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STORM, WILLIAM GEORGE, architecte et officier de milice, né le 29 octobre 1826 à Burton-upon-Stather, Angleterre, fils de Thomas Storm et de Mary Hopkins ; le 3 janvier 1882, il épousa à Toronto Agnes Cotterill, et ils eurent un fils et trois filles ; décédé le 8 août 1892 dans la même ville.
William George Storm immigra dans le Haut-Canada avec ses parents, qui se fixèrent à York (Toronto) vers 1830. Fervents méthodistes, ils le placèrent pendant une brève période à l’Upper Canada Academy de Cobourg. Quelques années plus tard, William George commença à travailler pour son père, entrepreneur en vue dans le domaine de la construction. À l’été de 1845, il faillit perdre la vie en tombant d’un échafaudage. Comme il avait des talents d’artiste et connaissait la construction, il opta pour l’architecture, qu’il étudia auprès de William Thomas*, à Toronto. Il avait d’abord songé à s’installer en Californie, mais il y renonça vers la fin de 1848 ou au début de 1849, lorsqu’il devint l’assistant de Frederic William Cumberland*. Il put alors développer ses remarquables dons de dessinateur en préparant des épures et des détails, et en juillet 1852 Cumberland le prit comme associé. Durant la douzaine d’années que dura leur entente, la Cumberland and Storm fut l’une des principales firmes d’architectes de la province.
Le rôle de Storm dans cette association est difficile à déterminer. Étant donné ses relations familiales, sociales et commerciales, et son expérience d’entrepreneur, Cumberland dut conserver la responsabilité de recruter de nouveaux clients et de négocier les contrats. Les premières années, c’est probablement lui qui s’occupa aussi de l’aspect proprement créateur des travaux, mais son intérêt croissant pour les chemins de fer allait l’obliger à déléguer à Storm des responsabilités de plus en plus nombreuses. Ce fut le cas pour l’achèvement, après bien des retards, de la chapelle du cimetière de St James-the-Less. En guise de préparation à leur principal ouvrage, le University College (1856–1859), Cumberland se rendit outre-Atlantique afin d’étudier les plans d’établissements d’enseignement. À l’automne de 1857, Storm entreprit à son tour un voyage qui le mena en Angleterre, en Irlande, en France et en Allemagne. Cette tournée élargit ses horizons et lui permit de recueillir des informations qui non seulement servirent à l’achèvement du collège mais influencèrent aussi ses travaux ultérieurs.
Apparemment, Cumberland quitta son associé en 1863, mais on continua d’utiliser la raison sociale de la firme jusqu’en 1866. Pendant cette période de transition, Storm entreprit seul plusieurs projets à Toronto. En 1862, il conçut les plans de l’immeuble à bureaux de la Northern Railway ; en 1865, il ajouta la tour de la cathédrale St James, en s’inspirant très fortement du plan qu’en avait fait Cumberland en 1850. Il dessina en 1866 la grille de fonte d’Osgoode Hall, qui orne encore la rue Queen ; c’est la Cumberland and Storm qui avait d’ailleurs exécuté la partie centrale de cet édifice. Sa plus prestigieuse commande, à l’époque, fut la gare du Great Western Railway, terminée en 1866 et rasée par un incendie en 1952. Conçu selon un plan qui en séparait rationnellement les fonctions, l’immeuble était constitué d’un hangar de trains surmonté d’une voûte en berceau et d’une salle des pas perdus joliment décorée en bois, à l’italienne ; le tout formait un ensemble pittoresque à l’extrémité sud de la rue Yonge. La liquidation de la Cumberland and Storm ne se fit pas à l’amiable, surtout en raison des pertes qu’avaient subies les deux associés dans des investissements immobiliers effectués par la firme à Toronto et dans le canton de Nottawasaga. La poursuite que Storm intenta à Cumberland se régla en 1871 : lui-même fut libéré de ses obligations financières et Cumberland conserva les biens immobiliers.
