SNIDER, ELIAS WEBER BINGEMAN, minotier, manufacturier et homme politique, né le 19 juin 1842 à Waterloo, Haut-Canada, troisième fils d’Elias Snider et de Hannah Bingeman ; le 19 avril 1864, il épousa à Preston (Cambridge, Ontario) Nancy Weber (décédée en 1912) et ils eurent sept fils et quatre filles (un des fils mourut bébé), puis en 1915, Helen Shoemaker ; décédé le 15 octobre 1921 à Kitchener, Ontario.

Elias Weber Bingeman Snider quitta l’école publique à 12 ans pour travailler à la ferme familiale. Dès 1860, intéressé par la production de farine tout comme son père, il entama un apprentissage de deux ans au moulin familial de German Mills (Kitchener). Devenu responsable du moulin à la fin de son apprentissage, il négocia en 1864 avec son père une entente en vertu de laquelle il l’administrerait en ayant droit à une part du bénéfice. En 1868, les Snider acquirent aussi un petit moulin à Berlin (Kitchener), mais en 1871, Elias fils se mit à son compte et acheta une minoterie à St Jacobs. Cette dernière serait la première au Canada à être équipée de cylindres. En effet, sur l’avis d’un de ses anciens employés, John Braun (Brown), Snider acheta en 1875 un système de cylindres de la compagnie viennoise Hoerde. Plus petits que des meules, ces cylindres tournaient plus lentement mais faisaient un travail plus efficace. Le produit, appelé par Snider farine Walzen – du nom du procédé, Walzenstuhle –, était d’une qualité bien supérieure à la farine moulue selon la méthode traditionnelle. Snider trouva des clients non seulement en Ontario, mais aussi dans l’est du Canada, dans le nord-est des États-Unis et en Grande-Bretagne. En 1876, il fit l’acquisition d’une deuxième minoterie, à New Dundee, où il installa aussi des cylindres. Vers 1885, la production totale de cette installation et de la Pioneer Roller Flouring Mill de Snider à St Jacobs s’élevait à 250 barils par jour.

La minoterie ne fut pas le seul domaine où Snider s’intéressa au progrès de la technique et saisit des occasions d’investir. En 1884, il acheta à Waterloo, de Jacob Bricker, une fonderie qu’il exploita avec le fils de celui-ci, Levi. Quatre ans plus tard, l’entreprise fut constituée juridiquement sous le nom de Waterloo Manufacturing Company Limited. Les principaux actionnaires étaient Snider et Absalom Merner, lui aussi propriétaire de fonderie. Cette société, alors sous la présidence de Snider, deviendrait célèbre pour ses machines agricoles. Elle donna de l’expansion à la gamme de batteuses de Jacob Bricker et conserva la marque de commerce de celui-ci, Champion. De plus, elle commença à fabriquer des tracteurs à vapeur de marque Lion Brand. Elle prospéra dans les années 1890 et 1900, malgré la rude concurrence qui existait au Canada dans le commerce de la machinerie agricole. En 1908, elle employait 150 hommes et avait 15 commis voyageurs ainsi que des succursales à Winnipeg et à Regina. Cependant, le progrès de la technique entraînerait aussi le déclin de l’entreprise. Dès 1925 environ, le tracteur à essence ferait de la vapeur une force motrice désuète en agriculture. Snider et sa compagnie réalisèrent un prototype de tracteur de ce genre, mais à cause du coût et de la concurrence américaine, ils abandonnèrent le projet. Au début des années 1920, après le décès de Snider, l’avenir de l’entreprise serait encore plus compromis par l’arrivée, dans les Prairies, d’une moissonneuse-batteuse efficace à prix raisonnable. Cette machine remplaçait à la fois le tracteur et la batteuse, éliminant ainsi les principaux marchés de la Waterloo Manufacturing Company. En 1927, les fils de Snider, alors à la tête de la société, vendirent celle-ci à la Playfair and Company of Toronto.

De 1881 à 1894, Snider fut député libéral de Waterloo North à l’Assemblée législative de l’Ontario. Il s’employa surtout à accroître les pouvoirs des municipalités en travaillant à l’évaluation municipale et en participant à la conception d’une loi sur l’assurance-incendie pour les municipalités. Par la suite, il s’intéressa à la protection des forêts et fit pression pour la création de réserves. La question le préoccuperait encore longtemps après son départ de la politique : en 1918, dans le rapport de la Waterloo Historical Society, il publierait un article sur le déboisement des forêts du comté de Waterloo. Aux élections fédérales de 1896, il affronta le conservateur Joseph Emm Seagram* dans Waterloo North. C’était une circonscription industrielle, et Snider, lui-même protectionniste, devait répondre des positions libre-échangistes des libéraux. Le journal conservateur local le somma d’« être un homme » : « Déclarez que vous soutiendrez soit [Wilfrid Laurier*] et le libre-échange, soit Joseph Seagram et la protection. » Les électeurs préférèrent Seagram.

Snider connut le succès dans le secteur manufacturier et la minoterie. Il promut un chemin de fer, le Waterloo Junction Railway, et s’occupa un peu de l’industrie de la betterave à sucre. Il eut aussi des intérêts dans la Toronto Foundry (plus tard l’Anthes Foundry), la Snider Lumber Company of Waterloo Limited, qui exploitait des scieries à Gravenhurst, et la Canada Felting Company Limited de St Jacobs.

