DANFORTH, ASA, colonisateur et constructeur d’une route, né le 29 juin 1768 à Brookfield, Massachusetts, fils d’Asa Danforth et de Hannah Wheeler ; en 1789, il épousa au même endroit Olive Langdon, et ils eurent trois filles ; décédé en 1821 ou après.
En 1788, Asa Danforth père partit s’établir dans la vallée d’Onondaga, dans l’état de New York, avec sa famille. L’année suivante, son fils Asa retourna à Brookfield pour se marier et peu après s’installa avec sa femme à Salt Point, localité qui porta plus tard le nom de Salins (Syracuse, New York), où il s’occupa de la production de sel. Asa Danforth père était un personnage important dans la région d’Onondaga et John Graves Simcoe*, premier lieutenant-gouverneur du Haut-Canada, le considérait comme « l’ennemi le plus virulent de la Grande-Bretagne dans le pays ». Il était donc assez étonnant de voir, en 1797, le jeune Danforth arriver dans la province en quête des faveurs du gouvernement.
En 1792, Simcoe avait instauré une politique qui consistait à confier des cantons entiers à l’exploitation exclusive de colonisateurs dans l’espoir d’en accélérer le peuplement. Il y avait apparemment un malentendu au sujet des avantages offerts aux agents de développement de cantons ; ils semblaient penser qu’on leur avait promis une concession inconditionnelle de leurs cantons s’ils réussissaient à y établir un certain nombre de nouveaux colons. En fait, ils n’avaient droit qu’à 1 200 acres de terre et à installer des colons là où ils le voulaient. Quoi qu’il en soit, il devint vite évident que le projet était voué à l’échec. En mai 1796, Simcoe proclama que plusieurs de ces cantons étaient confisqués parce qu’ils n’avaient pas été colonisés et déclara que ceux qui prétendaient avoir colonisé leurs cantons devaient en fournir les preuves au Conseil exécutif au plus tard le 1er juin 1797. Danforth était, selon son expression, « lié [...] à la colonisation » des cantons de Haldimand, de Hamilton, de Percy et de Cramahe, et pour démontrer que les propriétaires de ces cantons avaient rempli leurs obligations, il se présenta devant le conseil en 1797, demandant que quelque 205 colons soient confirmés dans la possession de leurs lots.
Le président Peter Russell* adopta une attitude plus conciliante envers les propriétaires que son prédécesseur Simcoe ; les cantons confisqués furent rouverts en juillet 1797, mais leurs propriétaires, dont Danforth, devinrent éligibles à 1 200 acres de terre chacun, à la condition de devenir des résidents de la province. Cette décision du conseil souleva beaucoup de mécontentement et, à l’instigation d’un des propriétaires les plus déçus, William Berczy*, des notifications d’opposition furent déposées pour contester au conseil le droit de céder des terres qui avaient déjà des propriétaires. Pour protéger leurs droits à ces quatre cantons, Danforth et ses associés enjoignirent à leur procureur, William Weekes* de se joindre aux protestations en déposant aussi des notifications d’opposition. Outragé, le conseil rejeta leur intervention « des plus inopportunes et injustifiées » et annula sa recommandation concernant la concession de 1 200 acres de terre que devait recevoir personnellement Danforth. Au début de 1799, ce dernier s’excusa, expliquant qu’il avait promis à ses concitoyens des États-Unis « d’employer tous les moyens possibles » et qu’il n’avait pas eu l’intention de faire preuve d’ « irrespect ». Le conseil accepta ses excuses et lui rendit ses concessions. Ce n’était toutefois pas la fin de ses difficultés. En 1798, deux colons qui avaient pris part à la colonisation des quatre cantons se plaignirent au conseil que le nom de Danforth avait été inscrit dans les registres, au lieu des leurs, vis-à-vis les lots où ils s’étaient installés et auxquels ils avaient apporté des améliorations. Le conseil exigea une enquête et, à la suite du rapport présenté en 1799, accusa Danforth et ses associés de fraude et de duplicité. En conséquence, tous les certificats de lots délivrés antérieurement dans ce canton furent suspendus ; aucun nouveau permis ne fut remis avant le 1er juillet 1800 et, après cette date, ils le furent seulement lorsqu’on put prouver que des améliorations avaient déjà été faites.
Il est cependant assez étonnant de constater que, malgré l’enquête qui était en cours, le conseil avait passé un contrat avec Danforth le 9 avril 1799, sur la recommandation de Russell, pour qu’il ouvre une route de York (Toronto) jusqu’à l’embouchure de la rivière Trent. Elle devait être terminée, avec les ponts et les chaussées, pour le 1er juillet 1800. À mesure que la route avancerait et serait inspectée, Danforth recevrait une partie de la somme convenue et le reste à l’achèvement des travaux. Cependant, les paiements tardèrent et il fut gêné par un manque de capitaux. En mars 1800, au cours d’un bref séjour aux États-Unis, il fut emprisonné pour dettes. Libéré, il retourna dans le Haut-Canada en mai, demanda et obtint une prolongation des travaux puis termina la route le 18 décembre.
