CREIGHTON, JOHN, libraire, éditeur, conseiller municipal et directeur de pénitencier, né le 19 août 1817 près de Clandeboye, comté de Down (Irlande du Nord), fils de Hugh Creighton et de Mary Young ; le 8 octobre 1850, il épousa Frances Coverdale, sœur d’un charpentier et architecte de Kingston, William Coverdale*, et ils eurent huit enfants ; décédé le 31 janvier 1885 à Portsmouth, Ontario.

C’est en 1823 que John Creighton, l’aîné de quatre frères, arriva avec sa famille à Kingston, dans le Haut-Canada. Il fréquenta la Midland District Grammar School en compagnie de John Alexander Macdonald*, avec lequel il se lia d’une amitié qui dura toute sa vie. Après avoir travaillé comme apprenti imprimeur chez John Lovell*, à Montréal, il fut employé au Chronicle & Gazette de Kingston où il accéda au poste de prote. En 1846, il entra à l’Argus de Kingston en qualité d’imprimeur et de gérant, et rédigea des articles sur les affaires commerciales. Il devint conseiller presbytéral à l’église presbytérienne St Andrew, fit partie de divers comités paroissiaux et enseigna à l’école du dimanche. En 1844, il fut élu président de la Kingston Typographical Society, l’un des premiers syndicats ouvriers de cette ville, et, pendant son mandat, il s’efforça d’empêcher l’engagement d’apprentis à la place de compagnons imprimeurs.

Creighton s’installa dans l’état de New York en 1848, mais revint à Kingston l’année suivante, et, en 1851, devint commis dans une librairie-papeterie qu’il eut tôt fait d’acheter. En 1853, il avait ajouté à son entreprise un service d’impression de travaux de ville et un atelier de reliure qui furent dirigés par son frère, James Moore, jusqu’à son décès en 1865. Certaines publications parurent sous son nom d’imprimeur, « John Creighton », d’autres sous celui de son frère, « James M. Creighton ». Ils publièrent ainsi un grand nombre de brochures, de sermons et de tracts religieux, les Annals de la Botanical Society of Canada, au moins trois recueils de poésie, dont celui de Charles Sangster*, The St. Lawrence and the Saguenay, and other poems (1856), quelques ouvrages d’imagination en prose et des travaux d’histoire locale.

De 1859 à 1862, Creighton siégea au conseil municipal de Kingston à titre d’échevin du quartier Victoria ; élu maire en 1863, il fut réélu sans opposition en 1864 et 1865. En qualité de maire, il fit agrandir le City Park et améliora l’état sanitaire de la place du marché ; quand il recommanda de puiser dans les fonds publics les sommes nécessaires à l’aide aux pauvres, il obtint, par vote du conseil, un crédit de $800 à dépenser comme il jugerait à propos. En janvier 1865, lorsque le feu détruisit l’aile de l’hôtel de ville qui abritait le marché, Creighton reçut l’autorisation de reconstruire le bâtiment et de faire installer une horloge pour le dôme.

Nommé magistrat de police en 1866 et directeur intérimaire du pénitencier de Kingston en octobre 1870, Creighton continua de s’occuper de ses affaires commerciales jusqu’en janvier 1871, date à laquelle le gouvernement de sir John A. Macdonald le désigna officiellement au poste de directeur de cette prison. Il fut non seulement le plus respecté des directeurs dans l’histoire de l’établissement, mais peut-être également celui qui réussit le mieux dans ses fonctions. Il se montra un administrateur compétent et un réformateur humanitaire et perspicace. Son principal souci n’était pas le châtiment mais bien la réhabilitation. Il s’efforçait de faire comprendre à son personnel que même les pires malfaiteurs méritaient de la compassion et que les quatre cinquièmes d’entre eux réagiraient favorablement s’ils étaient traités d’une manière ferme mais bienveillante. Creighton éprouvait de la répulsion pour la peine du fouet, qu’il jugeait dégradante pour les détenus, bien que nécessaire en dernier recours pour venir à bout des insoumis. S’il lui arrivait d’imposer cette peine, il assistait avec le médecin de la prison à l’exécution du châtiment qu’il faisait souvent abréger.

