ATECOUANDO (Jérôme), chef et orateur de la tribu des Abénaquis de Saint-François-de-Sales (Odanak, Québec), circa 1749–1757. Rien ne permet d’affirmer qu’il existe un lien de parenté entre lui et le chef Atecouando* qui vécut pendant quelques années (1706–1714) dans la même mission.

Atecouando était l’un des cinq chefs qui signèrent la lettre écrite le 23 septembre 1749 par le père Joseph Aubery, missionnaire à Saint-François-de-Sales, et envoyée aux chanoines de la cathédrale de Chartres pour renouveler l’union de prières contractée par les Abénaquis près de 60 ans auparavant [V. Jacques et Vincent Bigot*].

Comme orateur attitré de sa tribu, Atecouando joua un rôle de premier plan, non seulement en incitant la tribu à s’occuper de ses affaires internes, mais aussi en exprimant les vues de la tribu dans ses relations avec les autres nations. On a conservé, en version française due à des interprètes, trois harangues d’Atecouando.

De 1748 à 1756, même si la France et l’Angleterre étaient officiellement en paix, les escarmouches entre les colons de la Nouvelle-Angleterre et les Indiens continuèrent à la frontière et les Abénaquis de Saint-François prirent une part active à ces hostilités. À l’été de 1752, le capitaine Phineas Stevens vint en Nouvelle-France de la part du gouverneur de Boston pour racheter des prisonniers anglais. Le 5 juillet, Atecouando s’adressa à Stevens, en présence de Charles Le Moyne de Longueuil, gouverneur intérimaire, et des Iroquois de Sault-Saint-Louis (Caughnawaga, Québec) et du lac des Deux-Montagnes. Faisant probablement allusion aux terres du New Hampshire actuel que les Abénaquis réclamaient et que les Anglais commençaient à coloniser, l’orateur demanda qui avait autorisé les Anglais à faire arpenter les terres des Abénaquis. Si les Anglais voulaient avoir la paix avec les Abénaquis, ils devaient s’en tenir aux limites consenties par leurs anciens chefs dans les traités antérieurs. « Nous vous défendons très expressément, disait-il, de tuer un seul castor, ny prendre un seul morceau de bois sur les terres que nous habitons. Si vous voulez du bois, nous vous le vendrons, mais vous ne l’aurez pas sans notre permission. »

Un conflit ouvert entre Français et Anglais s’était déclaré en 1754 dans la vallée de la rivière Ohio et, l’année suivante, les deux nations étaient officieusement en guerre en Amérique du Nord. Le 14 juillet 1755, quand le nouveau gouverneur général de la Nouvelle France, Pierre de Rigaud* de Vaudreuil, fut de passage à Trois-Rivières, les Abénaquis de Saint-François allèrent l’y rencontrer, et Atecouando le harangua en leur nom. Il lui dit : « Commande donc, ordonne, nous sommes prêts à partir, si ce n’est en canot, à pied. Nous savons porter nos bagages, battre et réduire ensuite, comme le vent dissipe la poussière, tous tes ennemis qui sont nôtres. » Les Abénaquis tinrent parole. Une centaine d’entre eux entraient en campagne le mois suivant et un détachement de Français et d’Indiens partait, sous les ordres de Dieskau, afin de refouler une attaque des Anglais qui, croyait-on, serait dirigée contre le fort Saint-Frédéric (Crown Point, N.Y.).

En 1757, un des successeurs du père Aubery, Claude-François-Louis Virot, qui voulait, semble-t-il, soustraire ses ouailles aux tentations de la civilisation européenne, conçut le projet d’aller avec ses Abénaquis fonder une mission chez les Loups de la vallée de l’Ohio. Ayant entendu parler de ce projet, les chefs de Saint-François et de Bécancour allèrent à Québec pour se plaindre à Vaudreuil. Atecouando harangua le gouverneur lui exposant la répugnance qu’avaient les siens à quitter la terre où leurs ancêtres étaient enterrés. Au mois de juillet, Vaudreuil permit néanmoins à Virot de partir pour l’Ohio avec une douzaine « d’apôtres », mais les Loups, qui avaient espéré des marchandises et des soldats, se montrèrent très peu réceptifs à la foi, et les Abénaquis s’en revinrent l’année suivante.

Les harangues d’Atecouando offrent de bons spécimens du langage franc et imagé des orateurs amérindiens.

Thomas-M. Charland

Coll. de manuscrits relatifs à la N.-F., III : 509512, 545s. Le journal de M. de Bougainville (Gosselin), RAPQ, 19231924.— JR (Thwaites), LXIX.— Paroles des Abénakis, BRH, XXXIX (1933) : 109112, 546549.— Les vœux des Hurons, et des Abnaquis à Notre-Dame de Chartres [...], F.-J. Doublet de Boisthibault, édit. (Chartres, 1857), 50.— Charland, Les Abénakis dOdanak.— Raymond Douville et J.-D. Casanova, La vie quotidienne des Indiens du Canada à lépoque de !a colonisation française (Paris, 1967), 165.— J.-A. Maurault, Histoire des Abénakis depuis 1605 jusquà nos jours (Sorel, Qué., 1866).— Les Ursulines des Trois-Rivières depuis leur établissement jusquà nos jours (4 vol., Trois-Rivières, 18881911), I : 312s.

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Thomas-M. Charland, « ATECOUANDO (circa 1749-1757) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/atecouando_1749_1757_3F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
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