CAREY, DAVID ARTHUR, machiniste, reporter, dirigeant syndical et fonctionnaire, né le 2 janvier 1859 à Dublin, fils de John Carey et d’Elizabeth Carter ; le 31 juillet 1878, il épousa à Toronto Agnes Theresa Monaghan, puis le 19 octobre 1886, dans la même ville, Annie Glynn, et de ce second mariage naquirent une fille et deux fils ; décédé le 26 mars 1927 au même endroit.
David Arthur Carey immigra au Canada avec sa famille en 1861 ou 1862. Les Carey habitèrent à Québec et à Montréal, où David Arthur étudia dans des écoles séparées. Une fois terminé son apprentissage de machiniste, il s’installa à Toronto et trouva un emploi de monteur de poêles, après quoi il travailla à la manufacture d’instruments aratoires de Hart Almerrin Massey*. En 1878, il épousa Agnes Theresa Monaghan. Leur union connut une fin tragique : la jeune femme, âgée de 19 ans, mourut le 2 février 1879, le lendemain du jour où elle donna naissance à deux jumelles – une mort-née, et l’autre qui ne survécut que six mois. David Arthur se remaria en 1886. Pendant plusieurs années, les Carey vécurent rue Markham ; comme bien des familles, ils arrondissaient leurs fins de mois en ayant un pensionnaire.
Dans les années 1880, Carey joua un rôle important dans le mouvement syndical à Toronto. Inscrit en 1882 à une cellule des Chevaliers du travail formée principalement d’employés de Massey, l’assemblée locale Maple Leaf no 2622, il fut maître-ouvrier de l’assemblée de district durant cinq ans. Avec d’autres syndicalistes chevronnés, notamment le typographe Daniel John O’Donoghue*, le tailleur Alfred Fredman Jury*, les peintres en bâtiment Charles March* et John W. Carter et le journaliste Thomas Phillips Thompson*, il définit les stratégies qui orienteraient l’action du mouvement durant une dizaine d’années. Estimant que des dirigeants de l’ordre des Chevaliers du travail, en particulier Alexander Whyte Wright*, faisaient du tort aux travailleurs en soutenant publiquement tel ou tel parti, il proposa en 1891 à l’assemblée de district d’annuler le mandat de tout délégué qui militait pour les conservateurs ou les réformistes. À la suite de cette dénonciation de l’action politique, le Congrès des métiers et du travail du Canada se substituerait peu à peu au comité législatif de l’ordre comme organe de pression, ce qui affaiblirait la position des Chevaliers du travail.
Pendant ces années tumultueuses, Carey appartint aussi au Toronto Trades and Labor Council, qui avait grandement contribué à la formation du Congrès des métiers et du travail en 1883. Il représenta le Toronto Trades and Labor Council aux assemblées annuelles du congrès en 1894, 1895, 1896, 1900 et 1901, et fut président du congrès de 1896 à 1898. À l’assemblée de cet organisme en 1897, il préconisa des réformes concrètes – entre autres la création de bureaux publics d’emploi ainsi que des mesures sociales et politiques d’envergure – en vue d’enrayer les « mœurs sociales » qui opprimaient les travailleurs canadiens. « Par son nouveau pouvoir éducatif, disait-il, la presse, qualifiée à juste titre de bibliothèque de l’ouvrier et de truchement du pouvoir politique, a mis des idées nouvelles, des principes nouveaux et des aspirations nouvelles dans la tête et le cœur des travailleurs. » L’intérêt de Carey pour la presse pourrait s’expliquer aussi par son changement d’orientation : depuis 1892 environ, il était reporter à l’Evening Telegram de Toronto.
À l’époque, le Congrès des métiers et du travail s’efforçait de préciser la position du syndicalisme canadien par rapport à l’American Federation of Labor. Les sections locales canadiennes exigeaient une plus grosse part du revenu de ce géant international et certains syndicats voulaient même s’en séparer. Le courant autonomiste était né en 1894 à l’assemblée du Congrès des métiers et du travail : un comité composé de Carey, de Patrick Joseph Jobin*, machiniste de Québec, et de James W. Patterson, maraîcher d’Ottawa, avait proposé que le congrès se reconstitue en une fédération syndicale canadienne qui serait habilitée à accorder des chartes et à remplir toutes les autres fonctions d’un syndicat national. Cependant, à l’assemblée de l’année suivante, les dirigeants du congrès se montrèrent réfractaires à l’idée d’aller plus avant sur la voie de l’autonomie. Deux ans plus tard, une motion en faveur de la création d’une fédération canadienne fut battue.
