VALLÉE, ARTHUR (baptisé Pierre-Marie-Arthur), médecin, professeur, fonctionnaire et auteur, né le 5 novembre 1882 dans la paroisse Notre-Dame de Québec, fils d’Arthur Vallée*, médecin, et d’Honorine Chauveau ; le 19 octobre 1910, il épousa dans la paroisse Saint-Patrice-de-la-Rivière-du-Loup, à Fraserville (Rivière-du-Loup, Québec), Maud Fraser, et ils eurent neuf enfants ; décédé le 8 janvier 1939 à Québec.

Arthur Vallée naquit dans une famille en vue de Québec. Son père était surintendant de l’asile de Beauport et professeur à la faculté de médecine de l’université Laval à Québec ; sa mère était la fille de Pierre-Joseph-Olivier Chauveau*, premier premier ministre de la province de Québec. Arthur fit ses études secondaires au petit séminaire de Québec de 1894 à 1901, puis s’inscrivit en médecine à l’université Laval à Québec. Il termina son doctorat en 1905 avec la mention « grande distinction ». Élève brillant, il mérita le prix du lieutenant-gouverneur et le prix Morrin de la faculté de médecine. Il approfondit ensuite ses connaissances à Paris pendant deux ans, notamment à l’Institut Pasteur, où il se perfectionna en bactériologie, en histologie et en techniques de laboratoire.

Avec cette formation, Vallée répondit aux attentes des autorités de l’université Laval, qui comptaient sur lui pour prendre en charge le laboratoire d’anatomie pathologique qu’elles voulaient mettre sur pied. Du reste, elles lui demandèrent d’acheter, tandis qu’il était encore en Europe, certains instruments et appareils nécessaires à la mise en place des installations. Pour des raisons pratiques, ce laboratoire ne fut toutefois pas aménagé, comme on l’avait prévu, dans les locaux de l’université, mais dans le nouveau pavillon d’Aiguillon de l’Hôtel-Dieu de Québec. Comme le recteur de l’université Laval, Olivier-Elzéar Mathieu, l’écrivit dans une lettre le 17 janvier 1907, « il n’est ni facile ni pratique de faire transporter à distance les crachats, le sang, les parties de tumeurs [que les médecins devront] faire examiner ». Vallée devint directeur de ce laboratoire dès son ouverture, en 1907, et il le resterait jusqu’à sa mort.

En 1908, Vallée fut aussi nommé directeur du laboratoire municipal de la ville de Québec. Il quitta ce poste en 1912 pour organiser et diriger les laboratoires d’anatomie pathologique et de bactériologie que l’université établit l’automne suivant, dans la faculté de médecine (endroit plus pratique pour l’enseignement), grâce à l’aide du gouvernement provincial. En 1913, Vallée prit également sous sa responsabilité le musée de l’école de médecine ; il fut chargé d’en faire un lieu plus propice à l’enseignement.

En 1928, quand le département d’anatomie pathologique de la faculté de médecine se transforma en institut pour mieux répondre aux besoins en analyse de spécimens des hôpitaux et des médecins de la région de Québec, ce fut à Vallée et au médecin Louis Berger qu’on en confia la direction. Utilisé pour l’enseignement et la recherche, l’Institut d’anatomie pathologique permettait aussi aux clientèles démunies d’avoir accès gratuitement au service d’analyse. En 1930, Vallée collabora à la création du Centre anticancéreux de l’université Laval, qui fut intégré à l’institut, et il en fut désigné codirecteur avec les médecins Berger et Charles Vézina. Il joua donc un rôle de premier plan dans le développement de la médecine de laboratoire dans la région de Québec dans le premier tiers du xxe siècle.

Au chapitre de l’enseignement, Vallée figura dans les registres de l’université comme professeur agrégé chargé des cours d’anatomie pathologique et de chimie physiologique pratique dès l’automne de 1908. Il devint secrétaire de la faculté de médecine au même moment, tâche qu’il accomplirait jusqu’à la fin de sa vie, puis professeur titulaire en 1909. Il enseigna la bactériologie pratique à partir de 1913–1914 et fut, dès 1915, responsable du cours d’histoire de la médecine. L’histoire, notamment celle de la médecine, occupa dès lors une grande place dans sa vie. Ce serait d’ailleurs surtout comme historien de la médecine que son nom survivrait encore au début du xxie siècle.

Plusieurs facteurs semblent avoir contribué à attirer ce médecin vers les lettres, et plus particulièrement vers l’histoire. Vallée venait d’un milieu où on valorisait la culture. Son père avait été le premier à donner le cours d’histoire de la médecine à l’université Laval entre 1894 et 1902. Son grand-père maternel fut non seulement ministre de l’Instruction publique et premier ministre, mais aussi auteur de textes d’histoire, comme celui publié à Québec en 1876, l’Instruction publique au Canada : précis historique et statistique, et d’un livre majeur paru à Montréal en 1853, Charles Guérin [...]. Sa femme était quant à elle la petite-fille de Philippe-Joseph Aubert* de Gaspé, auteur des Anciens Canadiens et de Mémoires, publiés respectivement à Québec en 1863 et à Ottawa en 1866. Enfin, entre 1907 et 1914, Vallée eut comme collègue Michael Joseph Ahern*, qui coécrivit avec son fils George la première recherche importante sur l’histoire de la profession médicale dans la province, parue à Québec en 1923 : Notes pour servir à l’histoire de la médecine dans le Bas-Canada depuis la fondation de Québec jusqu’au commencement du xixe siècle.

