ALDER, ROBERT, ministre de l’Église méthodiste et de l’Église d’Angleterre, né en Angleterre en 1796, décédé à Gibraltar le 31 décembre 1873.

Robert Alder exerça durant sa jeunesse le métier de typographe. En 1816, il se porta volontaire pour être missionnaire de l’Église méthodiste wesleyenne, avec l’espoir qu’il serait affecté à Ceylan. Il fut en fait envoyé à Yarmouth, en Nouvelle-Écosse, dont il fut le premier pasteur méthodiste ; il prêcha aux 5 000 citoyens de cette ville séduits par la doctrine de la « Nouvelle Lumière » un « salut libre, total et imminent ». Il fit du ministère dans plusieurs circuits des provinces maritimes et du Bas-Canada avant son retour en Angleterre en 1827. De 1833 à 1851 il occupa à Londres l’un des postes de secrétaires de la Société missionnaire méthodiste wesleyenne. Il était responsable des missions wesleyennes de l’Amérique du Nord britannique, ce qui lui permit d’exercer une grande influence sur leur développement.

Durant les années 1832–1833, Alder avait été l’un des artisans de l’union de l’Église épiscopale méthodiste du Haut-Canada et de la Conférence méthodiste wesleyenne anglaise. Il fit deux voyages dans le Haut-Canada, en 1834 et en 1839, en vue de consolider cette union et d’aplanir les différences entre les deux Églises. Son entreprise échoua ; son intransigeance sur les questions en litige provoqua un grave conflit avec les frères Ryerson, William, Egerton* et John. Cette lutte fut l’une des causes de la dissolution de l’union en 1840. Durant les sept années suivantes, il dirigea les activités d’un district wesleyen indépendant au Canada-Ouest. Quand, en 1846 et en 1847, ses frères prirent la décision de négocier une entente avec la Conférence canadienne, Alder se conforma à leur désir et, en tant que représentant de la partie principale, il força les wesleyens du Canada-Ouest à accepter l’union. Comme par une ironie du sort, mais très opportunément, il fut nommé premier président de la Conférence du Canada après le rétablissement de l’union en 1847.

À la même époque, Alder encourageait vigoureusement la croissance de l’Église méthodiste dans les provinces maritimes ; il restait en contact avec elle grâce à une correspondance régulière et détaillée et il visita la région en 1839 et en 1847. Au cours de son premier voyage, il présida une assemblée spéciale des missionnaires des quatre provinces. Ceux-ci demandèrent la permission de fonder une académie (qui devint Mount Allison University) et se mirent d’accord pour appuyer publiquement le principe selon lequel un gouvernement chrétien doit favoriser l’épanouissement religieux de ses sujets. Lors de son second voyage, en 1847, sa santé précaire l’empêcha de tenir de grandes réunions. Néanmoins, il demanda instamment la formation d’une conférence des provinces maritimes. C’est en grande partie sur son initiative et grâce à sa force de persuasion que la Conférence de l’est de l’Amérique du Nord britannique fut créée en 1855.

De la même manière, il participa aux négociations avec la Hudson’s Bay Company qui aboutirent à l’établissement d’une mission wesleyenne dans le Nord-Ouest en 1840 qu’il ne visita jamais cependant. Durant toute la durée de son mandat, il conseilla et soutint les missionnaires tels que James Evans*, Robert Terrill Rundle* et le ministre indien, Peter Jacobs*. Lorsque Jacobs se rendit à Londres en 1842, il demeura chez Alder qui lui fit connaître les églises et les coutumes anglaises. Jacobs, comme tous les wesleyens des provinces de l’est, avait beaucoup d’estime pour Alder.