Aux yeux de Creighton, la première étape de la réforme morale des prisonniers consistait à rendre meilleures les conditions matérielles de leur détention. Il améliora donc l’éclairage, le chauffage et la ventilation des lieux, ainsi que les chaussures, les uniformes et la literie des détenus ; il inspecta attentivement toutes les fournitures de cuisine et veilla à la préparation de mets plus variés. Il instaura des périodes d’exercice deux fois plus longues et en fit profiter tous les prisonniers. Creighton prenait ses repas à la salle à manger de la prison, entendait lui-même les doléances et visitait les hommes dans leurs cellules, aux ateliers, à la ferme pénitentiaire et dans les carrières de pierre. Il mit sur pied une bibliothèque de prêt, améliora le matériel scolaire, offrit des cours du soir et permit des divertissements que les détenus organisèrent eux-mêmes les jours de congé.

En octobre 1873, après avoir visité six des plus grandes prisons américaines, notamment celle de Sing Sing dans l’état de New York, Creighton nota avec satisfaction : « dans aucun de ces établissements les prisonniers ne sont aussi bien nourris ou vêtus que chez nous ». Parmi les détenus se trouvaient des Féniens arrêtés en 1866. L’un d’eux, une fois libéré, invita Creighton à son mariage ; un autre déclara qu’il ne pouvait « dire que des paroles aimables à l’endroit du généreux directeur Creighton, car [il] faim[ait] et l’estim[ait] comme [si celui-ci] était [son] propre père ou [son] frère ». L’inspecteur des prisons fédérales, James George Moylan*, éprouvait également une grande admiration pour les réalisations de Creighton. Dans le rapport pour l’année 1881–1882 qu’il adressait au ministre de la Justice, sir Alexander Campbell*, Moylan signala que les travaux de construction et d’amélioration effectués par les détenus sous la direction de Creighton atteignaient une valeur de $120 000, mais avaient coûté moins de $20 000, « preuve tangible et convaincante [...] de l’expérience et du bon jugement manifestés dans l’administration de la prison », écrivait-il. En 1884, Moylan fit observer que Creighton avait œuvré sous l’autorité de sept ministres de la Justice sans que son administration ait été l’objet d’aucune enquête. Lorsqu’une crise cardiaque, causée « par un trop grand souci de son travail », l’obligea à prendre un congé, la haute considération des prisonniers à son égard se traduisit par une « admirable discipline ». En dépit d’une seconde crise en 1884, Creighton était encore au travail quelques jours avant sa mort.

H. Pearson Gundy

APC, RG 31, Al, 1861 census, Frontenac County.— Correctional Staff College (Kingston, Ontario), Canadian Penitentiary Service Museum, Warden John Creighton’s journal, 1870–1874 (mfm aux QUA).— QUA, Corporation of the City of Kingston, Minutes of council, 1852–1866 ; Reports of committees, 1852–1866 ; A. E. Lavell papers, Unpub. hist. of Kingston ; Midland District School Soc., Board of Trustees, Minutes.— St Andrew’s Church (Kingston), Marriage registers.— Canada, Parl., Sessional papers, 1871–1884 (rapports de l’inspecteur des pénitenciers du dominion du Canada).— Chronicle and News, 6 oct. 1865.— Daily British Whig, 31 janv. 1885.— Daily News (Kingston), 3 janv. 1871, 31 janv. 1885.— Globe, 2 févr. 1885.— Weekly British Whig, 5 févr. 1885.— J. A. Edmison, « The history of Kingston Penitentiary », Historic Kingston, no 3 (1954) :26–35.

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H. Pearson Gundy, « CREIGHTON, JOHN (1817-1885) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/creighton_john_1817_1885_11F.html.

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