À Québec, en 1927, Vallée publia une biographie de Michel Sarrazin*, qui serait toujours consultée au début du xxie siècle. D’autres avant lui, dont Ahern, s’étaient déjà intéressés à ce médecin. Vallée fut cependant le premier à dresser une biographie complète de l’homme, à le situer dans son contexte et à évaluer sa contribution à la vie médicale et scientifique de son temps. Ce livre, intitulé Un biologiste canadien : Michel Sarrazin, 1659–1735, sa vie, ses travaux et son temps, connut du succès et valut plusieurs honneurs à son auteur. En 1928, l’Académie impériale de médecine de France lui offrit le prix Le Piez d’histoire de la médecine. En 1929, Vallée fut élu membre de la Société royale du Canada (section littéraire et historique) et l’université Laval lui décerna le titre honorifique de docteur ès lettres. Par contre, Vallée ne reçut pas le prix David (remis par le gouvernement de la province de Québec), comme on l’affirmerait par la suite, notamment dans quelques notices nécrologiques.

Vallée traita aussi d’histoire de la médecine à l’occasion de conférences publiques, dont certaines figurèrent dans Causeries, recueil qu’il fit paraître à Québec en 1929. Les textes qui y furent rassemblés apportèrent toutefois peu de chose à l’avancement des connaissances, car ils visaient surtout à informer le public des grandes étapes du développement de la médecine aux xviiie et xixe siècles.

Vallée aimait beaucoup la France, où il séjourna à plusieurs reprises. Il semble y être allé une première fois avec ses parents, au moment de l’Exposition universelle de Paris en 1900. Il retourna dans ce pays à diverses reprises à titre de représentant de l’université Laval, du gouvernement de la province de Québec et d’autres organismes. Il s’y rendit enfin peu avant sa mort pour visiter, entre autres choses, les monastères des Augustines de la miséricorde de Jésus, fondatrices de l’Hôtel-Dieu de Québec [V. Marie Guenet*]. Par ailleurs, il fit un voyage en Afrique du Nord, dont il raconta les grands moments dans Causeries.

Vallée fit partie de plusieurs organisations scientifiques et culturelles. Entre 1922 et 1924, il présida l’Association des médecins de langue française de l’Amérique du Nord [V. Michel-Delphis Brochu] et fut membre du comité organisateur des congrès annuels de ces années. À sa mort, il était notamment membre de la commission médicale du Conseil national de recherches du Canada, membre du comité organisateur des fêtes du troisième centenaire de l’Hôtel-Dieu de Québec (24 août au 2 septembre 1939), président de la section française de la Société royale du Canada, président de la Société du parler français au Canada et président de la Société médicale des hôpitaux universitaires de Québec. « Vallée était partout parce que partout on le réclamait », écrivit le médecin et professeur A.-Rosario Potvin dans Laval médical.

Arthur Vallée mourut subitement le 8 janvier 1939. Son décès fit la une des journaux de Québec et donna lieu à d’imposantes funérailles. Vallée vécut et mourut dans la maison qui l’avait vu naître, au 22, rue Sainte-Anne, à l’angle de la rue du Trésor, celle-là même qui avait appartenu à son père et à son grand-père Chauveau. Vallée laissa dans le deuil sa femme et sept enfants.

Jacques Bernier

BAnQ-Q, CE301-S1, 6 nov. 1882 ; Index BMS, dist. judiciaire de Québec, cimetière Saint-Charles, 8 janv. 1939.— FD, Saint-Patrice (Rivière-du-Loup, Québec), 19 oct. 1910.— Univ. Laval, Div. des arch., dossier Arthur Vallée, François Gagné, « Arthur Vallée, Louis Berger et ceux qu’ils ont connus ou la Naissance de l’anatomopathologie dans le milieu universitaire de Laval » (texte dactylographié, [Québec ?], 1996) ; U541 (Faculté de médecine), 12 (fonds Association professionnelle canadienne et américaine), 17 févr. 1921 ; 31 (procès-verbaux), 16 sept. 1908.— L’Action catholique (Québec), 9, 11 janv. 1939.— L’Événement, 9, 11 janv. 1939.— Le Soleil, 11 janv. 1939.— Jacques Bernier, « la Place de l’histoire de la médicine », Santé et Société canadienne ([Winnipeg]), 1 (1993) : 19–49.— C.-M. Boissonnault, Histoire de la faculté de médecine de Laval (Québec, 1953).— C.-F. Delâge, Arthur Vallée, 1882–1939 : extrait du rapport du bureau de direction de la Société royale du Canada pour l’année 1939 ([Ottawa, 1939]).— Guy Grenier, 100 ans de médecine francophone : histoire de l’Association des médecins de langue française du Canada (Sainte-Foy [Québec], 2002).— Albert Le Sage, « In memoriam : le professeur Arthur Vallée, 1882–1939 », l’Union médicale du Canada (Montréal), 68 (1939) : 117–119.— Arthur Maheux, « le Docteur Arthur Vallée », le Canada français (Québec), 2e sér., 26 (1938–1939) : 509–510.— A.-R. Potvin, « le Professeur Arthur Vallée, 1882–1939 », Laval médical (Québec), 4 (1939) : 59–63.— François Rousseau, la Croix et le Scalpel : histoire des Augustines de l’Hôtel-Dieu de Québec (1639–1989) (2 vol., Sillery [Québec], 1989–1994), 2 .— Troisième centenaire de l’Hôtel-Dieu de Québec, 1639–1939 ([Québec, 1947]).— Univ. Laval, Annuaire, 1894–1939 ; Faculté de médecine, Annuaire, 1930–1931 : 12.

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Jacques Bernier, « VALLÉE, ARTHUR (baptisé Pierre-Marie-Arthur) (1882-1939) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/vallee_arthur_16F.html.

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Auteur de l'article:    Jacques Bernier
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2016
Année de la révision:    2016
Date de consultation:    28 novembre 2024