CROWE, JOSIAS, commodore du convoi de Terre-Neuve en 1711, décédé le 21 septembre 1714.

On mentionne pour la première fois Crowe comme capitaine du St. Paul en 1691. Durant la guerre contre les Français, il commanda plusieurs autres navires. En 1695, il fut capitaine du convoyeur de la flotte marchande américaine ; puis en 1701 il servit à la station navale de la Nouvelle-Angleterre, ce qui lui permit d’acquérir une certaine expérience des rouages de l’administration coloniale anglaise.

En 1711, Crowe fut nommé commodore du convoi annuel de Terre-Neuve. On l’avait chargé de faire rapport sur les activités des Français, sur les pêcheries, les habitants et les navires de pêche. De plus, il lui fallait appliquer la loi de 1699 sur les pêcheries terre neuviennes. Il causa beaucoup d’émoi parmi les paisibles fonctionnaires en demandant qu’on lui indiquât avec précision quelles sanctions il aurait le droit d’infliger. Finalement, on se borna à lui dire d’employer « les méthodes les plus efficaces [...] pour remédier aux nombreux manquements à la loi encore fréquents dans ces parages ».

Durant son séjour à Saint-Jean, du mois d’août au mois d’octobre, Crowe prit ses fonctions au sérieux. Dans le but d’enrayer les effets néfastes de l’alcool, il rendit le 28 août un décret qui défendait la vente d’alcool le jour du Seigneur à toute personne sauf à des étrangers et rendait passibles d’une amende les gens trouvés en état d’ivresse. Toutefois, il n’est pas dit clairement à qui revenait la tâche d’appliquer les sanctions. Le décret fut sans doute imprimé ou reproduit à plusieurs exemplaires puisque chaque taverne était tenue de l’afficher.

Dans l’exercice de leurs fonctions, assez mal définies d’ailleurs, les commodores avaient l’habitude de consulter les capitaines marchands et les notables de la colonie. Crowe le fit d’une façon à la fois plus ouverte et plus poussée que ses prédécesseurs. Il réunit « les capitaines des navires marchands, les négociants et les principaux citoyens » en un groupe non officiel en vue d’établir des « règlements et des ordres » pour améliorer la situation dans l’île. Les décisions de Crowe furent ensuite promulguées sous le nom de « lois de Crowe » mais ces 16 articles ne constituent pas un code de loi et il n’est pas certain qu’ils aient eu valeur législative. Un certain nombre n’étaient que des décisions judiciaires ou quasi judiciaires prises en vue de régler les différends qui mettaient aux prises les habitants, ou les habitants et les pêcheurs saisonniers. De nouveau, les excès causés par l’alcool y étaient dénoncés. En outre, tout serviteur qui essayerait de servir deux maîtres devenait passible de punition. On prenait certaines dispositions en vue d’appliquer la loi de 1699 : tout colon installé sur une grève, qui depuis 1685 avait été occupée à un moment donné par l’équipage d’un morutier, était dépossédé et tous ceux qui durant l’hiver touchaient aux échafauds, aux vigneaux et aux cuisines appartenant aux navires de la flotte saisonnière étaient punis. Une contribution volontaire devait être prélevée en nature (poissons) pour rétribuer le révérend Jacob Rice, ministre du culte. John Collins, notable de Saint-Jean, se voyait confirmé dans ses fonctions de « gouverneur adjoint » des affaires militaires. Des règlements stipulèrent que les quartiers à l’intérieur du fort serviraient de refuge, vu qu’il n’y avait pas encore de garnison régulière. Des marins feraient la garde durant la nuit au cas où les Français enverraient des espions. Dès le 1er octobre, tous les habitants se retireraient dans les locaux d’hiver qu’ils ne pourraient quitter sans la permission des gouverneurs de l’endroit. Ceux-ci, au nombre de neuf, dont Collins, avaient été chargés des principaux établissements et placés à la tête de la milice. Beaucoup de ces dispositions avaient été prises entre 1708 et 1710 pour parer aux éventualités de la guerre. Bien que Crowe ait été plus minutieux, qu’il ait procédé d’une façon à la fois plus officielle et plus ouverte que la plupart des commodores, les historiens qui, comme Prowse, ont cru que les « lois de Crowe » préfiguraient une forme quelconque de gouvernement représentatif se sont trompés.

Crowe fit, en vue d’une réforme, des recommandations raisonnables mais qui manquaient d’originalité. Bien sûr, pour le bien de la colonie il était essentiel qu’on nommât un gouverneur résident « dûment muni des pouvoirs nécessaires pour faire appliquer la loi ». Crowe fit encore preuve de bon sens quant aux nombreuses infractions à la loi sur le commerce. Selon lui, bien peu de ces infractions étaient de nature sérieuse et il y en avait quelques-unes qu’il valait mieux ne pas corriger, par exemple le commerce maritime avec la Nouvelle-Angleterre qui, tout en étant la cause de bien d’autres, fournissait des marchandises indispensables à la colonie. Son rapport, en date du 31 octobre, était plus complet et faisait preuve de plus d’esprit critique que les rapports habituels mais ne s’éloignait guère des usages établis.

Son successeur, Sir Nicholas Trevanion, commodore en 1712, suivit de très près sa façon de procéder mais, par la suite, les capitaines du convoi jugèrent que tant de bruit et de formalités n’étaient pas nécessaires.

D. B. Quinn

The Fulham papers in the Lambeth palace library, W. W. Manross, édit. (Oxford, 1965), 3.— PRO, B. T. Journal, 1708/9–1714/15 ; CSP, Col., 1701, 1710–11, 1711–12, 1712–14.— Charnock, Biographia navalis, II.— M. A. Field, The development of government in Newfoundland, 1638–1713, thèse de M.A., University of London, 1924.— Prowse, History of Nfld.— Rogers, Newfoundland.

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D. B. Quinn, « CROWE, JOSIAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/crowe_josias_2F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1969
Année de la révision:    1991
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