Après la liquidation, Storm travailla toujours seul, sauf pendant une brève période où il s’associa à Charles Albert Walton, en 1877. Ce nouveau départ ne se fit pas sans mal : le plus souvent, on lui demandait de transformer des immeubles existants ou de travailler à des ouvrages exécutés par la Cumberland and Storm ; il n’avait pour ainsi dire pas de clients hors de Toronto. À deux reprises, il dut interrompre sa carrière, parce qu’il souffrait d’une quelconque faiblesse physiologique ou de séquelles de sa chute de 1845. Il subit un traitement au Clifton Springs Sanitarium, dans l’état de New York, au printemps de 1873. Quelques années plus tard, on l’admit au Toronto Général Hospital où, à compter de juillet 1878, il exécuta de menus travaux d’architecture en échange desquels il recevait des soins et pouvait occuper un bureau. Il demeura à l’hôpital jusqu’en 1879, et c’est là qu’il fit la connaissance de William Holmes Howland, président du conseil d’administration de l’établissement, qui allait se révéler un ami précieux en raison de sa participation à diverses sociétés de bienfaisance et comme membre de l’Église d’Angleterre.
Emerson Coatsworth, éminent méthodiste, commissaire municipal et président du Toronto Public School Board en 1873, fut aussi d’un grand secours pour Storm. Il l’aida à se remettre au travail après son séjour à Clifton Springs en lui confiant les plans de sa maison, et c’est surtout grâce à lui que le bureau demanda à Storm de faire les plans de cinq écoles publiques, toutes situées dans des quartiers différents. Construites en 1874, elles étaient en brique, sauf une, et la Wellesley Street School, qui présentait des proportions robustes, arborait une maçonnerie polychrome. Toujours pour le bureau, Storm agrandit la Borden Street School en 1884 et dessina les plans de la Sackville Street School en 1887. Cette dernière, qui existe toujours, est d’une sobre dignité qui contraste vivement avec les écoles précédentes. Storm réalisa aussi d’autres travaux pour le secteur éducationnel. En 1880, il agrandit la résidence des étudiants de l’Upper Canada College. Sept ans plus tard s’achevait, à Mimico (Toronto), la construction de la Victoria Industrial School et de ses petites résidences ; ces bâtiments, dont Howland avait été l’un des grands promoteurs, étaient l’œuvre de Storm. L’école, notamment à cause de ses pignons à colombage et de la ligne brisée de sa toiture, évoquait une maison.
Les rapports étroits que Storm entretenait avec l’Église méthodiste lui assurèrent d’importantes commandes tout au long de sa carrière. Comme l’église méthodiste wesleyenne de Cobourg, qui desservait le personnel et les étudiants du Victoria College, était devenue trop petite, il conçut pour la remplacer un édifice néo-gothique de brique blanche ; construit en 1852–1853, il a, depuis, été transformé et agrandi. L’église méthodiste Queen Street, à Toronto, présente plus d’intérêt. Bien qu’elle ait été construite officiellement par la Cumberland and Storm, en 1856–1857, c’est Storm qui supervisa les travaux et c’est probablement lui qui en avait dessiné les plans. Par leur éclectisme, les détails de cette église rappellent le University College ; elle présente, en façade, une rosace qui allait devenir un motif familier chez Storm. En 1874, les méthodistes primitifs le préférèrent à Henry Langley* pour la conception de leur nouvelle église de la rue Carlton. L’abside, qui renfermait la salle de conférence et la classe, fut achevée cette année-là et l’église ouvrit ses portes l’été suivant. L’édifice, de composition robuste, comportait une tour d’angle et, sur la façade à pignons, une rosace ; pour créer un effet de contraste, les encorbellements et l’arcade aveugle étaient de proportions plus petites. En 1885, Storm agrandirait l’intérieur afin de lui donner la forme d’un amphithéâtre, conformément au goût des congrégations méthodistes du temps.
Pendant la construction de l’église de la rue Carlton, Storm travailla aussi pour les presbytériens, à l’érection de l’église St Andrew, à l’angle des rues King et Simcoe [V. Daniel James Macdonnell]. Des difficultés surgirent en août 1875 : le comité de construction l’accusa de négliger ses fonctions d’architecte en chef, et l’on fit appel à la firme Grant and Dick pour terminer les travaux. Ouverte au culte en février 1876, l’église présente un triple portail normand et une façade de maçonnerie revêtue de pierre ; aux deux tours du devant s’en ajoute une troisième qui abrite l’entrée ouest. St Andrew demeure l’un des fleurons de l’architecture torontoise et montre bien que Storm aimait le pittoresque grandiose. Sans doute les presbytériens ne lui gardaient-ils aucune rancune puisqu’ils lui demanderaient, en 1883–1884, de dessiner le sanctuaire et l’écran de l’orgue de l’église, puis en 1886 de réaménager l’intérieur de l’ancienne église St Andrew, à l’intersection des rues Jarvis et Gerrard.
St Andrew fut la dernière église d’importance dont Storm réalisa les plans. En 1879–1880, il prépara de gros travaux de réfection et d’agrandissement à l’église anglicane Grace de la rue Elm, qui modifièrent son orientation. En 1882, il s’y maria, et peu après adhérait à la congrégation anglicane Church of the Redeemer. En 1890, il dessinerait le presbytère adjacent à l’église et agrandirait l’immeuble de l’école du dimanche.
Storm dessina aussi des plans de collège pour les méthodistes et les anglicans. Il proposa d’abord, en 1861, à la direction du Victoria College de Cobourg, l’intégration de l’édifice existant à un ensemble quadrangulaire qui comportait des pavillons en saillie pour le laboratoire et la chapelle. En 1875, il présenta un deuxième projet, moins ambitieux, qui ne fut pas retenu non plus. En 1884, le collège obtint le statut d’université, et on résolut de le réinstaller à Toronto ; cette décision fut prise dans un climat tumultueux [V. Nathanael Burwash*] que n’apaisèrent pas les restrictions imposées au concours organisé pour la conception des nouveaux édifices. Invité à soumettre des plans avec trois autres concurrents en octobre 1886, Storm fut choisi en novembre 1888. Avant d’entreprendre les travaux, il fallut cependant attendre que le collège et la University of Toronto s’entendent sur les conditions de leur fédération, ce qui eut lieu en novembre 1890. On avait envisagé de construire un ensemble qui aurait regroupé le collège et des résidences, mais seul l’édifice central fut construit après qu’on eut incorporé au plan final les modifications recommandées par le chancelier Burwash. Fait de la pierre grise et brune que l’on trouve dans la vallée de la rivière Credit, le Victoria College démontre que Storm maîtrisait fort bien le style néo-roman que l’architecte américain Henry Hobson Richardson avait popularisé. Si l’intérieur déçoit, l’extérieur en impose par sa composition sûre et habilement proportionnée. L’équilibre des horizontales et des verticales, des tours massives et des vastes porches fait de cet édifice l’un des plus beaux et des plus impressionnants du campus.
Durant sa longue collaboration avec les méthodistes, Storm dessina pour le courant évangélique de l’Église d’Angleterre [V. James Paterson Sheraton*] la Protestant Episcopal Divinity School (qui devint le Wycliffe College en 1885). Construit en 1881–1882, cet édifice (aujourd’hui démoli) était de style néogothique, en brique rouge, avec des moulures de pierre brune. En 1886, Storm y ajouta une bibliothèque et des salles de conférence, mais son plan de chapelle ne fut jamais exécuté. Les seuls travaux connexes qu’il allait réaliser seraient l’addition, en 1881, d’une salle d’assemblée et de classes, à l’aile est d’Osgoode Hall, puis un autre agrandissement en 1891.
Storm exécuta des travaux pour le Toronto General Hospital à mesure que son état de santé le lui permit. Il dessina la première ambulance de l’hôpital, mise en service en 1881, et conçut deux ans plus tard une nouvelle aile entourée de vérandas que l’on destinait aux convalescents. Il dessina aussi les plans du Hillcrest Convalescent Home, construit vers 1885 rue Bathurst, dans une propriété donnée par William Gooderham*. Sa dernière commande de ce genre fut l’addition d’une infirmerie au Boys’ Home de la rue George en 1889.
Dans l’ensemble, Storm travailla peu dans le secteur résidentiel, si ce n’est pour faire des transformations et des agrandissements. Il conçut quand même quelques maisons, dont les plus impressionnantes sont Northwold, dessinée en 1882–1883 pour la veuve du financier William Cawthra*, et la résidence de John Charles Fitch, deux ans plus tard. Ces deux grandes maisons de pierre à deux étages et demi, situées dans un quartier chic, à l’extrémité nord de la rue Jarvis, étaient bien dans le goût de la fin du xixe siècle : pignons décoratifs, détails colorés, fenêtres groupées selon des agencements variés. À l’intérieur, l’élément central était un grand vestibule lambrissé au rez-de-chaussée où l’escalier était mis en valeur. Des corniches ouvragées ornaient les portes, les fenêtres et les manteaux de cheminée des pièces principales. Dans le même quartier, Storm conçut des transformations importantes pour les maisons de John Hallam (1887–1888), de William Mulock* (1888) et du docteur John B. Hall (1892).
