TIFFANY, GIDEON, imprimeur, fonctionnaire, éditeur, propriétaire de moulins et officier de milice, né le 28 janvier 1774 à Keene, New Hampshire, fils de Gideon Tiffany et de Sarah Farrar, née Dean ; vers 1802, il épousa Ruth Tomlinson, et ils eurent cinq enfants qui atteignirent l’âge adulte ; décédé le 29 août 1854 dans le canton de Delaware, Haut-Canada.
Vers 1782, la famille Tiffany quitta Keene pour Hanover, dans le New Hampshire, où le jeune Gideon termina ses études secondaires. Il devint ensuite imprimeur, vraisemblablement en travaillant avec son frère aîné, Silvester*, qui dirigeait une imprimerie à Lansingburgh (Troy, New York). C’est probablement par son beau-frère, Davenport Phelps, qui vivait à Newark (Niagara-on-the-Lake, Ontario) en 1794, que Gideon apprit que le poste d’imprimeur du roi pour le Haut-Canada était vacant. En novembre 1794, il succéda ainsi à Louis Roy* et, le 3 décembre, il publia son premier numéro de l’Upper Canada Gazette ; or, American Oracle. Tiffany entreprit aussi de faire des travaux de ville et publia, en 1795, une brochure de Richard Cockrell* intitulée Thoughts on the education of youth. On croit qu’il s’agit de la première publication non gouvernementale de la province. Au début de 1796, son frère Silvester était venu travailler avec lui ; il devint adjoint à l’imprimeur du roi.
Bien que les frères Tiffany aient été des imprimeurs expérimentés, les autorités provinciales étaient d’avis qu’ils manifestaient des tendances proaméricaines. Cette critique amena Gideon à offrir sa démission comme imprimeur du roi en mai 1797, et c’est le loyaliste Titus Geer Simons qui lui succéda. Cependant, comme Simons n’était pas un imprimeur de métier et que le gouvernement n’avait pas de presse typographique, les Tiffany continuèrent d’imprimer la Gazette dans leur propre atelier. Même après la nomination de William Waters au poste d’imprimeur du roi en juillet 1798, le gouvernement continua probablement d’avoir recours à la presse des Tiffany, jusqu’au moment où l’on décida que la Gazette serait publiée à York (Toronto), à partir du mois de septembre de la même année.
Le 20 juillet 1799, les frères Tiffany commencèrent à publier à Niagara le premier journal indépendant du Haut-Canada, le Canada Constellation (qui allait devenir le Canadian Constellation). Toutefois, le numéro du 18 janvier 1800 informait les lecteurs que Gideon serait dorénavant l’unique éditeur de cet hebdomadaire, et il semble qu’à compter de cette date Gideon ait travaillé seul pendant plusieurs mois. Bien que Silvester ait continué à publier des journaux jusqu’à sa mort en 1811, Gideon avait abandonné le domaine de l’édition et de l’imprimerie dès 1801.
En mars de cette année-là, Gideon et un autre de ses beaux-frères, Moses Brigham, achetèrent d’Ebenezer Allan* 2 200 acres de terre dans le canton de Delaware, qui faisait partie du comté de Middlesex. Ils payèrent leur acquisition avec des billets à ordre s’élevant à £3 050 et venant à échéance dans cinq ans. La propriété comprenait deux scieries ayant appartenu à Allan ; dès 1804, Tiffany et Brigham produisirent annuellement entre 300 000 et 500 000 pied-planches pour le marché de Detroit. Apparemment, ils faisaient aussi la traite des fourrures avec les Indiens de la région. En novembre 1806, peut-être parce qu’ils étaient en désaccord avec Allan au sujet de la construction d’une église sur des lots qui lui avaient été originellement concédés et qu’ils ne pouvaient effectuer le dernier paiement sur lesdits lots, Tiffany et Brigham, de concert avec Allan, firent rédiger, pour toute la propriété, un acte de location-abdication en faveur du docteur Oliver Tiffany, un des frères aînés de Gideon qui était à l’aise financièrement et qui, à l’époque, demeurait dans le canton d’Ancaster. Gideon Tiffany et Brigham continuèrent d’habiter le canton de Delaware et d’exploiter les scieries. En plus de gérer les propriétés de son frère, Gideon acheta des terres dans les cantons de Delaware et de Caradoc. En 1810, il loua une de ses fermes du canton de Delaware, à condition que le locataire cultive le chanvre ; lui-même s’engageait à construire un moulin à chanvre pour transformer cette plante textile.
Même si, d’après lord Selkirk [Douglas*], Tiffany et Brigham étaient « des Yankees intelligents » qui semblaient « avoir des manières du monde dépassant de beaucoup ce à quoi on pouvait s’attendre en un tel lieu », Tiffany se limita surtout à exploiter ses talents dans le canton de Delaware où, pendant plus de 30 ans, il servit en qualité d’estimateur municipal, de gardien de fourrière, d’inspecteur des chemins et clôtures et de marguillier. Il reçut une commission de lieutenant dans le 1er régiment de milice de Middlesex en février 1812, mais son nom n’apparaît pas sur les états nominatifs de la milice après le mois de décembre de cette année-là. Il est possible que Tiffany se soit établi dans le canton d’Ancaster avec sa famille entre 1812 et 1814.
