BUOTE, FRANÇOIS-JOSEPH, instituteur, imprimeur, rédacteur en chef et éditeur, né le 1er novembre 1861 à Tignish, Île-du-Prince-Édouard, unique enfant de Gilbert Buote* et de Madeleine Gallant ; le 6 janvier 1886, il épousa à Cap-Pelé, Nouveau-Brunswick, Marie-A. Goguen, et ils eurent un fils, qui mourut bébé, et une fille ; décédé le 20 octobre 1922 à Tignish.

François-Joseph Buote fit ses études primaires dans la région de Tignish, où son père enseignait, et à St Marys Bay, en Nouvelle-Écosse, où son père fut instituteur de 1873 à 1877. Après une année au St Dunstan’s College de Charlottetown, il passa trois ans au collège Saint-Louis, établissement fondé par Marcel-François Richard* et situé à Saint-Louis de Kent, au Nouveau-Brunswick. Il était donc beaucoup plus instruit que la plupart des jeunes Acadiens de son temps. En 1882, les Buote s’installèrent dans le Maine, où François-Joseph apprit le métier de typographe. De retour au Nouveau-Brunswick avec ses parents en 1885, il enseigna dans le district de Cap-Pelé et suivit des cours d’été à l’école normale de Fredericton [V. Alphée Belliveau]. À la fin des années 1880, il travailla comme typographe au Courrier des provinces Maritimes à Bathurst. En 1891, à Cap-Pelé, il lança son premier périodique, le Buote’s Monthly and Commercial Advertiser. Cependant, aucun numéro ne subsiste et l’on ignore tout du contenu.

En 1893, François-Joseph Buote retourna à Tignish, un des foyers acadiens des Maritimes. Ses parents s’y trouvaient déjà depuis deux ans. Gilbert Buote avait pris la direction de l’école locale et François-Joseph s’établit comme imprimeur de travaux de ville. En 1893, ils fondèrent ensemble le premier journal francophone de la province, l’Impartial. Gilbert y exerçait la fonction de rédacteur en chef ; François-Joseph en fut le premier imprimeur et éditeur. Cet hebdomadaire, qui comptait d’abord quatre pages, traitait surtout de sujets intéressant les Acadiens de l’Île-du-Prince-Édouard. Il faisait la promotion de la langue française et encourageait les Acadiens à être fiers de leurs origines tout en prônant une coopération amicale avec les anglophones. Gilbert Buote y écrivait, sur l’histoire et la généalogie locales, de longs articles qui demeurent une précieuse source d’information, souvent la seule. En outre, l’Impartial défendait certains projets : une association d’instituteurs acadiens, des fromageries coopératives et des mutuelles d’assurance, par exemple. Avec plus ou moins la neutralité annoncée par son titre, le journal donnait aussi quelques nouvelles internationales et abordait des questions politiques. Organisateurs du centenaire de Tignish en 1899, les Buote publièrent à cette occasion un numéro spécial, illustré, de l’Impartial. Ce document est aussi une excellente source de renseignements sur l’histoire de la région et la généalogie de ses familles.

L’Impartial ne semble jamais avoir été vraiment rentable ; au cours de ses 22 ans d’existence, la parution en fut suspendue au moins une fois, apparemment pour plusieurs années. Après le décès de Gilbert Buote en 1904, la femme de François-Joseph, Marie-A. Goguen, ancienne institutrice, collabora à la production. Le journal cessa de paraître en 1915, peut-être tout autant à cause de difficultés financières que de la pénurie de papier journal causée par la Première Guerre mondiale. Pourtant, Buote paraît n’avoir jamais manqué de moyens d’arrondir son revenu. Il vendait des livres et de la papeterie, représentait une compagnie de bicyclettes et une société d’assurance et imprimait toujours des travaux de ville. En août 1918, il commença à publier un mensuel de langue anglaise, le Buote’s Magazine. Seuls deux ou trois numéros de ce magazine subsistent ; ce sont probablement les seuls à avoir paru. Il semble que Buote le considérait comme une suite de l’Impartial, car la page de titre indiquait qu’il s’agissait d’une « nouvelle série » d’une publication lancée en 1893.

