VALLETTE DE CHÉVIGNY, MÉDARD-GABRIEL, écrivain du roi, marchand et garde-magasin ; circa 1712–1754.
Médard-Gabriel Vallette de Chévigny semble être arrivé en Nouvelle-France avec l’intendant Michel Bégon vers la fin de 1712. Il travailla pendant plusieurs années comme subalterne dans le bureau de l’intendant. Le 25 novembre 1720, il épousait à Québec Marguerite, fille de Jean-Baptiste Maillou, dit Desmoulins. L’acte de mariage le désigne comme écrivain du roi et fils de Charles Vallette de Chévigny, « procureur du roi des eaux et forêts de Vitry », et de Marie-Anne Deschamps de Fellière, tous deux originaires de la paroisse Saint-Médard dans le diocèse d’Orléans, en France.
La carrière de Chévigny offre un grand intérêt dans la mesure où il fut probablement le plus ardent promoteur de l’industrie du goudron et de la poix en Nouvelle-France. Dès 1724, il accompagna le groupe que Bégon envoyait dans la région de la baie Saint-Paul pour trouver du bois propice à la fabrication de mâts pour la marine française ; quelques années plus tard, il dirigea le travail de 25 soldats et de 2 sergents des troupes de la Marine à l’usine de goudron du roi située à Grande-Anse (seigneurie de La Pocatière) sur le Saint-Laurent. Sous l’influence de Gilles Hocquart*, qui, depuis son arrivée en Nouvelle-France comme commissaire ordonnateur en 1729, s’efforçait de promouvoir la construction navale et les industries connexes, Chévigny entreprit de consacrer tout son temps à la fabrication du goudron.
En 1731, il alla en France apprendre les procédés de fabrication du goudron, de la poix, de la résine et de la térébenthine. De retour au Canada l’année suivante, il distribua avant l’été des copies de ses études aux colons que la chose intéressait. Toutefois, en 1733, il dut partir à la recherche de bois pour la construction navale dans la région du lac Champlain. Ce fut un voyage révélateur : en effet, le ministre de la Marine, Maurepas, fut avisé qu’il ne se trouvait aucun arbre pouvant servir à la construction de navires dont la quille dépassait 100 pieds. Ainsi, cinq ans avant que les chantiers maritimes du roi à Québec ne commencent à construire des grands navires, le rapport de Chévigny venait démontrer l’impossibilité d’une telle entreprise.
L’industrie de Chévigny ne connut pas la prospérité. Vers la fin du printemps de 1734, de concert avec trois soldats, il commença à faire des expériences avec les pins rouges et les pins blancs de la région de la baie Saint-Paul. À la fin de la saison, ils en avaient tiré près de 1 000 livres de poix sèche et de résine. Cependant, le climat était trop rigoureux. La sève des pins blancs n’ayant commencé à couler qu’en juillet, l’entreprise s’avéra non rentable. Au cours des deux saisons suivantes, Chévigny se tourna vers le sud-ouest, où, dans les seigneuries de Berthier et de Dautré, il fabriqua de la poix et de la résine à son propre compte, tout en apprenant les procédés aux paysans intéressés. En 1736, même s’il n’avait travaillé qu’une partie de l’été, il envoya de nouveau 1 000 livres de poix et de résine à Québec, lesquelles furent acheminées en France pour être inspectées. Soit que les résultats n’aient pas répondu aux désirs de l’intendant ou que Chévigny ait pu considérer qu’il s’était embarqué dans une mauvaise affaire, il mit fin à ses opérations dans les pineraies de la Nouvelle-France en 1737. L’entreprise fut reprise par Antoine Serindac, un des soldats qui avait travaillé pour Chévigny à Grande-Anse dans les années 20.
Le 27 mars 1738, Hocquart nommait Chévigny garde-magasin au fort Saint-Frédéric (Crown Point, N.Y.). Deux ans plus tard, celui-ci s’opposa sérieusement aux activités du commandant du fort, François Lefebvre Duplessis Faber, qui voulait développer la colonie et exploiter les ressources de la forêt. Chévigny objectait que Duplessis Faber revendiquait le droit de distribuer des vivres et des provisions à la garnison et qu’il s’était emparé des clés des magasins. Hocquart les rappela tous deux à Québec en 1741 ; puis, fait significatif, il renvoya presque immédiatement Chévigny au fort avec un nouveau commandant, François-Antoine Pécaudy de Contrecœur. Néanmoins, l’intendant se plaignit de ce que le garde-magasin se montrât incapable de présenter des comptes bien détaillés et, en 1744, forma le projet de le remplacer le plus tôt possible.
À partir de cette date, on perd la trace de Chévigny. En 1754, il est désigné comme un bourgeois de Québec. Le fait que son décès n’apparaît nulle part dans les archives nous incite à croire qu’il retourna en France durant la guerre de Sept Ans ou après la Conquête. De ses 12 enfants, un seul semble être parvenu à la maturité.
AJQ, Registre d’état civil, Notre-Dame de Québec, 25 nov. 1720.— AN, Col., B, 58, f.423 ; 63, f.472 ; Col., C11A, 62, f.265 ; 74, pp. 168–176 ; 75, pp. 362–366, 367 ; 82, pp. 15–20 (copies aux APC) ; Marine, C7, 334.— P.-G. Roy, Inv. contrats de mariage, VI : 87 ; Inv. jug. et délib., 1717–1760, I : 317, 318, 321 ; II : 52, 122–125 ; V : 304 ; Inv. ord. int., I : 246, 274, 291 ; II : 20, 26, 163, 184, 199, 241 ; III : 72.— Tanguay, Dictionnaire.— J.-N. Fauteux, Essai sur l’industrie, I : 201 ; II : 319, 322–326.
James S. Pritchard, « VALLETTE DE CHÉVIGNY, MÉDARD-GABRIEL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/vallette_de_chevigny_medard_gabriel_3F.html.
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Auteur de l'article: | James S. Pritchard |
Titre de l'article: | VALLETTE DE CHÉVIGNY, MÉDARD-GABRIEL |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1974 |
Année de la révision: | 1974 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |