WISNER, JESSE OLDFIELD, manufacturier, né le 24 mars 1811 à Amity, comté d’Orange, New York, fils de Moses Wisner, cultivateur, et de Dollie Howell ; le 23 mars 1835, il épousa Mary Sheldon (décédée en 1855), et ils eurent deux fils et deux filles, puis le 25 août 1856 Frances Augusta Wells, et de ce mariage naquirent un fils et trois filles ; décédé le 3 octobre 1897 à Brantford, Ontario.

Ayant atteint l’âge adulte, Jesse Oldfield Wisner se fit cultivateur près de Huron, comté de Wayne, dans l’état de New York ; sa famille s’y était établie en 1817. Vers 1849, il devint directeur d’un hospice, le Wayne County Poor House, poste qu’il occupa pendant six ans, avant de se lancer dans le louage et la pension de chevaux. C’est en janvier 1857 qu’il arriva à Brantford. Il devint l’associé principal de la Wisner, Wilcox and Company, petite fabrique artisanale de tarares et de charrues. En 1861, la firme employait sept hommes. Wisner considérait en partie l’entreprise comme un moyen d’établir ses fils Wareham Sheldon et Charles Harrison. Tous deux furent d’ailleurs au service de la compagnie jusqu’à sa fermeture vers 1865, année où chacun lança sa propre entreprise manufacturière. Sans doute leur père leur accorda-t-il une certaine aide financière, mais il n’eut aucune participation directe à leurs activités. En fait, il est possible qu’il n’ait pas du tout été en affaires en 1867 ou 1868.

En 1869, Jesse Oldfield Wisner et son fils Wareham Sheldon formèrent la J. O. Wisner and Son. Wisner père s’occupa des ventes tandis que le fils se chargea de la production. Au début, ils employèrent cinq hommes dans la fabrication de tarares et autres appareils en bois comme des escabeaux et la « lessiveuse standard Wisner avec essoreuse Champion ». Bientôt s’ajoutèrent semoirs, râteaux mécaniques, herses et cultivateurs. En 1874, les associés avaient investi environ 8 000 $ dans l’entreprise, dont 6 500 $ provenaient de Wisner père.

La compagnie avait atteint sa limite de croissance à titre d’entreprise artisanale et familiale : pour continuer à prendre de l’expansion, il lui fallait de nouveaux capitaux. En 1878, l’agent de crédit de la Banque canadienne de commerce à Brantford, Thomas Strahan Shenston, déconseilla l’octroi d’une marge de crédit de 8 000 $ : « Je ne sais rien de bon ou de mauvais à leur sujet. Je ne crois pas qu’on ait jamais estimé qu’ils faisaient des affaires très florissantes [...] Avoir été en affaires aussi longtemps avec si peu de biens libres de toute obligation, ne me semble pas un signe de prospérité. » Néanmoins, malgré la dépression qui sévissait à cette époque, les Wisner réussirent à obtenir des prêts hypothécaires d’investisseurs locaux pour financer une expansion majeure de leur usine entre 1874 et 1881. La constitution juridique obtenue en 1881 permit de réorganiser l’entreprise en y associant Edward L. Goold, quincaillier et fabricant local. En 1883, la J. O. Wisner, Son and Company employait plus de 100 personnes.

Une entente commerciale conclue avec le fabricant d’outillage agricole le plus important de Brantford, A. Harris, Son and Company Limited [V. John Harris*], avait également contribué à la croissance de l’entreprise de Wisner. À compter de 1875, les représentants des produits Harris dans l’est du Canada offraient aussi ceux de Wisner ; pour le marché de l’Ouest, Harris les achetait en gros. Cette entente permettait à chaque entreprise d’augmenter sa production tout en offrant aux cultivateurs une gamme complète d’instruments aratoires.

Lorsque la firme Harris fusionna avec la Massey Manufacturing Company de Toronto en 1891 [V. Hart Almerrin Massey], leur production rationalisée et leur réseau de distribution firent que l’entente conclue entre Harris et Wisner n’était plus nécessaire. Par conséquent, la petite firme de Brantford perdit ses points de vente. Durant l’été, les Wisner s’allièrent à la Patterson and Brothers de Woodstock. Toutefois, la fusion avec l’important fabricant et détaillant d’une gamme complète d’instruments agricoles désavantageait nettement les Wisner : la rumeur de fermeture de l’usine de Brantford laisse croire que la firme de Woodstock cherchait à réduire la capacité de production de l’industrie devant la saturation du marché. La fusion attira l’attention de la Massey-Harris Company, qui négocia à la mi-novembre la mainmise sur la Patterson-Wisner sur la base d’un échange d’actions. Les Wisner reçurent 718 actions, dont 453 allèrent à Jesse Oldfield Wisner. À sa mort en 1897, ces titres, dont la valeur marchande était d’environ 38 500 $, constituaient plus de la moitié de sa succession. En 1892, la Massey-Harris cessa de fabriquer la vieille gamme des produits de Wisner mais, plutôt que de fermer l’usine, la compagnie y transféra les activités d’une autre firme acquise depuis peu, la Verity Plow Company, d’Exeter.

Âgé de plus de 80 ans au moment de la prise de possession, Wisner passa les six dernières années de sa vie dans une retraite paisible. Il continua cependant à s’intéresser aux activités de l’église congrégationaliste de Brantford, où il avait été diacre, ainsi qu’à celles du parti libéral, auquel il était demeuré fidèle pendant plus de 25 ans.

La participation de Jesse Oldfield Wisner au monde des affaires représente bien la carrière d’un certain nombre de petits fabricants artisanaux à l’époque de la transition vers le capitalisme industriel au Canada. En complétant la production d’un fabricant plus important et grâce à une prise de contrôle qui lui fut avantageuse, il parvint à une certaine réussite malgré des débuts modestes. Sa bonne fortune n’est toutefois pas représentative de l’expérience de la majorité des petits artisans qui, à compter des années 1870, n’allaient connaître que l’échec dans le nouvel ordre industriel du Canada.

David G. Burley

AN, RG 31, C1, 1861, 1871, 1881, Brantford.— Baker Library, R. G. Dun & Co. credit ledger, Canada, 13 : 52L, 125, 134.— Brant County Surrogate Court (Brantford, Ontario), Reg., liber J (1897–1899), nº 2080 (mfm aux AO).— City of Brantford Arch. (Brantford), Assessment rolls, 1857–1880.— MTRL, T. S. Shenston papers, letter-book, 494.— Courier (Brantford), 25 juill. 1892.— Expositor (Brantford), 14 déc. 1888, 19 nov. 1891, 29 juill. 1892, 7 oct. 1897.— D. G. Burley, « The businessmen of Brantford, Ontario : self-employment in a mid-nineteenth century town » (thèse de ph.d., McMaster Univ., Hamilton, Ontario, 1983).— Merrill Denison, Harvest triumphant : the story of Massey-Harris, a footnote to Canadian history (Toronto, 1948).— The history of the county of Brant, Ontario [...] (Toronto, 1883), 549.

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David G. Burley, « WISNER, JESSE OLDFIELD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/wisner_jesse_oldfield_12F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1990
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