WILLIS, EDWARD, journaliste, éditeur, homme politique et fonctionnaire, né le 5 novembre 1835 à Halifax, Nouvelle-Écosse, fils cadet de John Willis, originaire du comté de Cavan (république d’Irlande), et frère de John Roberts Willis* ; le 6 juillet 1858, il épousa à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, Sarah Adams, fille aînée de Zachariah Adams, marchand, et ils eurent quatre enfants ; décédé le 5 mars 1891 au même endroit.

Après ses études à la National School de Halifax, Edward Willis s’installa à Saint-Jean et, en 1857, y lança deux journaux : le premier (en collaboration avec John Valentine Ellis*) était un petit hebdomadaire destiné à toute la famille, et le second, un mensuel consacré aux affaires maçonniques dans lesquelles il prenait lui-même une part active. Il devint bientôt rédacteur d’articles de fond au New-Brunswick Courier. Willis gravit rapidement les échelons du monde journalistique néo-brunswickois et succéda en 1863 au redoutable George Edward Fenety, rédacteur en chef de l’influent Morning News de Saint-Jean. À cette époque, Willis avait adhéré au mouvement pro-Confédération et accordait son appui à Samuel Leonard Tilley. S’employant à ridiculiser les adversaires de la Confédération au Nouveau-Brunswick, il les accusa en 1865 de croire « que le commerce [pouvait] être stimulé davantage par l’isolement et le maintien de tarifs hostiles ; que les chemins de fer [pouvaient] être construits sans argent, et les capitalistes amenés à investir sans [qu’on leur offre de] garantie ; que les déplacements entre les provinces [étaient] mieux encouragés [par l’absence] de liaison ferroviaire ». Cette année-là, Willis acquit des intérêts dans le Morning News, qui prospéra et devint un quotidien après 1868.

Au début des années 1870, le Nouveau-Brunswick fut le théâtre d’un débat houleux sur un projet de loi présenté par George Edwin King* et que Willis appuyait fortement, lequel visait à mettre fin au financement public des écoles séparées. Les tensions entre protestants et catholiques s’accentuèrent de façon marquée. Willis, anglican et orangiste engagé, avait été défait lorsqu’il avait tenté pour la première fois, en 1867, de se faire élire à la chambre d’Assemblée. Toutefois, au milieu des tensions croissantes, il réussit en 1870 à obtenir le siège de la ville et du comté de Saint-Jean, et fut l’une des figures de proue du débat en chambre sur le projet de loi concernant les écoles publiques, qui fut adopté l’année suivante. Même s’il joignit les rangs de l’opposition en 1872 – probablement pour des motifs personnels – et en fut le chef pendant quelque temps, il s’attendait tout de même à ce que l’on permette à la loi de faire ses preuves. Lorsque des membres de l’opposition cherchèrent à l’affaiblir, il retourna dans les rangs du gouvernement King et, le 20 février 1873, entra au Conseil exécutif à titre de ministre sans portefeuille. Réélu en 1874, il demeura au conseil jusqu’en 1876.

Comme il était sans doute l’orangiste le plus influent de l’Assemblée, Willis présentait régulièrement des demandes pour que la loge provinciale de l’ordre soit constituée juridiquement. Il atteignit enfin son objectif en 1875, et décida, avec les autres membres de l’ordre, de souligner l’occasion l’année suivante en organisant un défilé dans les rues de Saint-Jean pour commémorer la bataille de la Boyne. La dernière parade des orangistes, en 1849, avait donné lieu à des affrontements sanglants entre catholiques et protestants [V. Robert Duncan Wilmot], et voilà que la question scolaire faisait à nouveau mousser le fanatisme religieux chez l’une et l’autre communauté. En 1876 cependant, les Irlandais de la deuxième génération n’exprimèrent la violence de leurs prédécesseurs que pour la forme, et personne ne fut grièvement blessé. La même année, Willis contribua à la création d’une nouvelle loge orangiste qui porta son nom. Il fut réélu à l’Assemblée en 1878, et se rangea dorénavant du côté de l’opposition menée par Andrew George Blair*. Il devait alors s’occuper des affaires chancelantes de son journal qui avait été sévèrement touché par le désastreux incendie de 1877 à Saint-Jean, et il s’absentait souvent de la chambre. Willis perdit son siège aux élections de 1882, qui portèrent Blair au pouvoir.

