BALDWIN, CONNELL JAMES, militaire et fonctionnaire, né en 1777 à Clogheneagh (comté de Cork, République d’Irlande), fils du docteur James Baldwin, député, et de Mary O’Connell ; en 1830 il épousa Mary Sprague, d’Albany, New York, qui donna naissance à un fils et six filles ; décédé le 14 décembre 1861, à Toronto, Haut-Canada.

Connell James Baldwin appartenait à une grande famille irlandaise comptant parmi ses membres des militaires, tel le comte Daniel O’Connell, général de la brigade irlandaise de l’armée française. Son frère, Herbert, représenta Dublin au parlement ; Daniel O’Connell, dit « Le Libérateur », était son cousin ; le leader réformiste du Haut-Canada, Robert Baldwin*, lui était également apparenté, à un degré éloigné. Après avoir fait ses études à un collège dirigé par les jésuites, probablement à Saint-Omer, en Bretagne, ou à la Stonyhurst School, en Angleterre, il s’enrôla dans la marine royale à l’âge de 14 ans. Réformé deux ans plus tard, il entra dans l’armée et suivit un cours au Farnham Military College. Il prit part à plusieurs des principales batailles de la guerre d’Espagne, où son ardeur au combat lui valut une médaille et dix barrettes, le poste d’aide de camp du général Thomas Picton, le grade de capitaine et une pension en raison de quatre blessures subies au combat.

Après la guerre, Baldwin tint garnison en qualité de major de brigade en Grande-Bretagne, puis dans les Antilles, et ce de 1820 à 1826, date à laquelle il prit sa retraite en demi-solde. De 1826 à 1828, il s’occupa de lever et de commander un régiment, formé en grande partie de troupes jadis placées sous son commandement pendant la guerre d’Espagne, dans le but de servir au Brésil sous les ordres de l’empereur Pierre Ier. Les tâches confiées à ses hommes étant devenues celles de simples travailleurs, il exigea qu’on les licencie et qu’on paie leur passage en Irlande.

En 1828, Baldwin immigra au Canada où plusieurs de ses anciens compagnons d’armes qui avaient servi sous ses ordres au Brésil, dont le père William John O’Grady*, le rejoignirent. Il se vit octroyer 400 acres de terre près de Peterborough, où il ne fit qu’un bref séjour, et 400 autres acres dans le canton de Toronto Gore. C’est à cet endroit qu’il bâtit, en 1830, une école et érigea une église à l’intention de ses voisins, ses compagnons, et des gens sous sa dépendance, et qu’il s’installa en seigneur de village. Comme juge de paix, il acquit une réputation d’impartialité dans ses jugements lors de procès civils, assez peu importants du reste. Commissaire à la voirie, il fut aussi colonel de milice de 1835 à 1851. Sur le plan politique, il était un réformiste modéré, ardent défenseur des intérêts des Irlandais catholiques. Au milieu des années 30, il adressa plusieurs lettres ouvertes à William Lyon Mackenzie concernant les activités de l’ordre d’Orange et l’indifférence des tories face à ce qu’il considérait être la menace orangiste.

Toutefois, lorsque les troubles de 1837 éclatèrent, Baldwin conserva sa loyauté envers le gouvernement. Il leva, à ses propres frais, une troupe de 1 200 hommes pour défendre la frontière du Niagara. Cette initiative devait d’ailleurs lui attirer maints ennuis par la suite : en effet, Baldwin ayant refusé, en raison de leur piètre qualité, un lot d’uniformes qu’il avait commandés, il se vit intenter un procès par le fournisseur, perdit sa cause et dut payer. Croyant que le gouvernement lui offrirait spontanément de l’aide, Baldwin refusa de solliciter une indemnisation. Finalement, il se vit forcé de capitaliser sa demi-solde afin de liquider ses dettes. Ne disposant plus que de sa pension de blessé de guerre, il dut réduire considérablement le champ de ses activités. Ayant fermé sa propre école, il fit néanmoins partie du conseil d’administration du district local des écoles séparées, quand celui-ci fut créé en 1841. Il continua d’exercer ses fonctions de juge de paix, mais, par fierté, n’accepta jamais la moindre rémunération.

Lors des élections de 1841, il se présenta comme candidat réformiste dans la seconde circonscription électorale d’York, forteresse orangiste. Son adversaire était George Duggan* le jeune, farouche orangiste ; Baldwin retira sa candidature afin d’éviter une effusion de sang. Il ne put toutefois obtenir d’être de nouveau candidat du parti lors du scrutin de 1842, probablement désavantagé par son appartenance à la religion catholique. En 1847, alors que le choléra s’abattit sur Toronto, Baldwin transforma son domicile en hôpital privé et s’employa à secourir un grand nombre d’immigrants défavorisés atteints par la maladie. Il connaissait intimement les évêques Alexander Macdonell*, Michael Power* et Armand-François-Marie de Charbonnel* avec lesquels il collabora étroitement à la cause du catholicisme. En 1859–1860, il joua un rôle important au sein d’un groupe de catholiques de la région de Toronto qui réussirent à empêcher le prince de Galles, alors en visite au Canada, de passer sous l’arche d’honneur dressée par l’ordre d’Orange et, par là, de reconnaître officiellement l’existence de ce dernier.

Baldwin mourut en 1861, au cours d’une visite à Toronto. Il avait œuvré dans plusieurs secteurs d’activités, plus particulièrement auprès du parti réformiste, de l’Eglise catholique et des défavorisés. Pourtant, à sa mort, qui fut suivie, à quelques mois d’intervalle, par celle de son fils, il laissait à sa femme et à ses filles de lourdes dettes pour tout héritage. Seule une fervente campagne menée par son neveu, Moore A. Higgins, et quelques amis permit à Mme Baldwin d’obtenir une maigre pension.

Ronald J. Stagg

PAO, Mackenzie-Lindsey papers, clippings, box 22A.— Arthur papers (Sanderson).— Canada, prov. du, Legislative Assembly, Journals, 1841.— Canadian Freeman (Toronto), 28 déc. 1871.— Church, oct.–déc. 1841.— Examiner (Toronto), 24 févr., 24 mars 1841.— Irish Canadian (Toronto), 13 déc. 1871.— Leader, 16, 18 déc. 1861.— Mirror (Toronto), oct.–déc. 1841.— Chadwick, Ontarian families.— W. P. Bull, From Brock to Currie, the military developments and exploits of Canadians in general and of the men of Peel in particular, 1791 to 1930 (Toronto, [1936]) ; From Macdonell to McGuigan, the history of the Roman Catholic Church in Upper Canada (Toronto, 1939) ; From the Boyne to Brampton, or John the Orangeman at home and abroad (Toronto, 1936).— G. S. Tavender, From this year hence, a history of the township of Toronto Gore, 1818–1967 (Brampton, Ont., 1967).— J. R. Teefy et al., Jubilee volume, 1842–1892 : the archdiocese of Toronto and Archbishop Walsh (Toronto, 1892).

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Ronald J. Stagg, « BALDWIN, CONNELL JAMES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/baldwin_connell_james_9F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1977
Année de la révision:    1977
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