DEBLOIS, JOSEPH-FRANÇOIS, officier de milice, avocat, homme d’affaires, homme politique et juge, né le 22 avril 1797 à Québec, fils de François Deblois, marchand, et de Marie-Geneviève Létourneau ; décédé le 10 août 1860 à Québec.

Entré au petit séminaire de Québec en 1810, Joseph-François Deblois y étudie jusqu’en 1813. À l’automne de 1812, après que la guerre eut éclaté avec les États-Unis, il est enseigne dans le 1er bataillon de milice de la ville de Québec. La mort de son père en janvier 1814, au moment où les affaires de la famille vont plus ou moins bien, oblige Deblois, à titre de fils aîné, à aider sa mère à gérer son magasin. De 1821 à 1826, il fait son stage de clerc chez Louis Lagueux*, avocat de Québec, tout en travaillant une partie de la journée au magasin de sa mère. Il est admis au barreau le 1er avril 1826.

Dans le but d’aider sa mère aux prises avec divers créanciers qui lui réclament plus de £980, Deblois l’acquitte en mai 1826 d’une importante somme qu’elle lui doit et, tout comme ses frères, il renonce à ses droits de succession. Il devient également l’un des fidéjusseurs de sa mère. Les créanciers ayant accordé à cette dernière un délai de paiement, Deblois décide de tenter fortune dans le district de Gaspé, « dont il avait entendu parler ». Après avoir visité la région, il retourne à Québec afin de faire les préparatifs et les achats nécessaires à une importante entreprise de pêche au hareng à la baie de Cascapédia, dans la’ baie des Chaleurs. Il pense avoir trouvé ainsi un moyen efficace de solutionner les problèmes financiers de la famille. À la fin d’août 1826, il est de retour en Gaspésie avec son frère François-Xavier, qui gérera le magasin de New-Richmond. Cependant, les résultats sont médiocres, et il faut payer le salaire et la nourriture des engagés ainsi que le loyer des hangars. De plus, les embarcations, les filets et le matériel de pêche utilisés ont subi des dommages. L’entreprise se solde donc par des pertes financières à l’automne de 1826.

Parallèlement à cette entreprise de pêche, Deblois commence à pratiquer dans la péninsule gaspésienne à titre de procureur et d’avocat à la Cour provinciale du district de Gaspé. Il est alors un des premiers hommes de loi à exercer sa profession de façon permanente en Gaspésie. Le 28 juillet 1827, il fait l’acquisition d’une ferme et de deux lots à New-Carlisle, petit village loyaliste et principal centre administratif et judiciaire de la région. Son frère François-Xavier vient bientôt le rejoindre, ainsi que sa mère et son plus jeune frère. Deblois achète encore deux terrains à New-Carlisle en décembre 1828, puis un autre en avril 1830. Vers la même année, la ferme compte quelques animaux, dont le soin est confié à un employé.

À l’automne de 1834, Deblois se présente comme candidat aux élections de la chambre d’Assemblée du Bas-Canada dans la circonscription de Bonaventure, alors représentée par deux députés. Il est élu le 5 décembre avec un autre avocat, Édouard Thibaudeau, qui renouvelle son mandat. Le Canadien qualifie les deux hommes de « réformistes » et attribue la défaite de l’ancien député, John Robinson Hamilton, à son vote contre les Quatre-vingt-douze Résolutions. Il semble que Deblois ait bénéficié de l’aide du missionnaire de Carleton, Louis-Stanislas Malo, dont la desserte recouvre tout l’ouest de la circonscription.

Entre-temps, la situation financière de Deblois ne semble guère s’être améliorée. Ainsi, le 13 septembre 1834, il emprunte une somme d’argent à Amasa Bebee, greffier de la Cour provinciale du district de Gaspé, et hypothèque les cinq terrains et la ferme qu’il possède à New-Carlisle. Le 15 avril 1835, quelques mois après son arrivée à Québec afin de participer à la session de la chambre d’Assemblée, il apprend que Bebee le poursuit pour une somme de £64 et qu’un jugement le rendant coupable de non-paiement de dette a été rendu en son absence par John Gawler Thompson, juge de la Cour provinciale du district de Gaspé. Hamilton, avocat à New-Carlisle et neveu de Thompson, semble être mêlé à cette histoire, tout comme à une autre poursuite intentée par Peter Du Val, marchand de l’île Bonaventure, vers la même époque.

Le 16 novembre 1835, Deblois demande en chambre la destitution du juge Thompson. Il l’accuse d’être incompétent, de s’être rendu coupable « de grands crimes et de malversations », d’être « partial, capricieux, arbitraire et vindicatif », d’être souvent ivre dans l’exercice de ses fonctions et de s’être immiscé dans la dernière élection tenue dans la circonscription de Bonaventure « avec les ennemis déclarés des libertés du Peuple ». Cette histoire qui, au départ, met en présence deux groupes rivaux à l’échelon local est rapidement récupérée au niveau provincial, dans la foulée des luttes que se livrent la chambre d’Assemblée et le Conseil exécutif. D’ailleurs, au même moment, les députés patriotes protestent contre le fait que Samuel Gale* a été nommé juge de la Cour du banc du roi à Montréal en 1834. Thompson était aussi reconnu comme un ami de l’ancien gouverneur Dalhousie [Ramsay*] et de Robert Christie, ex-député de Gaspé.