Une des rares activités auxquelles se livra Tiffany à l’extérieur du canton de Delaware fut la démarche fructueuse qu’il entreprit en 1806 pour s’assurer le concours de certaines gens du district de London, afin qu’ils contribuent à l’engagement d’un « courrier à cheval ». Par la suite, les journaux, les lettres et autres articles furent apportés de Niagara toutes les trois semaines.
Une autre activité, plus importante celle-là, fut sa participation au mouvement réformiste. Le 6 octobre 1837, il fut élu à l’unanimité pour présider, dans le canton avoisinant de Westminster, une grande réunion de réformistes à laquelle on donna une large publicité. Au cours de l’assemblée du 2 décembre, qui aboutit à la formation de la Delaware Reform Association ou Branch Political Union, il fut l’un des signataires de la constitution de cet organisme et préconisa la désobéissance civile, laquelle devait se manifester par le non-paiement des taxes provinciales. Il présenta aussi une résolution stipulant que les délégués au congrès provincial du 21 décembre à Toronto, dont il faisait lui-même partie, « reçoivent le mandat de proposer à l’assemblée qu’elle demande à Sa Majesté de séparer la province de la mère patrie d’une façon pacifique, afin de prévenir une guerre civile ». Par suite de son intervention, Tiffany fut emprisonné le 15 décembre, à l’âge de 63 ans, pour avoir participé à cette « conspiration [du canton] de Delaware » ; selon les comptes rendus du procès, on l’accusait entre autres « de tentatives en vue de propager la désaffection parmi les Indiens ». Le 7 mai 1838, il fut jugé, acquitté et libéré.
Après ces événements, Gideon Tiffany continua à mener une vie calme. Il s’adonna à l’exploitation agricole dans le canton et il fut estimé et hautement respecté de ses voisins. Ceux-ci se rendirent compte qu’il possédait un grand « répertoire d’anecdotes et d’histoires », et qu’il était « un causeur très agréable, [un homme] généreux, sympathique et libéral dans ses sentiments ». Après son décès à sa résidence, il fut inhumé au cimetière Tiffany, dans le village de Delaware. Les plans de ce village avaient été tracés au milieu des années 1820 par son frère Oliver, qui prévoyait que Delaware deviendrait le siège judiciaire et administratif du district de London.
Pour la rédaction de cette biographie, l’auteur a consulté diverses sources manuscrites, dont des inscriptions sur des pierres tombales du cimetière Tiffany (Delaware, Ontario) ; il corrige un certain nombre d’erreurs factuelles qu’on retrouve dans des ouvrages déjà publiés : N. O. Tiffany, The Tiffanys of America : history and genealogy ([Buffalo, N. Y., 1901]) ; W. S. Wallace, « The first journalists in Upper Canada », CHR, 26 (1945) : 372–381, et « Historical plaque to commemorate Gideon Tiffany, 1774–1854 » (un communiqué de presse publié par Ontario, Dept. of Public Records and Arch., Hist. Branch, [Toronto], 27 mai 1968, disponible aux AO). [d. j. b.]
AO, RG 1, A-I-1, 63 : 2728–2729 ; RG 22, sér. 321, nos 56, 131.— APC, RG 1, L3, 495 : T2/54 ; 511 : T misc., 1791–1819/4.— Eva Brook Donly Museum (Simcoe, Ontario), Norfolk Hist. Soc. Coll., Thomas Welch papers, 1023–1024.— Middlesex West Land Registry Office (Glencoe, Ontario), Instruments 6–7, 68, 3168.— UWOL, Regional Coll., Delaware Township, London District, minutes of annual town meeting, 1807.— [Thomas Douglas, 5e comte de] Selkirk, Lord Selkirk’s diary, 1803–1804 [...], P. C. T. White, édit. (Toronto, 1958), 307.— « Minutes of the Court of General Quarter Sessions of the Peace for the London District [...] », AO Report, 1933 : 135–136.— The Talbot papers, J. G. Coyne, édit. (2 vol., Ottawa, 1908–1909), 1 : 175.— Canadian Constellation (Niagara [Niagara-on-the-Lake, Ontario]), 20 juill. 1800.— Constitution (Toronto), 18, 25 oct. 1837.— Upper Canada Gazette ; or, American Oracle, 3 déc. 1794-oct. 1798.— Marie Tremaine, A bibliography of Canadian imprints, 1751–1800 (Toronto, 1952), 649–653.— Hist. of Middlesex, 478–479, 568.— Read, Rising in western U.C.— W. S. Wallace, « The periodical literature of Upper Canada », CHR, 12 (1931) : 5–6, 11–12.
Daniel J. Brock, « TIFFANY, GIDEON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/tiffany_gideon_8F.html.
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Auteur de l'article: | Daniel J. Brock |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
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