Sur le plan religieux, Alder eut un rôle analogue à celui que jouèrent sur une plus grande échelle les fonctionnaires du ministère des Colonies et il adopta comme eux, face à sa tâche, des attitudes ambivalentes. Son œuvre fut par là même controversée. Lui et ses aides se heurtaient continuellement à la disparité entre l’ampleur du travail missionnaire et les minces revenus de la société. Homme perspicace, Alder voulut encourager dès le début la volonté d’indépendance chez ses frères d’Amérique du Nord britannique. Il incita en particulier les méthodistes des provinces maritimes à s’organiser efficacement, à choisir des chefs laïcs et religieux, et à trouver eux-mêmes des fonds. Toutefois Alder critiqua régulièrement leurs initiatives, leur reprochant souvent d’être insubordonnés et imprudents.

Son comportement étrange peut s’expliquer non seulement par le paternalisme et par la prudence qui caractérisaient un organisme central mais aussi par le désir de voir le méthodisme s’établir sur des bases solides en Amérique du Nord britannique. C’est dans cette perspective que, d’après lui, il fallait traiter avec respect l’establishment anglican, qu’il entretenait des liens amicaux avec l’Église d’Angleterre et que, selon la tradition wesleyenne, il accordait une place importante à la liturgie. Cette attitude se trouvait renforcée par des idées politiques conservatrices ; pour lui, comme pour plusieurs de sa génération, démocratie et infidélité étaient intimement liées. Il n’est pas étonnant par conséquent qu’il ait considéré les méthodistes du Haut-Canada comme des yankees déguisés, et qu’il ait tenté de les intégrer au groupe wesleyen. Il critiquait fortement leurs attitudes indépendantes sur les biens du clergé et les changements politiques ; il s’efforça même pendant quelque temps de saper le travail de leur conférence en appuyant une organisation wesleyenne rivale dans le Canada-Ouest.

Les difficultés ainsi causées par Alder et ses amis furent souvent pour ses frères une source d’inquiétude mais furent riches d’enseignements. Elles éveillèrent chez les méthodistes canadiens une conscience plus profonde de la nécessité d’une indépendance religieuse – et partant politique – vis-à-vis la métropole. D’autre part, la Conférence anglaise favorisa, par ses attitudes et par les contraintes qu’elle imposa, la continuité entre les traditions religieuses d’Angleterre et d’Amérique du Nord britannique, aidant ainsi au rapprochement entre les deux cultures.

Très estimé des Anglais et des Américains, Alder reçut en 1839 un doctorat honorifique en théologie de Wesleyan University de Middletown, Connecticut. Toutefois il quitta prématurément son poste de secrétaire de la société missionnaire en 1851, sans doute à cause de l’aggravation du conflit qui opposait les méthodistes réformistes aux chefs wesleyens et qui avait jeté le discrédit sur ces derniers. Deux ans plus tard, il quitta l’Église méthodiste et fut ordonné dans l’Église d’Angleterre. Sa splendide éloquence et son zèle réfléchi lui valurent de gagner très vite l’estime de tous. Il devint chanoine de la cathédrale Holy Trinity à Gibraltar et termina ainsi sa carrière dans cet avant-poste de l’Empire victorien.

G. S. French

Methodist Missionary Society (Londres), Records of the Wesleyan Methodist Missionary Society (copies aux UCA).— Christian Guardian (Toronto), 1832–1847.— Minutes of the Methodist conferences, from the first, held in London by the late Rev. John Wesley, A.M., in the year 1744 (12 vol., Londres, 1812–1855), IV, VII, XII.— Wesleyan Methodist Magazine (Londres), 3° sér., XLV (1822)— LXVII (1844).— Carroll, Case and his cotemporaries.— G. G. Findlay et W. W. Holdsworth, History of the Wesleyan Methodist Missionary Society (5 vol., Londres, 1921–1924).— G. S. French, Parsons & politics : the rôle of the Wesleyan Methodists in Upper Canada and the Maritimes from 1780 to 1855 (Toronto, 1962).— Anson Green, The life and times of the Rev. Anson Green, D. D. [...] (Toronto, 1877).

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G. S. French, « ALDER, ROBERT », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/alder_robert_10F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
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