Toutefois, Snider est réputé surtout pour sa contribution à l’étatisation de l’électricité en Ontario. Converti de bonne heure aux bienfaits de l’électricité, il avait installé en 1894, dans sa minoterie de St Jacobs, une génératrice qui alimentait aussi des maisons de la localité. En 1900, avec Daniel Bechtel Detweiler et Joseph Bingeman, il forma une compagnie afin de produire de l’électricité pour des mines situées au nord du lac Supérieur. Le succès rapide de cette entreprise, la Michipicoten Falls Power Company Limited, convainquit Snider de l’importance de l’hydroélectricité pour l’industrie. En février 1902, il invita l’élite du monde des affaires et des localités de la région de Berlin à se réunir pour trouver le meilleur moyen de s’assurer que l’électricité produite aux chutes du Niagara serait mise à la disposition des entreprises et des foyers de la province. À une autre réunion, en juin, on confia l’étude de la question à un comité présidé par Snider. Lui-même et Detweiler – publiciste, recherchiste et homme à tout faire du projet – rencontrèrent bon nombre des leaders du monde municipal et du monde des affaires ainsi que des représentants des entreprises hydroélectriques du Niagara. À une assemblée tenue en février 1903, on décida d’exercer des pressions sur le gouvernement provincial soit pour qu’il construise des lignes publiques de transmission, soit pour qu’il autorise les municipalités à le faire. Le gouvernement de George William Ross* fit adopter une loi habilitant les municipalités à agir. Le 12 août, Snider devint président de l’Ontario Power Commission, qui représentait sept municipalités et dont les membres comprenaient le maire de London, Adam Beck, et d’autres notables. Dans son rapport, déposé en mars 1906, la commission recommandait qu’une coopérative de municipalités construise et exploite un réseau qui produirait de l’énergie hydroélectrique aux chutes du Niagara et la distribuerait. Cependant, le nouveau gouvernement de James Pliny Whitney* nomma en 1905, sous la présidence de Beck, une deuxième commission qui recommanda en avril 1906 la création d’un réseau provincial, et ce fut cette recommandation qui fut adoptée. Quatre ans plus tard, le premier ministre Whitney se rendit à Berlin pour basculer l’interrupteur qui mit en marche le réseau hydroélectrique de l’Ontario. Avec le temps, le rôle de Snider dans ces événements tomba dans l’oubli, au profit de celui de Beck. Au début des années 1930, son fils, William Weber Snider, commença à exercer des pressions sur le gouvernement provincial de George Stewart Henry* afin que cette situation soit corrigée. La campagne porta fruit : en 1956 on érigea à St Jacobs un monument à la mémoire de Snider et la Commission d’énergie hydroélectrique de l’Ontario reconnut officiellement sa contribution.

Elias Weber Bingeman Snider mourut en 1921 à Kitchener, où il s’était installé après son second mariage. Membre de l’Evangelical Association, il fut inhumé dans le cimetière de St Jacobs. Il avait connu une grande réussite en adoptant des techniques nouvelles dans les domaines de la mouture du grain, de la machinerie agricole et de la distribution de l’électricité.

Andrew Thomson

L’article d’Elias Weber Bingeman Snider intitulé « Waterloo forests and primitive economics » figure dans Waterloo Hist. Soc., Annual report (Kitchener, Ontario), 6 (1918) : 14–36.

Kitchener Public Library, Rare Books Depart., MC 5.4 (Dan Detweiler papers) ; MC 6.17 (E. W. B. Snider papers) ; E. W. B. Snider file.— Ontario Agricultural Museum (Milton, Ontario), Waterloo Manufacturing Company coll.— Kitchener Daily Record, 17 oct. 1921.— John English et Kenneth McLaughlin, Kitchener : an illustrated history (Waterloo, Ontario,1983).— Neil Freeman, « Turn-of-the-century state intervention : creating the Hydro-Electric Power Commission of Ontario, 1906 », OH, 84 (1992) : 171–194.— F. L. Leung, Grist and flour mills in Ontario : from millstones to rollers, 1780s–1880s (Ottawa, 1981).— H. V. Nelles, The politics of development : forests, mines & hydro-electric power in Ontario, 1849–1941 (Toronto, 1974).— Elliott Richmond, « E. W. B. Snider », Waterloo Hist. Soc., Annual report, 9 (1921) : 183–188.— W. A. Schmidt, « The Waterloo Manufacturing Co. Limited », Waterloo Hist. Soc., Annual report, 75 (1987) : 16–23.— H. S. Turner and R. W. Irwin, Ontario’s threshing machine industry : a short history of these pioneer companies and their contribution to Ontario agriculture (Guelph, Ontario, 1974).— G. M. Winder, « Following America into corporate capitalism : technology and organization of the Ontario agricultural implements industry to 1930 » (thèse de ph.d., Univ. of Toronto, 1991).

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Andrew Thomson, « SNIDER, ELIAS WEBER BINGEMAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/snider_elias_weber_bingeman_15F.html.

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Auteur de l'article:    Andrew Thomson
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
Année de la révision:    2005
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