Les accusations sont soumises au comité permanent des griefs de l’Assemblée, dont Deblois fait partie. Le 12 mars 1836, le comité déclare les accusations fondées et recommande au gouverneur Gosford [Acheson*] de suspendre Thompson jusqu’à ce qu’il soit destitué. La chambre approuve la résolution par 37 voix contre 4. Cependant, Gosford ne veut pas prendre de décision avant d’avoir entendu Thompson. À l’automne de 1836, ce dernier ainsi que des sympathisants affirment au gouverneur que Deblois se contredit parce qu’il a déjà défendu le magistrat à la suite de plaintes portées contre lui en 1827 et 1828, que l’avocat a mal accepté la concurrence de Hamilton et qu’il veut devenir juge à la place de Thompson. Gosford soumet la question à lord Glenelg, secrétaire d’État aux Colonies, qui lui la renvoie au comité judiciaire du Conseil privé. Le gouverneur décide de ne pas destituer Thompson avant d’avoir reçu une réponse de Londres. La décision prise semble avoir été favorable à Thompson, car il continue d’exercer ses fonctions.

Le 27 mars 1838, à la suite des troubles politiques et de la suspension de la constitution du Bas-Canada, le Parlement est dissous. Deblois demeure toutefois à Québec où il exerce son métier d’avocat. Il est aussi capitaine dans le 1er et le 2e bataillon de milice de la ville de Québec (il avait été adjudant de milice en Gaspésie au cours des années 1830).

Nommé un des deux juges en tournée du district de Gaspé le 9 juillet 1849, Deblois s’installe à Percé le 6 août. Sa circonscription judiciaire comprend aussi les îles de la Madeleine ; le second magistrat n’est nul autre que le fameux juge Thompson, en poste à New-Carlisle. En tant que magistrat, Deblois est sollicité de plusieurs façons par les péninsulaires. Ainsi, le 27 février 1852, il devient président de la Société d’agriculture de Gaspé. Ses problèmes financiers semblent réglés, car il donne et prête très souvent de fortes sommes d’argent à diverses, fabriques du comté de Gaspé afin d’aider, notamment, à la construction d’églises à Grande-Rivière et à Cap-d’Espoir ainsi qu’à celle d’une école à Percé. En 1857, il prête £300 à l’archevêché de Québec. Il a confié l’administration et la gestion de ses affaires à Québec au notaire Michel Tessier. Entre 1852 et 1857, il fait l’acquisition d’une terre et de deux emplacements à Saint-Lazare, près de Québec, sur lesquels il établit son frère François-Xavier.

En juin 1857, une loi abolit les charges de juge en tournée, et Joseph-François Deblois n’est pas réintégré dans d’autres fonctions. On lui avait suggéré de demander sa retraite afin de pas avoir l’air d’être destitué. Il obtient ainsi une pension correspondant au tiers de son salaire de juge. En mai 1858, il retourne vivre à Québec où il meurt le 10 août 1860, après une maladie de quelques jours.

Marc Desjardins

AAQ, T, D.— AC, Bonaventure (New-Carlisle), Minutiers, J.-G. Lebel, 25 janv., 10 oct. 1835 ; Martin Sheppard, 28 juill. 1827, 12 nov. 1830.— ANQ-Q, CE1-1, 22 avril 1797 ; CN1-261, 6 juin, 26 juill. 1859 ; P1000-27-505.— APC, MG 30, D1, 10 : 94-96 ; RG 4, B8, 22 : 8018-8027 ; RG 9, I, A5, 13-16 ; A6, 1-3 ; A7, 18.— ASQ, E, 4.— B.-C., chambre d’Assemblée, Journaux, 1835-1836 : 143-144, 500-501, 693-694, app. EE, app. OO.— Canada, prov. du, Assemblée législative, App. des journaux, 1841, app. W.— Le Canadien, 7 janv. 1835.— Le Courrier du Canada, 13, 15 août 1860.— La Gazette de Québec, 7 janv. 1835.— Almanach de Québec, 1826-1841.— F.-J. Audet, « les Législateurs du B.-C. ».— Quebec directory, 1847-1850.— P.-G. Roy, les Avocats de la région de Québec ; Fils de Québec, 3 : 79-81 ; les Juges de la prov. de Québec, 153.— J.-G. Barthe, Souvenirs d’un demi-siècle ou Mémoires pour servir à l’histoire contemporaine (Montréal, 1885), 169-180.— Jules Bélanger et al., Histoire de la Gaspésie (Montréal, 1981).— Christie, Hist. of L.C. (1848-1855), 4 : 205-208.— « Les Disparus », BRH, 32 (1926) : 172.

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Marc Desjardins, « DEBLOIS, JOSEPH-FRANÇOIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/deblois_joseph_francois_8F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
Année de la révision:    1985
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