Le conseil ne fut pas satisfait du travail de Danforth, qui ne reçut qu’une partie du paiement et fut avisé qu’il n’en recevrait pas d’autre tant que la route ne serait pas achevée convenablement. Amer, Danforth retourna faire un court séjour aux États-Unis où les pressions de ses créanciers ne s’étaient pas relâchées. Il prétendit avoir eu plusieurs entretiens avec Aaron Burr, candidat à la présidence. Il prévoyait qu’une victoire du parti républicain aurait « des conséquences heureuses pour ceux qui [avaient] été entraînés à l’extérieur du pays par les belles promesses du général Simcoe et ses semblables [...] Quand le Conseil exécutif [avait] constat[é] que [les] éricains avaient choisi parmi les meilleures terres de la province, [il avait] conçu un plan pour résilier [les contrats] et reprendre les terres jusque-là concédées et y [avait] fait les locations de [son] choix. » Danforth pensait que les fonctionnaires du Haut-Canada redoutaient l’éclipse éventuelle du pouvoir britannique en Amérique du Nord, mais que « les trois quarts de la population [auraient été] favorables à un changement ». Il revint dans le Haut-Canada en juin 1801, espérant un règlement satisfaisant de ses réclamations au sujet des terres et de l’argent, mais il fut de nouveau déçu et quitta définitivement la province en janvier 1802.
Avant de partir, Danforth organisa une réunion à Albany, dans l’état de New York, pour les citoyens du Haut-Canada qui étaient insatisfaits. Joseph Brant [Thayendanegea*], Ebenezer Allan* et Silvester Tiffany* comptaient parmi les mécontents qu’il espérait rallier à son but, qui était de renverser le gouvernement provincial. Apparemment, plusieurs réunions eurent lieu, sans qu’il en ressorte quoi que ce soit. Jusqu’en 1806 Danforth crut pouvoir récupérer les terres et les sommes qui lui étaient dues. Sa raison d’espérer avoir finalement gain de cause venait du succès obtenu par Weekes dans ses attaques contre la façon dont Peter Hunter* administrait les fonds publics.
Asa Danforth passa quelques années à Salina, où il travailla à ses concessions de sel, mais il était constamment embarrassé par le manque de capitaux et forcé d’emprunter pour financer les améliorations qui s’imposaient. En 1811, il loua son équipement et ses droits sur le sel à son principal créancier, qui se porta finalement acquéreur de toute la propriété. La dernière mention qu’on a de Danforth date de 1821 : il était alors à New York et se cachait du shérif. La route qui lui avait valu la célébrité n’eut pas un bien meilleur sort. Des rapports officiels datés d’octobre 1802 étaient très sévères à son sujet. Défectueuse dès le début, elle s’était détériorée en quelques années et n’était plus guère utilisée.
APC, RG 1, E3, 32 : 37–43 ; RG 5, A1 : 557–559.— Syracuse Univ. Libraries, George Arents Research Library (Syracuse, N.Y.), Green family coll., Timothy Green papers.— Corr. of Hon. Peter Russell (Cruikshank).— Onondaga Hist. Soc., Pub. (Syracuse), 1913 : 134–136 ; 1914 : 168.— « U. C. land book D », AO Report, 1931.— Danforth genealogy : Nicholas Danforth, of Framlingham, England, and Cambridge, N.E. (1589–1638) and William Danforth, of Newbury, Mass. (1640–1721) and their descendants, J. J. May, compil. (Boston, 1902).— Canniff, Hist. of the settlement of U. C.— J. V. H. Clark, Onondaga, or reminiscences of earlier and later times [...] (2 vol., Syracuse, 1849 ; réimpr., Millwood, N.Y., 1973), 2 : 108, 139–140.— Cowdell Gates, Lands policies of U.C.— George Geddes, Report on the agriculture and industry of the county of Onondaga, state of New York [...] from the transactions of the N.Y. State Agricultural Society, 1859 (Albany, N. Y., 1860).— J.-P. Wallot, Intrigues françaises et américaines au Canada, 1800–1802 (Montréal, 1965).— C. J. Werner, A history and description of the manufacture and mining of salt in New York State (Huntington, N.Y., 1917), 28–29.— L. F. [Cowdell] Gates, « Roads, rivals, and rebellion : the unknown story of Asa Danforth, Jr. », OH, 76 (1984) : 233–254.
Lillian Francis Gates, « DANFORTH, ASA », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/danforth_asa_6F.html.
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
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