Buote avait la réputation d’être « un orateur de premier ordre » tant en anglais qu’en français. Des groupes acadiens installés dans des lieux aussi éloignés que Lawrence, au Massachusetts, l’invitaient. En 1908, il fut nommé président de la Société nationale de l’Assomption. Cinq ans plus tard, il organisa la Convention nationale des Acadiens, qui eut lieu à Tignish, et abandonna la présidence au profit de Pascal Poirier*. Ce congrès, qui à l’origine devait avoir lieu en 1911, donna peu de résultats. Dans certains milieux, on reprocha à Buote d’en avoir retardé la tenue et de l’avoir mal préparé. Selon J.-O. Gallant, rédacteur en chef de l’Évangéline de Moncton, au Nouveau-Brunswick, ce fut « un pique-nique quelconque » plutôt qu’« une réunion de travail ».

À Tignish, Buote appartint à de nombreux organismes, le plus souvent à titre de secrétaire. Adepte des mutuelles, de plus en plus nombreuses à la fin du xixe et au début du xxe siècle, il contribua à l’établissement de trois d’entre elles dans le district, y compris une section de la Société l’Assomption [V. Rémi Benoît*] dont il fut président pendant un certain temps. En outre, il consacra des énergies au Farmers’ Institute, à la fromagerie coopérative et au comité d’embellissement de Tignish. Il fut aussi membre de la commission provinciale sur l’éducation, formée en 1908.

Aux élections provinciales de 1900, Buote avait brigué les suffrages sous la bannière conservatrice dans le 1er district du comté de Prince, mais il avait perdu. Par la suite, lui-même et son père devinrent libéraux. En 1914, la une de l’Impartial portait l’inscription suivante : « L’Organe officiel du Parti libéral des provinces Maritimes. » En 1919, François-Joseph proposa que William Lyon Mackenzie King* défende les couleurs de ce parti au scrutin partiel fédéral qui se tiendrait dans Prince cette année-là. King serait élu sans opposition et les deux hommes se lieraient d’amitié.

Quelque temps après la fermeture de l’Impartial, Buote, intéressé depuis longtemps par l’élevage du renard, alors à son apogée [V. Robert Trenholm Oulton*], s’installa avec sa famille à Trois-Rivières, dans la province de Québec, pour y diriger une ferme. Cependant, un historien qui connaissait les Buote affirme que, lorsque François-Joseph mourut subitement, en 1922, il était sur le point de relancer son journal et avait même acheté du matériel d’imprimerie neuf.

François-Joseph Buote semble avoir été de ces gens qui veulent toujours être dans le feu de l’action. Ce trait de caractère explique en partie pourquoi il promut tant de causes. Comme son père, il était « parfois impatient, exigeant et peu conciliant ». Travailler avec lui était donc difficile, et il se montrait implacable avec ses adversaires. Néanmoins, en raison de ses activités à l’Île-du-Prince-Édouard, il est l’une des figures marquantes de la « renaissance » acadienne, survenue dans la dernière partie du xixe siècle.

Emily Elizabeth Cran

La collection la plus complète de l’Impartial (Tignish, Î.-P.-É.), publié du 22 juin 1893 au 11 juill. 1915, se trouve au Centre d’études acadiennes, Moncton, N.-B. ; on peut aussi y consulter un dossier moins complet sur microfilm. L’exemplaire le mieux conservé de l’Impartial illustré, numéro souvenir produit pour le centenaire de Tignish en 1899 appartient à M. J.-Henri Gaudet, de Tignish ; deux exemplaires incomplets sont conservés par M. Reg Porter, de Charlottetown, qui a aussi en sa possession les seuls numéros qui restent du Buote’s Magazine (Tignish). M. Gaudet possède également un album de documents concernant la famille rassemblés vers 1921 par Alma Buote.

Le Moniteur acadien (Shédiac, N.-B.), 1886, 1891, 1898.— Georges Arsenault, les Acadiens de l’Île, 1720–1980 (Moncton, 1987).— D. B. Baker, « la Convention nationale des Acadiens – Tignish, Île-du-Prince-Édouard, août, 1913 », Soc. hist. acadienne, Cahiers (Moncton), 15 (1984) : 21–31.— J.-H. Blanchard, Acadiens de l’Île-du-Prince-Édouard ([Charlottetown], 1956).— Yvon Léger, « les Buote de l’Île-du-Prince-Édouard », Soc. hist. acadienne, Cahiers, 24 (1993) : 151—182.— Souvenir program of the centennial celebration of the Church of St. Simon and St. Jude, Tignish, Prince Edward Island, Alma Buote, compil. (Sackville, N.-B., 1960).

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Emily Elizabeth Cran, « BUOTE, FRANÇOIS-JOSEPH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/buote_francois_joseph_15F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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