La première commande que Storm exécuta seul dans le secteur commercial lui fut confiée par James Worthington, ancien associé des entrepreneurs du University College, la Worthington Brothers. Le Worthington Block, construit en 1874 à l’endroit où s’élève aujourd’hui le St Lawrence Centre, était un édifice de trois étages, à six baies, qui évoquait un palais vénitien et dont le rez-de-chaussée était rustiqué. Storm dessina en outre, pour le directeur de l’Upper Canada College, George Ralph Richardson Cockburn, une rangée de cinq magasins dans la rue Queen ; construits entre 1881 et 1884, ils existent toujours. Trois ans plus tard, il conçut une élégante et sobre composition pour l’étroit terrain que le pharmacien Andrew Jeffrey possédait rue Yonge. Arthur Brindley Lee, pour qui il avait déjà transformé une maison et qui était associé à la Rice Lewis and Son, fut sans doute celui qui l’engagea en 1888 pour agrandir le nouvel entrepôt de la compagnie. En 1890, Storm dessina une rangée de cinq édifices pour William E. Dunn ; sis à l’intersection des rues Spadina et St Andrew, ces immeubles existent toujours. L’année suivante, encore pour la Rice Lewis and Son, il construisit un nouvel entrepôt de cinq étages. L’utilisation abondante de la fonte, tant en façade que pour les garnitures intérieures, offrait une composition vigoureuse qui convenait à cet emplacement sis à l’angle de deux rues, soit King et Toronto.
Storm exerça diverses fonctions pour le conseil municipal de Toronto. En 1890, il fut l’un des trois juges qui choisirent les plans du nouveau palais de justice. Auparavant, il avait conçu le greffe municipal. Cet édifice sobre, en brique, construit en 1869–1870, était agrémenté de détails inspirés des styles gothique et vénitien ; en 1886–1887, il en doubla presque la superficie. Il exécuta, en 1887, une autre commande importante pour la municipalité, soit le réaménagement intérieur de l’aile est de l’hôtel de ville, situé rue Front. On lui doit aussi le caveau d’attente du Prospect Cemetery ; élevée en 1889–1890, cette belle construction de brique rouge parée de pierre, réalisée dans un style néo-roman dépouillé, sert toujours.
Plusieurs jeunes architectes torontois firent leur apprentissage dans le cabinet de Storm. C’est là qu’en 1887 lui-même et quelques-uns de ses éminents collègues se réunirent pour discuter de questions professionnelles et fonder l’Architectural Guild of Toronto, où il milita jusqu’à sa mort. En 1889 naissait l’Ontario Association of Architects ; Storm en fut le premier président et le resta pendant trois ans. On le retrouve aussi parmi les membres fondateurs de l’Ontario Society of Artists et de l’Académie royale canadienne des arts. Lieutenant dans le 5th Battalion of Toronto militia, il entra dans le 10th Battalion Volunteer Militia Rifles (plus tard le Royal Grenadiers) dès sa formation, le 14 mars 1862. Il fut membre à vie du Toronto Mechanics’ Institute. Franc-maçon, il militait au sein des Knights Templars. Par la suite, il fut membre fervent du courant évangélique de l’Église d’Angleterre, délégué laïque au synode et collaborateur dévoué d’un autre organisme anglican, appelé Brotherhood of St Andrew.
William George Storm mourut subitement d’une crise cardiaque pendant l’été de 1892. Sa situation financière semblait stable, et pourtant sa succession ne valait que 2 600 $. Le départ de Cumberland avait nui à sa carrière, tout comme sa mauvaise santé et ses difficultés financières. Pourtant, il avait apporté une contribution importante à l’architecture de Toronto en adaptant aux travaux très divers qu’il réalisa les styles historiques alors en vogue. Parmi cette gamme de styles fort différents, celui qui lui convenait le mieux était probablement le néo-roman, puisqu’il lui permettait de donner libre cours à son goût du pittoresque. Même si la University of Toronto lui infligea une humiliante déception en ne lui permettant pas de participer à la reconstruction du University College, partiellement détruit par un incendie en 1890, il était, au moment de sa mort, au faîte de sa carrière et jouissait de l’estime de ses clients, de ses collègues et de l’ensemble de la collectivité. Le conseil d’administration du Victoria College le qualifia d’« architecte talentueux » et de « gentleman chrétien qui, en raison de sa compétence professionnelle et de sa civilité, avait été un collaborateur fort agréable ».
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Shirley G. Morriss, « STORM, WILLIAM GEORGE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/storm_william_george_12F.html.
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Auteur de l'article: | Shirley G. Morriss |
Titre de l'article: | STORM, WILLIAM GEORGE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |