Magnan et de Cherououny, alors en mission de paix au pays des Iroquois. Erouachy en profita pour renouveler son plaidoyer en faveur du prisonnier. Champlain promit de ne pas agir avant le retour des navires et la réunion annuelle des indigènes.

En juin, les Français de Québec ayant épuisé leurs provisions, Erouachy demanda avec instance qu’on relâchât le prisonnier, alors malade par suite de sa longue détention. Craignant les Indiens et se trouvant dans des circonstances précaires, Champlain finit par y consentir, mais seulement si on lui livrait un autre otage et si Chomina, à qui revenait en fin de compte le mérite de la libération du prisonnier, était élu principal représentant des tribus qui traitaient avec les Français. Ces exigences semblent avoir été inspirées par la méfiance des Français envers Erouachy, à l’égard de qui Chomina se montrait aussi hostile.

Les brefs récits de Champlain nous éclairent bien peu sur le caractère d’Erouachy ou sur les phases les plus importantes de sa vie. Comme son ennemi et rival possible Cherououny, il paraît avoir été loin de se montrer bien disposé envers les Français de Québec. On ne possède pas la preuve qu’il s’imposait vraiment parmi ses compatriotes. Peut-être, homme faible de nature, recherchait-il la faveur des Français, mais il ne réussit jamais à gagner leur confiance.

En 1636, les Jésuites mentionnent que la femme d’Erouachy offrit sa fille au baptême. On ne sait pas au juste si Erouachy vivait encore à cette époque.

Bruce G. Trigger

Champlain, Œuvres (Biggar).— JR (Thwaites), IX : 32.-Sagard, Histoire du Canada (Tross), passim.— Desrosiers, Iroquoisie, 111.— P.-G. Roy, La Ville de Québec, I : 65s.

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Bruce G. Trigger, « EROUACHY (Eroachi, Esrouachit) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/erouachy_1F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1966
Année de la révision:    1986
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