Durant ses années à l’Assemblée, Willis avait adopté une position modérée sur des questions de tempérance chaudement débattues [V. Samuel Leonard Tilley], appuyé l’adoption d’un projet de loi visant à accorder un privilège foncier aux fournisseurs de matériaux de construction et fait en vain la promotion de l’union des provinces Maritimes. Il s’opposa à ce que la province publie ses documents en français, fut en faveur de réduire les exigences relatives au droit de vote et dénonça régulièrement les concessions fiscales accordées aux entreprises privées.

Lorsque son journal disparut en 1884, Willis demanda l’aide de Tilley. À cette époque, les tories au pouvoir à Ottawa avaient à cœur de démontrer le succès de la Politique nationale, et Tilley, ministre des Finances dans le gouvernement de sir John Alexander Macdonald, confia à Willis le soin de mener une enquête approfondie sur les effets de cette politique dans les Maritimes. Arpentant la région de long en large, Willis rencontra des dizaines d’hommes d’affaires, d’artisans et de notables locaux, et la plupart appuyaient l’action du gouvernement. Il compila des statistiques détaillées sur le nombre de personnes employées à diverses tâches en 1878, comparativement au nombre beaucoup plus élevé de travailleurs en 1884. Il en vint à la conclusion que le Canada avait seulement besoin de marchés plus nombreux pour absorber le flot de biens manufacturés. Le rapport qu’il remit au gouvernement fut très utile à ce dernier sur le plan politique et, en 1886, Willis fut nommé maître de poste de Saint-Jean. Au cours des cinq années qui suivirent, il conserva ce poste, mais se retira de la vie publique à mesure que sa santé déclina.

À la mort d’Edward Willis en 1891, le St. John Daily Sun déclara qu’il était mieux connu comme journaliste qu’en tant qu’homme politique. Il ne fait aucun doute que sa longue expérience de rédacteur lui avait été d’une aide précieuse pour rédiger son excellent rapport sur les industries manufacturières de certaines parties des provinces Maritimes, qui fut publié dans les Documents de la session de 1885 et qui demeure un monument durable à ses talents de journaliste.

Robert H. Babcock

Musée du N.-B., Misc. index ; Tilley family papers, Willis à S. L. Tilley, 18 mars 1861.— Canada, Parl., Doc. de la session, 1885, nº 37 : 35–197 (Edward Willis, « Report [...] on the manufacturing industries of certain sections of the Maritime provinces [...] »).— R. H. Conwell, History of the great fire in Saint John, June 20 and 21, 1877 (Boston, 1877), 340.— Davin, Irishman in Canada, 165.— N.-B., House of Assembly, Journal, 1871 : 207–208 ; 1872 : 121, 170, 180 ; 1873 : 43–44, 50, 53, 114, 118–119, 132, 150, 176–177, 194 ; 1874 : 17, 29, 44, 191 ; 1875 : 26, 32, 43, 48, 51, 61, 73–75, 78–79, 148, 159, 173–174 ; 1876 : 33, 44, 129 ; 1877 : 68, 100, 129 ; 1878 :146 ; Synoptic report of the proc., 1874 : 11, 16, 21, 34, 75, 84–85, 97, 123–124 ; 1875 : 17–24, 28–29, 53 ; 1876 : 34, 53, 97 ; 1880 : 98–99, 105 ; 1881 : 68–74.— Provincial Grand Orange Lodge of New Brunswick, Report of the proc. (Fredericton, etc.), 1876 : 1 ; 1877 : 14–19 ; 1892 : 13.— St. John and its business : a history of St. John [...] (Saint-Jean, N.-B., 1875).— Stewart, Story of the great fire.— Daily Telegraph (Saint-Jean), 5 mars 1891.— Morning News (Saint-Jean), 19 avril 1865.— St. John Daily Sun, 5 mars 1891.— Sentinel (Toronto), 26 mars 1891.— Western Recorder and Carleton Advertiser and Home Journal (Saint-Jean), 20 mars, 21 août 1858.— CPC, 1879.— J. R. Harper, Historical directory of New Brunswick newspapers and periodicals (Fredericton, 1961).— History and directory of the Provincial Grand Orange Lodge and primary lodges of New Brunswick, 1690–1934, J. E. Steele, compil. (Saint-Jean, 1934).— Baker, Timothy Warren Anglin.— [J. J.] B. Forster, A conjunction of interests : business, politics, and tariffs, 1825–1879 (Toronto, 1986), 205–206.— C. A. Woodward, The history of New Brunswick provincial election campaigns and platforms, 1866–1974 [...] (s.l., 1976).— S. W. See, « The Orange order and social violence in mid-nineteenth century Saint John », Acadiensis (Fredericton), 13 (1983–1984), nº 1 : 68–92.

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Robert H. Babcock, « WILLIS, EDWARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/willis_edward_12F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
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