Le dilemme entre syndicalisme international et syndicalisme national était donc résolu, mais un autre problème subsistait : au Canada, beaucoup de syndiqués versaient des cotisations à des organisations essentiellement américaines. En 1898, Carey et le secrétaire du Congrès des métiers et du travail, George W. Dower (typographe torontois), rencontrèrent Thomas Kidd, le premier délégué fraternel (nommé depuis peu) de l’American Federation of Labor auprès du congrès. La fédération américaine proposait de verser une subvention de 100 $ au Congrès des métiers et du travail afin d’aider son comité législatif et d’apaiser le mécontentement de ses membres. Le congrès accepta la proposition et élut un premier délégué fraternel – Carey en l’occurrence – auprès de l’American Federation of Labor. Le congrès, semble-t-il, ne se rendait pas compte que la fédération américaine agissait dans son propre intérêt. Dès 1901, Carey défendait clairement la position de celle-ci : un plus grand nombre de lois portant expressément sur le travail et moins d’action politique directe. En 1902, le congrès expulsa un certain nombre de syndicats, qui formèrent ensuite une fédération canadienne, mais cette dernière ne réussit pas à s’imposer. Au bout du compte, l’incapacité de former un organisme national efficace assurerait une position hégémonique au type de syndicalisme international pratiqué par l’American Federation of Labor.
Carey continuait de militer dans le mouvement syndical torontois. Il appartint au conseil d’administration de la Toronto Labor Temple Company Limited dès la formation de celle-ci en 1904, en fut président pendant de nombreuses années et participa à de nombreux arbitrages. Les ouvriers torontois le connaissaient bien, surtout ceux des bords du lac Ontario et de la gare Union, où son travail de reporter l’amenait souvent. Musicien d’orchestre dans sa jeunesse, Carey milita à titre de représentant et d’agent de district à l’American Federation of Musicians, fondée en 1896 et implantée au Canada depuis 1901. Selon le Labor Leader de Toronto, il dirigea « bon nombre de conciliations entre des propriétaires de théâtre en colère et des orchestres ».
En octobre 1917, Newton Wesley Rowell*, membre du nouveau gouvernement de coalition formé à Ottawa, fit mousser la candidature de Carey au poste de sous-secrétaire au Travail. Carey avait fait œuvre utile en tempérant la résistance que la conscription suscitait au sein du Congrès des métiers et du travail et, selon Rowell, il pouvait parler au nom des catholiques irlandais de l’Ontario, qui s’estimaient sous-représentés à Ottawa. Aux élections générales de décembre, Carey se présenta dans la circonscription de Toronto South sous la bannière du Parti ouvrier indépendant, mais certains exprimèrent des doutes sur les motifs qui le poussaient à vouloir siéger à Ottawa, et il perdit au profit de Charles Sheard. Vers 1925, il quitta le Telegram pour assumer la direction du Labor Temple, rue Church.
Fervent catholique, Carey fit partie du Separate School Board de Toronto durant 35 ans. Il fréquentait l’église St Mary de la rue Bathurst, où il contribua à la fondation de la St Mary’s Athletic Association. Il était membre du Tiers-Ordre régulier de Saint-François et des Chevaliers de Colomb. Par la suite, il fréquenta l’église St Francis, avenue Mansfield, où son fils Harold devint vicaire. Sa fille entra chez les Sisters of St Joseph.
En mai 1926, au cours du congrès de l’American Federation of Musicians à Salt Lake City, dans l’Utah, David Arthur Carey éprouva des problèmes cardiaques qui continueraient plus tard de l’affliger. Il mourut en mars 1927 chez lui, avenue Montrose à Toronto, et fut inhumé au cimetière Mount Hope.
AO, RG 80-2-0-138, nº 37217 ; RG 80-5-0-78, nº 12930 ; RG 80-5-0-147, nº 14775 ; RG 80-8-0-59, nº 17075 ; RG 80-8-0-1050, nº 2675.— BAC, RG 31, C1, 1901, Toronto, Ward 5, div.11 : 3 (mfm aux AO).— Mount Hope Cemetery (Toronto), Gravestone and burial records.— St Michael’s Cemetery (Toronto), Burial records.— Globe, 28 mars 1927.— Labor Leader (Toronto), 1er avril 1927.— Annuaire, Toronto, 1883–1927.— R. H. Babcock, Gompers in Canada : a study in American continentalism before the First World War (Toronto et Buffalo, N.Y., 1974).— Canadian annual rev., 1903–1904, 1917, 1921, 1923.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— CPG, 1918.— Eugene Forsey, Trade unions in Canada, 1812–1902 (Toronto, 1982).— G. S. Kealey, Toronto workers respond to industrial capitalism, 1867–1892 (Toronto et Buffalo, 1980).— G. S. Kealey et B. D. Palmer, Dreaming of what might be : the Knights of Labor in Ontario, 1880–1900 (Toronto, 1987).— H. A. Logan, Trade unions in Canada : their development and functioning (Toronto, 1948).— Middleton, Municipality of Toronto.— James Naylor, The new democracy : challenging the social order in industrial Ontario, 1914–1925 (Toronto, 1991).— Margaret Prang, N. W. Rowell, Ontario nationalist (Toronto et Buffalo, 1975).
Christina Burr, « CAREY, DAVID ARTHUR », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/carey_david_arthur_15F.html.
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Auteur de l'article: | Christina Burr |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
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